Aucune explication verbale ne remplace jamais la contemplation. Saint-Exupéry, Pilote de guerre.
Le monde est tout ce qui a lieu. 1.
Le monde est la totalité des faits, non des choses. 1.1.
Quelque chose peut isolément avoir lieu ou ne pas avoir lieu, et tout le reste demeurer inchangé. 1.21.
Ce qui a lieu, le fait, est la subsistance d’état de choses. 2.
En logique, rien n’est accidentel : quand la chose se présente dans un état de choses, c’est que la possibilité de l’état de choses doit déjà être préjugée dans la chose. 2.012.
Quelque chose de logique ne peut être seulement possible. La logique traite de chaque possibilité, et toutes les possibilités sont ses faits. 2.0121.
Les objets contiennent la possibilité de toutes les situations. 2.014.
La substance est ce qui subsiste indépendamment de ce qui a lieu. 2.025.
L’espace, le temps et la couleur (la capacité d’être coloré) sont des formes des objets. 2.0251.
L’objet est le fixe, le subsistant ; la configuration est le changeant, l’instable. 2.0271.
La totalité de la réalité est le monde. 2.063.
Nous nous faisons une image des faits. 2.1.
L’image s’accorde ou non avec la réalité ; elle est correcte ou incorrecte, vraie ou fausse. 2.21.
Ce que l’image figure est son sens. 2.221.
Il n’y a pas d’image vraie a priori. 2.225.
L’image logique des faits est la pensée. 3.
Nous ne pouvons rien penser d’illogique, parce que nous devrions alors penser illogiquement. 3.03.
La proposition n’est pas un mélange de mots. (De même que le thème musical n’est pas un mélange de notes.) La proposition est articulée. 3.141.
Dans la langue usuelle il arrive fort souvent que le même mot dénote de plusieurs manières différentes - et appartienne donc à des symboles différents -, ou bien que deux mots, qui dénotent de manières différentes, sont en apparence employés dans la proposition de la même manière. [...] Ainsi naissent facilement les confusions fondamentales (dont toute la philosophie est pleine). 3.323, 3.324.
Les définitions sont des règles de traduction d’une langue dans une autre. 3.343.
La pensée est la proposition pourvue de sens. 4.
L’homme possède la capacité de construire des langues par le moyen desquelles tout sens peut être exprimé, sans qu’il ait une idée de ce que chaque mot signifie, ni comment il signifie. De même aussi l’on parle sans savoir comment sont produits les différents sons. La langue usuelle est une partie de l’organisme humain, et n’est pas moins compliquée que lui. [...] La langue déguise la pensée. Et de telle manière que l'on ne peut, d’après la forme extérieure du vêtement, découvrir la forme de la pensée qu’il habille ; car la forme extérieure du vêtement est modelée à de tout autres fins qu’à celle de faire connaître la forme du corps. 4.002.
La plupart des propositions et des questions qui ont été écrites touchant les matières philosophiques ne sont pas fausses, mais sont dépourvues de sens. Nous ne pouvons donc en aucune façon répondre à de telles questions, mais seulement établir leur non-sens. La plupart des propositions et questions des philosophes découlent de notre incompréhension de la logique de la langue. (Elles sont du même type que la question : le Bien est-il plus ou moins identique que le Beau ?) Et ce n'est pas merveille si les problèmes les plus profonds ne sont, à proprement parler, pas des problèmes. 4.003.
Le disque de phonographe, la pensée musicale, la notation musicale, les ondes sonores sont tous, les uns par rapport aux autres, dans la même relation représentative interne que le monde et la langue. À tous est commune la structure logique. 4.014.
La proposition ne peut être vraie ou fausse que dans la mesure où elle est une image de la réalité. 4.06.
La totalité des propositions vraies est toute la science de la nature [...]. La philosophie n’est pas une science de la nature. [...] Le but de la philosophie est la clarification logique des pensées. La philosophie n’est pas une théorie mais une activité. Une œuvre philosophique se compose essentiellement d’éclaircissements. 4.11, 4.111, 4.112.
La théorie de la connaissance est la philosophie de la psychologie. 4.1121.
[La philosophie] doit marquer les frontières du pensable, et partant de l’impensable. Elle doit délimiter l’impensable de l’intérieur par le moyen du pensable. 4.114.
La proposition est une fonction de vérité des propositions élémentaires. (La proposition élémentaire est une fonction de vérité d’elle-même.) 5.
Les événements futurs, nous ne pouvons les conclure à partir des événements présents. La croyance en un lien causal est un préjugé. 5.1361.
Le libre arbitre consiste en ce que nous ne pouvons connaître maintenant les actions futures. Nous ne pourrions les connaître que si la causalité était une nécessité interne, comme celle de la déduction logique. 5.1362.
Une proposition n’est, en elle-même, ni probable ni improbable. Un événement se produit ou ne se produit pas, il n'y a pas de milieu. 5.153.
Les frontières de mon langage sont les frontières de mon monde. 5.6.
Le monde et la vie ne font qu’un. 5.621.
Il y a donc réellement un sens selon lequel il peut être question en philosophie d’un je, non psychologiquement. Le je fait son entrée dans la philosophie grâce à ceci : que “le monde est mon monde”. Le je philosophique n’est ni l'être humain, ni le corps humain, ni l’âme humaine dont s’occupe la psychologie, mais c’est le sujet métaphysique, qui est frontière - et non partie - du monde. 5.641.
La forme générale de la fonction de vérité est : [formule de Wittgenstein]. C’est la forme générale de la proposition. 6.
[Il] ne peut jamais y avoir de surprises en logique. 6.1251.
Nous ne pouvons comparer aucun processus au “cours du temps” - qui n’existe pas - mais seulement à un autre processus (par exemple à la marche du chronomètre). C’est pourquoi la description du déroulement temporel n’est possible qu’en se fondant sur un autre processus. 6.3611.
Que le soleil se lève demain est une hypothèse, et cela veut dire que nous ne savons pas s’il se lèvera. 6.36311.
Toute la vision moderne du monde repose sur l’illusion que les prétendues lois de la nature sont des explications des phénomènes de la nature. 6.371.
Le monde est indépendant de ma volonté. 6.373.
Même si tous nos vœux se réalisaient, ce serait pourtant seulement, pour ainsi dire, une grâce du Destin, car il n'y a aucune interdépendance logique entre le vouloir et le monde, qui garantirait qu’il en soit ainsi, et l’interdépendance physique supposée, quant à elle, nous ne pourrions encore moins la vouloir. 6.374.
De même qu'il n’est de nécessité que logique, de même il n’est d’impossibilité que logique. 6.375.
Le sens du monde doit être en dehors de lui. Dans le monde, tout est comme il est, et tout arrive comme il arrive ; il n’y a en lui aucune valeur - et s’il y en avait une elle serait sans valeur. 6.41.
Du vouloir comme porteur de l'éthique on ne peut rien dire. Et le vouloir comme phénomène n’intéresse que la psychologie. 6.423.
Si le bon et le mauvais vouloir changent le monde, ils ne peuvent changer que les frontières du monde, non les faits ; non ce qui peut être exprimé par le langage. [...] Le monde de l’homme heureux est un autre monde que celui de l’homme malheureux. 6.43.
Ainsi dans la mort, le monde n’est pas changé, il cesse. 6.431.
La mort n’est pas un événement de la vie. On ne vit pas la mort. Si l’on entend par éternité non pas la durée infinie mais l’intemporalité, alors il a la vie éternelle celui qui vit dans le présent. 6.4311.
L’immortalité de l’âme humaine, c'est-à-dire sa survie éternelle après la mort, non seulement n’est en aucune manière assurée, mais encore et surtout n’apporte nullement ce qu’on a toujours voulu obtenir en en recevant la croyance. Car quelle énigme se trouvera résolue du fait de mon éternelle survie ? Cette vie éternelle n’est-elle pas aussi énigmatique que la vie présente ? La solution de l’énigme de la vie dans le temps et dans l’espace se trouve en dehors de l’espace et du temps. 6.4312.
Les faits appartiennent tous au problème à résoudre, non pas à sa solution. 6.4321.
D’une réponse qu’on ne peut formuler, on ne peut non plus formuler la question. Il n’y a pas d’énigme. Si une question peut de quelque manière être posée, elle peut aussi recevoir une réponse 6.5.
Nous sentons que, à supposer même que toutes les questions scientifiques possibles soient résolues, les problèmes de notre vie demeurent intacts. À vrai dire, il ne reste plus alors aucune question ; et cela même est la réponse. 6.52.
La solution du problème de la vie, on la perçoit à la disparition de ce problème. 6.521.
La méthode correcte en philosophie consisterait proprement en ceci : ne rien dire que ce qui se laisse dire, à savoir les propositions de la science de la nature - quelque chose qui, par conséquent, n’a rien à faire avec la philosophie -, puis quand quelqu’un d’autre voudrait dire quelque chose de métaphysique, lui démontrer toujours qu’il a omis de donner, dans ses propositions, une signification à certains signes. Cette méthode serait insatisfaisante pour l’autre - qui n’aurait pas le sentiment que nous lui avons enseigné de la philosophie - mais ce serait la seule strictement correcte. 6.53.
Sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence. 7.
WITTGENSTEIN L., Tractatus logico-philosophicus, Paris, Gallimard, 1993.
Nous ne sommes que les autres. Henri Laborit, Mon Oncle d'Amérique, film d'Alain Resnais.
Notes contemplatives de lecturePatrick Moulin, MardiPhilo, septembre 2024.
Philosophie, Mardi c’est Philosophie, #MardiCestPhilosophie, Contemplation, Notes contemplatives, WittgensteinNotes contemplatives - Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus #Philosophie #MardiCestPhilosophie #Contemplation #WittgensteinPhilosophie, Mardi c’est Philosophie, #MardiCestPhilosophie, Contemplation, Notes contemplatives, Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus, Logique, Contingent, Nécessaire, Possible, Impossible, Proposition, Vrai, Faux, Monde, Mort, Âme, Immortalité#Philosophie #MardiCestPhilosophie #Contemplation #Wittgenstein #Tractatus #Logique