Maria Zambrano Alarcón naît en 1904 à Vélez-Málaga, municipalité d’Andalousie. Ses parents sont tous deux enseignants. De 1924 à 1927, elle étudie la philosophie à Madrid, sous la direction de José Ortega y Gasset, mais aussi Manuel García Morente ou encore Xavier Zubiri, tous philosophes espagnols reconnus. En 1939 commence un exil qui durera 45 ans. La Havane, Mexico, Paris, Rome, le Jura français furent quelques-uns de ses étapes et lieux de vie. Elle se lie d’amitié avec Albert Camus et René Char lors de son séjour à Paris. En 1984, elle revient à Madrid, où elle meurt le 6 février 1991. Elle est enterrée dans sa ville natale, auprès de sa mère et de sa sœur, entre un oranger et un citronnier.
L’œuvre littéraire de Maria Zambrano n’a été reconnue en Espagne que tardivement, à la fin du XXe siècle, après un long exil durant la dictature franquiste. Elle reçoit le prix Prince des Asturies en 1981 et le prix Cervantès en 1988, deux hautes distinctions littéraires espagnoles. Elle est nommée Docteur honoris causa par l’Université de Malaga en 1981. La gare ferroviaire de Málaga reçoit son nom [cf. l’article de Nuria Barrios en bibliographie]. La Bibliothèque de Philologie et de Droit de l’Université de Madrid, ainsi que le campus universitaire de Ségovie portent également son nom.
Pour Maria Zambrano, la philosophie est la question, et la poésie est la réponse. Chantal Maillard [cf. Bibliographie] distingue deux grands domaines dans l’œuvre zambranienne : la création de la personne, et la raison-poétique. Chacun de ces domaines se décline à travers d'autres thèmes sous-jacents.
Elle correspond à la question de l’être. Elle est reliée au divin, à l’histoire et donc au temps, au rêve et son contraire, l’éveil. “Car au commencement était le délire” : pour expliquer une réalité où il se sentait regardé sans voir lui-même, l’homme remplit le monde de dieux, et les a nommés en espérant obtenir leur grâce. L’ignorance et le vide non comblé par les dieux conduit les Grecs à poser la première question ontologique : Que sont les choses ? La conscience apparaît, accompagnée de la philosophie comme savoir tragique : la question vient de l’ignorance, du manque de connaissance ou d’être. La découverte de la conscience conduit à la solitude de l’individu. Nietzsche fait mourir les dieux pour retourner à l’origine, et pour forger la liberté et récupérer ses passions. À partir du néant, l’homme a la responsabilité de créer son être. Le long processus de la création de la personne débute.
L’homme n’est pas qu’un être historique, évoluant dans le temps de la conscience où la réalité ne serait qu’une succession d’événements. Il doit perpétuellement se transcender. La naissance fait sortir du rêve initial, vivre est sortir d’autres rêves alternant avec des moments d’éveils. Le temps du sujet se décompose en trois types : le temps successif, le temps de la psyché, le temps de la création. Le premier est le temps de la conscience libre, dans les trois dimensions passé/présent/futur. Le second correspond à l’atemporalité du rêve, où le sujet ne décide pas et est mû par les circonstances. Le troisième est celui de l’éveil, et notamment de la création de la personne.
Maria Zambrano lutte contre le rationalisme comme absolutisme, qui exige une réalité transparente à la raison, une et intelligible, en faisant abstraction du temps. La raison poétique met en pratique le ratiovitalisme d’Ortega, qui combine raison et vie : l’homme n’est pas indépendant de ses circonstances de vie. La raison vitale donne un sens à l’existence, elle est un mode d’être de l’homme dans son histoire. La raison poétique apporte la méthode : le propre de l’homme est d’ouvrir le chemin par son action éthique, volontaire, qui ouvre à son tour un horizon. Et l’homme lui-même est le chemin.
La philosophie de Maria Zambrano prend son origine “à l’Orient de l’Intelligence, là où le soleil ou la lumière se lève”. La raison-poétique est aurorale : elle dévoile les formes avant la parole. La méthode n’est pas le système fermé d’une raison qui analyse et déduit. L’âme aspire à ouvrir un lieu “qui s’élargit comme une clairière au milieu d’une forêt”.
Zambrano M. :
Délire et destin, Paris, Éditions Des femmes, 1997.
Les clairières du bois, Toulouse, Association des publications de l’Université de Toulouse-Le Mirail, 1985.
L’homme et le divin, Paris, Éditions Corti, 2006.
Notes pour une méthode.
Sentiers.
Philosophie et poésie.
De l'Aurore.
Nuria Barrios, María Zambrano n’est pas une station de train (El País).
Chantal Maillard, Maria Zambrano. La mujer y su obra, Université de Málaga.
Éditions Alianza : page consacrée à Maria Zambrano.
Revue Europe, Maria Zambrano, n° 1027-1028, novembre-décembre 2014.
Wikipédia (en espagnol) : Maria Zambrano.
Patrick Moulin, MardiPhilo, août 2024.
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