06 - Jacques Pomey (1897-1971)

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Jacques Pomey (1897-1971)

Jacques Pomey en tenue d'académicien.

L'Entreprise et les Hommes.

La substance même d'une entreprise industrielle considérée dans ses moyens, sa puissance, son renom, c'est le travail des hommes.

Le groupe Renault en particulier s'est édifié au prix d'une somme prodigieuse d'efforts de toutes sortes: physiques, ner­veux, intellectuels, et même, nous ne devons pas l'oublier, au prix de la vie de certains dont parmi eux, un président-directeur général.

Dans cette œuvre, des hommes ont marqué leur action propre par une empreinte qui, longtemps après leur retrait ou leur dis­parition, reste apparente dans les orientations, l'efficacité des fonctions et le comportement des personnes devant leur tâche. Jacques Pomey fut un de ces hommes.

Carrière industrielle de Jacques Pomey

1923 -Ingénieur civil des mines. École nationale supérieure des mines de Paris. 1923 -Ingénieur de recherche, adjoint au directeur de la sta­tion d'essais du comité des Houillères de France. 1926 -Chef du service des recherches métallurgiques à la société anonyme des forges et aciéries de Firminy. 1932 -Chef du service des recherches métallurgiques aux Hauts fourneaux et aciéries de Pompey.

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Jacques POMEY

(1897 1971)

1933 -Chef du service des ateliers de traitements thermiques et des laboratoires * de la Société anonyme des usines Renault.

1939 -Directeur des laboratoires de la Société anonyme des usines Renault.

1952 -Directeur scientifique à la Régie Renault.

1960 -Directeur conseiller scientifique à la Régie Renault.

* * 1962 -Conseiller scientifique au groupe U sinor ainsi qu'aux aciéries du groupe Renault : Société des aciers fins de l'Est (S.A.F.E.) et Société des aciéries du temple (Saint-Michel-de-Maurienne).

Les récompenses honorifiques seront citées plus loin, mais dès maintenant, l'élection à l'Académie des sciences, le 13 novem­bre 1967, doit être notée comme distinction extraordinaire.

Le bref résumé de carrière produit ci-dessus fait apparaître que pendant 27 ans Jacques Pomey a eu la charge du laboratoire central de l'entreprise, et jusqu'à sa mort subite le 6 septembre 1971, il en a gardé le contact par ses fonctions de conseil à la Régie Renault puis aux aciéries filiales.

La force et le caractère de son œuvre ne peuvent pas être saisis sans la connaissance des fonctions qu'assure le laboratoire cen­tral (appelé depuis 1968 direction des laboratoires). Beaucoup

• Depuis une période proche de leur origine, le laboratoire et les ateliers de traitement thermique étaient sous la même autorité. Retraite des usines Renault par limite d'âge.

certes, les connaissent pour y faire appel ou y avoir fait appel, mais il se peut que beaucoup aussi, dans d'importantes activités de l'entreprise, n'en aient qu'une idée imprécise. Pour cette raison, elles doivent être exposées.

Fonctions du laboratoire central.

L'action et la responsabilité du laboratoire central s'exercent sur les matériaux et les produits, c'est-à-dire, d'une part, sur ce en quoi sont faits les éléments constitutifs des matériels destinés à la clientèle ou utilisés en fabrication (métaux de diverses natu­res, caoutchoucs, plastiques, tissus, etc.) et, d'autre part, les substances qui interviennent dans le fonctionnement de ces matériels (lubrifiants, carburants, liquides de coupe ou de refroidissement, etc.).

Les activités qui s'exercent dans le domaine ainsi défini appa­raissent de façon concrète bien que succincte dans les extraits d'une note d'attribution établie en 1968 (1).

La direction des laboratoires : -procède à des recherches relatives à la composition, l'élabora­tion, la transformation et l'emploi des matériaux; -définit pour les directions d'études, à leur demande, les caractéristiques de la matière constituant les pièces nouvelles ou de série;

-contribue à la résolution des problèmes à court terme qui se posent aux services techniques et aux usines dans le domaine des matériaux ; elle se tient à leur disposition pour tout conseil scientifique qui leur apparaîtrait utile ;

est consultée sur les dispositions générales qui sont prises pour assurer la qualité des matériaux avant ou en cours de transformation et sur les moyens mis en œuvre ;

-procède à des recherches sur les méthodes d'examen et de contrôle des matériaux et décide de leur choix en accord avec les laboratoires d'usines dans leur fonction de contrôle des matériaux;

-au sein du groupe Renault, la direction des laboratoires se tient à la disposition du secrétariat du groupe pour assurer les fonctions définies ci-dessous au bénéfice des filiales;

-vis-à-vis de l'extérieur, la direction des laboratoires repré­sente la R.N.U .R. pour les problèmes scientifiques. En parti­culier, elle se tient informée de l'activité des laboratoires d'université ou d'autres organismes de recherches et leur confie éventuellement des travaux capables de contribuer au progrès des techniques du groupe.

Action technique et activité scientifique.

Le rappel à la note, évitant tout d~veloppement fastidieux, fait apparaître qu'outre les activités de contrôle, analyse, essai, conseil que la vie de l'entreprise impose de façon permanente, des investigations plus générales, inspiratrices de progrès nou­veaux et qui de toutes façons doivent contribuer puissamment à la rapidité et à la qualité de résolution de problèmes industriels immédiats, doivent être incluses dans l'action du laboratoire central. Il n'est pas exclu que, ce faisant, le laboratoire accède à la connaissance de phénomènes, de propriétés ou de principes nouveaux et accroisse ainsi, au-delà de ce qui était prévisible, son potentiel d'action au profit de l'entreprise. En un mot, dans l'activité du laboratoire central, doit s'insérer un effort perma­nent de maintien et de développement de connaissances géné­rales. Il importe d'en définir et d'en proposer les buts, le volume et les moyens.

Par raison, et sans doute aussi par goût et par don, dans l'esprit de Jacques Pomey, le problème technique effectif et la connais­sance scientifique générale ne sont jamais séparés. Sa concep­tion, son sentiment ne peuvent pas mieux être présentés que par ce qu'il en a écrit lui-même (2).

« Non seulement j'ai eu continuellement aux laboratoires, puis à l'atelier, à appliquer les connaissances scientifiques aux per­fectionnements industriels, mais en outre, je me suis donné pour mission de rechercher en toutes circonstances les problè­mes scientifiques de base dont la résolution serait source de pro­grès industriels.

La méthode scientifique qui est la recherche des lois auxquelles les phénomènes naturels obéissent, grâce à la mesure et à la compréhension de ceux-ci, est la même qu'il s'agisse de recher­che pure ou de recherche appliquée ; seul varie le mobile qui l'anime, lajoie de connaître dans le premier cas, le désir de réa­liser dans le second; ces deux tournures d'esprit ne sont d'ail­leurs pas exclusives l'une de l'autre. La connaissance scientifi­que qui résulte de ces recherches fondamentales permet de résoudre plus sûrement et plus complètement les problèmes posés par la technique industrielle puisque le caractère perma­nent et général de ces données s'applique à tous les cas particu­liers rencontrés dans la pratique, ce qui permet de résoudre simultanément un grand nombre de problèmes. Au contraire, la seule exploration méthodique des nombreux facteurs rencon­trés dans le problème pratique du moment présent, bien que pouvant nécessiter plus de temps et de travail, ne conduirait qu'à une solution particulière de portée pratique limitée. J'ai toujours eu ce double souci de remonter aux problèmes fonda­mentaux pour ensuite exploiter le résultat au maximum sur le plan pratique et contribuer ainsi au progrès à la fois scientifique et technique. Les programmes de recherche sont alors imposés par la hiérarchie des problèmes, le caractère plus fondamental et plus général de certains d'entre eux les rendant à la fois plus fertiles en connaissances et plus productifs en applications ".

La personnalité et la fonction.

La grande diversité des matériaux et des procédés de leur trans­formation (usinage, forge, fonderie, traitement thermique, éla­boration et mise en forme des caoutchoucs et plastiques, etc.) est un caractère très remarquable de l'industrie automobile.

(1)

Note de service nO 498, du 15-5-1968, de M. Dreyfus.

(2)

Notice sur les travaux scientifiques de M. Jacques Pomey 1954. -Édition

R.N.U.R.

Les nombreux problèmes que posent les comportements d'usage en clientèle et en fabrication sont donc extrêmement variés dans leur nature et chaque nature de question ne peut ainsi que se trouver confiée à des équipes ou à des personnes qui, quelle que soit l'étendue de leurs connaissances, se trou­vent spécialisées, au moins pendant un temps, dans un certain domaine. La spécialisation s'attache non seulement à la connaissance des problèmes à traiter, mais aussi aux moyens d'investigation auxquels il faut recourir, moyens qui doivent être maîtrisés, suivis dans leur progrès et souvent adaptés et perfectionnés.

Jacques Pomey a toujours voulu ne négliger aucune des ques­tions étudiées et même conduire la plupart d'entre elles. Il s'imposait ainsi d'entretenir et d'étendre sa capacité de les trai­ter. Il y parvient par sa vivacité intellectuelle et une puissance de travail peu commune. Il approfondit ou pénètre les discipli­nes les plus diverses : métallurgie physique et métallurgie pré­parative, mécanique, chimie minérale, chimie organique, microscopie, diffraction de rayons X, spectographie analyti­que, etc. Que de fois, le lundi matin, a-t-il commenté à ses col­laborateurs concernés, les grandes lignes d'un abondant manuscrit qu'il avait établi chez lui le samedi et le dimanche, et dont il dégageait une nouvelle orientation de travail, ou le pro­jet d'une recherche nouvelle ou encore une clarté projetée sur le mécanisme de phénomènes encore mal expliqués. Car pour Jacques Pomey, c'est systématiquement par l'écrit que s'éta­

blissait la cohérence finale de sa pensée.

Importance de l'écrit comme élément de progression de la recherche.

Comme il est connu, c'est à la « soumission modeste aux faits )', au refus de reconnaître à la seule raison la capacité de tendre vers la vérité, que la méthode scientifique expérimentale a dû et doit son extraordinaire efficacité. Il n'en est pas moins évident que le rôle mental du chercheur intervient de façon nécessaire dans la conception des hypothèses propres à coordonner les faits observés dans la nature, dans les techniques et dans les labora­toires, hypothèses qui deviendraient des règles et des lois si l'expérimentation à laquelle elles doivent être soumises, et que le chercheur doit avoir la capacité d'imaginer, et de réaliser, en confirme la valeur. C'est par ces règles et par ces lois que s'ouvrent de nouveaux champs de connaissance et de possibili­tés matérielles et finalement c'est par l'écrit que cette démarche expérimentale et mentale acquiert son unité ainsi que sa préci­sion et assure la diffusion nécessaire à sa fécondité.

Ce qui est remarquable pour Jacques Pomey, c'est que l'écrit est mis en jeu à tout moment et participe de façon réelle à la démarche de recherche. Les questions traitées, à de fréquents degrés de leur avancement, doivent faire l'objet d'un compte rendu, conçu certes comme aide-mémoire et moyen de communication, mais dont on attend aussi et surtout la lumière qu'apporte la mise en ordre des mots. Le compte rendu doit être complet, clair, ordonné et établi dans sa forme définitive seulement après que chaque point en a été longuement discuté. Il n'est pas d'exemple qu'un tel effort n'ait pas conduit à une nouvelle orientation des travaux ou à une conclusion qui sans lui ne se seraient imposées. A cette démarche, tous ceux qui, sous son autorité, assuraient la progression des questions tech­niques et scientifiques se sont rapidement adaptés. De disci­pline imposée, elle est vite devenue un acte normal de travail.

Origine, conduite et progression des recherches. Un exemple.

Indépendamment de l'intervention permanente de conseil, de contrôle, d'expertise, de mise au point, on peut voir dans les travaux des laboratoires deux sortes de préoccupation : les pro­cédés et la connaissance. Un exemple pris dans ce dernier domaine, celui de la connaissance, pourra utilement illustrer la démarche générale de Jacques Pomey, dont l'exposé qu'il en a fait lui-même a été cité plus haut.

On sait depuis longtemps que le comportement satisfaisant en service de beaucoup de pièces de machines ne peut pas être assuré sans qu'un traitement de durcissement superficiel (ther­mique ou mécanique) soit inclus dans leur cycle de fabrication.

En 1946, Jacques Pomey réfléchit au cas particulier de la cémentation (3) suivie de trempe. Pour lui, le durcissement superficiel qui en résulte n'a pas pour seul avantage de s'oppo­ser à la détérioration des surfaces par matage, usure et grip­page. Il considère une pièce dans l'ensemble de son volume, les constituants qui se forment ou disparaissent en chaque point, à chaque instant du traitement, ainsi que les tendances locales aux variations de volume qui découlent de la densité particu­lière de chaque constituant. L'opposition les unes aux autres de ces tendances est génératrice de contraintes qu'on peut espérer, par action sur les conditions de traitement, répartir de telle sorte qu'elles atténuent les effets des seules forces extérieures appliquées en service. Par exemple, en surface, les contraintes résiduelles en compression s'opposeront utilement aux contraintes d'extension que doit développer l'effort d'usage. Le cœur de la pièce, maintenu malléable, pourra supporter sans dommage les contraintes résiduelles d'extension inévitables. Mais l'analyse ainsi faite ne doit pas rester qualitative.

L'élasticimétrie (4), fondement de la discipline dite « résistance des matériaux» est un volumineux chapitre de la mécanique. Jacques Pomey en connaît les bases essentielles. Il les rassem­ble, les complète en assimilant les développements les plus récents et, puisant dans ces matériaux, établit une théorie de la corrélation entre les durcissements superficiels et le champ des précontraintes. Une telle théorie n'était pas accessible à un spé­cialiste, soit mécanicien, soit métallurgiste. Elle ne peut être issue que d'un esprit qui a pénétré profondément les deux disci­plines. Ce caractère multidisciplinaire intervenant dès la conception est une des marques de l'œuvre de Jacques Pomey.

(3)

Modification de la composition des couches superficielles par apport d'un élément (il s'agit ici de carbone ou de carbone et d'azote).

(4)

Étude de la répartition spatiale des contraintes et des allongements élasti­ques dans un corps solide.

La théorie ne clôt pas la recherche. Elle en guide la poursuite. Un appareil capable de la mesure des contraintes résiduelles de traitement est conçu, réalisé et utilisé. Par ailleurs, la recherche est complétée par des mesures de limite d'endurance et de rési­lience dans des cas de traitement que la conception générale fait choisir. Les résultats en sont discutés, classés, ordonnés et commentés dans des synthèses claires et cohérentes qui comportent en conclusion des règles pratiques. Les techniques industrielles de durcissement superficiel sont dégagées de l'empirisme.

Interpénétration des recherches et des techniques

Certains résultats de recherche, du domaine du procédé, ont été rapidement exploités. Ce fut le cas de la cémentation gazeuse, mise en œuvre en 1935 aux usines Renault pour la première fois en Europe à l'échelle de la production de série, suivant un procédé nouveau-né sur une table du laboratoire. Longtemps après, un autre procédé, lui aussi issu du labora­toire, tenant compte des évolutions et des conditions locales, a été implanté à l'usine du Mans. Actuellement, à la suite du développement général des techniques, ce sont des moyens de fourniture extérieure répandus dans toute l'industrie auxquels on a recours. Il en reste que pendant longtemps le bénéfice tiré des recherches a été important.

Bien entendu, toutes les recherches n'ont pas des conséquences aussi rapidement visibles. La théorie des précontraintes liées aux durcissement superficiels, citée plus haut en exemple du domaine de la connaissance, comporte en conclusion des règles pratiques. Mais les organes de décision en conception et métho­des ne peuvent pas les mettre en œuvre sans considérer, en regard des avantages avancés, l'état de ce qui existe: spécifica­tions, gammes de fabrication, installations et évidemment considérer aussi les investissements et prix de revient, bien que ceux-ci ne soient jamais absents des préoccupations du labora­toire.

Ce qui est finalement important, c'est l'accroissement des connaissances acquises dans les domaines de l'entreprise et l'accroissement pour le laboratoire de sa capacité d'interven­tion et de conseil. Dans la capacité d'intervention qu'on peut reconnaître à la direction des laboratoires, Jacques Pomey a été d'un grand poids.

Publications -Sociétés savantes -Enseignement.

Par la lecture des publications, l'audition des conférences orga­nisées par les sociétés savantes ou techniques, la participation aux colloques et congrès, le laboratoire, comme tout autre corps à fonction technique, se tient informé des travaux pour­suivis et des progrès réalisés dans les entreprises ou organismes extérieurs.

Jacques Pomey ne se limite pas à la simple recherche d'infor­mations ou de documents. Il établit ou consolide des relations personnelles avec les représentants -directeurs ou chercheurs ­souvent éminents, des organismes de recherche les plus divers. Il participe à l'organisation et à la vie de sociétés savantes et se voit confier la présidence de certaines d'entre elles.

Il publie aussi beaucoup. Il affine, résume ou complète, sou­vent avec des vues nouvelles, les comptes rendus de laboratoire dont il a induit ou conduit la rédaction. Les textes qu'il établit ainsi font l'objet de notes à l'Académie des sciences, d'articles publiés dans des revues techniques ou scientifiques, telles que la Revue de la société française de métallurgie, ou de conférences présentées dans des colloques ou congrès. Le nombre des mémoires, conférences ou articles qui ont été publiés est de 100 dont 25 notes à l'Académie des sciences (5). Elles peuvent se rapporter, par exemple, aux mécanismes physicochimiques de certains traitements, à des recherches d'ordre chimique visant à créer des produits nouveaux ou encore à des méthodes d'investigations ou à des procédés de mesure. Ses travaux connus, appréciés, lui valent des honneurs et finalement son élection à l'Académie des sciences. Ces récompenses et les sociétés savantes à la vie desquelles il a participé sont produites en annexe. Y figurent également les enseignements qu'il a dis­pensés. Car c'est aussi par l'enseignement que Jacques Pomey diffuse les connaissances nouvelles qui découlent des travaux qu'il a conduits.

Ainsi, pendant toute sa vie professionnelle -déjà avant d'être aux usines Renault et en dernier lieu pour le compte et avec le support de la S.A.F.E. et d'Usinor -Jacques Pomey a imaginé des sujets de recherche, en a conçu les programmes et les moyens de leur progression et, après une analyse pénétrante des résultats, les a présentés dans des publications, intérieures ou extérieures à l'entreprise, originales, ordonnées, claires et complètes.

Le Bureau pendant l'allocution du duc de Broglie. De gauche à droite: Marcel Chateau, Achille-G. Lefebvre, président général de la Société royale belge des ingénieurs et industriels. Albert Caquot, membre de l'Ins­titut, ancien président de l'Académie des sciences, Duc de Broglie, de l'Académie française, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, Fernand Picard, directeur-conseil à la Régie Nationale des Usines Renault, Georges Chaudron, membre de l'Académie des sciences, Maurice Mangez, vice-président de l'association des anciens élèves de l'École nationale supé­rieure des mines de Paris.

(5)

La liste des publications est disponible à la Section d'Histoire.

(6)

Collège international de recherche de productivité.

Le terme de son action industrielle, avait été fixé par lui, pour l'essentiel, à la fin de 1971. Au cours de cette année, il avait accepté d'assurer la rédaction d'une partie d'un traité de physi­que du métal. Pour tenir le délai qu'impliquait son accord, il était resté au mois d'août à Paris, où se trouvaient ses sources de documentation pour se consacrer à ce travail. Au début de septembre, il assistait à Cracovie à un congrès du C.I.R.P. (6) et c'est pendant ce congrès que survint sa mort subite. Il arri­vait à la fin de sa 74e année. Et ainsi, son activité de recherches, de communication et de discussions savantes qu'il aimait et pour laquelle il était fait, ill'a exercée jusqu'à ses derniers ins­tants.

Quelques traits hors de la profession.

A coup sûr, il apparaît ici évident au lecteur que l'œuvre n'a pu s'accomplir que par un effort permanent considérable débor­dant largement les horaires de l'entreprise. Et pourtant une telle activité n'était pas exclusive de toute autre. Par exemple, pendant longtemps, Jacques Pomey a pratiqué l'aviation spor­tive. Peintre paysagiste, il a produit de très nombreuses aqua­relles qui portent la marque d'un incontestable talent. Il a conçu et dessiné lui-même l'épée d'académicien qui lui a été remise le 7 décembre 1968 dans une cérémonie à laquelle a par­ticipé une nombreuse assistance comprenant d'éminents savants et professeurs.

Dans l'ordre militaire, il combat au cours de la Première Guerre mondiale, et reçoit la croix de guerre 1914-1918. En 1945, il s'engage à la 1,e armée. Il participe à la campagne d'Allemagne comme chef de bataillon et en 1950 reçoit la croix de chevalier de la Légion d'honneur à titre militaire.

L'œuvre.

Jacques Pomey fut loué, admiré. Il fut aussi critiqué. Les reproches : prise en compte insuffisante des préoccupations immédiates des corps techniques; objet de certaines recherches trop éloignées des besoins de l'entreprise ; activité extérieure de communication jugée excessive et attribuée au goût de la noto­riété ; mobilisation trop exclusive vers les recherches générales des ingénieur~ et techniciens des laboratoires qui, de ce fait, ne participaient qu'insuffisamment à la vie des usines.

Mais les fortes personnalités, et Jacques Pomey en était une, se trouvent immanquablement sujettes à la critique. C'est le relief qui crée les ombres et montrer les ombres, c'est faire apparaître le relief. C'est ainsi que les critiques, par leur existence, met­tent en évidence la ténacité et le caractère s'ajoutant à une puis­sance de travail hors du commun, dont Jacques Pomey a dû faire preuve pour assurer son autorité et obtenir les moyens nécessaires à l'accomplissement de sa fonction telle qu'il la concevait. Il a œuvré sans jamais avoir composé avec ses convictions.

Jacques Pomey était certes sensible aux honneurs. Mais qui ne l'est pas ? Les honneurs n'existent que par le plaisir que notre nature nous y fait trouver. Et n'est-elle pas légitime la fierté de voir reconnaître la qualité de l'ouvrage accompli?

En réalité, une personnalité est un tout. Il est vain de regretter certaines composantes de sa nature. Dans les « Souvenirs" récemment publiés de ceux qui ont approché Louis Renault, des ombres apparaissent : décisions injustes, brutales, blessan­tes. Mais c'est parce qu'il était ce qu'il était que Louis Renault a doté le pays d'une pièce maîtresse de son industrie.

PourJacques Pomey, ce qui est certain, c'est que ceux qui l'ont approché n'ont pas connu d'autres personnes qui possèdent des connaissances aussi approfondies dans un domaine de discipli­nes aussi étendu.

Ce qui est certain aussi, c'est que Jacques Pomey a façonné au profit de l'entreprise un outil de valeur, un outil efficace qui porte encore sa marque et la portera longtemps encore.

Marcel CHATEAU

Récompenses et sociétés savantes

1923 Médaille d'honneur de l'association amicale de l'École

nationale supérieure des mines.

1948 Membre du comité des arts physiques de la Société

d'encouragement pour l'industrie nationale.

1948 Lauréat de l'Académie des sciences, prix de mécanique

H.-de-Parvil.

1949 Membre du conseil de la société française de physique.

1949 Vice-président de la Société française de métallurgie.

1950 Président du Groupement pour l'avancement des

méthodes d'analyse des contraintes (G.A.M.A.C.).

1951 Président du Groupement pour l'avancement des

méthodes spectrographiques (G.A.M.S.).

1956 Président du Groupement pour l'avancement de la

mécanique industrielle (G.A.M.I.).

1957 Président de la Société française de métallurgie.

1957 Membre du Collège international pour l'étude scientifi­

que des techniques de production mécanique

(C .I.R.P.).

1957 Membre de la commission scientifique de l'institut de

recherche de la sidérurgie (I.R.S.I.D.).

1967 Membre de l'Académie des sciences.

Enseignement

1944 Cycle de conférences à l'École nationale supérieure des ponts et chaussées.

1947 Professeur à l'École nationale supérieure de l'ar­mement.

1949 Professeur à l'Institut supérieur des matériaux.