PAYS DE BLÉ ET D'ORGE, DE VIGNE, DE FIGUIERS

Deutéronome 8, 8

« Un pays ruisselant de lait et de miel » Nombres 13, 28

« Je ferai pousser pour eux des plants de renom ». Ezéchiel 34, 29

La terre d'Israël est célèbre depuis les temps bibliques pour sa flore magnifique, l'abondance de ses fleurs et de ses fruits de toute espèce, et de même que pour sa faune très diversifiée. L'évocation de la faune et de la flore est un autre sujet dans lequel semble exceller Maria Valtorta. Pourtant il s'agit là encore de domaines où le risque d'erreur menace l'écrivain à chaque ligne. Avec une cinquantaine d'espèces minérales, une centaine d'espèces animales, et près de cent cinquante espèces végétales mentionnées, la faune et la flore dans l'oeuvre de Maria Valtorta n'ont vraiment rien à envier à celle pourtant renommée de la bible[299] ! Mais cette évocation, à l'examen, montre clairement qu'elle n'est absolument pas un simple plagiat de descriptions bibliques.

Des potagers bien garnis

Il semble admis que la pomme de terre, la tomate, l'arachide, le poivron, le chocolat, la goyave, l'avocat et l'ananas, pour citer quelques aliments courants sur nos tables aujourd'hui, étaient inconnus en Palestine au temps de Jésus... Tout comme ils sont absents dans le texte de Maria Valtorta qui, par ces omissions, évite ainsi le piège de l’anachronisme ! Il n'est pas non plus question de carotte dans l'œuvre. La carotte telle que nous la consommons de nos jours, est le produit de l’intervention humaine, au 16e siècle, par croisement des variétés à chair rouge et à chair blanche. Un autre absent, le maïs, était effectivement inconnu en Palestine à cette époque.

Originaire des Amériques, le maïs fut introduit en Europe au 16e siècle. Voici un bref échantillonnage des descriptions horticoles de Maria Valtorta: « c'est un jardin. Il n'y a pas de salade. Mais des poireaux, des aulx, des herbes fines, des légumes, il y en a. Et les courges !»384.3. « Des légumes et j'ai encore quelques melons »496.1. « Une corde où sont suspendus des paquets d'aulx et d'oignons »531.8. « Ils sont passés pour prendre mes concombres »564.11. Poireaux, aulx, oignons, melons, concombres étaient en effet, semble-t-il, très prisés des hébreux[300]. Mais il y a aussi dans l'oeuvre des fenouils, « la chicorée, les salades, les légumes, les jeunes plantes de cucurbitacées », des figues, des dattes, des olives, du raisin, des pommes, des grenades, des fraises, des framboises, etc.

Des fleurs à profusion

Dès les premiers jours du printemps, la Palestine se couvrait de fleurs de toutes sortes. Maria Valtorta s'émerveille devant cette profusion de parfums et de couleurs : « en ce début du printemps de Palestine, qui répand ses nuées d'amandiers en fleurs et dépose les perles des fleurs qui vont éclore sur les poiriers et les pommiers, les grenadiers, les cognassiers, tous, tous les arbres les plus riches et les plus agréables pour leurs fleurs et leurs fruits.(...) Les rives... sont constellées des boutons d'or des renoncules, des étoiles rayonnantes des marguerites et près d'elles ... les myosotis élégants... En ce début de printemps, le lac n'a pas encore cette opulence qui le rendra triomphal les mois suivants. Il n'a pas encore cette somptuosité... des mille et mille rosiers rigides ou flexibles ... des milliers de corymbes des cytises et des acacias (...) d'alignements de tubéreuses en fleurs, des mille et mille étoiles des agrumes, de tout ce mélange de couleurs, de parfums violents, enivrants »158.1. « Des odeurs de bois, de menthe, de violettes, des premiers muguets, des rosiers toujours plus fleuris et, par-dessus tout, cette odeur fraîche, légèrement amère des fleurs des arbres à fruits qui répandent partout une neige de pétales sur l'herbe »348.4 « quantité de muguets et de narcisses sauvages »174.12. « les trèfles et les bleuets, les camomilles et les liserons »382.4. « autant de fleurs qui émergent de la terre dépouillée des blés, coquelicots, bleuets et marguerites »411.1. Mais aussi « les lys et les roses, le jasmin et le camphre, les cinnamomes et les œillets »300.7. Il serait possible de rassembler ainsi des dizaines d'espèces, tant est riche et détaillée la flore que Maria Valtorta ne se lasse pas de nous faire admirer, au hasard des déplacements du Maître et de ses disciples. Seule une vérification attentive et systématique met en évidence (mais ce n'est plus une surprise), que toutes ces descriptions s'intègrent avec une parfaite harmonie dans la chronologie, respectant le cycle des saisons et les données climatiques propres à la Palestine.

Les beaux champs de lin de Lazare

A de nombreuses reprises Maria Valtorta évoque les champs de lin de la Judée. « Ils vont vers de magnifiques vergers et des champs de lin de hauteur d’homme, prêt à être coupés »84.1. Près de Béthanie « Jésus se repose près d'un champ de lin tout en fleurs, qui appartient à Lazare... Si haut que soit le lin à son complet développement, Jésus émerge largement de cette mer verte et bleue »204.1. Ailleurs encore « Derrière le fourré, un champ de lin dont le vent fait onduler les hautes tiges qui commencent à sortir leurs fleurs de couleur bleu ciel »575.2. Ou encore « Des étoupes floconneuses de lin ou de chanvre semblent des tresses défaites le long du mur blanchi à la chaux »262.2. Il est avéré que le lin, très fréquent en Egypte, était aussi cultivé en Palestine (comme le chanvre et peut-être même le coton) bien avant le temps de Jésus. La gaze, cette fine étoffe de lin et de soie, doit d'ailleurs son nom à la ville de Gaza où elle était initialement fabriquée[301].

De même le byssus, ou byssos[302] était bien connu en Judée. Maria Valtorta l'évoque à maintes reprises dans son œuvre : « Il en sort tant de sachets de byssos... Des couleurs délicates transparaissent à travers le lin[303] très fin »294.3.

Réflexions sur le riz, l'avoine et le seigle

Depuis des milliers d'années, le riz a été l'alimentation de base en Asie du Sud et en Orient. Pourtant il n'est pas question du riz dans la bible, contrairement au Talmud qui le connaît sous le nom de orez. Aucun témoignage ne mentionne sa culture en Palestine au premier siècle. Mais cette culture du riz est pratiquée dans la plaine de Hulé depuis maintenant quelques siècles[304]. L'absence de la moindre allusion au riz par Maria Valtorta peut donc être porté au crédit de l'authenticité de ses révélations. Le seigle et l'avoine ne sont pas non plus mentionnés dans la bible. Si donc Maria Valtorta y avait puisé son inspiration, elle n'aurait sans doute pas cité dans son œuvre l'avoine à plusieurs reprises, dès les premières pages : « une belle tonnelle qui coupe en deux le verger jusqu’au commencement des champs, dont les avoines sont récoltées »5.1 comme aux toutes dernières : « la paille peut-elle suffire? Elle ne suffit pas même pour le ventre des bêtes de somme, et si leur maître ne fortifie pas les animaux avec de l'avoine et des herbes fraîches, les animaux nourris de la seule paille dépérissent et finissent par mourir »635.13. Quant au seigle, elle en observe dans la région de Kérioth : « Dans des champs assez étroits mais bien tenus, cultures diverses de céréales : orge, seigle surtout, et aussi de beaux vignobles sur les terres les plus ensoleillées »78.1. Un texte du Talmud, la Mischna, confirme que le seigle (schiphon) et l'avoine (schibboleth schoual) étaient connus et cultivés en Judée vers le premier siècle[305], mais il est hautement improbable que ce texte ait pu influencer Maria Valtorta !

Les agaves

A plusieurs reprises dans l'œuvre il est question de l'agave, cette étonnante cactée originaire d'Amérique, mais qui existe à l'état sauvage dans les zones méditerranéennes. Maria Valtorta les a bien observés et en donne un portrait très détaillé. « Trente années d’espérance, oh! la longue attente! voilà : maintenant ils sont fleuris comme la fleur de l’agave solitaire »102.3 Un peu plus loin : « Il rappelle l’agave qui, près de mourir, sort un grand candélabre avec sa fleur à sept pétales qui flamboient et répandent son parfum »127.1. Puis : « Des chèvres blanches et des chèvres noires, grandes, agiles, aux longues cornes recourbées, aux yeux doux et vifs broutent les cactées et donnent l'assaut aux agaves charnus, à ces énormes pinceaux de feuilles dures et épaisses qui sont comme des artichauts ouverts au milieu desquels se dresse le candélabre de cathédrale, à la tige géante aux sept bras sur lesquels flambe une fleur jaune et rouge au parfum agréable »221.1... « Plus belle est la fleur de l'agave, si majestueuse, si puissante »412.1.

Toutes ces descriptions sont exactes : après dix ou quinze années s'élève en son centre une tige pouvant atteindre 12 m, et qui porte au sommet des paquets de fleurs fournissant un nectar abondant et odorant. La floraison est unique et peu après la tige de l'agave meurt. Dois-je préciser que je n'ai trouvé nulle mention de l'agave dans les nombreux dictionnaires bibliques que j'ai consulté, ce qui montre que la bible n'était pas, ici encore, la source d'inspiration de Maria Valtorta.

Les figues de Barbarie de Sychar

Lorsque Jésus passe par Sychar, au début janvier 28, Maria Valtorta décrit : « Jésus marche devant, seul, en frôlant une haie de cactus qui, se moquant de toutes les autres plantes dépouillées, avec leurs grosses palettes épineuses sur lesquelles il reste quelques fruits que le temps a rendus rouge brique ou sur lesquelles déjà rit quelque fleur précoce jaune teintée de cinabre »147.1. C'est la description exacte des figues de Barbarie. De couleur pourpre plus ou moins foncée, ou parfois jaunâtre avec des nuances de rouge. La floraison de ce cactus est jaune. Les fruits se récoltent effectivement jusqu'en décembre/janvier. Originaire de Goa, il est aussi appelé figuier d’Inde, et était connu de Pline, de Théophraste et de Strabon. (Dictionnaire universel de Trévoux 1738, tome 3 pp. 815/816). Ce qui nous permet d'apprécier une fois de plus la spontanéité et la qualité des descriptions de Maria Valtorta : « Ils trouvent finalement une haie de figuiers d'Inde aux sommets desquels, hérissées de piquants, il y a des figues qui commencent à mûrir. Mais tout est bon pour qui a faim et, en se piquant les doigts, ils cueillent les plus mûres »217.4 ou encore : « les cactées de la plaine ou des bas coteaux revêtent de couleurs de jour en jour plus gaies les ovules de corail bizarrement posés par un joyeux décorateur au sommet des spatules charnues qui semblent des mains qui forment en se fermant des étuis piquants qui tendent vers le ciel les fruits qu'elles ont fait croître et mûrir »221.1.

(Capitolo estratto da: Jean-François Lavère, L'énigme Valtorta - Une vie de Jésus romancée? 2012)



[299] Dans l'ensemble de la bible on dénombre environ 110 noms de plantes et 140 d'animaux.

[300] Nombres 11, 5.

[301] Dictionnaire technologique ... universel des arts et métiers 1827, Tome X, p118.

[302] Le byssos a été connu de la plupart des peuples orientaux, notamment des Hébreux. Fabriqué aussi en Grèce, (en Elide et à Patras) le linum byssinum se vendait au poids de l’or selon Pline.

[303] Le byssus était la matière du manteau des lévites. Il est mentionné dans la bible: 1 Chroniques 4, 21; 15, 27; Esther 1, 6; 8, 15; Proverbes 31, 22; Luc 16, 19; Apocalypse 18, 12, 16; 19, 8, 14.

[304] Salomon Munk, Palestine, Description géographique, historique et archéologique, 1845 p. 18.

[305] Voir aussi Constantin François Volney, Voyage en Syrie et en Egypte, 1787 pp. 288-289.