Aucune explication verbale ne remplace jamais la contemplation. Saint-Exupéry, Pilote de guerre.
Il ne se croyait pas le sage parfait : “Comment pourrais-je me comparer, disait-il, à l’homme d’une vertu accomplie ?... Je m’efforce inlassablement d’y atteindre et de l’enseigner aux autres sans relâche”. p. 13.
La connaissance du Ciel est la base même de la connaissance humaine : “Quiconque veut connaître les hommes doit d’abord connaître le Ciel. Car la connaissance et l’intelligence pratique de l’homme suppose la connaissance et l'intelligence de ce que le Ciel a mis dans l'homme et des lois qu’il lui a données”. Parmi les opérations du Ciel, Confucius mentionne particulièrement la création du sage parfait : “Qu’un homme naisse parfait, le Ciel seul peut le faire. Se faire parfait petit à petit, l’homme le peut”. Le commentaire de ce texte dit : “Le Ciel fait naître certains grands sages, tandis que les autres arrivent à la perfection par leurs études et leurs efforts. p. 27-28.
“L’alternance des deux modalités yn et yang constitue le Tao, la voie naturelle, le cours ordinaire. Quand le yn et le yang n’expliquent pas le phénomène, on a affaire aux chen, esprits.... ; ce qu’il y a de transcendant, de mystère, dans les êtres, doit être attribué aux chen”. p. 29.
“[Prier] n’est autre chose que pratiquer la vertu, se corriger de ses défauts et solliciter ainsi le secours des esprits. Si j’ai quelques défauts, je les corrige chaque jour ; s’il est une vertu à pratiquer, je la pratique. Ma prière est vraiment continuelle. Comment aurais-je attendu jusqu’à ce jour pour prier ?” p. 30.
“Toi qui ne sais pas servir les vivants comme il faut, pourquoi t’apprendrai-je à servir les morts ?” p. 33.
“A leur naissance tous les hommes sont droits [...]. La loi que le Ciel a mise dans le cœur de l’homme, est la loi naturelle. L’observation de cette loi s’appelle la Voie. Réparer la voie (ou remettre en lumière dans le cœur des hommes la règle des actions que les passions ont obscurcie), cela s’appelle enseigner [...]”. / Tout homme porte en soi cette loi par sa conscience : “Inutile d’aller chercher loin la règle des mœurs”. p. 35-36.
Si la nature humaine est bonne ; d’où vient donc le mal ? Confucius le considère comme chose artificielle, déviation de la nature. Il se produit dans l’individu, par erreur d’appréciation, en plus ou en moins, par suite d’une influence de la passion sur la raison, esprit faussé ou corruption du cœur. Le mal provient donc de ce que la faculté naturelle, ou l’appétit normal du bien ne s’est pas pleinement développé vers sa perfection ; ou bien celle-ci n’était pas suffisamment forte pour résister à l’influence de la passion. p. 36.
“Le meilleur moyen de conserver l’esprit est de modérer et de maîtriser ses passions”. p. 37.
“Gouverner c’est rectifier”, autrement dit, créer une ambiance bonne et honnête, procurer un milieu favorable au peuple pour lui faire suivre la voie droite - naturelle - et écarter toutes les circonstances qui risquent d'entraîner au mal. / “Au peuple il faut d’abord donner le bien-être puis l’instruire de ses devoirs”. En effet, l’homme a besoin d’un minimum de biens matériels pour conserver sa vie, développer sa nature et accomplir le bien”. p. 38-39.
Le rôle du gouvernement [...] doit s’exercer surtout par l’exemple. [...] Si le gouvernement fait son devoir, toute contrainte, toute répression doivent être inutiles. p. 39.
Dans la doctrine de Confucius, l'éthique est donc inséparablement liée à la politique. L’éthique dirige l’homme vers la rectitude naturelle et native ; la politique donne les moyens d’arriver au but destiné par l’exemple et l'enseignement. p. 39-40.
La base de la morale de Confucius est l’invariable milieu : “Se tenir dans l’invariable milieu, oh, c’est la plus haute perfection ! Peu d’hommes sont capables d’y rester longtemps". “La bonne conduite consiste à se tenir dans le juste milieu, l’invariable milieu”. Car l’excès et le défaut sont vices également répréhensibles. p. 40.
“Traiter les hommes en hommes, voilà la bonté. Faire ce qui convient, voilà l’équité”. [...] “Celui qui fait le bien sans vouloir de récompense, qui évite le mal sans être menacé de châtiment, est l’homme rare”. p. 40.
“Les rites (morale artificielle) sont la barrière qui retient les instincts des hommes”. p. 41.
La perfection est l’épanouissement total de l’homme tel qu’il est né ; elle consiste à devenir l’homme tel que la nature ou le Ciel l’a fait, l’homme le plus digne. p. 43.
“De même que le marbre, s’il n’est sculpté, ne peut devenir statue, ainsi l’homme s’il n’étudie, ne peut connaître la vérité… ; de même que sans y participer réellement, il est impossible à l’homme de goûter la saveur des meilleurs banquets, de même sans l’étude la bonté des meilleures doctrines reste cachée”. p. 44.
“Celui qui cultive parfaitement, connaît sa nature. Et celui qui connaît sa nature, connaît le Ciel”. p. 44.
“Le sage règle sa conduite d'après la condition dans laquelle il se trouve, il ne désire rien en dehors de sa condition. Dans les richesses et les honneurs, il agit comme convient à un homme pauvre et méprisé... Partout et toujours le sage a ce qui lui suffit (la vertu).” p. 46.
L’archer a un point de ressemblance avec le sage quand sa flèche n’atteint pas le milieu de la cible, il en cherche la cause en lui-même (n’accuse personne). p. 46.
“Le sage commence par faire ce qu'il veut enseigner ; ensuite il enseigne”. [...] “Le sage est modeste dans ses paroles et il fait plus qu’il ne dit”. p. 46-47.
“Le disciple de la sagesse avance par la vraie voie, c'est-à-dire par degrés. Il veut arriver à posséder la sagesse comme si elle était naturelle en lui. Lorsqu’il l’a acquise, il la garde tranquillement. Lorsqu’il la garde tranquillement, il en a un trésor abondant. Il y puise et en fait usage en toutes circonstances ; il est toujours à la source. Pour cette raison, le disciple de la sagesse veut arriver à la posséder aussi parfaitement que si elle était naturelle en lui.” p. 47.
“Le sage se perfectionne lui-même, puis il travaille à la perfection et à la tranquillité des autres. Il se perfectionne lui-même, ensuite il fait régner la vertu et la paix parmi les peuples”. “Le parfait ne s’arrête jamais à sa propre perfection, mais il tend à rendre les autres parfaits”. p. 49.
“Entre les quatre mers, tous les hommes sont des frères”. p. 52.
“Le sage règle sa conduite d’après la condition dans laquelle il se trouve… ; dans un rang élevé, il ne vexe pas ses inférieurs ; dans un rang inférieur, il ne recherche pas la faveur des grands… ; sur le trône il ne s’enfle pas d’orgueil”. p. 52.
“La nature (rationnelle) est l’œuvre de la volonté du ciel. Vivre selon la nature constitue la loi de l’homme. [...] L’équilibre et l’harmonie c’est la loi générale de tous les changements qui se produisent dans le ciel et sur la terre. Quand l’équilibre et l’harmonie atteignent leur sommet, l'ordre règne dans l'univers et tout se développe en bien… Se tenir dans le juste milieu, dans l’invariable équilibre, oh ! cela est la plus haute perfection. p. 53.
“La vérité constitue les êtres et la loi (naturelle) conduit naturellement l’homme. La vérité est le commencement et la fin des êtres. Sans vérité il n'y a pas d’existence et c’est pourquoi le sage tient grand compte de cette vérité.” p. 54.
“Seul en ce monde celui qui est pénétré de la vérité absolue, et la possède pleinement, peut ordonner et ajuster les grandes lois de la société humaine, fixer les principes fondamentaux de la moralité et comprendre les lois de la création de l’univers”. p. 56.
Toute morale est donc basée sur ce fondement : ne pas nuire à autrui. p. 59.
“L’homme ayant la vertu d'humanité, dit Confucius, veut se tenir ferme lui-même et il affermit les autres ; il désire comprendre les principes de la vérité et il instruit les autres. Cette vertu consiste donc à juger les autres par soi-même et à les traiter comme on désire être traité soi-même”. p. 59.
“Il n’y a pas deux doctrines pour ceux qui dirigent et pour ceux qui sont dirigés : “Un prince sage, avant d’exiger d’autrui, pratique lui-même la vertu ; avant de reprendre, a soin d’éviter lui-même. Un homme qui ne sait pas traiter et mesurer les hommes avec la même mesure que celle employée pour lui-même, ne peut pas les instruire.” / La vertu d’humanité ainsi comprise se confond souvent avec la norme même de la morale. “La vertu d’humanité est ce qui fait l’homme”, dit Confucius. p. 60.
“La douceur et la bonté sont les racines de la vertu d'humanité. Le respect et l’attention en sont la demeure. La générosité et la bienveillance en sont les effets. La politesse et les cérémonies en sont les formes extérieures. Les paroles et les discours en sont les ornements. Les chants et les symphonies expriment l’harmonie. La distribution des bienfaits en est l’exercice”. p. 62.
[La vertu de justice] est considérée comme modalité selon laquelle la vertu d'humanité doit être appliquée. [...] / “La justice, dit Confucius, consiste à traiter chacun comme il convient”. p. 62.
“Le sage met la justice au-dessus de tout. Un homme élevé en dignité qui a de la bravoure et ne respecte pas la justice trouble le bon ordre ; un homme privé qui a de la bravoure et manque de justice, devient brigand”. p. 63.
“Le fondement des rites est la raison elle-même, à tel point que ceux qui ne sont pas formulés dans les livres de rites ne peuvent être considérés comme tels qu’autant qu’ils sont conformes à la raison”. p. 65.
“La musique agit sur l’intérieur de l’homme, les rites sur l’extérieur. Le but de la musique est l’harmonie ; le but des rites est la conformité avec l’ordre de la nature… L’homme doit avoir sans cesse pour compagnie les rites et la musique. Lorsqu’on étudie à fond la musique pour régler son cœur, celui-ci devient naturellement calme, droit, aimant, sincère. Lorsque le cœur est calme, droit, aimant, sincère, il possède la joie ; possédant la joie, il est heureux ; étant heureux il est constant dans la pratique de la vertu”. p. 66.
La société humaine a sa raison d’être dans la nature humaine [...]. [...] la vertu d’humanité n'est autre que l’expression du sentiment naturel de sympathie qui nous porte spontanément à vivre avec nos semblables et à nous aider mutuellement. p. 77.
Le moyen le plus efficace en vue de la réforme du peuple, est le bon exemple de la conduite vertueuse du gouvernement. “Gouverner les hommes, c’est leur faire suivre la voie droite. Si vous marchez vous-mêmes à leur tête dans la voie droite, qui osera ne pas vous suivre ?” “Si vous aimez vous-même sérieusement la vertu, votre peuple sera vertueux. La vertu du prince est comme le vent, celle du peuple est comme l’herbe. Au souffle du vent l’herbe courbe toujours”. p. 78-79.
“Seul le disciple de la sagesse peut demeurer ferme dans la pratique de la vertu sans disposer de biens matériels. Les hommes ordinaires, en effet, ne sont pas fermes dans la vertu, quand ils n'ont pas de biens stables. S’ils ne sont pas fermes dans la vertu, ils se permettent toutes sortes de licences, de désordres, d’injustices et d’excès. Les poursuivre et les punir de mort, s’ils tombent ensuite dans les crimes, c’est prendre les peuples dans un filet. Comment un chef d’État véritablement doué de la vertu d'humanité pourrait-il commettre cette action criminelle ? C’est pourquoi un prince éclairé, en organisant la vie économique de son peuple, fait en sorte que chacun ait de quoi entretenir ses parents et nourrir sa femme et ses enfants, que dans les années de fertilité on ait toujours à vivre en abondance et dans les mauvaises années on ne meure pas de faim. Ensuite, il pourra instruire le peuple et le conduire dans le chemin de la vertu”. p. 83.
Cependant le rôle du gouvernement n’est pas tout dans l’économie. Il doit avoir un très grand souci de l’éducation publique, laquelle doit assurer une vie humaine digne d’elle. [...] D’où la nécessité des écoles. p. 83.
“Lorsque la grande voie de la vertu était fréquentée, l’Empire était considéré comme un bien appartenant à tous. On choisissait pour chefs d’État des hommes vertueux et capables, qui savaient maintenir la concorde. [...] Il n’y avait ni fraude, ni vol, ni brigandage, ni trouble. Les maisons avaient des portes à l’extérieur, mais on ne les fermait pas. C’était ce qu’on peut appeler la grande concorde, la fraternité universelle”. p. 86.
L’esprit cosmopolite ne peut pas admettre les militaristes, ceux qui ne craignent pas de répandre le sang humain pour s’emparer des terres et des biens d’autrui. La guerre est contre la nature humaine. p. 86.
“Si on livre ces combats pour gagner des territoires, les hommes tués couvriront les campagnes ; si on livre des combats pour prendre une ville, les hommes tués rempliront la ville prise. Cela s’appelle forcer la terre à dévorer la chair des hommes.” p. 87.
Selon la vieille philosophie chinoise, l’homme est un microcosme dans le macrocosme et il n'y a pas une action humaine qui n’ait sa répercussion dans l’univers. Toute la loi morale doit être universelle, avoir pour tous la même valeur et être évidente immédiatement et également pour tous. p. 113.
Il est à remarquer que Confucius attachait une certaine importance au rapport qui existe entre le concept et son principe. “Je rendrai à chaque chose son vrai nom : si les noms ne conviennent pas aux choses, il y a confusion dans le langage ; s’il y a confusion dans le langage, les choses ne s’exécutent pas… Lorsqu’on a scruté la nature des choses, les connaissances ont atteint leur plus haut degré ; lorsque les connaissances ont atteint leur plus haut degré, la volonté devient parfaite”. p. 114.
Confucius savait parfaitement que l’on ne peut parler aux masses comme à un individu, qu’il faut leur appliquer une autre mesure que celle que l’on applique à l’homme isolé cherchant son chemin. Il ne trouve alors que deux possibilités de les mettre dans la bonne voie : la force civilisatrice de la convenance (li) et l’exemple donné par les hommes éminents, surtout par ceux qui tiennent les rênes du gouvernement, ayant reçu mandat du Ciel selon la conception chinoise. p. 118.
Comme penseur, Confucius fut le personnage le plus important de la civilisation chinoise et l’un des plus remarquables que l'humanité ait jamais connus. Il a droit incontestablement à une place de premier rang, non seulement dans l’histoire de la philosophie chinoise, mais aussi dans l’histoire générale de la philosophie, parce qu’hormis tout autre mérite, il fut, comme penseur et métaphysicien des mœurs, l’un des plus profonds et des plus originaux. p. 124.
EUL SOU YOUN L., Confucius - Sa vie, son œuvre, sa doctrine, Adrien Maisonneuve Éditeur, Paris, 1942.
Nous ne sommes que les autres. Henri Laborit, Mon Oncle d'Amérique, film d'Alain Resnais.
Notes contemplatives de lecturePatrick Moulin, MardiPhilo, septembre 2024.
Philosophie, Mardi c’est Philosophie, #MardiCestPhilosophie, Contemplation, Notes contemplatives, Notes contemplatives - Modèle #Philosophie #MardiCestPhilosophie #Contemplation #ConfuciusPhilosophie, Mardi c’est Philosophie, #MardiCestPhilosophie, Contemplation, Notes contemplatives, Confucius, Lao Tseu, Tao, Taoïsme, Vertu, Morale, Éthique, Loi, Universel, Nature, Société, Chine, Orientale, Sagesse, Raison#Philosophie #MardiCestPhilosophie #Contemplation #Confucius #LaoTseu #Tao #Taoïsme #Vertu #Morale #Éthique #Loi #Universel #Nature #Société #Chine #Orientale #Sagesse #Raison