Il faut éteindre la démesure [hybris] plus encore que l’incendie. Fragment 43.
[...] la démesure humaine est opposée à un tout autre principe agissant, lui, dans la nature. [...] Si l’hybris déplaît aux dieux, c’est qu’ils aiment l’ordre. Apollon spécialement, après Zeus, est le dieu de la mesure et de l’ordre. Si donc il recommande d’“éteindre l’hybris”, qu’en conclure quant à la nature de la démesure, sinon qu’elle est un principe de désordre, ou plutôt, sans doute, le principe même du désordre. Et s’il importe plus d’éteindre la démesure que l’incendie, n’est-ce pas qu’un incendie, s’éteignant de lui-même par les seules lois naturelles, ne peut entraîner qu’un dommage limité ? La nature contrôle d’elle-même les petits désordres qui se produisent en elle. Elle se régularise elle-même. Seulement elle n’a pas pouvoir sur l’homme. L’homme échappe, a échappé à son pouvoir. La démesure humaine ne sera pas éteinte par le seul jeu des lois naturelles. C’est à l’homme lui-même de l’éteindre. C’est à l’homme de mettre un terme au délire humain. M. Conche, Héraclite - Fragments, p. 188-189.
Comment éteindre l’hybris sociale et politique ? C’est là, pour Solon, le rôle de la loi. [...] Or, quand on parle de “démesure”, qu’est-ce qui représente la mesure ? La loi. Socialement et politiquement, la démesure consiste dans le mépris de la loi [...]. Héraclite souhaite une cité exempte de démesure, et notamment de violence : cela veut dire une cité où règne la loi. La loi doit régir les choses humaines comme elle régit déjà la nature, où aucun incendie ne peut se développer sans trouver bientôt sa limite. L’ordre règne dans la nature ; et ce qui est souhaitable est un ordre humain à l’image de l’ordre naturel. La justice dans la cité doit prendre exemple sur la justice cosmologique qui fonde la stabilité, l’équilibre du monde, cela grâce à la mesure régissant les échanges, commandant la répartition des rôles entre les éléments, la distribution des énergies. Ibid., p. 189-190.
[...] la Divinité, qui, suivant l’antique tradition, tient en mains le commencement, le milieu et la fin de tout ce qui existe, en réalise, par la voie droite de la Nature, la complète révolution. Toujours elle est suivie de près par Justice, qui venge la loi divine en châtiant ceux qui s’en écartent : Justice, que suit en s’attachant humblement, posément, à ses pas celui qui veut mener une vie heureuse, tandis qu’un autre, exalté par l’orgueil, excité par ses richesses ou par ses honneurs, ou bien encore par la beauté de ses formes, en même temps que par l'inexpérience de sa jeunesse et par sa déraison, embrase son âme du feu de la démesure, dans la conviction qu’il n’a besoin ni d’un chef ni d’un guide, et qu’il a, lui, tout ce qu’il faut pour guider ses semblables ; un tel homme est abandonné de la Divinité, il reste seul avec lui-même. Mais, dans cet abandon, il appelle à lui d’autres hommes encore, il bondit follement, met partout le trouble et la confusion, et, tandis que bien des gens se sont figuré qu’il est quelqu’un, au bout néanmoins d’un temps qui n’est pas bien long, il subit sous le bras vengeur de Justice une peine à laquelle il n’y a rien à redire ; de fond en comble, il s’est lui-même ruiné, et, avec lui, sa propre maison et la Cité dont il fait partie. 715 e - 716 b.
[...] l’outrage [hubris] consiste à faire et à dire ce qui entraîne de la honte chez la victime, non pour qu’échoie à l’auteur un autre bénéfice, ou parce que quelque chose s’est passé mais pour le plaisir : car rendre la pareille, ce n’est pas outrager mais se venger. La cause du plaisir ressenti par ceux qui outragent est la croyance que le mauvais traitement exercé sur autrui accroît leur supériorité personnelle. C’est pour cette raison que les jeunes et les riches sont portés à l’outrage, car ils croient par l’outrage établir leur supériorité. 1378b.
L’hybris signifie la démesure de l’homme, l'orgueil. Son origine vient de l’Antiquité grecque, et le mot est aujourd’hui toujours utilisé dans le sens de la démesure.
Mot grec, démesure.
Mot grec signifiant “démesure”, et que l’on traduit parfois par “violence”. On écrit aussi “hubris”.
Dans l’Antiquité, tout ce qui dépasse la mesure, les limites de la condition humaine ; exemple : l’acte de Prométhée dérobant le feu aux dieux.
La démesure de l’être humain qui ne reste pas en place, ne se contente pas de ce qu’il a, ni de ce qu’il est, et désire être un dieu. Dans la tragédie grecque, l’hybris était sanctionné par le Destin.
[Hubris ou Ubris :] Chez les Grecs, tout ce qui, dans la conduite de l’homme, est considéré par les dieux comme démesure, orgueil, et devant appeler leur vengeance.
Littéraire. Outrance dans le comportement inspirée par l’orgueil ; démesure : journalistes se méfiant de l’hubris.
Marcel Conche, Héraclite - Fragments, Collection Épiméthée, PUF.
Paul Demont, Hubris, « outrage », « anomie » et « démesure » de Gernet à Fischer : quelques remarques.
France Culture, Les Chemins de la philosophie : Philosophie de l'excès - Épisode 4 : Aristote et Platon, faut-il être prudent ?
Patrick Moulin, MardiPhilo, septembre 2024.
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