01 - Renault et l'aviation

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Texte brut à usage technique. Utiliser de préférence l'article original illustré de la revue ci-dessus.

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Renault et l'aviation

Les épreuves de la troisième Coupe Deutsch étaient fixées au dimanche 19 mai 1935. Les essais de qualification consz"stant en des décollages et des atterrz"ssages en moins de 500 mètres et en un vol de 500 kz10mètres devaient être terminés le 2 mai avant 20 heures.

Dès le 30 avril, l'aérodrome d'Étampes-Mondésir connaît une activité débordante. Devant de nombreuses personnalités, parmi lesquelles Maryse Bastié et Suzanne Deutsch de la Meurthe, pilotes et mécaniciens s'affairent. Gut Bart se pré­pare à monter son Nehwing à moteur Régnier de 350 ch, 6 cylindres, muni d'un train d'atterrissage avec une béquille escamotable et d'une aile pourvue de volets d'intrados. Louis Massotte effectue un premier vol sur son Martinet qui n'est autre qu'une cellule de Caudron 360 modifiée par l'ingénieur Herbemont. Marcel Riffard dirige le montage d'un Caudron 560 dont le moteur Renault est un 12 cylindres inversés en V refroidi par air, d'une puissance de 450/475 ch. L'appareil est doté d'un démultiplicateur et d'une hélice Ratier à pas varia­ble. Dans la soirée, un deuxième Caudron 12 cylindres arrive pour le montage et, vers 18 heures, Delmotte atterrit sur un Caudron-Simoun, bientôt suivi de Maurice Arnoux sur un Caudron-Rafale.

Le lendemain, mécaniciens, ingénieurs et pilotes soht auprès de leurs appareils, préParatifs fébrz1es, montages hâtifs, écrit l'Auto. Enfin, le 2 mai, c'est" l'examen de passage ". Delmotte et Arnoux vont, sans trop de difficultés, qualifier les cinq Caudron engagés. Quant à Massotte et Bart, ils échouent. A l'issue de la journée, les cinq Caudron sont seuls retenus pour l'épreuve finale.

Le triomphe de Caudron-Renault

L'enjeu de la bataille, pour Caudron-Renault, n'est donc pas de vaincre -seul constructeur en lice, la victoire lui est assurée -mais d'atteindre les plus grandes vitesses. Alors, entre le 3 et le 18 mai, Étampes se mue en centre d'essais Caudron-Renault.

Toute l'équipe est là : les pilotes, Delmotte, Arnoux, Lacombe, Monville, Franco; les ingénieurs, Riffard, Chaumont, et l'innombrable cohorte des mécaniciens et monteurs. Chaque jour, des vols sont effectués. Arnoux notamment boucle, le 6 mai, 100 kilomètres en 13 minutes 3 secondes. Des modifications sont apportées, des réglages affinés.

Et c'est le grand jour 1 Le temps déplorable de samedifaz"sait redouter le pire, écrit l'Auto du 20 mai, or les déParts furent donnés à l'heure dans l'ordre suivant : Franco (n 01), Monville (n 0 3), Lacombe (n 0 5), Arnoux (n 0 6), Delmotte (n 0 8). Le journal poursuit : Monville, ayant des bougies encrassées par suite d'un long point fixe au ralentz~ dut changer de jeu. Il perdit 16 minutes. Les Plus raPides terminaient leur premier tour quand il s'envola. APrès le quatrième tour, Franco abandonne. Au huitième tour, c'est Arnoux qui a des ennuz"s de graz"ssage. Il abandonne, ayant malgré tout, en poussant sa machine, bouclé le septième tour à 469 kilomètres/heure.

A l'issue de la première manche, le classement se présentait amSl:

l. Delmotte : 2 heures 14 minutes 31 secondes, moyenne 446 kilomètres/heure.

2.

Lacombe: 2 heures 15 minutes 55 secondes, moyenne 441,500 kilomètres/heure.

3.

Monville : 2 heures 40 minutes 14 secondes, moyenne 394,736 kilomètres/heure.

Ensuite, ce fut la trêve du déjeuner. Au restaurant, et un peu partout sur l'herbe séchée par le solez1, on sacrifia aux estomacs creusés par le grand air. Mais, pour les pilotes, cette trêve allait être brève.

Sur l'aérodrome d'Étampes-Mondésir, mécaniciens, techniciens et officiels entourent un Caudron.

Il était un peu Plus de 13 heures quand les trois aV7;ons restant en course reçurent le signal d'envol. Monvz"lle, très sportz"ve­ment, laissait à son camarade Arnoux la machine qu'û avait jusque-là menée avec une belle régularz"té, afi"n qu'Arnoux pût effectuer la course entière. Ce beau geste mérz"taz"t d'être signalé. Mais Arnoux, après s'être envolé, revenaz"t au terrain. Pendant ce temps, Delmotte et Lacombe poursuivaient leur ronde à 450 kûomètres/heure. Au quinzième tour, Delmotte conservaz"t son avance sur Lacombe quifaiblissaz"t : le capotage amovz·ble de son appareû n'étaz"t Plus suffisamment fi"xé et Lacombe étaz"t obligé de le maintenir de la maz·n gauche.

Et les tours se succèdent. Enfin, un point se précise et un rase­

mottes à pleins gaz suz·vz· d'une longue chandelle termine la

course remarquable de Delmotte. On va chercher le vaz·nqueur

et ce sont bientôt les félz"citations chaleureuses, les aPPlaudisse­

ments, les exzgences des PhotograPhes et des cinéastes. Le fi"dèle chien de Delmotte " Moumousse " semble tout heureux du succès de son maître.

Le résultat final s'établissait ainsi:

1.

Delmotte.: 4 heures 30 minutes 17 secondes 2/5, moyenne 443,965 kilomètres/heure.

2.

Lacombe : 4 heures 42 minutes 53 secondes, moyenne 424,203 kilomètres/heure.

3.

Arnoux : 5 heures 44 minutes 9 secondes, moyenne 348,685 kilomètres/heure.

journée glorieuse, écrivit Charles Faroux, qui n'hésitait pas à désigner les vrais vainqueurs : Louis Renault quz· ordonna, Riffard quz· conçut, Caudron et les usines Renault quz· construi­sirent. Et, ajoutait la publicité du groupe Caudron-Renault : Tn·omPhe des aûes Caudron-Renault.

Récit de Raymond Delmotte

j'ai préParé cette Coupe avec tout le soin, toute la technz·que dész·rables. je fus servz· par un matén·el hors de pair qui situe à sa juste valeur l'avance prise par la construction française dans le domaine où elle porta ses efforts en vue de cette utûe comPé­tz"tz·on, laquelle servz·ra amPlement, non seulement l'avz·atz·on de grand sport raPide, mais aussz· l'avz·atz"on commerciale.

Ma course est sans histoire ;j'az·pris le déPart à 9 h 5 et, suivant le tableau de marche quz· étaz"t fixé par l'ingénz·eur Riffard qui a c·onçu les avz·ons de la Coupe Deutsch, j'az· maintenu un régime constant de 2 950 tours, correspondant à une vz·tesse en palz"er de 475,480 kûomètres.

j'az· pris mes vz·rages selon la technique exzgée pour des avz·ons de cette fi"nesse. je vzrais à "badzn "constant, avec gn rayon assez large, de façon à ne pas frezner l'avz·on sur sa trajectoire, entre 20 et 50 mètres, altitude quz· permet de viser le pylône le Plus près possible.

j'ai volé durant les 2 000 kûomètres, aussi Men le matin que le soz·r, à une hauteur variant entre 20 et 100 mètres.

j'ai été extrêmement chahuté, beaucoup Plus au cours de la seconde manche que de la première. j'ai rencontré Plusz·eurs grazns quz· ne m'ont pas beaucoup gêné. Par contre, l'après-

Raymond Delmotte veille au montage de son appareil.

midz·, au cours de la deuxième manche, les remous provoqués par les nuages d'orage, noirs et très bas, me rendz·rent l'épreuve Pénible, même brutale. A ce moment-là, û me fut donné d'admz·rer la remarquable tenue de l'avz·on et sa stabûz"té.

j'avoue n'avoz·r éProuvé aucune émotz·on partz"culz"ère durant cette performance. Mon traz·n d'atternssage escamotable fonctionna d'une façon parfaite dans les deux sens. l'hélz"ce à pas van·able me donna également la Plus entière satisfactz"on aux différents régimes.

On m'a posé cent fois cette questz"on avant la Coupe: A cette allure-là, pouvez-vous vous poser sans risque en campagne? je répondrai ceci: La vitesse acquise permet une vitesse ascen­sionnelle (chandelle) qui autorise une montée d'environ 500 mètres et permet, à cette altitude, d'effectuer en toute sécurité les manœuvres des volets d'intrados, le rabattement du train et la prise de terrain vent debout. D'ailleurs, nous avons eu des exemples d'atterrissage en campagne sans incidents, aussi bien l'année dernière que cette année.

j'estz"me, pour ma part, que la Coupe de cette année serafertûe en ensezgnements de toute sorte. Au point de vue technique, la moyenne a été élevée consz·dérablement par rapport à l'an passé et je souhaüe ardemment que cette formule de 8 lz"tres de cylz"ndrée sot"t conservée puisque Mlle Suzanne Deutsch de la Meurthe a bz·en voulu promettre de remettre une coupe en compétz"tz"on pour 1936.

Cette limt"tation de cylz"ndrée à 8 lt"tres aura permis une évolu­tz"on très marquée dans le domaz·ne des moteurs; nous allons, sous peu, dans la même cylindrée, termz·ner les essais des moteurs de 12 cylz"ndres quz· n'ont pas pu prendre part à la Coupe et je compte bz·en, sot"t à Étampes, soz"t à Istres, porter la vz·tesse à 500 kz10mètres à l'heure sur un parcours de 1 000 kûo­mètres et atteindre 550 kûomètres à l'heure sur la base d'Istres.

La dernière Coupe Deutsch

La quatrième Coupe Deutsch fut disputée le 13 sep­tembre 1936. Cette date avait été retenue pour, selon les orga­nisateurs, permettre des possibilités d'atterrissage en rase campagne, les récoltes n'étant Plus sur pied à cette époque. Mais aussi pour augmenter le délai de mise au point des appa­reils, les grèves du printemps de 1936, suivies des premiers congés payés, ayant perturbé les travaux de préparation.

Sept appareils étaient engagés: cinq Caudron-Renault (deux C 461, un C 450 et deux C 560), un Mallet-Régnier et un Sainte-Anne qui ne se présenta pas. Après les épreuves qualifi­catives, seuls furent retenus trois Caudron-Renault (deux C 461, pilotés par Delmotte et Arnoux, un C 450, piloté par Lacombe). Les C 461 étaient presque identiques aux C 460 de la Coupe 1935 ; seules différences, l'aérodynamique de leur fuselage qui avait été remarquablement améliorée par l'ingé­nieur Riffard, et les trains d'atterrissage escamotables en vol dont ils avaient été munis.

Le départ devait être donné à 8 heures sur l'aérodrome d'Étampes-Mondésir, mais les conditions atmosphériques médiocres qui sévissaient sur le circuit habituel obligèrent les commissaires à le retarder jusqu'à 11 h 30.

C'est Lacombe qui, le premier, prit son vol, suivi de Arnoux à 11 h 31 et de Delmotte à 11 h 32. Ce dernier boucla le premier tour à la moyenne de 390,875 kilomètres/heure, Arnoux réalisant 386,266 et Lacombe 376,569.

Au septième tour, Delmotte doit abandonner à la suite de la rupture d'une pipe d'échappement qui provoque un échauffe­ment subit du radiateur d'huile. Et Arnoux termine la première manche en 2 heures 24 minutes 44 secondes, soit à la moyenne horaire de 414,550 kilomètres, Lacombe le suivant à moins de 4 minutes avec 403,813 kilomètres/heure.

Après l'escale prévue au règlement, c'est le départ de la seconde manche. Des ennuis de mise en route retardent les deux concurrents, et Arnoux ne pourra pas maintenir l'avance qu'il avait sur Lacombe.

A l'issue de l'épreuve, le classement de la quatrième Coupe Deutsch se présentait ainsi :

1.

Lacombe en 5 heures 8 minutes 7 secondes, vitesse moyenne 389,462 kilomètres/heure.

2.

Arnoux en 5 heures 24 minutes 41 secondes, vitesse moyenne 369,590 kilomètres/heure.

Ces résultats déçurent le public et les milieux aéronautiques. Selon une revue spécialisée : La progression constante des résultats enregistrés depuis· 1933, l'entrée en course des C 560 qui n'avaient pu partz"czper à la Coupe précédente, les nou­veaux fuselages, tout donnaz"t à penser que les records établis par Delmotte en 1935 devaz·ent être largement battus. Il n'en a rz·en été. Les raisons de cet échec relatif ont pour cause le manque d'émulation provoqué par l'abstention des concur­rents étrangers, et surtout les diffi"cultés zndustrz·elles relatzves à la mise au point des moteurs.

L'absence d'émulation fut certainement une des causes de la disparition de la Coupe Deutsch. De fait, pour la cinquième coupe qui devait se disputer le 12 septembre 1937, on ne comptait, en dehors de cinq Caudron-Renault, que deux autres engagés, deux Lignel à moteur Régnier. Alors, Caudron-Renault, malgré l'attrait de trois millions de francs de primes offertes par la ministère de l'Air, déclara forfait et les Lignel renoncèrent.

Ainsi prit fin une coupe qui avait tant contribué au renom de l'aviation française.

Victoires américaines

Les différentes Coupes Deutsch ont incontestablement dominé toutes les manifestations aéronautiques du moment. Cepen­dant, parallèlement aux épreuves d'Étampes, bien d'autres exploits ont été accomplis par d'audacieux pilotes, aux commandes des appareils de Marcel Riffard.

Les rappeler tous risquerait d'être fastidieux. Ils furent trop nombreux, dix par exemple, pour la seule année 1934. Et, jusqu'en 1938, chaque année vit sa moisson de lauriers. Mais, vaincre les Américains chez eux, Caudron-Renault le dut à Michel Détroyat.

Épreuves difficiles et dangereuses que le Greve TroPhy et le Thompson TroPhy, mais l'homme avait toutes les audaces et la machine avait fait ses preuves.

A Los Angeles, les 7 et 8 septembre 1936...

Michel Détroyat après son triomphe dans le Thompson Trophy.

Récit de Michel Détroyat

Le Greve Trophy, cette grande course si attendue des Américaz'ns, est réservée aux moteurs de moins de 9 Htres de cylz"ndrée. Elle se court sur le petÙ drcuÙ à trois virages de 8 kilomètres.

Nous sommes sept partants au déPart en Hgne comme pour une course de chevaux. Le starter nous annonce: Encore une minute ; puis il lève un drapeau blanc, ce qui veut dz're qu'il ne reste que dzx secondes. Et soudain le drapeau se baisse ...

Mon décollage s'effectue bz'en, mais Plusz'eurs petits avions avec trazn fixe et hélz"ce à pale fixe me prennent 500 mètres au départ. Le temps de rentrer mon trazn et d'attraper le grand pas d'hélz"ce, après avoz'r étéjusqu'au pylône sÙué sur le bord de la mer, et je réussis à revenz'r vers les tribunes, le premier.

Je fais deux tours vite puis, voyant ma grande avance, je réduis pour conserver une avance suffisante, afin de battre le record de la même course porté à 341 kilomètres à Cleveland, en 1935.

Je veux surtout réserver mon moteur pour la grande course de demaz'n qui se court sur le grand drcuù de 16 kzlomètres, alors que la Coupe Deutsch, à Étampes, comporte un drcuù de 100 kilomètres.

Petùe inquiétude au dzxième tour ; un banc de brume arrive assez vÙe au ras du sol, et menace de couvrz"r le drcuù. Je suis Plusieurs fois gêné par les huù concurrents dans les trois vzrages, mais, ayant une grande marge, je continue sans me presser, à quatre-vz'ngts pour cent de la puissance de mon petù Renault qui" éPate" vraiment beaucoup tous les Américaz·ns.

Résultats : premz"er, moyenne 431,230 kzlomètres/heure; deuxz'ème Neumann, moyenne 363,700 kzlomètres/heure. Deux concurrents se retournent à l'atterrzssage : Joe Jacobson et King qui accrochent une balise, sans acddent.

APrès ma vzdoire, très aPPlaudie sportivement par la foule américazne, on joue la Marseillaise que tout le monde écoute debout. Je suis très fier de représenter notre drapeau dans cet z'mmense pays et de pouvoir montrer que, malgré l'avance des Amérz'caz'ns en avz'ation commerdale, nous avons une technique très au point... et l'après-midi du lendemain, c'est le Thompson Trophy que Michel Détroyat va également remporter.

La Plus grande et la dernz"ère journée des courses natz'onales aériennes de Los Angeles est aussi la Plus belle journée de ma carrière. j'ai gagné le Thompson Trophy, lafameuse course de vz'tesse dont le total des przx est le double de ceux du Bendix Trophy, ce qui en montre l'z·mportance.

Et si ma joie est grande, ce n'est pas tant pour une réussÙe personnelle que pour une vzdoire des ailes françaises que

M. Pierre Cot, mz'nzstre de l'Air, m'avaÙ donné missz'on de représenter zà.

Sur le terrazn, une foule énorme grouülaù dans les immenses tribunes pavoisées. Nous étz'ons dix concurrents en Hgne et j'éProuvais quelque émotz'on car Lee Milles devaù pzloter un monoPlan sPédal de course de 1 000 ch et Earl Ortman un autre apparez"l raPide de 900 ch.

Au moment où nous allons prendre le déPart en Hgne, un banc de brume venant du Padfique arrz've soudain, s'étend très vzie et recouvre les pylônes du drcuit de 10 miles. Les commissaz'­res, pour évz'ter des accidents, demandent aux dzx concurrents s'z"ls acceptent de fazre la course sur le petù drcuù de 5 miles. Nous acceptons.

Nous attendons impatiemment. En effet, une brzse de mer se lève, assez vz'olente, et le beau temps réapparaît. Aussùôt on donne le départ.

Mon petù Caudron-Renault de 325/350 chfend le àel de ses ailes coupantes et j'az' bz'entôt l'impressz'on que je dépasse aisément les machines de 1 000 et 900 ch.

Je gagne sans cesse de la vz'tesse et je parvz'ens à effectuer un

tour à 484,370 kilomètres/heure et un autre à 482,760

kilomètres/heure, chiffres énormes pour les Américazns.

N'étant pas z'nquiété, je réduis mon allure, craignant qu'un

concurrent ne veuüle me dépasser dans les cznq derniers tours. Je voulais avoz'r de la puissance de réserve.

Huù de mes concurrents sont dépassés deux fois dans le czrcuz"t par ma petùe machzne qui" gaze" admz·rablement. Enfzn, dans les trozs dernz'ers tours, j'aperçois mon adversaz're Lee Müles quz', avec son avion de 1 000 ch, file bon train. Je mets plein gaz pour essayer de lui prendre un tour comPlet. Trop tard, je n'azJaÙ que le devancer, très sérieusement d'azlleurs. C'est la fin et j'atterris, ravz·.

La gorge serrée, j'entends la Marseillaise et les acclamatz'ons d'une foule z·mmense. j'adresse de bz'en vzJs remeràements à Delmotte, à qui revz'ent entz'èrement cette vzdoire. N'est-ce pas le pilote d'essais qui met au poznt une machzne et permet à l'utz"lisateur qui vz'endra ensuÙe d'en tirer le maximum .~ Merd encore au chef mécanzàen Ramondou et ses collaborateurs, mes trois assistants Bournat, Barrat et Bozsson, quz' m'ont donné tout leur concours et qui disent maintenant O.K. comme de vrais Amérz·cazns.

Le mz'nistre de l'Air m'avaz"tfaù confz·ance. Ilfallaù que je me montre dzgne de l'espoir que tous avaz'ent mis en moi. En voyant, aujourd'hui, le drapeau tricolore de la France aufaîte de l'aérodrome, je vous affirme que je me sens parfaÙement heureux.

Commentaires de Marcel Riffard

C'est dans une interview accordée au journal l'Auto, que Marcel Riffard devait donner les raisons de la supériorité technique de l'avion de Michel Détroyat :

Le succès de Détroyat étaù absolument certain car nous avons, en matz"ère d'avz'atz"on de course -reconnaissons les faùs ­une écrasante suPériorÙé sur les autres pays. Songez que, pendant le Greve Trophy pour lequel la cylzndrée des moteurs étaÙ HmÙée à 9 lz"tres, Michel Détroyat a maintenu son moteur au regzme de 2 800 tours/minute alors que celui-à peut tourner sans z'nconvénient à 3 100 tours, ce quz' augmente la vz'tesse de 60 kz'lomètres/heure.

Pendant le Thompson Trophy, course pour laquelle la cylin­drée des moteurs est z'llimitée, Détroyat a tourné pleins gaz pendant deux tours, puz's a réduit le régime de son moteur quand z'l a vu qu'z'l surclassait nettement ses concurrents, même ceux ayant des moteurs de 1 000 ch. Donc, suPériorité très' nette, incontestable.

L'origine de cette suPérz'orité, c'est la Coupe Deutsch et son excellente formule des 8 litres de cylz'ndrée. La Coupe, par son z'ntérêt, nous a oblz'gés à travaz'ller ; la lz'mitatt"on de la cylz'ndrée a fait écarter les avz'ons mastodontes pour lesquels on attend la vitesse du nombre de chevaux et non de lafz'nesse de la cellule.

J'az' przs une formule que les faits révèlent excellente: celle du moteur à cylz'ndres en lz'gne à refroidz'ssement par air. Les cylin­dres en ligne permettent de réduire au minimum le maître­couPle du fuselage. Les cylz'ndres refroz'dz's par az'r, avec un capotage Men étudz'é, n'opposent que très peu de rész'stance à l'avancement.

Une fats ma formule déterminée, monoPlan surbaz'ssé, moteur à cylz'ndres en lz'gne inversés, j'ai applz'qué d'un seul coup toutes les solutions modernes que, jusque-là, on n'utz'lz'sait qu'avec timz·dité. Citons le profz'l d'az'le biconvexe symétrz'que, l'hélz'ce à pas variable, le train rentrant, le volet d'intrados, le Plan fz'xe réglable en vol. Chacune de ces choses exigeait une étude sPéàale; z'l fallait coordonner ces solutz'ons dont certaines étaient connues maz's n'étaz'ent pas au poz·nt. Avec beaucoup de travaz'l nous y sommes parvenus.

Les femmes aussi : Hélène Boucher

Le 15 jùin 1931, Hélène Boucher quittait le sol pour la première fois, seule à bord d'un Moth-Gipsy. Le 30 novem­bre 1934, elle se tuait aux commandes d'un Caudron-Rafale. Elle était âgée de 26 ans.

Trois années séparent ces deux dates. Trois années de rudes combats et de belles victoires qui la hissèrent au premier rang. Et sa mort, qui frappa si vivement la France entière, rendit légendaire la figure de la jeune aviatrice.

Pourtant, rien ne destinait cette fille d'architecte, au difficile métier de pilote, et sa décision fut l'effet de sa seule volonté et de son ambition. Une volonté que rien ne put rebuter, ni les mises en garde prodiguées, ni les conseils de sa famille et de ses amis, pas même l'absence de fortune.

Il est vrai que d'autres femmes l'avaient précédée dans cette voie pourtant parsemée d'embûches. Femmes d'hier comme la baronne de Laroche, femmes, ses contemporaines aux noms prestigieux: Adrienne Bolland, qui avait eu l'audace, en 1921, de franchir la Cordillère des Andes, Maryse Bastié, détentrice du record féminin de distance en ligne droite sur Paris-Irino (U.R.S.S.), Maryse Hilsz enfin, qui, en douze jours de vol effectif, avait relié Paris à Saigon.

A Istres en août 1934 : Hélène Boucher devant son C 430.

Ambitieuse Hélène Boucher! Elle recherchait la gloire et elle avait, selon son expression, " foi dans son étoile". Cette foi, elle réussit à la faire partager par les siens.

Six mois après son vol solitaire, elle se donne le moyen de son ambition en acquérant un Moth-Gipsy. Elle satisfait alors aux épreuves du brevet de pilote de transport, tout en participant à de nombreux meetings aériens. Mais les tournées à travers la France, si elles lui permettent de résorber ses difficultés finan­cières, ne constituent cependant pour Hélène Boucher que des palliatifs.

Son rêve? Le Grand Raid. Son Moth est insuffisant? Alors elle s'en débarrasse et achète un Avro-Cirrus sur lequel d'ailleurs, par deux fois, elle échappera de peu à la mort.

Le 13 février 1933, c'est sa tentative sur Paris-Saigon. Un raid entrepris sans aide officielle. Par étapes, elle atteint Bagdad le 12 avril. Elle n'ira pas plus loin : l'Avro s'y refuse! Cet échec n'est cependant pas totalement négatif: il lui apporte un début de notoriété qu'elle exploite auprès du constructeur Pierre Mauboussin.

Le 2 juillet 1933, avec un Mauboussin de 40 ch, elle participe aux Douze Heures d'Angers. Épreuve particulièrement péni­ble, car il s'agit de tourner pendant trois manches de quatre heures sur un circuit de cinquante kilomètres. Les plus avertis pensent qu'Hélène Boucher ne pourra pas tenir. Or, non seule­ment elle tient, mais elle réalise un véritable tour de force en se classant treizième.

Un mois plus tard, avec le même appareil, elle s'attribue le record féminin d'altitude en atteignant 5 900 m,ètres. Elle bat ainsi de 400 mètres le précédent record établi par l'Américaine May Haizlip.

A partir de ce moment, bien des barrières se lèvent et c'est en partie sur les conseils du ministre de l'Air, Pierre Cot, qu'elle se dirige vers l'acrobatie aérienne. Michel Détroyat était alors le maître incontesté de la voltige et dirigeait l'école Morane de Villacoublay. Tout naturellement c'est de lui qu'Hélène Boucher va solliciter des leçons.

Entre ces deux êtres aux mêmes passions, va naître une amitié que seule la mort pourra rompre. Chaque jour, les heures d'entraînement s'accumulent: descentes en vrilles, montées en chandelle, passage sur le dos et tonneaux n'ont bientôt plus de secret pour la jeune pilote dont les dons sont éclatants.

Le 9 octobre 1933, première prestation en public. Il ne s'agit pas de conquérir un titre mais de donner la réplique à l'Allemande Vera von Bissing, cependant que Michel Détroyat affronte Gerhard Fieseler. Le succès qu'elle obtient, tant par l'aisance que par la perfection de sa présentation, emporte l'adhésion enthousiaste du public.

Désormais, son nom figurera chaque jour dans la presse, et c'est cette notoriété jointe à des qualités sans cesse affirmées qui favorisera sa rencontre avec Caudron-Renault.

Hélène Boucher.

Pour l'ingénieur Albert, le collaborateur de Marcel Riffard, la certitude qu'Hélène Boucher était douée pour la vitesse, ne souffrait pas de discussion. Or, justement, Caudron-Renault recherchait un pilote de vitesse pour renforcer l'équipe de la marque, endeuillée par la mort de Ludovic Arrachart. Pourquoi pas Hélène Boucher, suggéra Albert.

Après de longues négociations menées à la fois par François Lehideux et Raymond Delmotte, Hélène Boucher rejoignit l'équipe Caudron.

1934 fut, pour Hélène Boucher, l'année de ses plus beaux et plus nombreux succès. Elle fut l'année de sa plus grande gloire et aussi celle de sa mort.

Le 8 juillet, la voici de nouveau aux Douze Heures d'Angers. Dix concurrents sont en présence, dont quatre avec des Caudron 530, et un avec un Phalène. Parmi les dix, trois femmes: Hélène Boucher, Viviane EIder avec un Farman­Renault, Madeleine Charnaux avec un Miles Hawks Gipsy.

C'est une nouvelle victoire pour Caudron-Renault qui prend les quatre premières places. Mais, si Lacombe est en tête avec un parcours de 2 885,203 kilomètres à la vitesse horaire de 240,433 kilomètres, Hélène Boucher le suit avec 2 821,400 kilomètres et 235,153 kilomètres/heure; et elle devance Arnoux!

En se classant deuxième, elle s'adjuge le record de vitesse pour avions légers (450 kilogrammes à vide) sur 1 000 kilomètres avec 254,327 kilomètres/heure, record qu'elle reprend à l'équi­page Arnoux-Brabant qui l'avait établi le 13 octobre 1933 avec 225,705 kilomètres/heure sur Farman-Renault. De plus, elle devient détentrice du record féminin sur 1 000 kilomètres. Ainsi, pour sa première sortie sous les couleurs de Caudron­Renault, Hélène Boucher s'est particulièrement distinguée.

Et elle récidive! Le 8 août suivant, à Istres, sur le Caudron nO 13 de la Coupe Deutsch, elle vole 1 000 kilomètres à la moyenne horaire de 409,200 kilomètres. Le record qu'Arnoux avait élevé à 393 kilomètres/heure au cours de la Coupe Deutsch est battu, et aussi celui de l'Américaine Amelia Earhard, détentrice depuis le 25 juin 1930 avec 281,470 kilomètres/heure.

Deux jours plus tard, sur la même base, elle bat le record fémi­nin de vitesse pure sur 3 kilomètres, avec une moyenne de 428,223 kilomètres/heure. Le lendemain elle l'améliore en le portant à 445,028 kilomètres/heure.

Mais le 30 novembre 1934...

Cet après-midi-Ià, Hélène Boucher est au stand Caudron­Renault à l'occasion du Salon de l'aviation; au-dessus du stand, le Rafale nO 13 doublement victorieux. La foule se presse pour apercevoir, ne serait-ce qu'un instant, l'héroïne aux multiples exploits.

L'aviatrice a cependant un souci en tête, reprendre son.entraî­nement qu'elle avait dû abandonner pour assurer, notamment au Portugal, quelques exhibitions de haute voltige avec Michel Détroyat. A Guyancourt, un nouveau Caudron-Rafale l'attend. Abandonnant la foule, la voici bientôt sur le terrain.

Les conditions atmosphériques ne sont guère favorables à un vol; mais Hélène Boucher insiste et Raymond Delmotte autorise seulement une courte sortie.

A 15 h 15, le Rafale décolle et disparaît à l'horizon. C'est au moment où Hélène Boucher, de retour, se préparait à atterrir, que son appareil s'écrasa dans le bois de la Croix, proche de Guyancourt.

Ainsi disparut ce pz10te de haute classe qui, selon les termes de la citation à l'ordre de la Nation, a mis au service de l'aviation française sa foi ardente et son audace réfléchie, a donné toute sa mesure au cours de sa brève carrière et sa vie à la cause qu'elle avait vaz1lamment défendue.

Les deux Maryse et quelques autres

jeune femme énergique et volontaire qui devraü conquérir raPidement une Place enviée parmi les premières aviatrices du monde, telle était l'appréciation portée sur Maryse Bastié par les milieux aéronautiques lorsqu'elle passa son brevet de pilote en 1925.

Maryse Bastié devant Simoun.

Après son raid Dakar-Natal, Maryse Bastié est accueillie au magasin Renault des Champs-Élysées.

Sa longue carrière ne devait pas démentir ces prévisions. Qu'on en juge! en 1928, le 28 juin, elle bat le record féminin de distance. L'année suivante, elle ravit à l'Américaine Eleonor Smith le record féminin de durée, en tenant l'air pendant 26 heures 48 minutes. Quelques jours plus tard, elle porte son propre record à 37 heures 52 minutes.

Mais son plus grand titre de gloire est, sans conteste, son auda­cieuse traversée de l'Atlantique sud, un itinéraire que nombre de pilotes avait défriché, et pour lequel bien des leurs avaient donné leur vie.

La Néo·Zélandaise Joan Batten avait ouvert la voie quand, le 30 novembre 1935, sur un avion de grand tourisme, seule à bord, elle était parvenue à joindre Natal à Dakar en 13 heures 15 minutes.

Pour Maryse Bastié, il s'agissait de renouveler cet exploit en un temps moindre, non seulement pour donner à la France un nouveau record, mais aussi pour servir la propagande française en Amérique du Sud. A cet effet, le ministère de l'Air lui confie un Caudron-Simoun 6 cylindres de 220 ch.

Le 30 décembre 1936, elle quitte Dakar à 7 h 23. A 19 h 28, elle atteint Natal, ayant couvert les 3 100 kilomètres du parcours en 12 heures 5 minutes, soit à la moyenne horaire de 256 kilomètres. Joan Batten est battue et la France fête Maryse Bastié. Et, lorsqu'en janvier 1937, elle retrouvera Paris, son accueil au Bourget prendra un caractère de fête nationale.

Une autre Maryse, Maryse Hilsz, a aussi bien des titres à faire valoir. Ancienne parachutiste, elle à cent douze sauts à son actif quand elle passe son brevet de pilote en 1929.

Dotée d'une magnifique résistance physique, elle se destine au raid. Le 12 novembre 1930, à bord d'un Moth-Gipsy, elle quitte Villacoublay et atteint Saigon en douze jours de vol effectif, puis rentre à Paris par la voie des airs.

En 1932, elle effectue Paris·Madagascar aller et retour. L'année suivante, elle réussit Paris-Tokyo sur un Farman 29l. Elle réédite son exploit la même année avec un Breguet 27.

Tous ces raids ne l'empêchent pas de s'approprier le record féminin d'altitude avec 9 761 mètres, que l'Italienne Carina Negrone lui ravit. Elle le lui reprend le 23 juin 1936 à bord d'un Potez 50 et atteint 13 661 mètres.

Le 19 décembre 1937, Maryse Hilsz s'attaque au record de distance féminin, détenu depuis 1932 par l'Américaine Amelia Earhart. Le Caudron-Simoun de 220 ch qu'elle va piloter seule, emporte 1 000 litres d'essence et 50 litres d'huile. Elle quitte Istres à 14 h 20 pour Saigon. Les circonstances atmosphériques qu'elle rencontre au-dessus de la Méditerranée accroissent dangereusement sa consommation d'essence ce qui l'oblige, le 20 décembre, à faire escale à Alexandrie. 2 200 kilomètres ont été ainsi parcourus, mais c'est l'échec.

Maryse Hilsz décide pourtant de poursuivre son raid. Le 20, elle est à Bassorah; le 21 à Calcutta: le 22 à Rangoon et le 23, elle se pose à Saigon. Les 10 150 kilomètres du parcours ont été

Le moteur Renault-Bengali est un excellent support publicitaire pour la marque.

225 kms 705 ­

accomplis en 92 heures 31 minutes à une vitesse moyenne de 124 kilomètres/heure. Elle a battu de plus de six heures le record de André ]apy, mais elle n'a pas pu faire mieux qu'Amelia Earhart.

Elle décide alors de rejoindre Paris par la voie des airs. Mais, dans l'étape Karachi-Bassorah, Maryse Hilsz doit lutter contre des orages d'une rare violence et une panne de moteur la contraint d'atterrir en plein désert près de Karjonsky. Perdue, seule au milieu de terres arides, il faudra aux sauveteurs deux journées de recherches pour enfin la retrouver vivante.

Maryse Bastié, Maryse Hilsz, Hélène Boucher, mais combien d'autres femmes de France n'ont pas hésiter à défier la mort. Qui se souvient encore de Mme Dupeyron, de Claire Roman ou d'Élis Léon qui, sur des Caudron-Renault, ont pourtant détenu quelques beaux records au cours des années pendant lesquelles, Anglais, Américains, Italiens, Allemands et Russes ne leur faisaient pas la vie facile !

Le crépuscule

La création du groupement Caudron-Renault avait contraint Renault à la fois à un effort d'organisation et à un effort commercial. Obtenir que le groupe ait une vie propre, une gestion saine, tel était l'objectif poursuivi par Louis Renault. Dans toutes ses créations antérieures il avait toujours veillé à rentabiliser chaque activité, même si des relations privilégiées existaient avec la maison mère.

Cet objectif semblait pouvoir être difficilement atteint dans le cadre du groupement tel qu'il se présentait en 1933_ Caudron fabriquait des cellules, Renault lui vendait ses moteurs. Mais Renault était également monteur de cellules pour le compte de Bloch. Dans la pratique, des techniciens, des ouvriers, travail­laient à la fois pour Caudron, Renault ou Bloch; d'où une difficulté certaine pour une répartition équitable des charges financières et des matières.

De plus, Caudron et Renault possédaient des aérodromes sépa­rés sur lesquels les moteurs subissaient les essais réglementaires. Comment distinguer le temps passé près des moteurs destinés à Caudron, stationnés sur un terrain Caudron, de celui passé près des moteurs destinés à Bloch, stationnés sur un terrain Renault, alors qu'il s'agissait souvent des mêmes équipes de techniciens ?

Une coordination s'imposait. En 1935, la société Renault­Aviation est créée. Elle a pour charge de négocier les marchés, y compris ceux de l'État, tant pour les moteurs que pour les cellules, de les faire exécuter et d'en répartir le règlement entre Caudron et Renault.

Le 11 août 1936, le Parlement vote une loi de nationalisation des industries de guerre, c'est pour l'aviation une occasion unique d'organiser sainement une activité industrielle qui s'est dévelopPée, depuis vz·ngt ans, sans aucun contrôle. far elle, nous pourrons arriver à cette concentration et à cette disper­sion des usz·nes, que tous les ministres de l'Air, depuù 1928, ont essayé sans succès de réalz"ser (Pierre Naquet).

Mais Caudron, dont l'activité aéronautique est orientée pour la plus grande part vers les besoins civils, échappe à la nationalisation.

Une nouvelle réforme interne intervient le 18 mai 1938 quand est constitué la Société des Moteurs Renault pour l'Aviation (S.M.R.A.). Dirigée par René de Peyrecave, elle regroupe, 45, quai du Point-du-Jour, à Billancourt, tous les ateliers d'étude, d'essais et de fabrication des moteurs. Création destinée à clarifier les problèmes de gestion financière.

C'est seulement en 1944 que l'ensemble des activités d'aviation de Caudron et de Renault seront nationalisées. Caudron sera Caudron-Renault a donc pu s'ouvrir à une clientèle qui ne pouvait que se développer. Ainsi vont être fabriqués, le Luciole, biplace d'école ou de tourisme dont huit cents exem­plaires sortiront, le Simoun, l'Aiglon, le Goëland, le Phalène, le Pélican. Bien entendu, la plupart de ces types sont des dérivés de ceux spécialement conçus pour les Coupes Deutsch et ils auront, parallèlement, des destinées diverses: transport postal, transport sanitaire... C'est seulement à partir de 1937 que trois types d'appareils militaires seront produiss : le kangourou, destiné au transport de troupes, le Rafale, mono­plan d'entraînement à la chasse, et le Cyclone, monoplan de chasse. Ils donneront naissance, eux aussi, à quelques dérivés.

Dès 1930, Renault dans sa publicité affirme que l'avion sera d'ici peu, aussi utilisé que l'automobile pour les déplacements rapides et le tourisme.

englobé dans la S.C.A.N. puis Nord-Aviation et la S.M.R.A. devenu atelier aéronautique de Billancourt se retrouvera dans la S.N.E.C.M.A.

Pendant toute la période qui précède la Seconde Guerre mondiale, l'effort du groupe Caudron-Renault a donc porté essentiellement sur l'aviation privée. Dès 1930, Renault avait proclamé que l'aviation de tourisme devenait accessible à tous, il anticipait de quelques années sur ce qui serait appelé " l'aviation populaire ".

Si les constructeurs de cellules commençaient à offrir des appareils adaptés aux besoins du tourisme -sécurité, confort, économie -Renault, lui, sortait un nouveau moteur de 100 ch, ancêtre du Bengali, répondant à ces exigences. Consommant 20 litres d'essence et 0,30 litre d'huile pour 1 700 tours/minute, il pouvait parcourir 100 kilomètres, soit l'équivalent de 140 kilomètres sur route. Aucun impôt ne frap­pait l'appareil de tourisme et, de plus, il bénéficiait d'une prime d'entretien variant de 65 à 160 francs par heure de vol.

Peut-être encore un moteur Renault

Après la dernière guerre mondiale, le moteur Renault pour l'aviation ne disparut pas complètement. Le Fouga de 1945 avait encore un moteur Renault 6 Q. de même que le Morane­Saunier 500, le Samson Bengali tout comme le Chardonneret NC 840 de la S.N.C.A.C., sans parler des appareils fabriqués par les nouvelles sociétés d'aviation telles que la S.N.C.A.S.. E. ou la S.N.C.A.S.O.

Aujourd'hui, cependant, le moteur Renault a fait son temps. Quelques-uns fonctionnent encore et, pour vous en rendre compte, dirigez vos pas vers un de ces nombreux petits terrains où foisonnent tant d'aéro-clubs ; un Stamp vous conviera à un baptême de l'air. Au retour, demandez au pilote qu'il lève le capot de son moteur, et votre surprise comme votre joie seront grandes d'y découvrir le nom de Renault.

Gilbert HATRY