10 - Chronique du C.A.R.: Histoire de la renaissance d'une 4 CV

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Texte brut à usage technique. Utiliser de préférence l'article original illustré de la revue ci-dessus.

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Chronique du C.A.R.: Histoire de la renaissance d'une 4 CV

Quel plaisir de posséder et conduire une 4 CV! Beaucoup peuvent encore répondre. Quel plaisir de «dénicher" et restaurer « à fond" une 4 CV! Les rangs se rétrécissent..., eh bien, j'ai la joie de faire partie de ces derniers et c'est cette petite aventure que je vais vous conter.

Le premier battement de cœur est provoqué par la décou­verte d'une 4 CV à vendre, stationnée dans une rue de Clichy, en ces derniers jours d'octobre 1976. Le rêve passe... et tout devient réalité lorsque, le 12 novembre sui­vant, la carte grise rayée et le modeste prix réglé, les portes de notre garage s'ouvrent toutes grandes pour laisser entrer notre R 1062 découvrable de 1955.

Quelque temps après, mes deux copains Emmanuel Cognet et Jean Tournet, le premier pour la mécanique, le deuxième pour la carrosserie, se joignent à moi pour éta­blir un programme de travail.

Il s'agit dès lors, d'envisager une remise en état qui nous permettra, peu importe le délai, de restituer toute sa jeu­nesse à la 4 CV et même d'« actualiser", un tant soit peu, son aspect. Nous désirons même, par l'emploi de produits n'existant pas à l'époque de sa fabrication, protéger sa robe pour qu'elle n'ait plus à souffrir des effets du vieil­lissement.

Dans son état, la voiture adaptée et rafistolée pour répon­dre aux nécessités immédiates d'emploi de son jeune et précédent propriétaire, présente un aspect plutôt clownes­que ; teinte deux tons bleu roi jusqu'à la ceinture et blanc en superstructure, la capote entièrement bricolée dans une bâche de camion d'un bleu foncé s'effondre littéralement et ses armatures ne tiennent pas verrouillées.

D'autre part, fait plus important, la voiture a dû verser acci­dentellement sur le côté droit, prenant appui sur les char­nières de portes en saillie, le pied milieu n'a plus de galbe

Le moteur prêt à recevoir le mécanisme boite-pont. La boite vient d'être remontée, le pont est en c'ours n d'analyse n.

Le compartiment, après nettoyage et prêt à recevoir l'ensemble propulseur, a reçu deux couches de peinture de la teinte finale choisie pour l'extérieur.

Noter l'application d'un enduit Blackson à l'intérieur du passage de roue.

Le caisson a reçu sur la totalité de son extrados une application d'enduit Blackson.

Le triangle inférieur gauche H.S. sera remplacé.

et le bord supérieur du pavillon est «embouti" sur toute sa longueur, l'aile avant droite est remartelée dans une forme approchée.

Par contre, l'infrastructure de la caisse est dans un état parfait, pas une parcelle de tôle rouillée, nous découvrons la teinte d'origine (vert 956) après dégarnissage des parties ayant échappé au folklore bleu et blanc, les parties basses des portières sont également très saines.

Ces dernières constatations renforcent la décision de Jean Tournet, la carrosserie doit être reprise entièrement pièce par pièce, remise en forme, sablée ou décapée pour repren­dre ses formes initiales; il se révèle en effet impossible de trouver maintenant les pièces neuves de carrosserie dans les magasins de pièces de rechange.

Du côté mécanique, les 40000 km affichés au compteur laissent à penser qu'un bon tour de cadran complémentaire a eu raison de pas mal d'éléments aussi bien du côté moteur que pour l'ensemble boîte-pont. Dans le même temps, un camarade du club, Pierre Le Moal, me propose très gentiment de me donner une épave de berline à toit ouvrant sur laquelle je peux récupérer tout ce qui est valide, en particulier le moteur (type 662-2) et le mécanisme bOÎte­pont (type 289).

L'opération de démontage ne fait qu'un tour et le 29 jan­vier 1977 un ferrailleur passait enlever ce qui restait de l'épave une coque difforme.

Ensuite, méthodiquement, les ensembles ont été entière­rement démontés, nettoyés, remontés avec échange des pièces défectueuses. Tout d'abord, le moteur de récupéra­tion en meilleur état que celui équipant la voiture, nous permet d'adapter non seulement le coup de fouet de Renault 4 mais aussi un vilebrequin neuf de Dauphine; l'allumeur neuf est équipé d'une nouvelle tête identique à celle des Renault 4, les démarreur et dynamo sont recondi­tionnés et le carburateur Solex 22 BIC est replani à son embase. Le radiateur, en très bon état est nettoyé et testé. Le moteur ainsi reconditionné a bien fière allure. Ensuite le mécanisme boîte-pont, toujours en utilisant la récupéra­tion de l'épave, il apparaît que seules les bagues de syn­chro sont à remplacer; l'opération est effectuée et les contrôles de réglage et de jeux sont faits avant la fermeture du mécanisme.

Avec un disque d'embrayage neuf, grosse cannelure, le mécanisme boîte-pont est accouplé au moteur la première semaine de juin et l'ensemble moteur-mécanisme avec roues équipées est remonté dans son compartiment le 16 juin 1977.

Pendant le même temps, Jean Tournet travaille avec toute son habileté sur les tôleries, il remet en forme, replane, retend. Avec ses marteaux et ses tas, il bannit toute recharge et s'interdit l'usage du Sintofer, ce grand art me laisse pantois.

A titre anecdotique, je peux citer le travail de préparation pour la remise au galbe du bord supérieur droit du pavillon; le vérinage de l'intérieur étant impossible du fait de la déformation du pied milieu, il est procédé au dépointage (95 points) de la doublure intérieure, mais une découvra­ble possède une double cloison... alors, l'opération de dépointage est reprise une deuxième fois, le « désossage " dure deux jours! Mais ainsi les deux doublures sont déga­gées et le bord droit accessible de l'intérieur.

L'ensemble propulseur vient d'être réinstallé dans son compartI­ment. Dans quelques instants, à l'aide d'une alimentation électrique provisoire, le moteur fera ses premiers tours.

Patiemment, la 4 CV reprend forme, elle devient un véri­table attachement pour l'équipe que nous formons tous les trois et je pense que lorsque ces lignes paraîtront elle aura fait ses premiers tours de roues.

Suivant un rythme aussi souple que décontracté, adopté dès le départ, il aura fallu une année pour sa restauration, c'est peut-être inimaginable pour certains qui ne connais­sent pas ce qui est le propre de l'Amateur: faire quelque chose pour le plaisir!

Claude LE MAITRE