07 - Les ponts de Sèvres (suite)

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LES PONTS DE SEVRES

(suite de notre précédent numéro)

Accès au nouveau pont

L'Entrepreneur supplie un secours et poursuit sa lettre :

« Je vous supplie également, M. le « Comte, d'ordonner que provisionnel­« lement aussi, il me soit payé un « acompte de cinquante-quatre mille « francs, applicable conformément à « la loi du 26 Pluviose An Il au paye­« ment de plus de 500 pauvres « ouvriers, employés et autres privi­« légiés de première ligne qui depuis « bientôt cinq ans attendent dans le « besoin leurs salaires arriérés par « l'effet de la spoliation totale et « subite que (ai essuyée en juin 1810.))

Le Sieur Dubournial termine sa lettre dans les termes suivants :

« J'ose vous représenter d'ailleurs,

« M. le Comte, que si justice ne «,m'était pas enfin rendue avant que « je succombe sous le poids des mots « qu'on accumule depuis si longtemps « sur ma débile vieillesse, il s'ensui­« vrait de ma malheureuse histoire que « le plus mince Ingénieur des Ponts « et Chaussées, pourrait désormais « violer impunément et livrer au gré de « ses passions, les traités qu'au nom « de Gouvernement vous êtes tous les « jours dans le cas de sanctionner « avec les entrepreneurs des grands « travaux des Ponts et Chaussées, « puisque pour y parvenir il ne faudrait « à cet Ingénieur qu'assez d'audace f( pour hasarder un état de situation « infidèle, et assez d'astuce pour en « entraver ou retarder la vérification « jusqu'à ce qu'elle soit devenue « impraticable, ou jusqu'à ce que « l'entrepreneur, épuisé par une lon­« gue et ruineuse lutte et flétri par la « misère et le malheur soit anéanti ou « réduit à /'impossibilité de se faire « écouter, et quels abus, quels pré­« judices pour le service, quelles « conséquences onéreuses pour le « Gouvernement ne pourrait-il pas en « résulter.

Se rappelant comme un très humble et très obéissant serviteur, l'Entre­preneur ajoute à sa lettre un Post­scriptum rédigé en ces termes :

« Si M. le Comte daigne avoir égard à « l'urgence et à la multiplicité de mes « besoins, je le supplie de me faire « provisoirement délivrer par M. Gal­« land, à valoir sur les secours qui « doivent m'être accordés sur les « fonds du Pont de Sèvres, une somme « de mille francs qui, employés à « faire imprimer de suite un petit « ouvrage dont le manuscrit est sous « les yeux de l'Empereur, et qui dans « les circonstances actuelles pourrait « être utile s'il était publié avant le 26 « de ce mois, me procurerait vraisem­« blablement quelques avantages ul­« térieurs. ))

Cette nouvelle lettre en précède d'autres, qui en motivent une du Directeur des Ponts et Chaussées, après de M. le Comte de Chabrol, Préfet de la Seine le 25 juillet 1815, où il est dit notamment:

« Le sieur Dubournial, Ex-entrepre­« neur au pont de Sèvres, vient de « m'adresser une nouvelle réclama­« tion tendant à obtenir un secours « extraordinaire en raison des pertes « qu'il a éprouvées au commence­« ment de ce mois par suite des opé­« rations militaires et des événements « de la guerre. Je vous prie M. le « Comte d'employer tous les moyens « qui sont en votre pouvoir pour « hâter le règlement du compte du « Sieur Dubournial, que je ne cesse « de demander. ))

Six jours plus tard, M. de Chabrol lui­même s'exprime clairement en ce qui concerne cette affaire Dubournial, et redonne à celui-ci une position qu'il n'aurait, semble-t-il jamais dû quitter.

Il a obtenu des renseignements sur l'état où se trouve l'opération de l'expertise et principalement sur ce qu'il y a de fondé dans l'assertion avancée par le réclamant touchant la somme dont il aurait été reconnu devoir être créancier le 19 juin 1810.

Il résulte des renseignements que les experts viennent d'adresser à M. de Chabrol, qu'en effet le Sieur Dubour­niaI, loin d'être débiteur du Gouver­nement à ladite époque du 19 juin 1810, était au contraire son créancier et que par aperçu on peut évaluer au moins à cent mille francs ce qui lui est dû aujourd'hui.

M. de Chabrol poursuit en indiquant que les experts n'ont qu'à mettre en ordre leur travail terminé, et qu'il l'aurait été sans les derniers évé­nements.

Il conclut: d'après cet état de choses,

M. le Comte, j'ai lieu de croire que cette affaire touche enfin à sa conclu­sion et je m'en rapporte entièrement à votre humanité et à votre prudence sur les moyens de venir au secours du Sieur Dubournial, dont les malheurs de la guerre viennent d'aggraver encore la fâcheuse position.

Les principaux créanciers du Sieur Dubournial se réunissent le 12 oc­tobre 1815. Quatre d'entre eux seule­ment signent la délibération, ils repré­

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sentent en valeur 128.000 francs sur une créance totale de 184.000 F. La somme de 56.000 F de différence est celle formée par de simples ouvriers que le Sieur Dubournial n'a pu réunir parce qu'ils sont absents ou dispersés et que leur nombre s'élève à plusieurs centaines.

Les signataires de la délibération consentent :

1.

qu'il soit attribué en privilège au Sieur Dubournial un secours extra­ordinaire de 2.000 F pour lui rem­placer l'absolu nécessaire que les évènements de la guerre lui ont détruit.

2.

que le secours alimentaire dont il jouit depuis le 1 er février 1814 soit porté à 200 F par mois pendant 6 mois à compter du 1 er octobre courant.

'3. qu'il soit payé à M. Jacob, Expert du Sieur Dubournial, une somme de

1 .500 F à compter sur ses hono­raires.

Un arrêté du Conseil de Préfecture, en date du 27 mai 1816 est étudié le 25 juillet 1817 par les Membres de la Commission des Ponts et Chaussées formée de MM. Tarte rapporteur, Bruyère et Bérigny, chargés par M. le Directeur Général d'examiner la liqui­dation du Sieur Dubournial, adjudi­cataire évincé du Pont de Sèvres.

Le 19 juin 1810, époque de l'éviction de l'entrepreneur il est établi que, déduction faite des payements de toute nature, le Sieur Dubournial était réellement en avance à cette époque d'une somme de 68.099,60 F, tandis qu'on ne pouvait exiger de lui qu'une avance de 30.386,21 F mais, sur ce point délicat, tous les Membres de la Commission n'ont pas partagé la même manière de voir. On aurait dû, au moment de l'éviction, établir un décompte légal dans lequel les 1ngé­nieurs n'avaient pas le pouvoir de faire entrer divers objets de dépense tels que les déblais de carrière, les approvIsionnements de matériaux douteux et autres articles dont l'entre­preneur n'a pu être admis à compter qu'après son éviction; mais, il a été répondu que, même dans cette hypo­thèse, lorsque l'on a provoqué l'évic­tion il eût été convenable d'indiquer à l'Administration au moins pour mé­moire et par aperçu, la valeur de ces dépenses dont le remboursement, non exigible alors, le deviendrait par le seul fait de l'éviction; dans ce sens la Commission reconnaît que le dé­compte rédigé par M. Cahouet le 19 juin 1810 est juste.

Au surplus, ce décompte devient indifférent, puisque le Conseil de Préfecture a débouté le Sieur Dubour­niai de toute demande en indemnité pour cause de son éviction et que, d'ailleurs, ce n'est pas sur ce décompte fait à cette époque que la liquidation sera établie, mais bien sur celui dont il va être parlé.

M. Cahouet estime qu'il reste dû au Sieur Dubournial pour solde de tout compte : 86.299,38 F. Somme fina­lement acceptée par écrit par l'entre­preneur évincé, mais, concernant la restitution de son matériel envahi indûment sans inventaire préalable, qu'il estime à 152.784 F, il émet une réserve et termine sa lettre de la façon suivante:

« accepte le décompte sous la réserve de se pourvoir par-devant qui de droit (à défaut de conciliation) contre le jugement du Conseil de Préfecture en ce qui concerne les restitutions en indemnité et les dommages et intérêts sur lesquels il n'a pas pro­noncé ou mal jugé. »

Cette fin de lettre, pleine de sous­entendus, n'a pas manqué d'attirer l'attention des Membres de la Commis­sion. Aussi, décident-ils :

1.

D'adopter les conclusions du rap­port de M. l'Inspecteur de la 1 re Di­vision en date du 23 octobre 1816,

2.

d'accorder en sus au Sieur Dubour­niai, à titre de secours extraordinaire, la somme de 4.000 F, dans le cas seulement où cet entrepreneur, en acceptant sa liquidation et en adhérant sans réserve au jugement du Conseil de préfecture, renon­cerait formellement à toute de­mande en indemnité pour éviction, pour restitution d'objets envahis ou pour toute autre cause générale­ment quelconque.

Dès le 31 janvier 1817, le Conseil émet un avis, signalant que des affaires dans le genre de celle du Sieur Dubournial, mettent l'Adminis­tration en difficulté. Étant entendu que les entrepreneurs qui traitent avec l'administration sont soumis aux règles des entrepreneurs des travaux publics, l'Administration ne peut agir de même si elle traite avec des particuliers qui peuvent bénéficier d'indemnités dans le cas d'occupation ou lésion de propriété.

On peut croire que l'ex-entrepreneur en a terminé avec son règlement de solde de tout compte! Non! le 27 mars 1817 M. Chabrol exige de connaître la liste des ouvriers et des fournisseurs créanciers du Sieur Du­bournial, afin de garantir leurs privi­lèges.

M. Saint-Jacques, ancien caissier de l'entrepreneur, demeurant rue Saint­Honoré vis-à-vis de la rue de la Sour­dière, à l'imprimerie de Mme Moreau, devra en dresser la liste. L'Administra­tion vérifiera la véracité des pièces et témoignages présentés par les créan­ciers qui se présenteront.

Mai 1817

Le 13 mai 1817, M. Cahouet rappelle que par Décret du 17 juillet 1808 qui ordonne la construction d'un pont en pierre sur la Seine à Sèvres, il est prescrit que ce pont et la route à ses abords seront sur une même ligne droite, depuis le hameau du Point du Jour, jusqu'à la traversée de Sèvres, vis-à-vis de la poste aux Chevaux.

Cette direction fait traverser l'extré­mité du Parc de Saint-Cloud et en isole une partie qu'il était indispen­sable d'abandonner.

Le 13 janvier 1815, M. le Directeur Général demande un projet pour raccorder les remblais avec le sol du Parc de Saint-Cloud, qui est à 5,33 m en contrebas du niveau du pavé de la culée du pont, seule partie sur profil général qui reste à discuter.

Dans tous les projets proposés par

M. l'Ingénieur Ordinaire, les chemins de halage ont la même disposition. Ils font à l'amont un angle obtus et à l'aval un angle aigu avec la direction du pont, ce qui, indépendamment du mauvais effet, a l'inconvénient de diriger le courant obliquement à la direction des piles.

Le principal motif qui a déterminé

M. l'Ingénieur Ordinaire à adopter ces positions, est le désir de conserver un abreuvoir qui sert à la caserne de cavalerie établie à Sèvres. M. l'Ingé­nieur en Chef observe avec raison que le motif lui paraît insuffisant; que cet abreuvoir, placé immédiatement à l'embouchure du Ru de Sèvres (le Ru de Marivel) reçoit tous les immon­dices de ce bourg qui rendent les eaux bourbeuses et malsaines, il le sup­prime et propose de le reconstruire au-dessus des anciens ponts; d'éta­blir les chemins de halage perpendi­culairement à l'axe du pont ainsi que c'est l'usage, et de donner au chemin de Sèvres à Saint-Cloud, et à la rue de l'Abreuvoir, les dispositions indiquées par plans.

L'abreuvoir qu'on propose de sup­primer est nécessaire, il faut donc le reconstruire dans un autre empla­cement; il ne peut être placé à l'aval du nouveau pont, ni entre ce pont et les anciens ponts, sans inter­rompre les chemins de halage d'une manière nuisible à la navigation et sans gêner le port de Sèvres; placé immédiatement au-dessus des an­ciens ponts il n'aura d'autre incon­vénient que d'être un peu plus éloigné de la caserne, ce qui n'en est pas un. Le nouveau pont de Sèvres et la route à ses abords devant être construits sur une même ligne droite exigent le sacrifice de la portion du Parc de Saint-Cloud qui en est nécessai­rement séparée par cette disposition, et il restera entre la nouvelle route et l'ancienne traverse une place vague et irrégulière.

Chaque idée de projet est analysée. On sait que le bourg de Sèvres reçoit journellement un nombre très consi­dérable de voitures qui s'y arrêtent pour s'y rafraîchir, la circulation y est très active dans tous les temps et beaucoup plus encore pendant les fêtes de Saint-Cloud et le deviendra bièn -plus encore pendant le temps que sa Majesté passera au palais de Versailles.

Comme il n'y a pas dans Sèvres d'emplacement où l'on puisse sta­tionner on propose de supprimer les gazons et les plantations projetés sur la place triangulaire comprise entre le Parc de Saint-Cloud et l'ancienne traverse de Sèvres; de faire de cet espace une place publique pavée, d'aliéner l'emplacement triangulaire qu'on propose de planter en quin­conce.

Choix de la qualité des pierres à employer en 1817 pour l'achèvement de la corniche et des parapets du nouveau pont de Sèvres

Le pont, selon les projets doit être construit entièrement en pierre de Saillancourt, au-dessus du plan des naissances.

Cette pierre est une agrégation de grains de sable plus ou moins gros réunis par un ciment dont la nature détermine la dureté et la durée de la pierre, seules qualités qui intéressent les constructeurs.

Si le ciment est formé par l'infiltra­tion de carbonate calcaire pur, la pierre est dure, sonore, absorbe peu d'eau et ne perd point ses qualités lorsqu'elle est humectée, parce qu'au­cune de ses parties ne se combine avec l'eau. Elle offre alors le plus de chance de durée possible. Si, au contraire, le ciment est formé en grande partie des dépôts de matière argileuse, la pierre tombe en pous­sière sous la pioche; quelquefois cependant elle peut encore être sonore et éclater sous le marteau pourvu qu'elle soit bien sèche; mais en la mouillant elle absorbe une quantité d'eau sept à huit fois plus considérable que la bonne pierre et perd alors toute sonorité parce que les parties argi­leuses sont entrées en combinaison avec l'eau. En se desséchant de nou­veau, elle reprend un peu de dureté mais ces dessiccations successives donnent lieu à des retraits de la ma­tière argileuse et à la désunion des parties; aussi les pierres se détruisent­elles assez promptement à l'air ainsi qu'on peut le reconnaître dans les chantiers du Pont de Sèvres (appro­

visionnements faits par le Sieur Du­bournial), au pont de Poissy et au pont de Neuilly lui-même où l'on a employé un petit nombre de maté­riaux de cette espèce.

A Saillancourt, l'exploitation se fait à ciel découvert après avoir enlevé 11 à 12 mètres de calcaire marneux et la pierre se présente alors en masse de quatre à cinq mètres de hauteur, sans couches horizontales sensibles; seulement cette masse est naturelle­ment divisée en gros blocs par des fissures à peu près verticales aux­quelles les ouvriers donnent le nom de filières. Dans toutes les parties d'un même bloc la qualité du ciment et la dureté de la pierre ne sont pas semblables, mais les différences sont beaucoup sensibles d'un bloc à l'autre et quelquefois, après avoir tiré long­temps de la pierre dure, on rencontre tout à coup une filière au-delà de laquelle la masse ne peut plus être exploitée à cause du défaut d'adhé­rence des parties, et les dépenses faites pour la découvrir le sont alors

en pure perte.

Pour obvier à cet inconvénient, on a « alloué}) dans les détails des prix sur lesquels il y aurait eu plus d'un quart de bénéfice s'il avait toujours été rencontré de bonnes veines.

Malgré ces précautions, on s'est laissé entraîner à exploiter pendant l'hiver de 1813 à 1814 une masse tendre et sans qualité, ce qui a donné lieu lors de l'emploi des matériaux en 1814, à des discussions dans lesquelles M. l'Ingénieur en Chef et

M. l'Inspecteur Divisionnaire sont

intervenus. Comme il arrive toujours en pareil cas, on a fini par employer les moins mauvais de ces matériaux, mais les Ingénieurs pensèrent dès ce moment qu'il conviendrait de construire la corniche et les parapets avec la pierre de Chérans qu'on emploie au pont de Rouen et qui, formée aussi de sable aggloméré présente plus uni­formément la dureté et les qualités de la meilleure pierre de Saillancourt. En 1815, la carrière de Saillancourt s'améliora et en 1816 on trouva une veine de première qualité, dans la­quelle on a tiré toute la corniche d'amont et l'assise des modillons d'aval, qui ont été construites pendant la campagne.

Il ne restait plus à extraire à la fin de 1816 que l'assise de cimaise d'aval et la totalité des parapets; mais on n'a plus été aussi heureux dans les exploitations de l'hiver dernier.

Le Fondé de Pouvoirs de l'entre­preneur voulant éviter les frais de transport d'une assez grande quantité de pierres qui n'auraient pas été admises à Sèvres a invité le 3 avril1817 l'Ingénieur Ordinaire à venir examiner les matériaux sur le port de Meulan.

M. Vigoureux s'y est rendu le 8 du même mois et il a reconnu que sur 130 morceaux alors déposés au lieu de l'embarquement, 48 étaient tout à fait inadmissibles et les autres de qualité inférieure à celle qu'on aurait désirée pour des parties aussi exposées qu'une cimaise et des parapets, que l'inspection des masses restant à exploiter n'annonçait aucune amé­lioration.

L'exploitation a été continuée pendant le mois d'avril et d'après l'état fourni par le Sieur Lacour, fondé de pouvoir du Sieur Galland, la cimaise d'aval est entièrement tirée au 1er mai 353,70 mètres linéaires de la 1re assise des parapets (la longueur totale de cette assise est de 481 mètres.)

On ne peut donc, dans cet état des choses, proposer de changement que pour l'assise supérieure des parapets, mais l'Ingénieur Ordinaire, M. Vigou­reux est d'avis qu'il convient:

de défendre sans délai à l'entre­preneur de maçonnerie du Pont de Sèvres de commencer à la carrière de Saillancourt aucune exploi­tation pour l'extraction de l'assise supérieure des parapets du Pont de Sèvres,

de l'inviter à présenter une sou­mission pour la fourniture de cette assise en pierre de Chérans.

M.

Lamande, Ingénieur en Chef, le 21 mai 1817 exprime clairement ses pensées. Il a eu l'occasion pendant la construction du pont de l'École mili­taire de reconnaître que les masses de la carrière de Saillancourt diffé­raient beaucoup entre elles. Les meil­leures disparaissaient chaque jour, sans qu'un indice permette d'espérer le retour à meilleure qualité. Cela lui a toujours fait douter de la possi­bilité pour cette carrière de fournir la totalité des besoins de la construction du pont de Sèvres. Être parvenu jus­qu'à l'assise supérieure des parapets lui semble une performance! Il spé­cifie bien que :

(( On a dans le cours des travaux (( rebuté une grosse quantité de ces (( pierres, ce qui a donné lieu à des (( discussions dont le résultat n'a pas {{ été à l'avantage du Gouvernement, (( car il a fallu payer en partie au Sieur (( Dubournial, ancien entrepreneur, des

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(( matériaux d'abord rejetés, qu'en­(( suite Messieurs les Architectes Ex­(( perts ont jugés admissibles, que (( cependant M. Becquey de Beaupré (( et M. Vigoureux, comme Ingénieurs (( et Constructeurs avaient en fait (( raison de ne pas recevoir et qui, (( en définitive, n'ont pu être em­(( ployés. ))

De son étude il ressort que l'on pourra compléter avec ces pierres de Sail­lancourt. la corniche et la 1re assise du parapet, mais qu'il sera impossible de faire en même pierre l'assise du bahut sans s'exposer à employer des matériaux douteux qui amèneront des réclamations de la part de l'entre­preneur à qui on a imposé cette pierre de Saillancourt. Il conseille les pierres de Chérans ou de Vétheuil qu'il a mises à l'épreuve au pont de Rouen et de l'École militaire. Le prix ne doit pas en être beaucoup plus élevé:

M. Vigoureux a rédigé un détail qui laisse apparaître que l'augmentation ne sera que de 1.652,97 F sur 25.326,49 F, en conséquence il donne ordre à l'entrepreneur d'arrêter les travaux d'exploitation de la carrière de Saillancourt. pour l'assise du bahut l'extraction n'est pas commencée, cette mesure ne lui causera aucun préjudice.

Cette décision est appuyée le 13 juin 1817 par M. Cahouet. dans un exposé approuvé le 5 juillet de la même année par le Conseil Général des Ponts et Chaussées, décision défini­tivement renforcée le 5 août 1817 par l'ordre du Directeur Général des Ponts et Chaussées à M. Lamande, Ingénieur en Chef de Département de la Seine, le prévenant qu'il autorise le Préfet de la Seine à faire construire en pierre dure de Vétheuil l'assise du bahut des parapets du pont, en lui remettant un état de la situation de la carrière de Saillancourt au 1er mai 1817.

Évincé le Sieur Dubournial a été remplacé par le Sieur Galland, mais ce dernier se refuse de fournir la pierre de Vétheuil.

C'est la soumission du Sieur Gignoux entrepreneur des Ponts et Chaussées demeurant à Paris rue de Lancry nO 10 qui est acceptée le 11 octobre 1817 pour la fourniture des pierres de Vétheuil qui serviront à la construc­tion de l'assise et des parapets du pont. pour la somme de 25.326,49 F prix de l'estimation approuvée dès le 5 août 1817 par le Directeur des Ponts et Chaussées.

L'Entrepreneur Galland ne veut pas endosser à lui seul les clauses du contrat qui ont finalement été remplies par plusieurs entrepreneurs. Aussi le 13 novembre 1817 il intervient près du Directeur des Ponts et Chaus­sées. Ses travaux sont terminés depuis plus d'un mois, il ne veut pas attendre un an comme indiqué dans une des clauses du contrat pour que réception en soit faite :

(( car il eut été impossible de rendre (( responsable l'entrepreneur de la (( maçonnerie qui construirait sur une (( fondation établie par un autre entre­(( preneur que lui, d'une construction (( dont le système porte tout entier (( sur des pieux battus par un premier (( entrepreneur. ))

L'entrepreneur Galland poursuit son exposé:

(( Permettez M. le Directeur Général,

(( que je joigne une autre observation

(( qui détruira tous les doutes qu'on

(( aurait pu vous donner ainsi que

(( toute garantie de ma part. C'est

(( qu'à l'approche des Alliés en 1815,

(( on fit brûler les cintres qui suppor­

(( taient l'arche du côté de Paris qui

(( était presque terminée et dont

(( l'écroulement a dû nécessairement

(( ébranler une portion de la cons­

(( truction. Mais tout ce qui doit

(( détruire ce qui pourrait rester de

(( prétentions de garantie quand même

(( on aurait droit d'en avoir contre

(( moi, c'est qu'on a miné deux fois

(( la quatrième arche pour parvenir à

(( la faire sauter. Je le répète, cette

(( circonstance majeure suffirait pour

(( me dégager de toute garantie. Je

(( pourrais encore ajouter, M. le Direc­

(( teur Général, que la construction du

(( pont de Sèvres devait être terminée

(( dans trois ans et que la pénurie des

(( fonds et les malheurs qui sont

(( vènus accabler la France les ont

(( prolongés pendant 6 ans, ce qui m'a

(( par conséquent tenu en avance de

(( 40.000 F pendant trois ans de plus

(( que je ne le devais, et ont exposé

(( également pendant trois ans de plus

(( mes outils aux injures du temps. On

(( peut évaluer ces équipages à la

(( somme de 50.000 F et dans ces trois

(( années ils ont dépéri d'un cinquième

(( de plus qu'ils ne l'auraient été si

(( j'eusse fini dans les trois premières

(( années.

(( Je dois dire aussi que mes propriétés

(( ont été grevées de 40.000 F d'hypo­

(( thèques pendant 6 ans au lieu de

(( trois ans.

(( Cette garantie qu'on voudrait m'ap­

(( pliquer aujourd'hui et qui m'est

(( absolument étrangère serait donc, (( M. le Directeur Général, pour m'in­(( demniser de n'avoir jamais inter­(( rompu mes travaux, de quelque (( manière même qu'on m'ait payé (à (( la vérité sous la réserve de réclamer (( pour les pertes que j'ai éprouvées), (( pour avoir donné 3 ans de mon (( temps de plus que je ne devais, pour (( avoir perdu /'intérêt de 40.000 F dont (( j'ai toujours été en avance, sans (( compter celles journalières dont j'ai (( également perdu /'intérêt, sans égard (( pour le cinquième de la perte que (( j'ai faite sur les équipages, sans (( égard pour les 3 ans qui ont frappé (( mes propriétés d'opposition : tels (( seraient cependant les résultats que (( je devais attendre si la proposition (( de M. /'Ingénieur pouvait être (( annulée.

(( Qu'il me soit permis d'ajouter à la (( demande qui vous est soumise (( aujourd'hui, deux autres qui sont de (( moindre importance mais qui sont (( de toute justice : ce serait, M. le (( Directeur Général, d'ordonner le (( remboursement au même prix qu'il (( m'a été cédé par le Gouvernement (( de la pierre de roche et libages fai­(( sant partie de celle que j'ai reçue du (( Gouvernement et qui devait être (( employée dans les trottoirs du Pont, (( dont la construction vient d'être (( ordonnée en pierre de granit; cette (( même pierre de roche et de libage (( restera au compte du Gouverne­(( ment comme elle l'était précédem­(( ment.

(( Qu'il vous plaise encore d'ordonner (( que les quatre doubles-chèvres qui (( m'ont été cédées par le Gouverne­(( ment à raison de 1.400 F l'une (( soient estimées par MM. les Ingé­(( nie urs d'après la jouissance que j'en (( ai eue, pour m'être payées d'après (( cette estimation, et lesdites chèvres (( rentrées dans les magasins du (( Gouvernement, ces machines n'étant (( propres qu'à la construction de «pnnts. 1/ m'est donc impossible, (( sans cela, d'en tirer aucun parti.

(( Enfin, j'ose encore vous demander, (( M. le Directeur Général, de vouloir (( bien inviter M. /'Inspecteur Divi­(( sionnaire et M. /'Ingénieur en Chef (( de se transporter le plus tôt possible (( sur les travaux du pont de Sèvres (( pour vérifier que les précautions (( qu'a prises et que compte prendre (( M. Vigoureux sont suffisantes pour (( retirer les eaux de dessous les (( voûtes et particulièrement sous (( celles de halages, et garantir les (( joints, et pour s'assurer si la chape (( est suffisamment couverte pour ne (( pas craindre les gelées que nous (( avons à redouter cet hiver. ))

Dès cette lettre du 13 novembre 1817, l'entrepreneur entre en conflit ouvert direct avec M. Vigoureux, Ingénieur Ordinaire, et s'en explique par écrit le 3 janvier 1818.

(( Je crois inutile de prolonger mes (( observations pour justifier qu'on n'a (( plus aucune garantie à exiger de (( moi, pour prouver que la justice (( doit me délivrer un certificat défi­(( nitif et que la chappe ne m'appar­(( tient plus par la possession qu'en a (( pris M. /'Ingénieur Ordinaire.

(( 1/ est pénible pour le Sieur Galland (( d'être obligé de dire que les connais­(( sances de M. /'Ingénieur Vigoureux (( laissent quelque chose à désirer (( surtout pour juger de la qualité des (( matériaux, puisqu'il lui est arrivé (( plusieurs fois qu'après avoir vérifié (( et sondé de la pierre à grands coups (( de pioche, l'avoir reçue sur les (( bateaux et ensuite vouloir la rejeter, (( notamment le 11 septembre 1814, (( sans savoir pourquoi et comment, (( il en rebutait à l'entrepreneur pour (( plus de 45.000 F, ce qui força ce (( dernier à avoir recours, le 13 du (( même mois à la justice de M. Votre (( Prédécesseur qui ordonna de suite (( que cette quantité effrayante de (( pierre rebutée serait visitée et exa­(( minée par /'Inspecteur Division­(( naire et par M. Becquey, alors (( Ingénieur en Chef Directeur. Cette (( visite eut lieu le 16, et la pierre fut (( reconnue de qualité à être employée; (( pour cette fois l'entrepreneur ne fut (( pas sacrifié aux désirs de M. Vigou­(( reux. Cette expérience ne lui suffit (( pas quoiqu'on eut déposé dans son (( bureau des échantillons pour pré­(( venir toutes difficultés ultérieures. (( Elle ne lui servit qu'à changer de (( tactique. Au lieu de la rejeter en (( masse il se réduisit à rebuter par (( 6 à 8 morceaux en 4 fois, et 3 fois (( M. Lamande, Ingénieur en Chef (( actuel du Département de la Seine, (( fut sollicité de la part de l'entre­(( preneur de venir visiter ces pierres (( ce qu'il voulut bien faire. Dans ces (( trois visites les pierres rebutées (( par M. /'Ingénieur Ordinaire furent (( reconnues de qualité à être em­(( ployées et elles le furent. ))

(( Pendant l'exécution des travaux (( de 1817 et surtout à la fin, M. /'In­(( génieur Ordinaire poussa encore (( plus loin son exigence. En l'absence (( de M. /'Ingénieur en Chef, qui alors (( ne pouvait plus vérifier les plaintes (( de l'entrepreneur, il exigea de ce (( dernier qu'il fit débiter et détailler (( toute la pierre qui était sur le (( chantier quoique la garantie fût (( beaucoup au-dessus des besoins (( pour compléter les ouvrages dont (( il était chargé.

(( L'entrepreneur a donc perdu non (( seulement le déchet sur cette pierre (( restante, mais encore la taille, perte (( qui s'élève à trois ou quatre mille (( francs. Le Sieur Galland observe en (( outre que la retaille des pierres (( écornées par les conducteurs de (( M. /'Ingénieur Ordinaire d'après ses (( ordres sur celles rejetées par lui (( en 1814 et reconnues de qualité (( à être employées par M. /'Inspecteur (( Divisionnaire et M. /'Ingénieur en (( Chef, a coûté 1800 F y compris le (( déchet, c'est pourquoi il ose solli­(( citer de votre bienveillance M. le (( Directeur Général, d'ordonner que (( cette somme lui soit remboursée. ))

Tout ceci n'empêche pas M. Vigou­reux de ne céder sur aucun point. Il reste sur ses positions.

C'est un échange de correspondançes qui évoquent admirablement bien le climat de l'époque quant à la cons­truction d'une œuvre comme celle d'un pont en pierres, édifice vital pour l'époque et les générations à venir.

Le 20 novembre 1817, soit une semaine à peine après la lettre de l'entrepreneur, un rapport de l'Ingé­nieur en Chef de la Seine M. Lamande renverse la position. Cette lettre dit en substance :

(( La chape en ciment destinée à (( empêcher les infiltrations des eaux (( pluviales dans les voûtes du Pont (( de Sèvres a été exécutée en 1817 (( par le Sieur Galland, elle a été ter­(( minée vers le 15 septembre par le (( Sieur Galland entrepreneur de ma­(( çonnerie. (( Le ciment qui, aux termes du devis (( (article 25) devait être formé entiè­(( rement de tuilots de Bourgogne (( était souvent mêlé de briques ou de (( tuiles du pays, et la chaux maigre, (( par conséquent difficile à éteindre, (( contenait beaucoup trop de biscuits. (( Les Ingénieurs et conducteurs fai­(( saient rejeter les plus gros toutes les (( fois qu'ils les apercevaient; mais, (( n'étant pas suffisamment secondés (( par les ouvriers et commis de (( l'entreprise, les mortiers renfermaient (( toujours une grande quantité de (( petits morceaux de chaux vive (( qui en s'éteignant à la longue (( produisaient des boursouflures qu'il (( fallait faire disparaÎtre après coup

(( en faisant des trous dans la chape ((pour enlever les grains de chaux et en (( les remplissant avec du mortier frais (( qui prenait difficilement corps avec (( l'ancien. (( D'un autre côté, la chape s'exé­(( cutant par bandes transversales de (( 80 cm de largeur environ, il fallait (( pour éviter les scissions à chaque (( reprise des précautions que les (( Ingénieurs et Conducteurs pres­(( crivaient sans cesse et jamais avec (( un succès complet parce qu'ils (( trouvaient toujours de la résistance (( dans le désir que les agents de (( l'entrepreneur avaient d'économiser (( le temps et les dépenses.

(( Dès lors on put craindre qu'il ne se (( formât par la suite des fissures dan­(( gereuses et malheureusement les (( effets ont justifié ces craintes.

(( En visitant les voûtes, hier 24 no­(( vembre, il a été reconnu que les (( eaux ont filtré à travers la chape (( au-dessus des 1re, 2 e, 3 e, 4 e, (( 7e, 8e, et g e arches, les 5e et 6e sont (( les seules entièrement saines; et le (( mal est le plus considérable à la (( voûte de l'arche de halage rive (( gauche sous laquelle les eaux (( coulaient par torrents lors des (( dernières pluies, en traversant les (( rangs de voussoirs supérieurs.

(( Ce qu'il y a de singulier, c'est qu'au (( moment où l'Ingénieur examinait (( ces malfaçons et se disposait à les (( constater, il a recu une longue (( réclamation pour laquelle l'entre­(( preneur demande à être dispensé (( du délai d'usage pour la garantie (( de la bonne exécution des ouvrages (( et demande que M. l'Ingénieur en (( Chef et M. /'Inspecteur Divisionnaire (( s'assurent par une visite si les (( précautions qu'a prises et que (( compte prendre l'Inspecteur Divi­(( sionnaire M. Vigoureux sont suffi­(( santes pour retirer les eaux de·· (( dessus les voûtes et particulière­(( ment sur celles de halage, et (( garantir les joints et pour s'assu­(( rer si la chape est suffisamment (( couverte pour ne pas craindre les (( gelées.

(( Pour retirer les eaux de dessus les (( voûtes, M. /'Ingénieur a fait cons­(( truire une chape en pente d'un (( centimètre par mètre vers les culées, (( conformément aux dispositions or­(( données à cet égard par M. le (( Directeur Général des Ponts et (( Chaussées et dont /'initiative n'ap­(( partient pas aux Ingénieurs du (( Département, mais au Conseil lui­(( même. Dans la crainte des gelées il

(( a fait recouvrir cette chape d'une (( couche de sable de 25 centimètres (( d'épaisseur, et les eaux n'y séjour­(( nent jamais; seulement ce sable (( reste constamment humide, ce qui (( est favorable à la solidité des (( mortiers de ciment. (( Quant au Sieur Galland, il devait (( faire une bonne chape et celle (( qu'il a exécutée est imparfaite (( puisque, sans que les voûtes aient (( éprouvé de tassements, cette chape (( laisse filtrer les eaux en plusieurs (( points. (( 1/ doit donc la réparer et ce n'est (( seulement qu'après cette opération (( et de nouvelles épreuves plus satis­(( faisantes que l'Ingénieur soussigné (( pourra sans se compromettre signer (( un certificat de réception. (( L'avancement de la saison et la (( crainte de gelées prochaines ne (( permettent pas de s'occuper de ces (( réparations avant le printemps pro­(( chain, mais il importait de constater (( les faits et il conviendrait que ( M... l'Ir)génieur en Chef donnât dès (( ce moment les ordres convenables (( à l'entrepreneur afin de prendre (( date et de lui ôter d'avance les (( moyens d'attribuer par la suite aux (( gelées qui ne sont pas encore (( venues des dégradations qui exis­(( tent en ce moment. ))

Le 20-11-1817 signé Vigoureux. L'Ingénieur Ordinaire M. Vigoureux, réaffirme sa position par lettre du 6 janvier 1818, estime que la chape établie par l'entrepreneur Galland n'est pas conforme et doit être par lui réparée et que ce n'est qu'après cette opération et de nouvelles expé­riences plus satisfaisantes qu'il pourra, sans se compromettre, signer un certificat de réception.

Le Conseil Général des Ponts et Chaussées, le 24 janvier 1818 adopte l'avis du rapporteur et stipule notam­ment, s'approchant en cela des désirs de l'entrepreneur, que : lorsque le Sieur Galland s'est chargé de la construction des maçonneries du Pont de Sèvres, le Gouvernement lui a cédé quatre doubles-chèvres à raison de

1.400 F l'une.

Ces chèvres sont encore en bon état et l'entrepreneur offre de les rétrocéder et qu'elles lui soient payées sur estimation des Ingénieurs.

M. l'Ingénieur en Chef et M. le Préfet estiment qu'il y a avantage à adopter les propositions de l'entrepreneur, que ces chèvres peuvent par la suite être utilement employées à la construc­tion du Pont de la Cité, puisqu'elles ne peuvent servir qu'à la construction de ponts.

La lutte se joue entre les Entrepreneurs et les Responsables des Ponts et Chaussées, elle est serrée, car, si les Ponts et Chaussées savent choisir leurs entrepreneurs, ceux-ci jouent de toutes les flèches de leurs arcs. L'Administration, si elle admet bien sûr, la nécessité de ce nouveau pont ne veut en prendre que la minorité des frais.

Dans son procès-verbal du 27 no­vembre 1817, elle arrête ce qui suit :

• La portion de terrain à partir de l'entrée actuelle du Parc, jusqu'à la route et la place projetées devant la nouvelle entrée, resteront fair·e partie des Domaines de la Cou­ronne, et l'Administration des Ponts et Chaussées fera à ses frais, dans cette portion de terrain, tous les remblais nécessaires pour avoir des pentes douces.

• Attendu l'observation qui a été faite par M. le Comte de Pradel, que l'Administration des Ponts et Chaussées ne paye rien pour la concession du terrain nécessaire à l'exécution de son projet. elle demeure chargée des frais de la construction du mur de clôture le long de la route, ainsi que du mur de soutènement en retour et bordant le fossé du parc, après toutefois que l'Ingénieur en Chef se sera concerté avec l'Architecte du Château de Saint-Cloud, pour les dimensions et le tracé de ce mur.

Suit une discussion de détail concer­nant le Parc de Saint-Cloud lui-même. Le Directeur Général, le 14 décembre 1817, en ce qui concerne l'ouverture de la route dans le Parc de Saint­Cloud demande des renseignements à M. Lamande, Ingénieur en Chef du Département de la Seine.

Il veut que l'on détermine quelles seront les charges exactes des diffé­rentes parties en cause, et fait remar­quer à M. le Préfet qu'il est également nécessaire de savoir si le Sieur Gatine veut céder sa propriété dont une partie est indispensable pour l'ouver­ture de la route et l'autre partie qui est demandée par l'Intendance des Bâtiments, que, s'il y consent il fau­drait de suite procéder à l'expertise contradictoire de cette propriété et dresser séparément l'estimation des 2 parties dans le procès-verbal des experts, qu'enfin s'il ne consent pas, on doit suivre les dispositions de la Loi du 8-3-1810 pour l'envoi en possession de terrain et le règlement de l'indemnité à laquelle ce particulier peut avoir droit.

L'urgence des travaux, pour occuper la classe ouvrière et indigente pendant l'hiver exige qu'il soit apporté le moindre délai possible dans les me­sures à prendre.

Liquidation du Sieur Dubournial

Le 9 décembre 1817, M. Chabrol Préfet. annonce officiellement l'état des créances privilégiées de l'entre­prise du Sieur Dubournial :

1. Aux ouvriers du Pont

de Sèvres ....... 28.695,20 F

2. Aux ouvriers de la

carrière de Saillan­

court pour complé­

ment ........... 7.533,52 F

3. Aux employés et

commis. . . . . . . . . . 9.330,96 F

4.

Aux tâcherons. . . .. 19.626,41 F

5.

Aux fournisseurs de

matériaux. . . . . . .. 28.579,56 F soit une somme égale à 93.765,65 F

M. Chabrol fait remarquer que la somme due au Sieur Dubournial étant de 86.299,38 F et le montant des créances privilégiées s'élevant à 93.765,65 F, ces dernières excèdent de 7.466,27 F ce qui revient à l'entre­preneur.

M. Chabrol insiste pour que ces comptes soient liquidés au plus vite, car les ouvriers et fournisseurs, depuis six années en attendent le paiement. Avis du Conseil Spécial en date du 16 mai 1818, suite au procès-verbal du 27 novembre 1817 établi par:

M. Lamande, Ingénieur des Ponts et Chaussées et M. Le Père, Architecte du Roi.

La route à construire aux abords du Pont de Sèvres exige le sacrifice d'une partie du Parc de Saint-Cloud. On décide d'établir une pente d'envi­ron 2 centimètres par mètre jusqu'à deux cents mètres de distance, à partir de l'axe de la route projetée. Le Ministère de la Maison du Roi, pour les terrains qu'elle va céder réclame: 50.852 F. On estime la valeur de la clôture du Parc à 210.836,45 F.

Le devis du Pont de Sèvres

Les 22 mars et 4 avril 1818, dans un exposé, il est reparlé des assertions du Sieur Galland concernant le délai d'un an (Article 132 du devis) pour la réception des travaux de la chape terminés dans le courant d'octobre 1817. Cette chape laissant filtrer l'eau en plusieurs endroits, il faut maintenir le délai d'un an pour s'assurer de sa solidité.

Le plus grand mal vient de la fabri­cation des mortiers.

Les raccordements des diverses bandes transversales qui forment la chape sont toujours exécutés avec négligence.

L'exposé dit en outre

« quant aux circonstances difficiles et atténuantes dans lesquelles le Sieur Galland s'est trouvé en l'an 1813 et suivantes aux efforts qu'il a faifj::mur les vaincre, aux avances considérables dans lesquelles il a consenti à se mettre, sans connaître l'époque précise à laquelle il en serait remboursé, les pertes qu'il a faites sur les valeurs qu'il a reçues en payement, et par la pro­longation de son entreprise bien au-delà du terme fixé, au zèle à l'activité et à l'intelligence qu'il a constamment déployés dans l'exé­cution de ce grand ouvrage, nous croyons avec M. le Préfet et M. l'Ingé­nieur en Chef, que ces motifs doivent être pris en grande considération et qu'ils doivent déterminer sur M. le Directeur Général à se relâcher de la rigueur littérale de l'Article 132 du devis, si surtout les défectuosités qu'on pourrait reprocher à cette chape, après l'examen qui en sera fait (en avril 1818) n'étaient pas de nature à compromettre la solidité de la cons­truction.

Il est alors fait mention d'une lettre adressée au Sieur Galland par M. Bec­quey de Beaupré, alors Ingénieur en Chef du Département de la Seine, datée du 4 août 1815. Cet Ingénieur instruit le Sieur Galland du désir de

M. le Directeur Général que les deux arches du nouveau Pont de Sèvres, détruites par suite des opérations militaires, soient reconstruites pendant la campagne et de l'assurer que cette Administration accordera autant de fonds qu'il lui sera possible, pour soutenir le zèle de l'entrepreneur.

L'Ingénieur en Chef établit le montant des dépenses à environ 123.017,52 F.

Or, le 17 juin 1811, l'adjudication totale pour l'ensemble de la fabri­cation du pont était de 1.400.000 F.

Réception définitive de la maçonnerie du Pont de Sèvres

C'est le mercredi 24 avril 1818 que l'Inspecteur de la première Division et l'Ingénieur en Chef du Département de la Seine, accompagnés de M. Gal­land entrepreneur, se sont rendus sur les lieux.

Ils ont procédé de la façon suivante:

1.

Visite de la chape du pont pour reconnaître les réparations qu'elle exige et dans le cas où elle aurait éprouvé des dommages en consta­ter les causes. A cet effet, ils ont fait enlever sur toute la longueur du pont et sur 1,50 m de largeur, la couche de 50 cm de sable qui la préservait.

2.

Examen des ragréments, rejoin­toiements et autres travaux exé­cutés par le Sieur Galland.

3.

Estimation des chèvres et des matériaux qu'aux termes de la déci­sion de M. le Directeur Général du 7.2.1818, doivent être repris à l'entrepreneur par l'Administration.

La visite terminée, accord est conclu que les ouvrages de maçonnerie exécutés par le Sieur Galland, peuvent être considérés comme en état de réception, à l'exception:

1.

de la portion de chape comprise au-dessus de l'arche de halage, rive gauche.

2.

de quelques rejointoiements dans les dernières retombées de l'arche de halage rive droite.

Le tout évalué à 214,50 m qui, à raison de 8 F le mètre carré, prix de l'adjudication, fait 1.716 francs. S'y ajoutent les rejointoiements pour 284 francs. La dépense totale à faire peut être évaluée à 2.000 francs.

Après avoir achevé la visite du pont, les Commissaires font un examen des quatre chèvres qui ont servi à la pose des voûtes du pont. Ces équipages sont encore en assez bon état, et après quelques réparations pourront servir à des constructions nouvelles. A la première construction, chaque chèvre a coûté 2.379,72 F et a été cédée au Sieur Galland en 1811 à raison de 1.400 F. Les Commissaires estiment qu'elles peuvent être reprises par le Gouvernement pour la somme de 900 F chacune.

Il reste sur le chantier une quantité de pierres de Châtillon, propre à être employée dans les abords du pont, pour un prix total de 5.965,05 F.

L'Article 132 est donc annulé. Les travaux réceptionnés. La demande faite par le Sieur Galland pour obtenir le règlement de ses comptes et être dégagé de toute responsabilité dès à présent, moyennant une déduction de 2.000 F, montant de l'évaluation des ouvrages restant à faire pour mettre les travaux de maçonnerie en état de réception, peut être ac­ceptée.

Dès le 7 mai 1818 M. le Directeur des Ponts et Chaussées adresse une lettre à M. le Préfet de la Seine dans laquelle il dit estimer qu'il est juste de régler définitivement les comptes et d'accor­der à l'Entreprise Galland la main­levée des hypothèques sur ses pro­priétés pour garantie de son marché du nouveau Pont de Sèvres.

Pavage du Pont de Sèvres Comme l'exécution de la nouvelle route sur la rive droite est très avancée et qu'on est sur le point de commen­cer les remblais de la levée rive gauche, il convient de comprendre dans la même adjudication les pavages à exécuter aux abords du pont, c'est-à­dire ceux des chemins de halage et des nouvelles chaussées sur les deux rives, dans le prolongement de l'axe du pont. En vues d'économie, on a d'abord pensé confectionner la nouvelle chaus­sée de la rive droite, avec les pavés provenant de la route existante, mais, pendant cette période de translation, la circulation serait extrêmement gênée et même peut-être interrompue entre

Paris et Versailles.

Aussi, il a été proposé un parti moyen qui consiste à ne pas exécuter simul­tanément la totalité de cette nouvelle route dont la longueur depuis le Pont jusqu'à l'Avenue de la Reine près du Hameau du Point du Jour, est de 2.383 mètres. Partant du Pont on s'arrêtera à l'avenue des Princes, qui partage cette longueur en deux parties égales, et l'on construira cette première partie en pavés neufs, partie de 1.233 mètres. Cela terminé, livré au public on dispo­sera des matériaux de la première moitié de l'ancienne route, pour exécuter la deuxième partie de la nouvelle entre l'avenue des Princes et de la Reine. Tout cela ne peut être terminé que fin 1819, car la superficie totale des pavages en pavés neufs pour le pont, sans les trottoirs et les parties des routes aux abords est de 18.515,09 m équivalant à 315.000 pavés.

M. Vigoureux propose pour fourniture les carrières de la forêt de Marly, qui sont les plus voisines et dont les roches sont d'un grain plein et serré, mais faciles à tailler.

Les carrières appartiennent déjà à divers entrepreneurs des routes, mais le nombre de professionnels carriers de grès, est très limité dans les envi­rons de Paris, on est certain que l'approvisionnement nécessaire ne se fera qu'en deux ans si on ne prend qu'un seul entrepreneur.

L'adjudication doit donc être faite pour deux lots : le premier lot pour 101.771,76 F, le second pour 79.618 F. Soit au total

181.389 francs et 76 centimes. Aucun doute n'est possible la-dessus, l'esti­mation a été faite par M. Coste, Ingénieur de l'Arrondissement de Ver­sailles, sur des prix qui lui ont été communiqués par M. Bérigny, Ingé­nieur en Chef.

Partager l'adjudication, comme le sug­gère M. Vigoureux, apporte des garan­ties mais le 1 er mai 1818, M. Lamande précise que, si les raisons données par M. Vigoureux sont valables, il ne voit par contre aucun inconvénient à ce que les deux lots soient adjugés au même entrepreneur, s'il présente des moyens suffisants de solvabilité et de garantie.

M. Cahouet, dans l'exposé du 26 mai 1818 prend position contre l'adjudi­cation au même entrepreneur. Il fonde son opinion sur ce que les prix très élevés, que la masse d'ouvrage étant moins considérable, il se présentera un plus grand nombre de concurrents et qu'il lui paraît certain qu'un seul entrepreneur ne parviendrait pas à se procurer l'approvisionnement néces­saire en deux années.

M. l'Ingénieur en Chef, s'il reconnaît le bien fondé de cette opinion ne la partage pas.

De toutes façon les prix annoncés sont trop élevés, seule une concur­rence peut les ramener à ce qu'ils doivent être.

Adjudication du pavage du Pont de Sèvres

Des affiches sont apposées le 9 dé­cembre 1818 annonçant que le terme du délai donné pour déposer des premières soumissions au rabais de la somme de 79.618 francs, est fixé au 26 décembre.

La Commission des Ponts et Chaus­sées se réunit le 28 mai 1818. Deux soumissions lui sont proposées pour le premier lot seulement, aucune pour le second lot.

La 1re soumission, d'un Sieur Fossard Duthil demeurant à Paris abaisse le prix de 118 francs.

La 2e soumission, d'un Sieur Camus fils, également de Paris, l'abaisse de

3.618 F, ramenant donc le prix pour ce 1er lot à 76.000 F.

Se conformant à l'Article 6 de l'Arrêté du Gouvernement, il est rédigé une autre affiche, ne mentionnant que le prix de 76.000 F afin d'inviter le public à faire de nouvelles soumissions qui doivent être déposées avant le 15 jan­vier 1819.

Premier lot

Par lettre stipulée « très urgent », du 22 décembre 1818, le Directeur Géné­rai des Ponts et Chaussées, écrit à

M. le Baron d'André, Intendant des Domaines du Roi, pour confirmer que le Sieur Camus fils est bien adjudica­taire des travaux de pavage du nou­veau pont et de la route aux abords de ce pont, et que la forêt de Marly est confirmée pour la fourniture. Il prie le Baron d'André de bien vouloir donner des ordres le plus tôt possible pour que cet entrepreneur puisse exploiter les grès dont il a besoin pour l'exécution de ses travaux.

C'est donc le Sieur Camus fils qui l'emporte pour ce permier lot, les travaux sont estimés à 107.693,27 F, non compris 31.909,12 F de sommes à valoir pour indemnité de terrain et ses imprévus adjugés à 83.500 F.

Ainsi le rabais est de 24.193,27 F.

Le 15 décembre 1818, M. l'Ingénieur en Chef Lamande, s'adresse au Comte de Chabrol, Conseiller d'Etat et lui précise:

(( Deux affiches pour les travaux de (( pavage du Pont de Sèvres ont été (( apposées et il ne s'est présenté (( samedi dernier pour l'adjudication (( définitive que deux entrepreneurs (( pour le 1er lot, aucun pour le 2 e. La (( première affiche n'avait déjà pour (( celui-ci, donné lieu à aucune en­(( chère. J'ai dû chercher la cause qui (( écartait les concurrents. Elle n'est (( pas due à la modicité des prix du (( détail puisque le rabais fait par (( le Sieur Camus Fils entrepreneur (( du 1er lot est d'environ 1115e.

(( Mais il résulte des renseignements (( positifs que je me suis procurés, (( qu'elle ne peut être attribuée qu'à (( l'insuffisance des carrières de Marly, (( les seules indiquées au devis, et qui, (( même en faisant de nouvelles dé­(( couvertes et en y plaçant un plus (( grand nombre d'ouvriers, ne pour­(( ront qu'avec beaucoup de peine (( fournir dans le temps prescrit la ((,_quantité nécessaire au pavage du (( 1er lot. ))

M. Lamande propose que, pour le deuxième lot non encore adjugé, la fourniture puisse être faite en pavés des carrières d'Orsay, le pavé y est d'aussi bel échantillon et d'une aussi grande dureté que celui de la forêt de Marly. Cela ammènera un plus grand nombre de concurrents à participer lors de l'appel par troisième affiche.

Deuxième lot

Quatre soumissions peuvent être prises en considération, partant du montant estimatif de 76.000 francs.

M. Lapie de Versailles propose la somme de 74.442,50 F soit moins 1.557,50,

M. Bézier également de Versailles propose 74.800 F soit moins

1.200 F.

M. Fossard de Paris propose la somme de 72.000 F doit 4.000 F de rabais,

M. Vasselle de Paris descend le prix à 71.600 F soit 4.400 F de rabais.

Le Conseil, formé de MM. Marchand, Champion, Leconte, Duclosel, Gau­thier, Chabrol et M. Walckenaer Secrétaire Général, donne sa préfé­rence à la dernière soumission, celle du Sieur Vasselle. La décision finale sera prise lorsque M. le Directeur Général des Ponts et Chaussées, à qui les pièces nécessaires seront adressées, aura fait connaître si Son Excellence le Ministre de l'Intérieur confirme la préférence.

L'accord intervient et dans sa lettre du 18 janvier 1819, M. Chabrol stipule que la soumission souscrite le 15 jan­vier 1819 par le SieurVasselleAntoine, demeurant à Paris, rue Cassette n° 8 est agréée.

Celui-ci devient donc adjudicataire définitif des travaux de pavage de la chaussée aux abords du nouveau Pont, rive droite de la Seine, moyen­nant la somme de 76.600 F, il doit bien sûr faire preuve de solvabilité témoigner d'un cautionnement en immeubles francs et quittes de toutes hypothèques pour une valeur de

10.000 F en capital.

Parc de Saint-Cloud

Le 3 avril 1819, il est demandé à M. le Conseiller d'État, Directeur des Ponts et Chaussées, d'écrire à M. l'Inten­dant des Bâtiments de la Couronne et de lui proposer que, moyennant le versement de la somme de 64.034,06 F l'Administration des Domaines de la Couronne restera seule chargée de l'exécution des clôtures du Parc et pourra y apporter toutes les modifi­cations et augmentations qu'elle ju­gera convenable. Notamment la subs­titution d'une grille en fer, au-dessus du socle du mur projeté, qui ajoutera beaucoup à la beauté de la route et à l'agrément du Parc et au public.

Tassement de plusieurs piles du Pont de Sèvres

Le 11 janvier 1819, M. Lamande, Ingénieur en Chef, rend compte au Directeur Général des Ponts et Chaus­sées d'un léger tassement qui s'est manifesté dans la maçonnerie du pont au-dessus de la 6e pile.

En décembre 1818 on a remarqué un dérangement dans l'assise du parapet, qui, après avoir été posée en ligne

La plaine de Billancourt vers 1830.

droite, a pris au-dessus de la 6e pile une inflexion curviligne dont la flèche est de 0,025 mm. par 25 mètres de corde, on aperçoit sous les têtes d'amont et d'aval une lézarde qui annonce un tassement partiel.

M. Vigoureux, Ingénieur Ordinaire chargé de la surveillance des travaux depuis leur origine, rapporte que dans une visite faite immédiatement après la chute de deux arches dé­truites par le génie militaire en 1815, il a remarqué qu'un repère placé au­

6e

dessus de la pile s'était abaissé de 3 centimètres; ce qui ajouté aux 25 millimètres observés dernièrement porterait le tassement total à 0,055 m (environ 2 pouces).

Réunis en Commission, les différents responsables recherchent la cause de cet état.

M. Lamande pense que le tassement est dû à un petit enfoncement des pieux de la pile. Il suppose que la commotion produite par l'explosion de la poudre sous les différentes par­ties du pont a ébranlé les pieux et diminué la pression latérale du sol dans lequel ils sont enfoncés, et qui est un des éléments de leur résistance. Dans cette hypothèse, la cause pre­mière de l'accident serait l'opération militaire qui a détruit deux arches du pont et ébranlé toutes les autres.

Ceci met à l'abri de tout reproche les

Ingénieurs qui ont projeté et construit le pont.

M. Lamande, en décembre 1818 a 6e

fait placer au-dessus de la pile un excès de charge de 113.620 kg. Le tassement n'a pas augmenté. Il aurait préféré une surcharge de 5 ou six cent mille kilos, mais si l'expé­rience avait entraîné de plus grandes lézardes, on aurait pu l'accuser d'im-. prudence. C'est pourquoi il préfère recourir aux lumières et à l'expé­rience du Conseil.

Une longue discussion technique

s'engage.

M. Lamande propose de démollir la maconnerie du tympan de la 6e pile et de la remplacer par des voûtes en évidement qui diminueraient de

420.440 kg le poids du système et qui détruiraient toute cause d'un nouveau tassement. Ce travail coû­terait en frais de démolition et de reconstruction la somme de 16.000 F.

M. Vigoureux le 29 mars 1819 fait un nivellement du socle de la 6e pile et il en résulte que le point le plus élevé est à l'extrémité du corps cassé en amont rive gauche, tandis que le point le plus bas qui lui est inférieur de 0,041 m est à l'angle d'aval, rive droite, diagonalement opposé.

Les sondes ont appris que la maçon­nerie de béton a peu de consistance et qu'il existe encore un vide de 0,0045 entre la surface et le dessous du caisson.

M. Vigoureux a examiné toutes les piles avec le plus grand soin. Il a cru reconnaître que les socles des quatre piles du milieu étaient plus bas que ceux des 4 autres piles, et cependant il a conscience de les avoir tous fait établir très attentivement à l'aide du niveau à bulle d'air.

Des discussions techniques, il ressort que des tassements sont l'origine du mal.

Quelles sont l'époque

et les causes du tassement?

M. Vigoureux dit que c'est au mois d'août 1819, six semaines après l'explosion de la 1 re et de la 4e arche que par le nivellement d'un repère placé sous la 6e pile et sur lequel il trouva une différence de 3 ou 4 cm, il conçut les soupçons du tassement de cette pile.

Cet Ingénieur pense que la force expansive de six à huit cents livres de poudre, en faisant vibrer tous les pieux avec des circonstances variables, suivant la nature et la densité du terrain, a diminué plus ou moins le frottement latéral qui forme toujours un élément nécessaire à la résistance lorsque les pieux n'ont pas atteint le roc dur.

Quel sera le remède?

M. Lamande propose de charger d'abord chacune des 4 piles d'un poids de 130.000 kg, de les évider pour procurer un allègement de

120.000 kg en sorte que les pieux des piles seraient déchargés réelle­ment d'un poids de 550 kg, ce qui ferait pour chacun des 76 pieux de chaque, une diminution de charge de plus de 7.000 kg, ce qui serait une garantie suffisante.

Si cela diminue la cause du tassement, cela ne rémedie pas à la faiblesse de la base de l'édifice.

On ne peut enrocher, ce qui dimi­nuerait la section de la rivière.

On envisage de construire autour des piles qui ont tassé une crèche qu'on remplirait en bonne maçonnerie de béton avec mortier de chaux hydrau­lique. On ferait ensuite une injection de béton pour garnir les vu ides qui se trouvent sous les caissons.

Le prix de la crèche monte à 45.122,66 francs.

Celui des injections à 4.877,24 francs. Ce qui ferait pour chaque pile un total de 50.000 F auquel il convient d'ajouter 1 6.000 F, prix des évide­ments.

MM. Lamande et Vigoureux repous­sent ce projet qui a le double désa­vantage d'être onéreux, de rétrécir considérablement la section de la rivière, d'affaiblir momentanément le système actuel des fondations par la nécessité de déplacer, au moins par­tiellement les anciens enrochements pour faire place au béton.

Ce moyen est ajourné.

M. Lamande propose alors de n'alléger que les tympans des piles qui ont réellement tassé au moment de l'ex­plosion et postérieurement. Soit sur les 4 piles du centre et sur une portion des 2e et 7e piles. Il en coûtera: pour les 4 piles 64.000 F. Pour les 2e et

7e

piles 11.000 F l'ensemble:

75.000 F. S'il y a lieu, sur la totalité, il coûtera pour les 8 piles 128.000 F; et pour les demi-piles 11.000 F. Soit

139.000 F. Dans les deux cas il faut compter en sus le prix du radier'en enrochement que M. Lamande évalue à 40.000 F.

La Commission soumet à l'appro­bation de M. le Directeur Général six propositions :

1.

La maçonnerie qui surmonte les 8 piles et les 2 demi-piles du Pont de Sèvres, sera entièrement démo­lie, à l'exception du parpaing des têtes. Elle sera remplacée conformé­ment au projet que rédigera M.l'ln­nieur en Chef et qui sera soumis le plus tôt possible à l'approbation de M. le Directeur Général.

2.

Cet évidement sera opéré simul­tanément sur tous les points. La démolition des tympans devra être faite sur le plus bref délai. Les matériaux en provenant seront dé­posés sur les rives. La construction des voûtes en évidement suivra immédiatement.

3.

On pratiquera sur l'un des trottoirs et sur chaque pile etdemi-pile un puits destiné à l'introduction des ouvriers et matériaux. Ces puits ou regards pourront être utiles par la suite, pour visiter, entretenir et réparer les voûtes.

4.

Il sera fait sous le pont un radier général en enrochement à pierres perdues qui s'étendra à 10 mètres en amont et en aval. Les détails de ce projet seront soumis à l'appro­bation de M. le Directeur Général. On aura soin de tracer sous la coupe en travers de la rivière le profil primitif du terrain, le profil observé en 1815, celui qui sera observé au 1er mai 1819 et enfin celui qu'on proposera de donner aux enrochements.

5.

On indiquera en même temps la grosseur convenable à donner aux pierres de superficie de l'enro­chement pour les mettre à l'abri de tout affouillement aux époques des inondations et des débâcles.

6.

M. l'Ingénieur en Chef sera invité à faire tous les mois un recolement du nivellement des socles des piles et culées. Il en tiendra registre ainsi que de l'état des arches et il soumettra à M. le Directeur Général les observations qu'il jugera dignes de quelque intérêt.

Le Conseil Général des Ponts et Chaussées adopte l'avis de la Com­mission.

Évaluation et appréciations

Dans le projet du 14 mai 1819, le montant global de l'opération est chiffré à 252.000 F duquel on déduit

27.000 F valeur représentée par m3

5.400 de meulière retirés des démolitions et réemployées, partie en enrochement, partie en chaussées aux abords du pont, en partie dans les revêtements en pressés à 5 francs le mètre cube.

M. l'Ingénieur en Chef, dans la lettre qui accompagne le projet, a proposé à M. le Directeur Général de commen­cer d'abord par évider les 4 piles du milieu, de paver provisoirement le reste du pont, d'y faire rouler les voitures chargées de matériaux et de faire observer les effets de ce roulage sur les différentes parties du pont.

Proposition acceptée. Elle entraîne la réflexion suivante du Conseil le 29 mai 1819 :

(( Le Conseil n'a pas vu sans regret que (( M. J'Ingénieur en Chef ait provoqué (( des changements à une délibération (( prise en sa présence par une Assem­(( blée nombreuse, les bases de la (( nouvelle décision n'étant plus telles (( qu'elles avaient été posées primi­(( tivement. Le Conseil doit demeurer (( étranger aux conséquences de ces (( modifications. ))

Adjudication

Par lettre adressée le 19 juin 1819 à la Préfecture du Département de la Seine, le Sieur Marc Gignoux s'engage envers l'administration des Ponts et Chaussées à fournir, poser et démolir les cintres pour la construction des voûtes en plein cintre de 2 mètres d'ouverture, qui doivent être exécutées au-dessus des piles du Pont de Sèvres dans la maçonnerie des reins ainsi que les étais nécessaires pour soutenir les cintres, aux conditions suivantes :

m3

45 F. le de bois d'assemblage pour les cintres et les étais, y compris déchet façon, pose et démolition, les bois devant être repris par lui-même;

14 F. le même employé précédem­ment une ou plusieurs fois dans les mêmes dimensions, pour déchet relatif au nouvel emploi;

30 F. le mètre cube de bois sans assemblage pour les couches;

8 F. le même employé précédem­ment une ou plusieurs fois.

L'entrepreneur Gignoux s'engage à ne pas interrompre cette tâche, les travaux de maçonnerie.

Le 8 juillet 1819, M. Chabrol lui donne une réponse positive.

Pavage du nouveau Pont de Sèvres

M. le Comte Chabrol de Volvic, Conseiller d'Etat, Préfet de la Seine, reçoit le 13 janvier 1820 une lettre du Directeur Général des Ponts et Chaussées lui signalant que l'adju­dication passée avec le Sieur Camus Fils est maintenant au Sieur Camus Père afin de reporter cette portion de travaux dans le 2e lot du pavage des abords du pont adjugé au Sieur Vas­selle, il en résulte une augmentation de dépense de 1.150,70 F. Les entrepreneurs Camus Père et Vasselle sont d'accord.

Où il est reparlé du 1 er entrepreneur du nouveau pont

Ce n'est que le 14 juin 1821 que

M. Henri Bouchon Dubournial, ex-entrepreneur des travaux du pont en vertu d'adjudications passées en mil huit cent neuf et résiliées, adhère sans restriction et sans réserve à la décision du Conseil de Préfecture du 27 mai mil huit cent seize.

Il a fallu tout ce temps et plusieurs Conseils de Préfecture pour en arriver là.

Voie d'accès

M. le Directeur Général des Ponts et Chaussées reçoit le 30 juin 1821 du Comte Chabrol de Volvic, une lettre qui lui demande d'acquérir un terrain appartenant au sieur Gautré, afin de construire une troisième route pour accéder au nouveau pont.

Cette voie provisoire serait établie entre la route n° 11 et la partie de la nouvelle route exécutée depuis le pont jusqu'à l'avenue des Princes. La dépense est estimée à 3.300 F y compris 1.500 F pour l'acquisition du terrain, acquisition qui doit être faite selon la loi du 8 mars 1810.

Il est reproché à M. le Directeur des Ponts et Chaussées d'avoir le 12 août 1821 approuvé l'ouverture de cette nouvelle route, avant qu'elle ne soit commencée, la considérant comme inutile puisque, jusqu'à présent on a pu s'en dispenser. On peut en faire l'économie si l'on adjuge prompte­ment la 2e partie de la route jusqu'au Point du Jour.

Adjudication du 2 e lot de pavage aux abords du nouveau pont

Le montant des dépenses adjugées le 18 février 1819 par M. le Préfet de la Seine est de 71.600 F.

Le fait d'avoir ordonné par 2e arrêté du 5 janvier 1820 que les pavages de la chaussée du pont (entre trot­toirs) seraient distincts du 1 er lot et reportés au second adjugé, au Sieur Vasselle, oblige à une seconde esti­mation.

Le second lot plus le pavage étaient estimés à 104.225,29 F, le sieur Vas­selle a passé son adjudication pour la somme de 93.729,34 F, ce qui fait ressortir un rabais total de 10.495,95 F. Mais en fait la totalité des dépenses s'élève à 115.910,43 F ce qui laisse apparaître un excédent de 22.181,09 F alors que l'excédent sur les détails approuvés n'est que de 11.685,14 F. Comment expliquer la différence?

Il Y a une indemnité de 2.000 F au fermier de la ferme du Trou d'Enfer (Domaine du Roi, forêt close de Marly) pour l'indemniser pendant la durée de son bail de la perte de jouis­sance du terrain de la carrière accordée au Sieur Vasselle. La somme exigée par ce fermier est considérable, mais il fallait ou la payer, ou renoncer à une exploitation qui fournit les plus beaux pavés des environs de Paris.

Et puis il a fallu construire une chaus­sée provisoire sur le pont, avant la pose des trottoirs et des parapets, à l'aide de laquelle on a pu transporter les pierres sans risque que la chape soit endommagée par les roues des ginards et chariots. Il a été fait en outre quelques pavages provisoires pour fermer les baies, la veille des diman­ches et des fêtes de Versailles et Saint-Cloud, le tout dans l'intérêt de la sûreté publique. Dans ce même intérêt, impérieusement, il fallait que la route nouvelle soit balisée par des réverbères aux abords du pont du côté de Sèvres. De six, le nombre de réverbères est passé à quatre, 2 ont été volés. Les 4 qui restent fonction­nent à raison de deux à chaque extré­mité du pont, sur des supports en fer ajustés aux bornes en granit.

Les remblais de la route rive droite ont été exécutés en régie (à la tâche) de l'année 1814 à l'année 1817, par des ateliers de charité établis d'après l'autorisation de M. le Directeur Géné­rai des Ponts et Chaussées.

M. Vigoureux, Inspecteur Division­naire, propose d'accepter l'augmen­tation et d'arrêter en conséquence le compte définitif de l'entrepreneur à la somme de 115.910,49 francs.

Assise supérieure du parapet

Le Sieur Gignoux, adjudicataire par soumission du 15 septembre 1817, expose au Comte de Chabrol le 4 mai 1822 qu'après 4 années de retard pour la confection des travaux qui devaient être terminés dans la campagne de 1818, ceux-ci viennent de reprendre. Par suite du tassement du pont, l'assise inférieure posée par l'ancien entrepreneur se trouve dérangée dans l'alignement et celle fournie par lui­même a également éprouvé un déran­gement, de sorte que, au lieu de simples ragréments, les deux assises subissent une taille de 10 à 15 mm sur les parements verticaux.

La pierre, fournie immédiatement après son extraction, se traite facilement. ce qui n'est plus le cas après quatre années.

L'entrepreneur explique qu'il effectue en ce moment une taille au lieu d'un simple ragrément et qu'il y a eu 1/5e d'augmentation dans le prix des journées d'ouvriers, ce qui est contraire à l'esprit de la soumission puisque les travaux devaient être terminés en campagne 1818.

Devant le refus de l'Ingénieur du paiement des dépenses qui s'élèvent alors à 5.000 F, M. Gignoux déclare qu'il suspend les travaux jusqu'à ce qu'il obtienne l'assurance que les dépenses qu'il a déjà faites lui soient remboursées soulignant que les ou­vrages restant à faire seront exécutés en régie (c'est-à-dire qu'on lui tient compte de ses déboursés avec 1/1 Oe en plus), puisqu'ils n'ont pas été prévus par la soumission.

Treize jours après cette lettre au Comte de Chabrol, M. Vigoureux dans un rapport explique que les dires de l'entrepreneur sont fondés. En effet, l'entrepreneur a fait achever, jusqu'au 4 mai, une surface de parements de 425 mètres, qui, suivant l'adjudication vaudraient par ragrément à raison de 2 francs le mètre superficiel, or sa dépense effective s'élève à 850 F. en outre 37 journées d'appareilleurs à 6 F et 1199,8 journées de tailleurs de pierre à 4 F valent 5.021,20 F.

M. Vigoureux précise que l'adjudica­tion du 23 novembre 1817 n'obligeait pas cet entrepreneur à achever la cor­niche ni l'assise inférieure du parapet, que les prix adjugés par ragréments et rejointements ne peuvent être appli­qués aux tailles qui restaient à faire en 1822. Il est d'accord pour que l'entrepreneur termine le travail en régie.

Il propose, et en cela est suivi par l'Ingénieur en Chef, de tenir compte à l'entrepreneur du montant de la dépense des journées en y ajoutant le 20 e pour avance à titre de prime; après l'exécution, si l'Administration juge qu'il a bien choisi l'appareilleur et les ouvriers et qu'il les a surveillés de manière que leur temps ait été utilement employé, un autre vingtième sera attribué.

Compte définitif du 2e lot de pavage

Le 25 juin 1822, M. le Directeur des Ponts et Chaussées soumet à l'appro­bation de M. Le Père, Inspecteur divi­sionnaire, le compte définitif de l'en­

2e

trepreneur M. Vasselle, du lot de pavage aux abords du pont. Les travaux s'élèvent à 115.910,43 Fils étaient adjugés pour la somme de 93.729,34 francs l'augmentation est donc de 22.181,09 francs.

Compte définitif du 1 er lot de pavage

Le 9 janvier 1823, M. Le Père, Ingé­nieur Divisionnaire, considérant les travaux de pavage, exécutés par. le Sieur Camus, aux abords du nouveau pont rive gauche de la Seine comme terminés, expose qu'ils étaient adjugés pour 65.585,28 francs et qu'ils n'ont coûté que 56.542,97 francs, qu'il y a donc eu diminution de 9.042,31 francs.

Le pont de Sèvres (état actuel) -cl. B. Jung.

Le pont de Sèvres (état actuel) -vu vers le

quai de Stalingrad -cl. B. Jung.

Éclairage du pont

Par sa lettre du 7 janvier 1823, le Directeur des Ponts et Chaussées adresse au Préfet de Police un refus formel à la demande du Maire de Sèvres. Il estime qu'il est impossible que son Administration continue à faire allumer les réverbères au nouveau Pont de Sèvres. Il souligne que l'administration n'est point tenue d'en­tretenir des réverbères pour la Commo­dité publique, que seulement elle fait mettre des lampions lorsque des matériaux sont déposés ou des tra­vaux entrepris sur les routes et qu'ils peuvent y causer des accidents.

Cela sera le dernier point sur lequel les Ponts et Chaussées auront à donner un désaccord, le pont est terminé.

Durant le siège de 1870-1871, le

pont fut rompu ce qui empêcha les

. -communards de prendre Sèvres. Hâti­

vement réparé, c'est par là que pas­

sèrent les troupes versaillaises.

Les communications entre Allemands et Français se feront au Pont de Sèvres. Une maison, détruite en 1942, a porté jusqu'à ce moment le nom de {( Maison du Parlementaire ».

Depuis 1684, le second Pont de Sèvres, celui de Napoléon 1er dont nous venons longuement de parler est le plus intéressant, mais il ne répond plus au trafic, et dès 1958, il est décidé de le remplacer.

La destruction de cet ouvrage remar­quablement construit est lourde, mal­gré ses blessures de guerre, le pont est solide.

Une passerelle provisoire en bois est édifiée en attendant son remplacement elle est solidement bâtie car les tra­vaux risquent de durer. Son passage en est malaisé et aux heures de {( pointe », il est difficile de la tra­verser.

Démolition du Pont de Sèvres Elle est commencée le 21 juillet 1958. Le 9 janvier 1959, le Docteur Bezan­çon, Président de la Société Histo­rique de la ville de Boulogne, consacre à ce sujet l'objet de la soirée. «Adieux au Pont de Sèvres» en sera le thème. Il évoque sa silhouette familière qui restera en souvenirs dans les cœurs boulonnais.

(( Son souvenir, avant l'industriali­(( satian de ses abords, rappelle la (( beauté des clairs matins sur les (( rives de la Seine, lorsque le soleil (( dorait les arches de pierre blonde, (( les reflets argentés de la moire du (( beau fleuve roulant paisiblement (( ses flots vers le Pont de Saint­(( Cloud.

(( Pendant les journées de juillet (( 1830, un combat s'y déroula contre (( les lanciers suisses de Char/es X (( et deux pièces d'artillerie restèrent (( aux mains des insurgés. ))

Le Docteur Bezançon rappelle 1870, ou du 30 octobre au 5 novembre, par trois fois une arche fut détruite, M. Thiers franchit à cet endroit la Seine en barque pour des entrevues secrètes avec Jules Favre resté à Paris en vue de la délivrance des Pari­siens.

Le 24 janvier 1871, Jules Favre, en sens inverse, s'avançait au milieu des glaçons charriés par le fleuve pour gagner Versailles afin d'y signer avec Bismarck les conventions d'armistice. Le 6 octobre 1896 voit le passage de l'Empereur de Russie qui se rend à la Manufacture de Sèvres.

En août 1944, nos chars d'assaut le traversent pour la libération de Paris.

L'actuel Pont de Sèvres

Le dernier pont relève de techniques nouvelles et obéit aux canons de l'architecture moderne. L'espacement de ses piles assure un trafic aisé, il a 30 m de largeur et permet le passage de 6 voitures de front.

La construction des piles, suivie par bien des badauds, fut intéressante à observer.

Trois batardeaux furent enfoncés sous l'eau avec un remplissage de cailloux, injectés de mortier, le travail de ter­rassement se fit sous l'eau (142 pieux battus par pile) le travail de plongée assuré par des scaphandriers. L'instal­lation de cadres assura la pression de l'eau. Après épuisement de cette eau, le colmatage des parplanches se fit à égalité de pression et l'armature intérieure et le bétonnage se firent à l'air libre, en gardant quelques pompes en action. Toutes ces opé­rations montrèrent les étonnantes ressources de la construction moderne. Le tablier est métallique.

Carmen ALEXANDRE.