08 - Note sur un premier inventaire des archives de Pierre Debos

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Note sur un premier inventaire des archives de Pierre Debos

La carrière de Pierre Debos (1900-1980), directeur des Méthodes, est retracée dans deux articles du Bulletin de la Section d'Histoire des Usines Renault, l'un dû à Fernand Picard, l'autre à Pierre Bézier, publiés dans le numéro 24 de juin 1982. Deux textes de Pierre Debos, sur "L'Évolution des méthodes de fabrication à la Régie 1946-1967" et "Organisa­tion et équipement des fabrications mécaniques 4 CV", parus respectivement dans les numéros 8 et Il de ce même bulletin, ainsi que les intéressants "Souvenirs d'un outilleur" de Pierre Bézier, publiés aussi dans le numéro 11, complètent notre information sur le personnage et la carrière de Pierre Debos, et, par là, sur l'histoire des méthodes et des moyens de fabrica­tion de la Régie Renault, au cours d'une époque qui vit le passage de la machine-outil classique à l'automation et à la commande numérique.

Pierre Debos a confié à la Section d'Histoire des Usines Renault ses papiers de travail, qui, sous le nom d'archives Debos, constituent un dépôt de vingt-quatre liasses, numérotées de façon discontinue, 17, puis 40 à 42, 47 à 51, 74 à 83, enfin 86 à 88, contenant un nombre inégal de dossiers, eux-mêmes numé­rotés de la même façon. On peut donc supposer que certains dossiers et liasses sont soit disparus, soit conservés autre part.

Aux fins d'une recherche sur l'histoire des bureaux d'études Renault, nous avons été amenés à dresser l'inventaire de ce fonds. S'il n'a que partiellement répondu à nos préoccupa­tions, il a révélé cependant un certain nombre de documents intéressants, dont il nous semble utile de rendre compte ici. Le détail de cet inventaire a été déposé à la Section d'Histoire, où il peut être consulté. Dans les lignes qui suivent, nous ferons référence à cet inventaire en donnant le numéro de la liasse suivi du numéro du dossier dans la numérotation d'origine, telle qu'elle a été fixée par Pierre Debos ou ses collaborateurs.

Le fonds lui-même est hétérogène: dessins techniques, parfois originaux, plus souvent multicopiés; rapports, notes de services, correspondance dactylographiée ou manuscrite, notes et brouillons manuscrits. Certains documents sont assez pitto­resques. Ainsi, le dossier 1009 "Recherche opérationnelle" de la liasse 40 contient le plan de la répartition des différents convives autour de la table du dîner sur la recherche opération­nelle donné le 25 janvier 1956.

Outre ces documents, qui, quelle que soit leur nature, ont tous pour origine ou destinataire propres le personnel ou les services de Renault, on trouve aussi des documents extérieurs. Princi­palement des rapports, coupures de presse, tirés à part de revues. Ils constituent une partie des références à la lumière de quoi les autres ont été lus ou écrits par Pierre Debos. Sauf lorsqu'ils sont annotés de la main de ce dernier, ou de ses collègues, on ne peut savoir de façon certaine la part qu'ils ont eue dans les réflexions de notre ingénieur. Lorsque -et nous en donnerons un exemple plus loin, à propos de la commande numérique -on dispose d'autres indices sur la marche de cette réflexion, on peut déduire les raisons -adhésion ou doute -qui ont conduit à retenir ces documents dans les archives.

Parfois, c'est la part du rêve qui fait retenir une information qui offre par anticipation, autre part, ce que l'on voudrait réaliser ici et maintenant. Ainsi, cette coupure du quotidien Ce Soir du 25 avril 1951 : "L'usine sans sueur et sans fatigue n'est plus un rêve. La première usine de mécanique fonctionnant automatiquement a été mise en marche à Moscou" (il s'agit d'un article sur l'usine de pistons pour moteurs de camion Zis 150, article conservé dans le dossier "Documentation diverse (usines)", nO 0063, liasse 49). Ou encore cet article d'André Bouju dans Science et Vie, sans date, mais vers 1954, "Des montages électroniques aussi simples que des jeux d'enfants.

Pour se passer éventuellement de spécialistes, les Américains ont si bien standardisé les éléments dont sont composés les appareils électroniques que des machines automatiques en réalisent entièrement le montage" (liasse 86, dossier 3, "Visites à l'extérieur"). Cet article se trouve rangé entre les comptes rendus d'une visite aux usines Peugeot et d'une visite aux usines

I.B.M. de Corbeil.

C'est bien entendu sur l'histoire de l'outillage chez Renault que le fonds apporte le plus. Mais il comporte d'autres éléments notables que nous voudrions signaler d'abord.

1. Renault dans la guerre et l'après-guerre

Les documents les plus anciens datent de la dernière guerre. Ils donnent sur les conditions matérielles, mais aussi morales ou idéologiques de la vie dans l'usine de 1943 à 1945, des aperçus souvent intéressants, parfois savoureux.

Ainsi, le dossier 17/1005 contient des éléments importants sur les effets matériels des bombardements alliés. On pourra sur ce point se reporter aux travaux de G. Hatry (1).

Ce dossier fournit une analyse fine des dommages, mais, en même temps, un relevé précis des machines touchées, avec leur date de fabrication. On peut avoir ainsi un tableau de la nature, de l'âge, de l'origine et de la valeur du parc de machines de l'usine à cette époque, tableau qui pourrait constituer le point de départ d'une histoire de l'outillage chez Renault. Nous y reviendrons.

Autre élément d'évaluation des effets de la guerre et des bom­bardements sur les condition de production : les efforts de décentralisation des fabrications, tels qu'ils apparaissent dans le dossier 17 ID 2.

Le dossier 17 lE 6 "Notes et rapports des chronométreurs sur le stage à l'Institut d'études corporatives et sociales" mériterait une analyse de contenu détaillée. On y saisit, à travers les comptes rendus des stagiaires, les efforts idéologiques du régime de Vichy envers les agents de maîtrise de l'industrie, et les réactions de ces derniers. Adhésion au moins formelle pour les uns, qui abondent dans le sens des conférences morales et politiques imposées avec les présentations techniques; opposi­tion ou du moins distance chez les autres qui prennent juste­ment prétexte des priorités techniques pour récuser les confé­rences idéologiques.

A noter cette remarque dans un compte rendu d'un chronomé­treur : "les reproches que formulent à notre intention les ouvriers ainsi que la maîtrise sont malheureusement dans bien des cas justifiés car il faut reconnaître que le chronométrage ne fut pas toujours exécuté au grand jour, en plein accord avec l'ouvrier et son chef. J'ai pour ma part de nombreuses fois assisté à ce genre de chronométrage clandestin".

"L'après-guerre" se dessinait à l'horizon, dès 1943. En témoi­gnent les nombreuses notes du dossier 17 IF l "Programme d'après-guerre -généralités". Le procès-verbal d'une confé­rence des 23 et 27 septembre 1943, tenue au bureau de

M. de Peyrecave alors directeur de l'usine (2), comporte une évaluation des parts de marché des divers constructeurs fran­çais, en vue de l'établissement d'un programme de reprise des fabrications après-guerre". Font suite à cette conférence diverses réunions tenues chez Jean Louis (dont une le 5 juin 19441). Jusqu'à une note de service du 17 février 1945, signée Louis, sur la mise en route de nouvelles fabrications: une note du 22 décembre 1944 rend compte d'une conférence du 6, tenue chez M. Lefaucheux pour l'examen du projet de programme de l'année 1945.

Cet ensemble de documents precise les conditions dans les­quelles ont été élaborées la nouvelle politique industrielle et la reprise de production de Renault, telles que la fameuse confé­rence du 9 novembre 1945 devait les définir.

Divers dossiers de la liasse 17, non numérotés, portant les titres: Voyage Allemagne; affaire Malhe, rapports d'Allemagne (établi par le lieutenant Debos de la 1« Armée Française) ; B.M.W. Deckel, et le dernier: Affaire B.M.W., numéroté 1411, montrent le rééquipement des usines fran­çaises, à partir de matériel saisi en Allemagne -retour des choses qui n'est pas toujours simple, ainsi l'affaire Malhe, industriel allemand qui tentait d'échapper à la saisie en se fai­sant passer pour Autrichien, et en prétendant que son matériel n'était pas orienté vers la production de guerre. Ainsi, encore, mais là les difficultés viennent d'un autre bord, ces réclama­tions au ministère de l'Économie, à propos de matériel saisi chez B.M.W., sur lequel le gouvernement n'aurait pas accordé priorité à la R.N.U.R.

Récupération outre-Rhin, achats outre-Atlantique: le dossier "Correspondance Barrat 1945", donne, à travers les relations entre la Régie et le conseiller français des approvisionnements en Amérique du Nord, une vue de l'écart entre la France et les États-Unis au lendemain de la guerre en matière de machine­out,il, et des appréciations des outilleurs français face aux développements à venir.

II. Innovations

Le dossier 40/1500 contient des documents datés de 1954 à 1958, qui éclairent les conditions et les considérations qui ont présidé à l'introduction de la recherche opérationnelle (R.O.) à la Régie. Une note de R. Pommier (note de service nO 372 du

1ee

décembre 1954) rappelle que "depuis 1949, nous nous sommes efforcés d'utiliser les mathématiques, et en particulier le calcul des probabilités, pour définir de nouvelles méthodes de contrôle de fabrication de grande série".

(1) Voir Bulletin de la Section d'HistoiTe des Usines Renault. 1974,2,8, pp. 1-24, et Louis Renault, patTon absolu, Paris, Lafourcade, 1982, chap. 20.

(2) Sur l'organisation de l'usine pendant l'Occupation, voir G. Hatry : Louis Renault, patTon absolu, p. 372.

Une note de R. Nion du 23 février 1955 définit les champs d'application de la R.O. à la Régie, à cette époque: étude des en-cours, pièces terminées, organes, à la demande du Bureau central; étude de classement, demandée par la Documenta­tion centrale ; étude des méthodes de contrôle pour les presses de Flins; étude d'une méthode de chronométrage.

Une note de R. de Longcamp (nO 589 du 2 mars 1956) rend compte d'une conférence où le groupe de R. O. a présenté ses premiers résultats.

Enfin, divers tirés à part de revues françaises et américaines donnent des indications sur les sources documentaires des réflexions sur la R.O. à la Régie, ou du moins celles de Pierre Debos.

La liasse 81 contient des documents intéressant la mise en place de nouvelles méthodes de gestion budgétaire en 1959, à partir d'une mission aux États-Unis de M. Lepage, en 1957, pour "obtenir des renseignements sur le système des prix de revient prévisionnels et notamment: leur détermination par le service estimation; les relations de ce service avec les études et méthodes".

La liasse 86 contient divers comptes rendus de visite dans des usines étrangères -tableau intéressant des réflexions de tech­niciens sur les facteurs de productivité dans une période qui va de 1946 à 1963. Je relèverai particulièrement cette interroga­tion de M. Pommier, de retour des États-Unis en 1953 : "Ne peut-on pas penser que, trop souvent en France, la producti­vité de certaines entreprises résulte presque essentiellement de l'effort de l'ouvrier, de sa dépense d'énergie musculaire et ner­veuse, en un mot de sa santé, alors que la productivité du tra­vailleur ne devrait être qu'un des éléments de la productivité tout court ?" (rapport D.F.G.M.B., service 996 -PP/ML.D. 24, février 1954, "Visite de M. Pommier aux États-Unis en 1953", p. 4).

La même liasse contient un rapport de R. Nion, sur un voyage de novembre 1954, relatif à l'organisation administrative, qui offre un intéressant tableau des débuts de l'informatique de gestion.

Sur un domaine plus étroit, le dossier 41/25 comporte une offre de la "Compagnie pour l'étude des équipements indus­triels" en faveur du dessin perspectif, avec cet argument : "la pénurie actuelle de main-d'œuvre oblige à employer des ouvriers peu entraînés à la lecture des plans... Le dessin pers­pectif exécuté avec la même exactitude et la même précision que les plans -technique largement utilisée aux États-Unis pour les besoins de la production de guerre -... permet. .. l'emploi d'une main-d'œuvre non qualifiée".

Cette note -dont on ignore quelle suite elle a reçue -intéres­sera l'historien du dessin technique. Elle souligne une des diffi­cultés que l'intégration complète de la conception et de la fabrication assistées par ordinateur devrait réduire.

III. La machine-outil

Les archives déposées par Pierre Debos à la Section d'Histoire ne comportent pas de dossier relatif à son voyage d'étude de 1946 aux États-Unis. Le Bulletin de la Section d'Histoire a publié dans son numéro 8 les conclusions du rapport que Pierre Debos rédigea au retour de cette mission.

En revanche, on trouve dans les dossiers 17/009, 17/0014 et

17/0015 les docùments relatifs à la préparation du voyage de

Pierre Debos et P. Bézier à l'exposition des machines-outils de

Chicago en 1947. On sait que les achats consécutifs à cette

visite servirent à l'équipement en machines classiques pour les productions qui suivirent la 4 CV (voir P. Bézier, Souvenirs d'un outilleur, Bulletin de la Section d'Histoire, 1975, 2, 11, 176-187 et P. Bézier, "Pierre Debos : notre patron", Bulletin de la Section d'Histoz're, 1982, 4, 24, 282-285). Ces trois dos­siers forment, avec le dossier 17/Correspondance Barrat 1945, un ensemble intéressant de sOurces pour l'histoire de l'outillage à la Régie.

Un document plus tardif contenu dans le dossier 77/1, une conférence de M. Guittard sur l'utilisation et l'entretien des machines-outils, fournit des indications sur l'évolution du parc de la Régie entre 1945 et 1956.

D'un point de vue plus littéraire, diverses contributions à un album historique, "L'Automobile de France", figurent dans le dossier 401Album Renault. L'une de Debos, une autre non signée présentent respectivement la politique de la R.N.U.R. en matière d'outillage et d'études, notamment à propos des machines-transferts (il s'agit d'un exposé présenté le 2 novem­bre 1950), et des considérations sur "la machine-outil et la civi­lisation" (le dossier est complété par un texte de Jules Romains sur Renault et un texte anonyme sur la cadence).

On trouve également dans le dossier 49/0067 le texte d'une intervention de Pierre Debos sur l'automation dans les machines-transferts à la Régie, lors de la Biennale de la méca­nique de haute précision, en septembre 1953.

Avec les dossiers 41/1503 et 41/1509, "Machines électroniques -machines programmes", nous rencontrons une nouvelle étape: les premières préoccupations relatives aux machines­outils à commande numérique. En 1956, une mission de Rondepierre aux États-Unis donne lieu à une correspondance et à une sélection de catalogues.

Une note de service nO 8965 de F. Picard, directeur des études, en date du 30 octobre 1956 sur les machines à commande élec­tronique "pour l'usinage des pièces prototypes demande à Pierre Debos..." d'informer M. Rondepierre et d'aller à South Bend (chez Bendix)... M. Dreyfus envisagerait éventuellement l'achat d'une machine qui serait destinée à fabriquer nos pièces d'études..." .

Le 18 décembre 1956, Pierre Debos présente et diffuse notam­ment à F. Picard le rapport de Rondepierre -qui marque cer­taines réserves envers les M.O.C.N.,du moins telles qu'elles étaient alors. Divers tirés à part de revues servent de contexte de référence, notamment un extrait de Productz·on (volume 39, nO 5, mai 1957) donnant les avis de MM. Davis (Ford), Lac Lean (Bendix), Kellet (Chevrolet), et notamment cette conclusion "At best, as a production machine, the tape controlled unit is best suited to operatz·ons z·nvolving "smaller" quantz"tz"es of close tolerance, z·ntrically shaped parts ... it shows no promise now for automotz"ve productz·on".

("Au mieux, comme machine de production, l'unité comman­dée par bande convient surtout aux opérations qui concernent des pièces en faible quantité, avec des tolérances étroites, et des formes complexes ... elle n'offre pas à présent d'avenir dans l'industrie automobile".)

Faut-il rapprocher cette attitude réservée de ces lignes de

P. Bézier (Bulletz"n de la Sectz·on d'Histozre, 1982, 4, 24,

p. 285) : "Lorsque la commande numérique des machines­outils fit son apparition, il ressentit une sorte de crainte en face de cet automatisme fondé sur des phénomènes impalpables de nature optique ou électronique... La même réserve se mani­festa lors du début des travaux qui servirent de base au système UNISURF".

Cependant Pierre Debos sut prendre pleinement acte des implications de l'automatisation pour une intégration accrue des étapes de la production. En témoignent ces lignes d'une conférence donnée devant la Société des ingénieurs de l'auto­mobile, dont il était vice-président, en 1964 : "Les méthodes modernes de fabrication, l'automatisation, constituent un état d;esprit et une sorte de philosophie qui ne doit pas être l'apa­nage des gens qui en ont la charge. Il faut dès le début de la conception des mécanismes et des pièces qui les constituent que les ingénieurs, les techniciens qui y participent aient conscience du fait que la disposition générale, la forme, la nature, les dimensions, la précision des pièces qu'ils dessinent doivent tenir compte des conditions futures de leur fabrication".

Il ajoutait: "les changements et les progrès accomplis par les méthodes de production dans les vingt dernières années ont été relativement plus importants que ceux réalisés dans la conception des pièces et des organes".

Cet état d'esprit se manifeste dans une note à MM. Dreyfus et Grillot du 11 janvier 1957 (D.F.M. 996 -PD/MGa, nO 1585, conservée dans le dossier 41/1538), où Pierre Debos présente un rapport de P. Bézier sur l'expansion des services des méthodes en ces termes :

Il ne serait pas logique de développer -comme nous le faisons très judicieusement -nos servz·ces et nos organismes de recher­ches en néglz"geant celles quz· intéressent les méthodes de pro­ductz"on. On peut même dz·re que, dans la Plupart des cas, le résultat de ces dernz·ères est Plus rapz·dement projïtable que celui de toutes les autres.

Un fait est certain: jusqu'à ce jour, nos servz·ces de Méthodes et d'Études d'Équzpements n'ont pas eu la capacité voulue pour faire autre chose que d'étudz·er et réaliser des moyens de fabri­catz·on au fur et à mesure que les problèmes de productz·on nous étaz'ent posés (nouveaux modèles, modifù;atz·ons importantes, augmentatz·on de cadence).

Il nous a été à peu près z·mpossible de travaz1ler "en profondeur" sur le perfectz"onnement des méthodes et des équi­pements de fabrication en servz"ce et sur l'étude de procédés tenant compte de l'évolutz"on, à longue échéance, des tech­nz·ques de fabrz·catz"on. Il y a pourtant beaucoup à faz·re et à gagner dans ces deux voz"es.

On n'analysera pas ici en détail le rapport de P. Bézier, qui dans son introduction retrace l'évolution des services des méthodes de 1945 à 1956, et insiste à son tour sur la nécessité pour les services des méthodes de pouvoir travailler sur l'ensem­ble du processus de fabrication, à long terme et avec des possi­bilités de recherche. Il justifie cette nécessité par le fait que "toute erreur dans le choix des machines, de l'outillage ou de l'implantation occasionne des frais d'exploitation inutiles. De plus, il est toujours très difficile et onéreux, sinon impossible, de corriger une faute de conception dès l'instant où la décision a reçu un commencement d'exécution". Le rapport donne d'intéressantes précisions sur l'organisation, les effectifs et les besoins des divers services des méthodes. Il est complété par un budget prévisionnel du service 980, bureau d'étude d'outillage (dossier 48/3008), où P. Bézier insiste à nouveau sur l'exten­sion, au-delà de la Régie, du marché de ses machines spéciales.

On conçoit que de telles préoccupations aient conduit à recher­cher des outils radicalement nouveaux, c'est-à-dire à s'orienter vers l'automatisme de production. Une note conservée dans le dossier 77/3 (note nO 8331, direction technique 9010 PD/PF du 3 octobre 1962) donne la liste des projets de recherche que la Régie comptait proposer au financement de l'État au titre du quatrième plan du commissariat général au Plan d'équipe­ment et de productivité. On relève en particulier, dans la rubrique Automatisme, les projets suivants:

1.

Traçage et usinage automatiques de profils plans quel­conques (M. Bézier).

2.

Extension de l'utilisation des machines à percer à com­mande numérique, déjà étudiées et en service, au fraisage de contours polygonaux (M. Bézier).

3.

Utilisation sur nos machines à commande numérique de bandes perforées normalisées à 1" (M. Georges).

4.

Utilisation sur les machines à commande numérique d'un système purement décimal (M. Georges).

Cette brève note ne peut donner qu'une vue partielle de l'ensemble de ce fonds, dont bien des documents demandent une étude plus attentive et plus technique. Elle permet cepen­dant de souligner le caractère crucial que les services des méthodes de fabrication ont pu avoir dans l'évolution de la production vers ce qu'on appelle aujourd'hui "les nouvelles technologies", et le rôle qu'y ont joué des hommes comme Pierre Debos.

Jean-Pierre POITOU