L'être est, le non-être n'est pas. Parménide, Poème.
L'homme est un roseau pensant. Pascal, Pensées.
Qu'est-ce que l'homme dans la nature ? Un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égard du néant, un milieu entre rien et tout. Pascal, Pensées.
Le nez de Cléopâtre, s'il eût été plus court, toute la face de la Terre aurait changé. Pascal, Pensées.
On ne choisit pas pour gouverner un vaisseau celui des voyageurs qui est de la meilleure maison. Pascal, Pensées.
Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie de n'être pas fou. Pascal, Pensées.
Se moquer de la philosophie, c’est vraiment philosopher. Pascal, Pensées.
Il est dangereux de trop faire voir à l’homme combien il est égal aux bêtes, sans lui montrer sa grandeur. Et il est encore dangereux de lui trop faire voir sa grandeur sans sa bassesse. Il est encore plus dangereux de lui laisser ignorer l’un et l’autre, mais il est très avantageux de lui représenter l’un et l’autre. Pascal, Pensées.
Le cœur a ses raisons que la raison ignore. Pascal, Pensées.
Le moi est haïssable. Pascal, Pensées.
Tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre. Pascal, Pensées.
La justice sans la force est impuissante, la force sans la justice est tyrannique. Pascal, Pensées.
Nous ne nous contentons pas de la vie que nous avons en nous, et en notre propre être : nous voulons vivre dans l'idée des autres d'une vie imaginaire ; et nous nous efforçons pour cela de paraître. Pascal, Pensées.
Que l’homme contemple donc la nature entière dans sa haute et pleine majesté, qu’il éloigne sa vue des objets bas qui l’environnent (...), que la terre lui apparaisse comme un point au prix du vaste tour que cet astre [le soleil] décrit et qu’il s’étonne de ce que ce vaste tour lui-même n’est qu’une pointe très délicat à l’égard de celui que les astres qui roulent dans le firmament embrassent (...). Tout ce monde visible n’est qu’un trait imperceptible dans l’ample sein de la nature. Pascal.
Quand je considère la petite durée de ma vie, absorbée dans l’éternité précédente et suivante, le petit espace que je remplis et même que je vois, abîmé dans l’infinie immensité des espaces que j’ignore et qui m’ignorent, je m’effraie et m’étonne de me voir ici plutôt que là, car il n’y a point de raison pourquoi ici plutôt que là, pourquoi à présent plutôt que lors. Pascal.
Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie. Pascal, Pensées.
Les inventions des hommes vont en avançant de siècle en siècle. La bonté et la malice du monde en général reste la même. Pascal.
Ceux qui sont accoutumés à juger par le sentiment ne comprennent rien aux choses de raisonnement, car ils veulent d’abord pénétrer d’une vue et ne sont point accoutumés à chercher les principes. Et les autres, au contraire, qui sont accoutumés à raisonner par principe, ne comprennent rien aux choses de sentiment, y cherchant des principes, et ne pouvant voir d’une vue. Pascal, Pensées, 3.
Deux excès : exclure la raison, n’admettre que la raison. Ibid., 253.
Le coeur a ses raisons, que la raison ne connaît point ; on le sait en mille choses. Je dis que le coeur aime l’être universel naturellement, et soi-même naturellement selon qu’il s’y adonne ; et il se durcit contre l’un ou l’autre à son choix. Vous avez rejeté l’un et conservé l’autre : est-ce par raison que vous vous aimez ? Ibid., 277.
C’est le coeur qui sent Dieu et non la raison. Voilà ce qu’est la foi : Dieu sensible au coeur, non à la raison. Ibid., 278.
Nous connaissons la vérité, non seulement par la raison, mais encore par le coeur ; c’est de cette dernière sorte que nous connaissons les premiers principes, et c’est en vain que le raisonnement qui n’y a point de part essaye de les combattre. Ibid., 282.
La raison nous commande bien plus impérieusement qu’un maître ; car en désobéissant à l’un on est malheureux, et en désobéissant à l’autre on est un sot. Ibid., 345.
La mémoire est nécessaire pour toutes les opérations de la raison. Ibid., 369.
Les hommes sont si nécessairement fous, que ce serait être fou, par un autre tour de folie, de n’être pas fou. Ibid., 414.
Dans la lettre De l’injustice peut venir la plaisanterie des aînés qui ont tout. “Mon ami, vous êtes né de ce côté de la montagne ; il est donc juste que votre aîné ait tout.” /“Pourquoi me tuez‑vous ?” Ibid., 291.
Il demeure au‑delà de l’eau. Ibid., 292.
“Pourquoi me tuez‑vous ? ‑ Et quoi ! ne demeurez‑vous pas de l’autre côté de l’eau ? Mon ami, si vous demeuriez de ce côté, je serais un assassin et cela serait injuste de vous tuer de la sorte ; mais puisque vous demeurez de l’autre côté, je suis un brave, et cela est juste.” Ibid., 293.
… Sur quoi la fondera‑t‑il, l’économie du monde qu’il veut gouverner ? Sera‑ce sur le caprice de chaque particulier ? quelle confusion ! Sera‑ce sur la justice, il l’ignore.
Certainement, s’il la connaissait il n’aurait pas établi cette maxime la plus générale de toutes celles qui sont parmi les hommes, que chacun suive les mœurs de son pays ; l’éclat de la véritable équité aurait assujetti tous les peuples, et les législateurs n’auraient pas pris pour modèle, au lieu de cette justice constante, les fantaisies et les caprices des Perses et Allemands. On la verrait plantée par tous les États du monde et dans tous les temps, au lieu qu’on ne voit rien de juste ou d’injuste qui ne change de qualité en changeant de climat. Trois degrés d’élévation du pôle renversent toute la jurisprudence ; un méridien décide de la vérité ; en peu d’années de possession les lois fondamentales changent ; le droit a ses époques, l’entrée de Saturne au Lion nous marque l’origine d’un tel crime. Plaisante justice qu’une rivière borne ! Vérité au‑deçà des Pyrénées, erreur au‑delà.
Ils confessent que la justice n’est pas dans ces coutumes, qu’elle réside dans les lois naturelles communes en tout pays. Certainement ils le soutiendraient opiniâtrement si la témérité du hasard qui a semé les lois humaines en avait rencontré au moins une qui fût universelle ; mais la plaisanterie est telle, que le caprice des hommes s’est si bien diversifié, qu’il n’y en a point. Le larcin, l’inceste, le meurtre des enfants et des pères, tout a eu sa place entre les actions vertueuses. Se peut‑il rien de plus plaisant, qu’un homme ait droit de me tuer parce qu’il demeure au‑delà de l’eau, et que son prince a querelle contre le mien, quoique je n’en aie aucune avec lui ? Il y a sans doute des lois naturelles ; mais cette belle raison corrompue a tout corrompu : Nihil amplius nostrum est, quod nostrum dicimus artis est [“Il n’y a rien qui soit nôtre ; ce que nous appelons nôtre relève de la convention”, Cicéron]. Ex senatusconsultis et plebiscitis crimina exercentur [“C’est en vertu des sénatus-consultes et des plébiscites que l’on commet des crimes”, Sénèque]. Ut olim vitiis sic nunc legibus laboramus [“Comme autrefois, nous étions écrasés par les vices, maintenant nous le sommes par les lois”, Tacite].
De cette confusion arrive que l’un dit que l’essence de la justice est l’autorité du législateur, l’autre la commodité du souverain, l’autre la coutume présente ;et c’est le plus sûr : rien, suivant la seule raison, n’est juste de soi, tout branle avec le temps. La coutume fait toute l’équité, par cette seule raison qu’elle est reçue ; c’est le fondement mystique de son autorité. Qui la ramène à son principe l’anéantit. Rien n’est si fautif que ces lois qui redressent les fautes ; qui leur obéit parce qu’elles sont justes, obéit à la justice qu’il imagine, mais non pas à l’essence de la loi ; elle est toute ramassée en soi ; elle est loi et rien davantage. Qui voudra en examiner le motif le trouvera si faible et si léger, que, s’il n’est accoutumé à contempler les prodiges de l’imagination humaine, il admirera qu’un siècle lui ait tant acquis de pompe et de révérence. L’art de fronder, bouleverser les États est d’ébranler les coutumes établies, en sondant jusque dans leur source, pour marquer leur défaut d’autorité et de justice. “Il faut, dit‑on, recourir aux lois fondamentales et primitives de l’État, qu’une coutume injuste a abolies.” C’est un jeu sûr pour tout perdre ; rien ne sera juste à cette balance. Cependant le peuple prête aisément l’oreille à ces discours. Ils secouent le joug dès qu’ils le reconnaissent ; et les grands en profitent à sa ruine, et à celle de ces curieux examinateurs des coutumes reçues. Mais, par un défaut contraire, les hommes croient quelquefois pouvoir faire avec justice tout ce qui n’est pas sans exemple. C’est pourquoi le plus sage des législateurs disait que, pour le bien des hommes il faut souvent les piper ; et un autre bien politique : Cum veritatem qua liberetur ignoret, expedit quod fallatur [“Comme il ignore la vérité qui peut le libérer, il est bon qu’on le trompe”, Augustin]. Il ne faut pas qu’il sente la vérité de l’usurpation ;elle a été introduite autrefois sans raison, elle est devenue raisonnable ; il faut la faire regarder comme authentique, éternelle, et en cacher le commencement, si l’on ne veut qu’elle ne prenne bientôt fin. Ibid., 294.
Que l’homme sans la foi ne peut connaître le vrai bien, ni la justice.
Tous les hommes recherchent d’être heureux ; cela est sans exception ; quelques différents moyens qu’ils y emploient, ils tendent tous à ce but. Ce qui fait que les uns vont à la guerre, et que les autres n’y vont pas, est ce même désir, qui est dans tous les deux, accompagné de différentes vues. La volonté [ne] fait jamais la moindre démarche que vers cet objet. C’est le motif de toutes les actions de tous les hommes, jusqu’à ceux qui vont se pendre.
Et cependant, depuis un si grand nombre d’années, jamais personne, sans la foi, n’est arrivé à ce point où tous visent continuellement. Tous se plaignent : princes, sujets, nobles, roturiers, vieux, jeunes ; forts, faibles ; savants, ignorants ; sains, malades ; de tous pays, de tous les temps, de tous âges et de toutes conditions.
Une épreuve si longue, si continuelle et si uniforme, devrait bien nous convaincre de notre impuissance d’arriver au bien par nos efforts ; mais l’exemple nous instruit peu. Il n’est jamais si parfaitement semblable, qu’il n’y ait quelque délicate différence ; et c’est de là que nous attendons que notre attente ne sera pas déçue en cette occasion comme en l’autre. Et ainsi, le présent ne nous satisfaisant jamais, l’expérience nous pipe, et de malheur en malheur, nous mène jusqu’à la mort qui en est un comble éternel.
Qu’est‑ce donc que nous crie cette avidité et cette impuissance, sinon qu’il y a eu autrefois dans l’homme un véritable bonheur, dont il ne lui reste maintenant que la marque et la trace toute vide, et qu’il essaye inutilement de remplir de tout ce qui l’environne, recherchant des choses absentes le secours qu’il n’obtient pas des présentes, mais qui en sont toutes incapables, parce que ce gouffre infini ne peut être rempli que par un objet infini et immuable, c’est‑à‑dire que par Dieu même ?
Lui seul est son véritable bien, et depuis qu’il l’a quitté, c’est une chose étrange, qu’il n’y a rien dans la nature qui n’ait été capable de lui en tenir la place : astres, ciel, terre, éléments, plantes, choux, poireaux, animaux, insectes, veaux, serpents, fièvre, peste, guerre, famine, vices, adultère, inceste. Et depuis qu’il a perdu le vrai bien, tout également peut lui paraître tel, jusqu’à sa destruction propre, quoique si contraire à Dieu, à la raison et à la nature tout ensemble.
Les uns le cherchent dans l’autorité, les autres dans les curiosités et dans les sciences, les autres dans les voluptés. D’autres, qui en ont en effet plus approché, ont considéré qu’il est nécessaire que ce bien universel, que tous les hommes désirent, ne soit dans aucune des choses particulières qui ne peuvent être possédées que par un seul, et qui, étant partagées, affligent plus leur possesseur, par le manque de la partie qu’il n’[a] pas, qu’elles ne le contentent par la jouissance de celle qui lui appartient. Ils ont compris que le vrai bien devait être tel que tous pussent le posséder à la fois, sans diminution et sans envie, et que personne ne le pût perdre contre son gré. Et leur raison est que ce désir étant naturel à l’homme puisqu’il est nécessairement dans tous, et qu’il ne peut pas ne le pas avoir, ils en concluent…
Pascal, Pensées, Brunschvicg 425.
La justice sans la force est impuissante : la force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite, parce qu’il y a toujours des méchants ; la force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force ; et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste. Pascal, Pensées, B. 298.
Jamais, même dans le bonheur le plus généreux, le plus fou, jamais ils n’avaient oublié leur plus haut, leur plus émouvant sentiment : le sentiment bienheureux qu’ils aidaient eux aussi à façonner la beauté du monde, qu’ils avaient un rapport profond avec l’ensemble, avec toute la beauté, avec l’univers entier. B. Pasternak, Le Docteur Jivago.
Je ne fais pas le bien que je veux et je commets le mal que je ne veux pas. Saint Paul, Epître aux Romains.
Une “vraie rencontre est celle dont on ressort changé. Charles Pépin, Qu’est-ce qu’une vraie rencontre ? Philosophie magazine, juin 2018.
Faire preuve de courage, c’est connaître la peur, avoir des raisons de ne pas y aller, mais y aller quand même. Y aller malgré tout, malgré la peur et avec elle. Charles Pépin, Qu’est-ce qu’être courageux ? Philosophie magazine, juillet-août 2018.
Connais-toi toi-même. Platon, Charmide.
Nul n'est méchant volontairement. Platon, Gorgias.
Mieux vaut subir une injustice que de la commettre. Platon, Gorgias.
Philosopher, c'est apprendre à mourir. Platon, Phédon.
De toutes les victoires, la première et la plus belle est celle qu’on remporte sur soi-même, comme aussi de toutes les défaites la plus honteuse et la plus funeste est d’être vaincu par soi-même. Cela veut dire qu’il y a en chacun de nous un ennemi de nous-mêmes. Platon, Les Lois.
Ce que je sais, c'est que je ne sais rien. Platon, Ménon et Apologie de Socrate.
Apprendre, c'est se ressouvenir de ce que l'on a oublié. Platon, Ménon.
L’œil est le miroir de l'âme. Platon, La République et Phèdre.
Certains disent en effet du corps qu'il est le "sépulcre" (...) de l'âme, attendu que, dans la vie présente, il en est la sépulture. (...) que le corps est pour elle [l'âme] une enceinte, image de la prison destinée à la "tenir en garde". Platon, Cratyle.
Chacun cherche sa moitié. Platon, Le Banquet.
Ce qui donne naissance à la société, c'est l'impuissance où chaque homme se trouve de se suffire à lui-même. Platon, La République.
L'art n'est qu'une imitation. Platon, La République.
Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre. Platon, Devise de son Académie.
Est-ce autre chose que la séparation de l’âme d’avec le corps ? On est mort quand le corps, séparé de l’âme , reste seul, à part, avec lui-même, et quand l’âme, séparée du corps, reste seule, à part, avec elle-même. Platon, Phédon.
Le corps est le tombeau de l’âme. Platon, Cratyle.
IL n’y a donc personne, Ménon, qui veuille le mal, à moins de vouloir être comme cela. En effet, être misérable, qu’est-ce que c’est, sinon désirer le mal et l’obtenir ? Platon, Ménon.
J’affirme que l’être (homme ou femme) doté d’une bonne nature morale est heureux, mais que l’être injuste et méchant est malheureux. Platon, Gorgias.
Je suis quelqu’un qui aime à être réfuté quand ce que je dis est faux. Platon, Gorgias.
C’est son corps seul qui est situé dans la Cité et qui y séjourne. Mais sa pensée, qui considère toutes ces choses d’ici-bas comme mesquinerie et néant, sa pensée promène partout son vol ; comme dit Pindare : “au-dessous de la terre”, mesurant sa surface, et “au-dessus du ciel”, contemplant les astres, et, partout, scrutant à fond toute la nature de chacun des êtres, sans redescendre à rien de ce qui est proche de lui. Platon, Théétète.
Une telle âme ne doit receler aucune bassesse, la petitesse d’esprit étant incompatible avec une âme qui doit tendre sans cesse à embrasser l’ensemble et l’universalité du divin et de l’humain (...). Mais l’âme à laquelle appartient l’élévation de la pensée et la contemplation de la totalité du temps et de l’être, crois-tu qu’elle fasse grand cas de la vie humaine ? (...) Un tel homme ne regardera donc pas la mort comme une chose à craindre. Platon, République VI.
Les hommes prétendent que, par nature, il est bon de commettre l’injustice et mauvais de la souffrir; mais il y a plus de mal à la souffrir que de bien à la commettre. Aussi, lorsque mutuellement ils la commettent et la subissent, et qu’ils goûtent des deux états, ceux qui ne peuvent point éviter l’un ni choisir l’autre estiment utile de s'entendre pour ne plus commettre ni subir l'injustice. De là prirent naissance les lois et les conventions, et l’on appela ce que que prescrivait la loi légitime et juste. Platon, République, II, 358 e - 359 a.
Donnons licence au juste et à l’injuste de faire ce qu’ils veulent ; suivons-les, et regardons où, l'un et l’autre, les mène le désir. Nous prendrons le juste en flagrant délit de poursuivre le même but que l’injuste, poussé par le besoin de l’emporter sur les autres [...]. Ibid., 359 c
[...] personne n’est juste volontairement, mais par contrainte, la justice n’étant pas un bien individuel, puisque celui qui se croit capable de commettre l’injustice la commet. Tout homme, en effet, pense que l’injustice est individuellement plus profitable que la justice [...]. Car si quelqu’un recevait cette licence dont j’ai parlé, et ne consentait jamais à commettre l’injustice, ni à toucher au bien d’autrui, il paraîtrait le plus malheureux des hommes, et le plus insensé, à ceux qui auraient connaissance de sa conduite ; se trouvant mutuellement en présence ils le loueraient, mais pour se tromper les uns les autres, et à cause de leur crainte d’être eux-mêmes victimes de l’injustice. Ibid., 360 c-d.
Si en effet, dans le cours de ma propre existence, j’agis en quoi que ce soit d’une façon qui n'est pas correcte, sache bien que ce n’est pas volontairement que je pèche, mais par le fait de mon ignorance ; en conséquence, [...] ne va pas t’abstenir de me gourmander, fais-moi au contraire voir convenablement quelle est cette occupation à laquelle il faut que je m’emploie et de quelle façon je pourrai mettre sur elle la main. Platon, Gorgias, 488 a.
[...] méchant, en effet, nul ne l’est de son gré, mais c’est par quelque vice de constitution corporelle, ou par la maladresse de ceux qui l’ont élevé, que le méchant devient méchant ; or, à tout homme, ce sont là des accidents contraires et qui ne lui arrivent que contre son gré. Platon, Timée, 86 d-e.
Quand on le connaît pas, l’homme n’est pas un homme, mais un loup pour l’homme. Plaute, Comédies.
Ne cesse pas de sculpter ta propre statue. Plotin, Première Ennéade.
[Les vertus] mettent réellement de l’ordre en nous et nous rendent meilleurs ; elles imposent des limites et une mesure à nos désirs et à toutes nos passions, elles nous délivrent de nos erreurs. Plotin, Des vertus.
Reviens en toi-même et regarde : si tu ne vois pas encore la beauté en toi, fais comme le sculpteur d’une statue qui doit devenir belle ; il enlève une partie, il gratte, il polit, il essuie jusqu’à ce qu’il dégage de belles lignes ; comme lui, enlève le superflu, redresse ce qui est oblique, nettoie ce qui est sombre pour le rendre brillant, et ne cesse de sculpter ta propre statue, jusqu’à ce que l’éclat divin de la vertu se manifeste. Plotin.
Le mal, c’est la matière. Plotin, Ennéades.
De quelle chute est donc né le temps ? Plotin, Ennéades.
Avant d’avoir engendré l’antériorité et la postériorité, le temps reposai dans l’être : il n’était pas le temps et restait complètement immobile. Mais la nature curieuse d’action, qui voulait être maîtresse d’elle-même et pour elle-même, choisit le parti de rechercher mieux que son état présent. Alors elle bougea, et le temps aussi se mit en mouvement : ils se dirigèrent vers un avenir toujours nouveau, un état non pas identique à leur état précédent, mais différent et sans cesse changeant. Et après avoir cheminé quelque peu, ils firent le temps, qui est une image de l’éternité. Plotin, Ennéades.
(...) n’allons pas prendre le temps en dehors de l’âme, pas plus que l’éternité en dehors de l’être : il n’accompagne pas l’âme, il ne lui est pas postérieur ; mais il se manifeste en elle, il est en elle, et il lui est uni comme l’éternité à l’être intelligible. Plotin, Ennéades.
Si l’on a la sagesse pendant un instant, on ne le cédera pas en bonheur à celui qui la possède pendant une éternité. Plutarque, Des notions communes contre les stoïciens.
Si tous nous sommes sujets à l’erreur et nous trompons souvent, individuellement et de manière collective, cette idée de l’erreur et de la faillibilité humaine en implique précisément une autre : l’idée de la vérité objective, cette norme que nous n’atteignons pas nécessairement. En conséquence, il ne faut pas considérer que la doctrine de la faillibilité relève d’une théorie pessimiste de la connaissance. Karl Popper, Conjectures et réfutations.
On peut conserver dans son intégrité le principe de l’empirisme, puisque ce sont l’observation et l’expérimentation, l’issue des tests, qui décident du sort d’une théorie, de son acceptation ou de son rejet. Dans la mesure où une théorie résiste aux tests les plus rigoureux que nous sachions élaborer, elle est acceptée ; dans le cas contraire, elle est rejetée. Karl Popper, Conjectures et réfutations.
Sur les dieux, je ne puis rien dire, ni qu’ils sont, ni qu’ils ne sont pas. Trop de choses empêchent de le savoir : d’abord l’obscurité de la question, ensuite la brièveté de la vie humaine. Protagoras, Fragments.
L’homme (...) est la mesure de toutes choses, de celles qui sont pour ce qu’elles sont et de celles qui ne sont pas, pour ce qu’elles ne sont pas. Protagoras, cité par Platon dans Théétète, 152a.
Rien n’est beau ni honteux, juste et injuste (...) Rien n’est en vérité. Pyrrhon.
Le désir est la toute première des mauvaises choses. Pyrrhon.
Tant que les hommes massacreront les bêtes, ils s'entre-tueront. Pythagore.
Dans la foule qui y assiste [aux jeux] il y a trois groupes distincts : les uns viennent pour lutter, les autres pour faire du commerce, et les autres, qui sont les sages, se contentent de regarder. De même, dans la vie, les uns sont nés pour être esclaves de la gloire, ou de l’appât du gain, les autres, qui sont les sages, ne visent que la vérité. Pythagore.
L'idée que le déterminisme exclut la liberté s'explique aisément. Si les choix sont déterminés par des événements antérieurs, et au fond par des forces extérieures à soi, comment pourrait-on faire des choix différents ? D'accord, on ne peut pas. Mais la liberté d'agir autrement qu'on veut ou qu'on juge convenable serait un bienfait bien médiocre. Willard V. O. Quine, Quiddités.
Je reconnais que l’éloge et le blâme devraient être réservés aux actions libres ; on ne saurait blâmer qui vous a heurté parce qu’on l’a poussé. Mais je maintiens que les héros, les génies et les criminels méritent éloge ou blâme, peine ou récompense pour leurs actions (...) indépendamment de toute chaîne causale faite de pédagogues brillants, entraînement précoce, traumatisme du Vietnam, enfance malheureuse ou patrimoine génétique. On admire ou on critique les œuvres d’un artiste ou d’un technicien pour leurs qualités, en étant bien conscient qu’elles ont des causes extérieures ; je demande qu’on fasse de même pour le héros, le génie ou le criminel. Willard V. O. Quine, Quiddités.
Patrick Moulin, MardiPhilo, août 2024.
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