« L’amour est un jeu… mais quand le hasard s’en mêle, les règles se brouillent, les cœurs s’emballent, et les masques tombent. »
Auteur : Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux
Genre : Comédie en prose, en trois actes
Date de création : 1730
Lieu de représentation : Hôtel de Bourgogne, troupe des Comédiens Italiens
Mouvement littéraire : Le préclassicisme finissant / Lumières (par sa critique sociale)
Silvia, jeune aristocrate vive et intelligente, est promise à Dorante, un inconnu pour elle. Méfiante face au mariage arrangé, elle élabore un stratagème audacieux : échanger sa place avec celle de sa femme de chambre, Lisette, afin de pouvoir observer son futur époux incognito.
Mais ce qu’elle ignore, c’est que Dorante a eu exactement la même idée ! Il arrive chez Orgon, le père de Silvia, déguisé en valet sous le nom de Bourguignon, tandis que son propre valet Arlequin joue le rôle du maître.
👉 Commence alors un jeu de masques, un double miroir où chacun tombe amoureux de celui qu’il pense être un simple domestique.
Silvia, déguisée, est troublée par l’esprit et la sincérité du « valet » Bourguignon (Dorante) ; lui, de son côté, tombe amoureux de celle qu’il croit être une servante. Lisette et Arlequin, quant à eux, s’éprennent aussi l’un de l’autre, dans une parodie irrésistible de leur maîtres.
Le père Orgon et Mario, frère de Silvia, sont les seuls à connaître toute la vérité et s’amusent de ces échanges cocasses.
Lorsque les sentiments deviennent trop forts, Dorante révèle son identité à Silvia… qui garde encore son masque pour tester ses intentions. Une ultime feinte, une dernière épreuve, puis vient le moment de la vérité : le jeu cesse, l’amour triomphe, et chacun retrouve sa place dans une double union :
✔️ Silvia épouse Dorante
✔️ Lisette épouse Arlequin
Rôle : Jeune noble, héroïne lucide et rusée.
Traits : Vive d’esprit, méfiante, mais aussi émotive et sincère.
Particularité : Se fait passer pour Lisette pour tester Dorante.
Évolution : De la méfiance à l’amour assumé, en revendiquant le droit au choix amoureux → symbole de la femme moderne chez Marivaux.
Rôle : Prétendant officiel de Silvia.
Traits : Sincère, délicat, respectueux mais troublé.
Particularité : Se fait passer pour un valet, Bourguignon.
Évolution : Refuse d’aimer une servante à cause de son statut, puis surmonte ce préjugé par amour → victoire du cœur sur la hiérarchie.
Rôle : Femme de chambre de Silvia.
Traits : Drôle, spontanée, rusée.
Particularité : Devient fausse maîtresse le temps du jeu.
Évolution : Se laisse séduire par Arlequin ; sa naïveté cache une grande lucidité. Elle est souvent la première à comprendre le vrai jeu.
Rôle : Valet de Dorante.
Traits : Comique, naïf, un peu balourd mais attendrissant.
Particularité : Joue le rôle du faux Dorante.
Évolution : Incarnation du comique traditionnel (hérité de la commedia dell’arte), il devient aussi un amoureux sincère, moins ridicule qu’il n’y paraît.
Rôle : Père de Silvia.
Traits : Bienveillant, moderne, complice.
Particularité : Il connaît toute la vérité et laisse faire, manipulant doucement les fils du jeu → regard amusé sur la jeunesse.
Rôle : Frère de Silvia.
Traits : Moqueur, joueur, complice de son père.
Rôle dans l’intrigue : Pimente le jeu, crée des situations embarrassantes pour sa sœur afin de la pousser à avouer ses sentiments.
Marivaux pousse l’art du déguisement au sommet : non seulement les maîtres deviennent valets, mais les valets deviennent maîtres. Cela permet de remettre en cause l’ordre social : l’amour peut-il naître au-delà des classes ?
➤ Le théâtre devient un laboratoire social où l’identité est un masque.
Dorante aime malgré la « bassesse » supposée de Silvia. Silvia le pousse à ses limites : est-il capable d’épouser une servante par amour ?
Le jeu devient une expérience morale.
Silvia n’est pas soumise : elle dirige le jeu, teste, doute, résiste, puis choisit. Elle incarne une vision moderne et éclairée de la femme au XVIIIe siècle, capable de maîtriser son destin sentimental.
Langage précieux, subtil, souvent indirect
Jeux de mots, ironie légère
Analyse psychologique raffinée des sentiments
Le "marivaudage" est souvent défini comme cet art délicat de dire l’amour sans le dire directement, de négocier les émotions comme des duels verbaux.
Parce qu’elle fait rire tout en faisant réfléchir.
« Le Jeu de l’amour et du hasard » est une horlogerie subtile, une mécanique du cœur qui explore :
la fragilité des sentiments,
les hiérarchies sociales en crise,
et surtout, le pouvoir des femmes à s’émanciper dans un monde d’hommes.
C’est une pièce d’intelligence, d’humour et de critique sociale déguisée, dans laquelle les masques tombent, mais les vérités apparaissent.
Acte I :
Silvia est la fille de Monsieur Orgon. Elle a peur d’épouser Dorante, un jeune homme que son père veut lui donner pour mari, mais qu’elle ne connaît pas du tout. Pour mieux le connaître, elle décide de se déguiser : elle échange ses vêtements avec sa femme de chambre, Lisette. Ainsi, elle pourra observer Dorante sans qu’il sache qui elle est vraiment. Mais Dorante a eu la même idée ! Lui aussi se déguise pour venir chez Monsieur Orgon : il se fait passer pour un serviteur appelé Bourguignon, tandis que son valet, Arlequin, joue le rôle de Dorante. Seuls Monsieur Orgon et son fils Mario savent que Silvia et Dorante sont déguisés. Ils décident alors de laisser faire ce “jeu de l’amour et du hasard” pour voir ce qui va se passer.
Acte II :
À partir de la fin du premier acte et tout au long du deuxième, les maîtres et les serviteurs, tous déguisés, se rencontrent et cela provoque beaucoup de surprises et de malentendus. Silvia et Dorante sont surpris de se sentir attirés par quelqu’un qu’ils croient être de classe sociale inférieure. De leur côté, Lisette et Arlequin, qui jouent le rôle des maîtres, sont très contents de voir qu’ils peuvent séduire la personne qu’ils pensent être leur patron ou maîtresse. Quand Silvia apprend enfin la vraie identité de Dorante, elle est très soulagée. Mais elle décide de continuer à jouer son rôle sans se révéler tout de suite.
Acte III :
Silvia veut maintenant que Dorante lui prouve vraiment son amour. Elle espère qu’il lui proposera le mariage, même s’il croit encore qu’elle est sa femme de chambre. Avec l’aide de son frère Mario, qui fait un peu monter la jalousie de Dorante, Silvia réussit à faire tomber ce dernier amoureux d’elle, sans qu’il sache qui elle est vraiment. Ce n’est que dans la dernière scène qu’elle lui dit enfin la vérité. Arlequin et Lisette, qui sont eux aussi démasqués à la fin, se promettent malgré tout un amour sincère, même s’ils sont un peu déçus.