Libre arbitre

Auteurs – Ouvrages

Platon, La République, Livre VIII

[La Démocratie] Or, en premier lieu, n'est-il pas sûr qu'on y est libre ? que l'Etat s'est empli de liberté, de franchise, et qu'on y a le droit de faire tout ce qu'on veut ? 557 b.

Aristote, Métaphysique

[De] même que l'humain qui a la fin en lui-même et non aucun autre profit, à ce que nous disons, est libre, de même nous la recherchons [la sagesse, science des causes premières et des premiers principes] dans l'idée qu'elle est la seule science libre, car cette science est la seul à avoir sa fin en elle-même. 982 b, 25.

Aristote, Ethique à Nicomaque

Le principe de l'action morale est le libre choix. VI, 2, 1139 a.

Épictète, Entretiens, I, 12

Puisque l'homme libre est celui à qui tout arrive comme il le désire, me dit un fou, je veux que tout m'arrive comme il me plaît. - Eh ! mon ami, la folie et la liberté ne se trouvent jamais ensemble ! [...] la liberté consiste à vouloir que les choses arrivent, non comme il te plaît, mais comme elles arrivent.

Descartes, Principes de la Philosophie

37. Que la principale perfection de l'homme est d'avoir un libre arbitre, et que c'est ce qui le rend digne de louange ou de blâme. [...] on doit nous attribuer quelque chose de plus, de ce que nous choisissons ce qui est vrai, lorsque nous le distinguons d'avec le faux, par une détermination de notre volonté, que si nous y étions déterminés et contraints par un principe étranger.

Descartes, Méditations métaphysiques

[Pour] affirmer ou nier, poursuivre ou fuir les choses que l'entendement nous propose, nous agissons en telle sorte que nous ne sentons point qu'aucune force extérieure nous y contraigne. Méditation IV, p. 145.

[Il] n'y a néanmoins personne qui, se regardant seulement soi-même, ne ressente et n'expérimente que la volonté et la liberté ne sont qu'une même chose, ou plutôt qu'il n'y a point de différence entre ce qui est volontaire et ce qui est libre. Réponses aux troisièmes objections, p. 316.

Baruch Spinoza, Ethique

Les hommes se trompent en ce qu'ils se croient libres ; et cette opinion consiste en cela seul qu'ils ont conscience de leurs actions et sont ignorants des causes par lesquelles ils sont déterminés. Ce qui constitue leur idée de la liberté, c'est qu'ils ne connaissent aucune cause de leurs actions. II, 35, scolie.

Il n'y a dans l'âme aucune volonté absolue ou libre ; mais l'âme est déterminée à vouloir ceci ou cela par une cause qui est aussi déterminée par une autre, et cette autre l'est à son tour par une autre, et ainsi à l'infini. II, 48.

J'appelle servitude l'impuissance de l'homme à gouverner et réduire ses affects ; soumis aux affects, en effet, l'homme ne relève pas de lui-même mais de la fortune, dont le pouvoir est tel sur lui que souvent il est contrainte, voyant le meilleur, de faire le pire. IV, préface.

Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs

(...) la volonté dans toutes les actions est à elle-même sa loi, n'est qu'une autre formule de ce principe : il ne faut agir que d'après une maxime qui puisse aussi se prendre elle-même pour objet à titre de loi universelle. Mais c'est précisément la formule de l'impératif catégorique et le principe de la moralité ; une volonté libre et une volonté soumises à des lois morales sont par conséquent une seule et même chose. p. 128.

Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra

Je ris de votre libre arbitre et aussi de votre serf arbitre ; ce que vous nommez volonté me semble pure chimère, il n'y a point de volonté.

Nietzsche, Le Crépuscule des idoles

Si l'on a conçu les hommes libres, c'est à la seule fin qu'ils puissent être jugés et condamnés, afin qu'ils puissent devenir coupables. "Les quatre grandes erreurs", 7.

Sartre, L'existentialisme est un humanisme

[L'homme] est condamné à être libre.

Camus, Le mythe de Sisyphe

Savoir si l'homme est libre commande qu'on sache s'il peut avoir un maître. [...] ou nous ne sommes pas libres et Dieu tout-puissant est responsable du mal. Ou nous sommes libres et responsables mais Dieu n'est pas tout-puissant. p. 81.

Étymologie

Larousse étymologique

Latin liber, de condition libre, indépendant ; latin arbitrium, "juge entre deux parties".

Définition

Capacité de choisir parmi des possibles par la volonté, d'émettre des jugements de valeur, des distinctions morales (bien/mal ; juste/injuste).

A/ Libre arbitre, illusion : nos choix sont déterminés par l'ordre nécessaire du monde (voir le concept d'Hétéronomie dans le Carnet de Vocabulaire)., il n'y a pas de volonté libre (influence de l'inconscient, de l'éducation, du milieu social, de la culture, de la biologie).

B/ Libre arbitre, propre de l'homme : nos choix sont déterminés seulement par notre volonté libre (voir le concept d'Autonomie dans le Carnet de Vocabulaire).

Références

Lalande

[Libre arbitre] : Puissance de choisir ou de ne pas choisir un acte telle qu'in en fait l'épreuve dans les choses où il n'y a aucune raison qui nous penche d'un côté plutôt que de l'autre.

[Serf arbitre] : par opposition au libre arbitre, la dépendance absolue de la volonté humaine à la puissance et à la grâce divines.

Morfaux

[Liberté] : Sentiment qu'a un sujet d'être la cause première de ses actes et de ses opinions et donc d'en être, sauf mauvaise foi, moralement responsable. [...] Cette liberté s'exprime dans la décision volontaire.

[Liberté et nécessité] : La doctrine de Spinoza est l'exemple classique d'un rationalisme absolue rejetant tout libre arbitre chez l'individu humain. L'unique substance divine est cause de soi (causa sui). Simple mode de cette substance, l'homme ne peut qu'imaginer qu'il est libre comme le ferait la pierre qui tombe si elle prenait conscience de sa propre chute "libre". [...] Cependant renoncer à l'illusion du libre arbitre et d'être "un empire dans un empire", accepter la "libre nécessité" du déploiement de la substance divine est surmonter les passions et ainsi accéder à la liberté véritable.

Vanhoutte

[Libre arbitre] : La faculté qu'aurait l'homme de se déterminer à faire une chose (plutôt qu'une autre) sans que sa volonté soit elle-même déterminée par rien (liberté de la volonté).

Par opposition

Déterminisme.

Bibliographie

Aristote, Métaphysique ; Ethique à Nicomaque.

Albert Camus, Le mythe de Sisyphe.

André Compte-Sponville, Le plaisir de penser, Vuibert.

René Descartes, Principes de la Philosophie ; Méditations métaphysiques.

Épictète, Entretiens.

Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs.

Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra ; Le Crépuscule des idoles ; Généalogie de la morale.

Platon, La République.

Philosophie magazine - hors-série, Spinoza - Voir le monde autrement.

Jean-Paul Sartre, L’existentialisme est un humanisme.

Baruch Spinoza, Ethique.

Les Stoïciens, Gallimard.

Voir aussi

Contingent/Nécessaire ; Hétéronomie/Autonomie.

Patrick Moulin, MardiPhilo, septembre 2024.