J’admire ta patience de pèlerin rusé et je crois que je commence à bien t’aimer ! Pour une fois que j’ai l’occasion de parler de cette histoire… Elle a pourtant quelque chose d’une vieille putain réduite à l’hébétude par l’excès des hommes, cette histoire. Elle ressemble à un parchemin, dispersé de par le monde, essoré, rafistolé, désormais méconnaissable, dont le texte aura été ressassé jusqu’à l’infini – et tu es pourtant là, assis à mes côtés, espérant du neuf, de l’inédit. Cette histoire ne sied pas à ta quête de pureté, je te jure. Pour éclairer ton chemin, tu devrais chercher une femme, pas un mort.
On reprend le même vin que celui d’hier ? J’aime son âpreté, sa fraîcheur. L’autre jour, un producteur de vin me racontait ses misères. Impossible de trouver des ouvriers, l’activité est considérée comme haram, illicite. Même les banques du pays s’y mettent et refusent de lui accorder des crédits ! Ha, ha ! Je me suis toujours demandé : pourquoi ce rapport compliqué avec le vin ? Pourquoi diabolise-t-on ce breuvage quand il est censé couler à profusion au paradis ? Pourquoi est-il interdit ici-bas, et promis là-haut ? Conduite en état d’ivresse. Peut-être Dieu ne veut-il pas que l’humanité boive pendant qu’elle conduit l’univers à sa place et tient le volant des deux… Bon, bon, j’en conviens, l’argument est un peu vaseux. J’aime divaguer, tu commences à le savoir.
Toi, tu es là pour retrouver un cadavre et écrire ton livre. Mais sache que si je connais l’histoire, et pas qu’un peu, je ne sais presque rien de sa géographie. Alger n’est qu’une ombre dans ma tête. Je n’y vais presque jamais et je la regarde à la télévision parfois, vieille actrice démodée de l’art révolutionnaire. Pas de géographie dans cette histoire donc, le tout se résume aux trois grands lieux de ce pays : la ville – celle-là ou une autre –, la montagne – où l’on se réfugie quand on est attaqué ou qu’on veut faire la guerre –, le village, l’ancêtre de tout un chacun. Tout le monde veut une femme du village et une pute de la ville. Rien que par les fenêtres de ce bar, je peux te ranger l’humanité locale selon ces trois adresses. Donc quand Moussa s’en est allé vers la montagne parler d’éternité à Dieu, M’ma et moi avons quitté la ville pour rejoindre le village. C’est tout. Rien de plus avant que je n’apprenne à lire et que le petit bout de journal, relatant le meurtre de Moussa/Zoudj, longtemps gardé entre les seins de M’ma, ne devienne brusquement un livre avec un nom. Songes-y, c’est l’un des livres les plus lus au monde, mon frère aurait pu être célèbre si ton auteur avait seulement daigné lui attribuer un prénom, H’med ou Kaddour ou Hammou, juste un prénom, bon sang ! M’ma aurait pu avoir une pension de veuve de martyr et moi un frère connu et reconnu au sujet duquel j’aurais pu crâner. Mais non, il ne l’a pas nommé, parce que sinon, mon frère aurait posé un problème de conscience à l’assassin : on ne tue pas un homme facilement quand il a un prénom.
Reprenons. Il faut toujours reprendre et revenir aux fondamentaux. Un Français tue un Arabe allongé sur une plage déserte. Il est quatorze heures, c’est l’été 1942. Cinq coups de feu suivis d’un procès. L’assassin est condamné à mort pour avoir mal enterré sa mère et avoir parlé d’elle avec une trop grande indifférence. Techniquement, le meurtre est dû au soleil ou à de l’oisiveté pure. Sur la demande d’un proxénète nommé Raymond et qui en veut à une pute, ton héros écrit une lettre de menace, l’histoire dégénère puis semble se résoudre par un meurtre. L’Arabe est tué parce que l’assassin croit qu’il veut venger la prostituée, ou peut-être parce qu’il ose insolemment faire la sieste. Cela te déstabilise, hein, que je résume ainsi ton livre ? C’est pourtant la vérité nue. Tout le reste n’est que fioritures, dues au génie de ton écrivain. Ensuite, personne ne s’inquiète de l’Arabe, de sa famille, de son peuple. À sa sortie de prison, l’assassin écrit un livre qui devient célèbre où il raconte comment il a tenu tête à son Dieu, à un prêtre et à l’absurde. Tu peux retourner cette histoire dans tous les sens, elle ne tient pas la route. C’est l’histoire d’un crime, mais l’Arabe n’y est même pas tué – enfin, il l’est à peine, il l’est du bout des doigts. C’est lui, le deuxième personnage le plus important, mais il n’a ni nom, ni visage, ni paroles. Tu y comprends quelque chose, toi, l’universitaire ? Cette histoire est absurde ! C’est un mensonge cousu de fil blanc. Prends un autre verre, je te l’offre. Ce n’est pas un monde, mais la fin d’un monde que ton Meursault raconte dans ce livre. La propriété y est inutile, le mariage si peu nécessaire, la noce tiède, le goût fade et les gens sont comme déjà assis sur des valises, vides, sans consistance, cramponnés à des chiens malades et putrides, incapables de formuler plus de deux phrases et de prononcer plus de quatre mots à la fois. Des automates ! Oui, c’est ça, le mot m’échappait. Je me souviens de cette petite femme, une Française, que l’écrivain tueur décrit si bien et qu’il observe, un jour, dans la salle d’un restaurant. Gestes saccadés, yeux brillants, tics, angoisse de l’addition, gestes d’automates. Je me souviens aussi de l’horloge au beau milieu de Hadjout et je crois que cette pendule et cette Française sont jumelles. L’engin est tombé en panne quelques années avant l’Indépendance, il me semble.
Le mystère pour moi est devenu de plus en plus insondable. Vois-tu, j’ai, moi aussi, une mère et un meurtre sur le dos. C’est le destin. J’ai tué moi aussi, selon les vœux de cette terre, un jour où je n’avais rien à faire. Ah ! Je me suis juré tant de fois de ne plus revenir sur cette histoire, mais chacun de mes mouvements en est la mise en scène ou la convocation involontaire. J’attendais un petit curieux comme toi pour pouvoir enfin la raconter…
Dans ma tête, la carte du monde est un triangle. En haut, Bab-el- Oued, c’est la maison où est né Moussa. En bas, en longeant le balcon de la mer d’Alger, c’est ce lieu sans adresse où le meurtrier n’est jamais venu au monde. Et enfin, plus bas encore, il y a la plage. La plage, bien sûr ! Elle n’existe plus aujourd’hui ou s’est lentement déplacée ailleurs. Selon des témoins, on pouvait, auparavant, apercevoir le petit cabanon de bois à son extrémité. La maison était adossée à des rochers et les pilotis qui la soutenaient sur le devant baignaient déjà dans l’eau. La banalité de l’endroit m’avait frappé quand j’y étais descendu avec M’ma le premier automne après le crime. Je te l’ai déjà racontée, hein, cette scène, moi avec M’ma, au bord de la mer, moi sommé de me tenir en arrière, elle, face aux vagues, leur lançant une malédiction. Cette impression, je l’ai chaque fois que je m’approche de la mer. D’abord un peu de terreur, le cœur battant, et, assez vite, une déception. Comme si l’endroit avait été tout simplement trop exigu ! Comme si on avait voulu caser de force L’Iliade sur un bout de trottoir, entre une épicerie et un coiffeur. Oui, le lieu du crime était en réalité affreusement décevant. L’histoire de Moussa mon frère a besoin de la terre entière, selon moi ! Depuis, je cultive d’ailleurs une folle hypothèse : Moussa n’a pas été tué sur cette fameuse plage d’Alger ! Il doit y avoir un autre lieu caché, une scène escamotée. Ce qui expliquerait tout, du coup ! Pourquoi le meurtrier a été relâché après sa condamnation à mort et même après son exécution, pourquoi mon frère n’a jamais été retrouvé, et pourquoi le procès a préféré juger un homme qui ne pleure pas la mort de sa mère plutôt qu’un homme qui a tué un Arabe.
J’ai parfois songé à aller fouiller la plage à l’heure exacte du crime. C’est-à-dire l’été, lorsque le soleil est si proche de la terre qu’il peut rendre fou ou pousser au sang, mais cela ne servirait à rien. D’autant que la mer m’incommode. J’ai définitivement peur des flots. Je n’aime pas me baigner, l’eau me dévore trop vite. “Malou khouya, malou majache. El b’har eddah âliya rah ou ma wellache.{1}” J’aime cette vieille chanson d’ici. Un homme y chante son frère emporté par les mers. J’ai des images dans la tête et j’ai bu un peu trop vite, je pense. La vérité est que je l’ai déjà fait. À six reprises… Oui, j’y suis allé six fois, sur cette plage. Mais je n’ai jamais rien retrouvé, ni douilles ni traces de pas, ni témoins, ni sang séché sur le rocher. Rien. Pendant des années. Jusqu’à ce vendredi – c’était il y a une dizaine d’années. Jusqu’à ce jour où je l’ai vu. Sous un rocher, à quelques mètres des flots, j’ai soudain vu une silhouette qui se confondait avec l’angle obscur de l’ombre. J’avais marché longtemps sur la plage, je m’en souviens, avec le désir de m’assommer au soleil, d’être foudroyé par l’insolation ou l’évanouissement et de revivre un peu ce que ton auteur raconte. J’avais aussi beaucoup bu, je l’avoue. Le soleil était écrasant comme une accusation céleste. Il se brisait en aiguilles sur le sable et sur la mer, mais sans s’épuiser jamais. À un moment, j’ai eu l’impression de savoir où j’allais, mais c’était sans doute faux. Et puis, tout au bout de la plage, j’ai aperçu une petite source qui s’écoulait sur le sable, derrière le rocher. Et j’ai vu un homme, en bleu de chauffe, allongé avec nonchalance. Je l’ai regardé avec peur et fascination, lui sembla à peine me voir. L’un de nous deux était un spectre insistant et l’ombre était d’une noirceur profonde, elle avait la fraîcheur d’un seuil. Puis… Puis il me sembla que la scène virait au délire amusant. Lorsque j’ai levé la main, l’ombre en fit autant. Et lorsque je me suis déplacé d’un pas, sur le côté, elle se retourna pour changer de point d’appui. Je me suis alors arrêté, le cœur affolé et j’ai pris conscience que j’avais la bouche ouverte comme un idiot et que je n’avais pas d’arme, ni de couteau. Je suais à grosses gouttes, les yeux m’en brûlaient. Personne n’était dans les parages et la mer était muette. Je savais avec certitude que c’était un reflet, mais j’ignorais de qui ! J’ai poussé un gémissement et l’ombre vacilla. J’ai reculé d’un pas, l’ombre en fit de même, dans une sorte de curieuse rétraction. Je me suis retrouvé couché sur le dos, tremblant de froid, assommé par du mauvais vin. J’avais marché à reculons sur une dizaine de mètres avant de m’écrouler en pleurant. Oui, je te le confirme, j’ai pleuré Moussa des années après sa mort. Tenter de reconstituer le crime sur les lieux où il a été commis menait à une impasse, à un fantôme, à la folie. Tout cela pour te dire que ce n’est pas la peine d’aller au cimetière, ni à Bab-el-Oued, ni à la plage. Tu n’y trouveras rien. J’ai déjà essayé, l’ami. Je te l’ai annoncé d’emblée, cette histoire se passe quelque part dans une tête, la mienne et la tienne et celle des gens qui te ressemblent. Dans une sorte d’au-delà.
Ne cherche pas du côté de la géographie, je te dis.
Tu saisiras mieux ma version des faits si tu acceptes l’idée que cette histoire ressemble à un récit des origines : Caïn est venu ici pour construire des villes et des routes, domestiquer gens, sols et racines. Zoudj était le parent pauvre, allongé au soleil dans la pose paresseuse qu’on lui suppose, il ne possédait rien, même pas un troupeau de moutons qui puisse susciter la convoitise ou motiver le meurtre. D’une certaine manière, ton Caïn a tué mon frère pour… rien ! Pas même pour lui voler son bétail.
On devrait s’arrêter là, tu as de quoi écrire un beau livre, non ? L’histoire du frère de l’Arabe. Une autre histoire d’Arabe. Tu es piégé…
*
Ah, le fantôme, mon double… Il est derrière toi, avec sa bière ? J’ai noté ses manœuvres, il se rapproche de nous progressivement, mine de rien. Un vrai crabe. C’est toujours le même rituel. Il étale le journal et le lit avec application pendant la première heure. Ensuite, il y découpe des articles liés à des faits divers – des meurtres, je crois, car j’ai jeté un coup d’œil à ce qu’il avait laissé traîner sur la table une fois. Ensuite, il regarde par la fenêtre en buvant. Puis les contours de sa silhouette se floutent, il devient lui-même diaphane, s’efface presque. Tel un reflet. On l’oublie, on le contourne à peine quand le bar est bondé. On ne l’a jamais entendu parler. Le garçon semble deviner ses commandes. Il porte toujours la même vieille veste usée aux coudes, cette même frange sur son front large, et a toujours ce regard glacé par la lucidité. Sans oublier sa cigarette. Éternelle cigarette, le reliant aux deux par la fine volute qui se tord et s’étire vers le haut. Il m’a à peine regardé durant toutes ces années de voisinage. Ha, ha, je suis son Arabe. Ou alors, il est le mien.
Bonne nuit, l’ami.
Introduction
Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud est un roman qui engage une réflexion profonde sur la mémoire, l’identité et la quête de justice dans un contexte historique et postcolonial. À travers les yeux du frère de Moussa, l'Arabe tué par Meursault dans L'Étranger d'Albert Camus, Kamel Daoud recontextualise cette figure d'ombre pour lui attribuer une voix et une existence. Le récit devient ainsi un contrepoint à l'œuvre de Camus, qui, bien que traitant de l'absurde et de l'existence humaine, ignorait la souffrance et l'humanité du personnage de l'Arabe. Cette réécriture pose un regard acerbe sur les héritages postcoloniaux et la manière dont le passé affecte le présent. Dans ce commentaire, nous allons analyser le roman à travers trois axes : l'exploration de l'identité, la critique de l'absurde et la quête de justice et de sens dans un monde dévasté.
Premier axe : La quête de l'identité dans un monde déshumanisé
Le narrateur, Haroun, incarne un personnage en quête de son identité, perdu entre les héritages coloniaux et la désillusion post-indépendance. Tout d'abord, il ne cesse de revenir sur le meurtre de son frère Moussa, tué sans raison apparente par un Meursault indifférent. Ce meurtre absurde, qui s'inscrit dans la logique de l'absurde camusien, résonne comme un symbole de l’oubli et de l’invisibilité des victimes coloniales. La grande originalité du roman de Daoud est d'attribuer une identité à ce personnage que Camus avait relégué au rôle d'“Arabe” anonyme, sans nom et sans voix. Haroun dénonce cette absence d'identité et fait le procès de l'indifférence qui entoure son frère, affirmant que son frère aurait pu devenir célèbre si seulement il avait eu un nom. Ce désir d'identité et de reconnaissance se manifeste également dans le narrateur, qui, à travers son propre regard sur la société algérienne, cherche à comprendre qui il est, en relation avec son passé, sa famille et son pays. Cette quête de sens est rendue difficile par un monde où les héritages sont lourds, où les mémoires sont étouffées et où l’individualité semble se perdre dans le collectif.
Deuxième axe : La critique de l'absurde et de la société postcoloniale
Kamel Daoud, tout en réécrivant L'Étranger, propose une critique acerbe de la société postcoloniale algérienne, qui semble toujours marquée par l'absurde. Ce concept de l’absurde, développé par Camus dans son roman, trouve un écho dans le regard d’Haroun sur le monde qui l'entoure. Le meurtre de Moussa par Meursault, raconté de manière détachée et presque banale dans L'Étranger, est ici dépeint par Haroun comme un événement tragique qui révèle une société déshumanisée et dénuée de sens. Le narrateur déconstruit la logique absurde du meurtre, où la violence ne trouve pas de justification rationnelle. Par cette réécriture, Daoud nous invite à remettre en question l’absurde, non seulement comme un principe philosophique, mais aussi comme un héritage de la violence coloniale qui continue de hanter l’Algérie. L’absurde se trouve ainsi amplifié dans la société algérienne contemporaine, où l’indifférence, la violence et l’injustice semblent omniprésentes. Haroun voit en Meursault un homme qui incarne l’absurde, mais également un reflet de la société qui permet à de telles injustices de se produire, sans véritable répercussion.
Troisième axe : La quête de justice et de sens dans un monde dévasté
Au-delà de l’exploration de l’identité et de la critique de l’absurde, Meursault, contre-enquête met en lumière la quête de justice et de sens dans un monde dévasté par les conflits coloniaux et postcoloniaux. Haroun cherche à comprendre l’injustice du meurtre de son frère, et son enquête devient le moteur de sa réflexion sur la société algérienne. Il questionne la façon dont l’Algérie a géré son passé colonial et comment la guerre d'indépendance a façonné un monde où la vérité et la justice sont souvent détournées. La justice, dans ce roman, apparaît comme une illusion, une quête sans fin. Le narrateur cherche à reconstruire le passé, mais se heurte constamment à des déceptions. L’absurdité du procès de Meursault, où l'on juge un homme plus pour son indifférence à sa mère que pour son meurtre, souligne l’absurdité d’une justice déconnectée de la réalité des victimes. Haroun se trouve face à un monde où le sens et la justice semblent inaccessibles, où le passé se mêle sans cesse au présent et où les blessures ne guérissent jamais vraiment. Cette quête inassouvie de sens et de justice fait écho à la situation postcoloniale de l’Algérie, où les idéaux de l'indépendance semblent avoir été perdus dans le tumulte des luttes internes et de la violence.
Conclusion
En somme, Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud est bien plus qu’une réécriture de L'Étranger de Camus. C’est une réflexion profonde sur l’identité, la justice et la mémoire dans un monde dévasté par le colonialisme et les conflits internes. À travers le personnage de Haroun, Daoud interroge la manière dont les héritages postcoloniaux conditionnent l’individu, et comment la quête de sens et de justice peut sembler une entreprise vaine dans une société marquée par l’absurde. Le roman met en lumière les fractures d'une Algérie contemporaine, où la violence, la mémoire et les idéologies religieuses et politiques se percutent. Par son style d’écriture, alliant humour noir et réflexion philosophique, Daoud parvient à déconstruire l’absurde et à redonner voix à ceux qui ont été relégués au silence. Il nous invite à réfléchir sur la manière dont les histoires sont racontées, et surtout sur celles qui sont oubliées, effacées ou ignorées dans le récit collectif. Meursault, contre-enquête nous rappelle l’importance de donner un nom et une voix aux invisibles de l’histoire.