Honoré de Balzac, Le Père Goriot (1835):
« Rastignac se leva, prit son chapeau, jeta un dernier regard sur ce vieillard, sur cette chambre, sur ce drame muet, et sortit. En franchissant le seuil, il se dit à lui-même : ‘A nous deux maintenant, société !’ »
Dans cet extrait, Eugène de Rastignac, un jeune provincial venu à Paris pour réussir socialement, fait ses adieux à Goriot, vieillard incarnant la figure du sacrifice paternel. Le moment où il dit : « À nous deux maintenant, société ! » symbolise une étape cruciale dans son évolution. Il renonce à ses idéaux et décide d’affronter la société parisienne pour s’élever dans l’échelle sociale. Cette phrase marque son entrée dans le monde impitoyable de la lutte sociale, caractéristique de l'univers balzacien.
Représentation fidèle de la réalité sociale :
Extrait : « Rastignac se leva, prit son chapeau, jeta un dernier regard sur ce vieillard, sur cette chambre. »
La scène décrit une chambre modeste, montrant les conditions de vie difficiles de certains personnages. Cela reflète la réalité sociale de l’époque, notamment les inégalités et les sacrifices liés à l'ascension sociale.
L’ascension sociale comme thématique centrale :
Extrait : « À nous deux maintenant, société ! »
Cette phrase met en lumière l’ambition de Rastignac et les obstacles qu’il devra affronter. Cela illustre le thème récurrent du réalisme : le désir d'intégration dans la haute société malgré les barrières économiques et morales.
Vision pessimiste de la destinée humaine :
Extrait : « Sur ce drame muet. »
L’expression évoque le sacrifice silencieux de Goriot et les désillusions de Rastignac. Balzac offre une vision sombre de l’humanité, marquée par l’égoïsme et les luttes d’intérêt.
Psychologie des personnages :
Extrait : « Il se dit à lui-même. »
Le monologue intérieur de Rastignac révèle ses pensées et ses dilemmes. Cette introspection approfondie est un procédé réaliste qui donne de l’épaisseur aux personnages.
Descriptions détaillées :
Extrait : « Jeta un dernier regard sur ce vieillard, sur cette chambre. »
Les détails sur le cadre et le vieillard renforcent l’impression de réel. La scène s'ancre dans un environnement précis, typique des récits réalistes.
Gustave Flaubert, Madame Bovary (1857):
« Emma, assise au bord de la fenêtre, regardait les champs. La terre, labourée en longs sillons réguliers, semblait une peau de bête, étendue et noire. Au loin, les arbres de la haie, frémissant tous ensemble, produisaient un seul bruit, comme un frisson continu. »
L'extrait tiré de Madame Bovary de Gustave Flaubert représente parfaitement le réalisme littéraire. Flaubert y décrit minutieusement la campagne normande, un décor qui reflète l'état d'esprit de l'héroïne, Emma Bovary. Cette scène illustre l'attention que les écrivains réalistes accordent aux descriptions détaillées et à la représentation fidèle du quotidien.
Le contexte du roman est marqué par le courant réaliste, né en réaction au romantisme, visant à représenter la vie telle qu'elle est, sans idéalisation. Flaubert explore dans ce roman des thèmes universels, tels que la désillusion, l'ennui, et la quête de sens, en mettant en avant la banalité de la vie d'Emma et son incapacité à échapper à son sort.
Descriptions détaillées :
L'extrait dépeint un paysage rural avec précision :
« La terre, labourée en longs sillons réguliers, semblait une peau de bête, étendue et noire. »
Cette description rend le décor vivant et tangible, comme une peinture réaliste.
Vocabulaire spécialisé et concret :
Flaubert utilise des termes liés à l'agriculture (« labourée », « sillons ») pour ancrer la scène dans une réalité accessible et compréhensible.
Vision pessimiste et mélancolique :
L'atmosphère générale de l'extrait est sombre et monotone :
« produisaient un seul bruit, comme un frisson continu. »
Ce « frisson » évoque une sensation d'inquiétude et d'immobilité, reflétant l'ennui existentiel d'Emma.
Écriture impersonnelle :
Flaubert adopte une narration objective, ne laissant transparaître aucune émotion personnelle, pour laisser les faits et les descriptions parler d'eux-mêmes.
Thématique réaliste – L'ennui et la désillusion :
Le paysage monotone reflète l'état d'esprit d'Emma, enfermée dans une vie banale qu'elle rejette intérieurement.
Absence d'idéalisation :
Contrairement au romantisme qui embellit la nature, ici, la campagne est présentée sans poésie :
« semblait une peau de bête, étendue et noire. »
Cette métaphore, bien que suggestive, est brute et terre-à-terre.
Émile Zola, L'Assommoir (1877):
« Gervaise, les yeux écarquillés, regardait ce tas de charbons, comme une bête surprise. Elle avait froid ; elle se blottit davantage contre la muraille. Le vent hurlait dans la rue, soulevant des tourbillons de poussière. »
Dans L'Assommoir d’Émile Zola, cet extrait illustre la détresse de Gervaise, une femme confrontée à la pauvreté et à des conditions de vie extrêmement difficiles. Le naturalisme, dont Zola est le chef de file, s’appuie sur une observation minutieuse de la réalité sociale et utilise une écriture réaliste pour décrire les milieux populaires.
Ici, Zola met en scène Gervaise, un personnage emblématique des victimes de la misère. Les termes comme « les yeux écarquillés », « regardait ce tas de charbons » et « comme une bête surprise » soulignent à la fois son désespoir et son impuissance face à la dureté de la vie.
Le contexte historique, marqué par l’industrialisation et l’émergence du prolétariat urbain, est essentiel pour comprendre cet extrait. L’œuvre de Zola s’inscrit dans une époque où les conditions de vie des ouvriers étaient déplorables, et il s’efforce de les dépeindre avec une grande objectivité.
Thème de la misère sociale :
Extrait : « Elle avait froid ; elle se blottit davantage contre la muraille. »
Analyse : Cette phrase décrit la pauvreté de Gervaise, incapable de se réchauffer ou d’améliorer sa situation. La misère est une thématique récurrente dans le réalisme.
Description précise et informative :
Extrait : « Le vent hurlait dans la rue, soulevant des tourbillons de poussière. »
Analyse : La description du décor met en avant un cadre réaliste, presque tangible, qui reflète l’ambiance oppressante de l’environnement ouvrier.
Vision pessimiste de la destinée humaine :
Extrait : « Gervaise, les yeux écarquillés, regardait ce tas de charbons, comme une bête surprise. »
Analyse : Cette comparaison à une « bête surprise » évoque la déshumanisation engendrée par la pauvreté. L’existence de Gervaise semble marquée par la souffrance et l’absence d’espoir.
Écriture objective et impersonnelle :
Extrait : « Elle se blottit davantage contre la muraille. »
Analyse : L’auteur s’efface derrière les faits. Aucun jugement ou émotion personnelle n’est exprimé, ce qui renforce le caractère réaliste du récit.
Milieu populaire comme sujet central :
Extrait : « Regardait ce tas de charbons. »
Analyse : Le choix d’un sujet aussi ordinaire que des charbons reflète la volonté de Zola de représenter les classes populaires et leur quotidien.
Guy de Maupassant, Une vie (1883):
« Elle se tenait debout, au bord de la fenêtre, les mains appuyées au rebord, regardant la campagne. Le soleil couchant inondait les champs d’une lumière dorée. Des nuages roses flottaient dans le ciel. Elle respirait profondément l’air frais du soir. Et elle se sentait triste, comme toujours, sans savoir pourquoi.»
Explication et contexte de l'extrait
Cet extrait de Une vie (1883) de Guy de Maupassant illustre un moment de solitude et de réflexion pour le personnage. L’héroïne est dépeinte debout près de la fenêtre, observant la nature au coucher du soleil. L’atmosphère est marquée par une mélancolie douce, avec des éléments comme « l’air frais du soir » et « des nuages roses » renforçant ce sentiment. La tristesse qu’elle ressent est vague, sans cause apparente, reflétant les thèmes du réalisme, qui explore souvent des émotions universelles et des états d'âme ambigus.
Contexte
Contexte historique et littéraire : Une vie s’inscrit dans le mouvement réaliste du XIXe siècle, qui vise à représenter la réalité avec objectivité. Maupassant est connu pour ses descriptions précises et ses analyses psychologiques, deux éléments essentiels du réalisme.
Contexte de l'œuvre : Ce roman relate la vie de Jeanne, une jeune femme confrontée aux désillusions de l’amour et de la société, thèmes typiques des œuvres réalistes.
Descriptions détaillées du décor naturel :
Extrait : « Le soleil couchant inondait les champs d’une lumière dorée. Des nuages roses flottaient dans le ciel. »
Analyse : Maupassant utilise des descriptions visuelles pour ancrer la scène dans un cadre réaliste. Le paysage reflète l’état d’âme du personnage, un procédé récurrent dans le réalisme.
Focus sur les sentiments ambigus :
Extrait : « Elle se sentait triste, comme toujours, sans savoir pourquoi. »
Analyse : La tristesse inexplicable de Jeanne est une illustration de l’approche réaliste des émotions humaines : elles sont complexes, souvent sans raison évidente.
Absence d’idéalisation :
Extrait : « Elle respirait profondément l’air frais du soir. »
Analyse : Contrairement au romantisme qui aurait sublimé cet instant, Maupassant décrit un moment quotidien, banal mais chargé d’émotion.
Vision pessimiste de l’existence :
Extrait : « Et elle se sentait triste, comme toujours. »
Analyse : Le réalisme expose souvent une vision désenchantée de la vie humaine. La récurrence de la tristesse chez Jeanne illustre cette perspective.
Lien avec la psychologie du personnage :
Extrait : « Les mains appuyées au rebord, regardant la campagne. »
Analyse : L’attitude physique de Jeanne (posture passive, regard contemplatif) traduit son état intérieur. Maupassant excelle dans la représentation de la psychologie des personnages à travers leurs gestes et observations.
Stendhal, Le Rouge et le Noir (1830):
« Julien Sorel, né à Verrières, petit bourg de Franche-Comté, fils d’un menuisier, avait depuis longtemps conçu un grand dessein. Il voulait sortir de l’obscurité où l’avait jeté le hasard de sa naissance, et se faire un nom.»
Contexte :
L'extrait est tiré de Le Rouge et le Noir de Stendhal, roman publié en 1830, considéré comme précurseur du réalisme. L’histoire se déroule sous la Restauration, époque marquée par des tensions entre classes sociales et par une lutte pour le pouvoir et le statut. L’ambition sociale et l’ascension des classes modestes sont des thèmes centraux.
Explication :
Dans cet extrait, Julien Sorel, fils d’un menuisier, rêve de gravir l’échelle sociale malgré sa naissance modeste. Il illustre l’aspiration d’un jeune homme de condition modeste à transcender sa situation grâce à ses efforts, son intelligence et son ambition. Ce passage met en lumière la quête de reconnaissance sociale, un thème clé du réalisme. Julien Sorel incarne un personnage complexe, tiraillé entre ses aspirations et les obstacles liés à sa condition.
Dépeindre une réalité sociale fidèle :
Extrait : « Julien Sorel, né à Verrières, petit bourg de Franche-Comté, fils d’un menuisier. »
Cette phrase situe Julien dans un cadre précis et réaliste, celui d’un village rural et d’une famille modeste. Le réalisme s’attache à représenter des personnages issus de classes populaires.
L’ascension sociale :
Extrait : « Il voulait sortir de l’obscurité où l’avait jeté le hasard de sa naissance. »
Le thème de l’ascension sociale est typique du réalisme. Julien cherche à se libérer des contraintes sociales et économiques qui l’entourent.
Une psychologie complexe :
Extrait : « avait depuis longtemps conçu un grand dessein. »
Le réalisme accorde une grande importance à la psychologie des personnages. Julien est montré comme un jeune homme réfléchi, habité par des ambitions fortes et un désir profond de changement.
Une écriture objective :
Stendhal adopte un ton neutre et factuel pour présenter Julien et ses aspirations, sans embellissement ni jugement.
Rejet de l’idéalisation romantique :
Contrairement au romantisme, qui aurait pu glorifier Julien en héros passionné, Stendhal le présente comme un individu déterminé, mais limité par sa condition et les normes de la société.
Le contexte social et historique :
Le récit est ancré dans une époque précise, la Restauration, qui influence directement les ambitions et les défis du personnage.
Un vocabulaire précis :
Les termes « petit bourg » et « menuisier » ancrent le texte dans une réalité concrète, évoquant une classe sociale modeste.
George Sand, La Mare au diable (1846):
« La ferme était basse, couverte en chaume, et s’adossait à une colline boisée. Devant, un grand pré s’étendait jusqu’à la rivière. Des poules caquetaient dans la cour, et une petite chienne dormait au soleil.»
Explication du texte et contexte
Dans cet extrait tiré de La Mare au Diable (1846), George Sand décrit une ferme avec simplicité et précision :
« La ferme était basse, couverte en chaume, et s’adossait à une colline boisée. Devant, un grand pré s’étendait jusqu’à la rivière. Des poules caquetaient dans la cour, et une petite chienne dormait au soleil. »
Contexte historique et littéraire :
La Mare au Diable précède le réalisme tel qu’il est défini dans votre fascicule, mais on y retrouve une attention marquée pour la vie paysanne et la nature. George Sand s'intéresse aux conditions des paysans, s'inscrivant dans une perspective pré-réaliste qui valorise la simplicité et la dignité des classes populaires.
Thème principal :
Une mise en avant du quotidien rural, sans idéalisation excessive, avec des descriptions fidèles à la réalité.
Description fidèle et détaillée :
Le texte commence par une description précise : « La ferme était basse, couverte en chaume, et s’adossait à une colline boisée. »
Cela illustre l’importance des descriptions réalistes, un procédé clé selon le fascicule.
Sujets simples et ancrés dans la réalité :
La scène évoque la campagne, les poules, et une chienne qui dort : des éléments du quotidien des paysans.
Ce choix de sujets est typique du réalisme, qui privilégie des thèmes réels et des vies ordinaires.
Représentation de la classe populaire :
L’attention portée à la ferme et à ses environs montre un intérêt pour les classes modestes, en cohérence avec la critique sociale évoquée dans le réalisme.
Absence d’idéalisation ou de lyrisme romantique :
Contrairement au romantisme, le passage est écrit avec une simplicité d’expression et sans exagération émotionnelle.
Impression de tranquillité quotidienne :
L’emploi de phrases simples et courtes donne une écriture objective, centrée sur la réalité telle qu’elle est perçue.