[Kant] portant à l'absolu [la connaissance effective], a isolé d’une part le concept pur, l’unité sans aucun contenu intuitif, d’autre part l’intuition pure, le divers éparpillé, qui n’a plus rien qui l’apparente au concept, rien qui l’appelle l’acte intellectuel : l’hétérogénéité de l’entendement et de la sensibilité rend donc, semble-t-il, impossible à résoudre un problème que la déduction transcendantale ordonne de résoudre. La solution de Kant est le schématisme transcendantal : on appelle schème la règle selon laquelle on peut construire les images correspondant à un concept ; le schème de la circonférence sera la règle de construction de toutes les circonférences possibles ; le schème n’est ni le concept de l’entendement ni l’image de la sensibilité, mais l’intermédiaire entre les deux, le produit de l’imagination. Le problème ne peut donc être résolu que si, entre l’entendement pur et l’intuition pure, on découvre un schème également pur et transcendantal. Kant et la philosophie critique, p. 1184-1185.
[Pour] que ces concepts purs de l’entendement puissent s’appliquer aux intuitions empiriques, alors qu’ils leur sont radicalement hétérogènes, il faut qu’un troisième terme, homogène aux deux, les relie : c’est le schème, produit de l’imagination transcendantale. Le schème n’est pas une image, mais ce qui rend possible les images et les lie au concept (par exemple, la géométrie opère sur le schème du triangle et non pas sur l’image de tel triangle particulier). Comme l’entendement ne tend à rien d’autre qu’à l’unité du divers de l’intuition dans le sens interne (qui est le temps), les schèmes ne sont finalement que des déterminations a priori du temps. L’âge critique de la raison, p. 63.
Le schème est toujours, en lui-même, un simple produit de l’imagination ; mais étant donné que la synthèse qu’accomplit cette dernière n’a pour objectif aucune intuition particulière, mais seulement l’unité dans la détermination de la sensibilité, le schème doit être distingué de l’image. [...] En fait, nos concepts sensibles purs ne reposent pas sur des images des objets, mais sur des schèmes. Pour le concept d’un triangle en général, nulle image ne lui serait jamais adéquate. En effet, elle n’atteindrait pas l’universalité du concept, qui fait que celui-ci vaut pour tous les triangles, rectangles, à angles obliques, etc., mais elle serait toujours limitée simplement à une partie de cette sphère. Le schème du triangle ne peut jamais exister ailleurs que dans la pensée, et signifie une règle de la synthèse de l’imagination par rapport à des figures pures dans l’espace. [...] Le concept de chien signifie une règle d’après laquelle mon imagination peut tracer dans sa dimension de généralité la figure d’un quadrupède, sans être limitée à quelque figure particulière que m’offre l’expérience ou encore à quelque image possible que je puisse présenter in concreto. Analytique des principes, Du schématisme, p. 225-226.
Présenter la réalité de nos concepts requiert toujours des intuitions. Si ce sont des concepts empiriques, celles-ci se nomment des exemples. Si ce sont des concepts purs de l’entendement, elles sont appelées des schèmes. [...] Toutes les intuitions que l’on soumet a priori à des concepts sont donc ou bien des schèmes, ou bien des symboles : les premiers contiennent des présentations directes du concept, les seconds des présentations indirectes. Dialectique de la faculté esthétique, p. 340-341.
Représentation intermédiaire de la pensée, produite par l’imagination, entre un objet perçu par la sensibilité et un concept pur de l’entendement. Le schème relie l’intuition sensible de l’objet à une catégorie : si je vois un caniche, je l’associe au concept de chien, en le schématisant comme un quadrupède qui remue la queue lorsqu’il est content.
[Schéma :] Latin schema, manière d'être, et figure de géométrie, ou de rhétorique, du grec skhêma. || Schème 1586, Ronsard, “figure de mots”. || 1800, Boiste, philosophie kantienne.
[Schêma :] Manière d’être. Extérieur, apparence.
Au sens kantien (schème transcendantal) : représentation intermédiaire homogène d’une part, au concept pur, en ce qu’elle ne contient rien d’empirique ; de l'autre aux perceptions, en ce qu’elle appartient à l’ordre du sensible, et qui par suite, permet la subsomption indirecte des perceptions ou des images sous les catégories. Le temps, en qualité de forme a priori de la sensibilité, fournit la matière de ces schèmes. Par exemple, le schème de la quantité est le nombre, dont les unités s’ajoutent successivement l’une à l’autre ; le schème de la réalité est la sensation (en général, en tant qu’elle occupe une durée) ; le schème de la substance est ce qu’il y a de permanent et d’invariable dans les choses, etc. Kant applique aussi le mot Schème aux “Idées de la raison pure”.
[Schématisme :] Schématisme des concepts de l’entendement (Kant) : la connaissance a pour condition l’application aux phénomènes de concepts purs de l’entendement ou catégories qui, n’exprimant que les formes pures des jugements, sont hétérogènes aux intuitions empiriques. Elle suppose donc “un troisième terme qui soit homogène d’un côté, à la catégorie, et de l’autre au phénomène [...]. Cette représentation doit être pure (sans aucun élément empirique) et pourtant il fait qu’elle soit d’un côté intellectuelle, et de l’autre sensible. Tel est le schème transcendantal”. ON appellera “la méthode que suit l’entendement à l’égard de ses schèmes le schématisme de l'entendement pur”. Le schème produit de l’imagination comme l’image, s’en distingue en ce qu’il est la “représentation d’un procédé général de l’imagination, servant à procurer à un concept son image” (ex. image de cinq : cinq points juxtaposés). En particulier, les concepts géométriques “n’ont pas pour fondement des images des objets mais des schèmes. Il n’y a pas d’image d’un triangle, qui puisse jamais être adéquate au concept d’un triangle en général [...]. Le schème du triangle ne peut exister que dans la pensée”. De même pour les catégories de qualité, de quantité et de relation. Ainsi les schèmes des concepts purs de l'entendement sont les “vraies et seules conditions qui permettent de mettre les concepts en rapport avec des objets et de leur donner ainsi une signification”.
[Chez Kant]. Schème (transcendantal). Représentation qui est intermédiaire entre les phénomènes perçus par les sens et les catégories de l'entendement.
[Schématisme :] Fonction intellectuelle par laquelle les concepts purs de l’entendement, inapplicables par eux-mêmes et directement à des objets d’expérience, sont remplacés dans cet usage par des schèmes qui permettent cette application.
Dans le système de Kant, objet qui existe dans l’entendement indépendamment de la matière ; synonyme de forme.
Un schème transcendantal est une représentation intermédiaire : entre un phénomène perçu par les sens et une catégorie de l’entendement ; ou entre un premier objet des sens et un second objet ; ou entre deux concepts qui ont une information en commun.
BRÉHIER E., Histoire de la philosophie, Paris, PUF, 2017.
FOLSCHEID D. Les grandes philosophies, Paris, PUF, “Que sais-je ?”, 2017.
KANT E., Critique de la raison pure, Paris, GF Flammarion, 2006.
KANT E., Critique de la faculté de juger, Paris, GF Flammarion, 2000.
Patrick Moulin, MardiPhilo, septembre 2024.
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