Aucune explication verbale ne remplace jamais la contemplation. Saint-Exupéry, Pilote de guerre.
Ce n’est pas une petite tâche que celle de peindre don Quichotte. p. 7.
[Le symbolisme pictural] a en Espagne un symbole par excellence, et ce symbole, authentique et profond, ce symbole empreint de la force étymologique et traditionnelle du vocable, concrétion et résumé vivant de réalités d’autant plus réelles qu’elles sont idéales, ce symbole, qui n’est pas une simple abstraction issue de l’exclusion, c’est don Quichotte. / Je convie le lecteur à m’accompagner dans mes divagations sur l’expression picturale de ce symbole vivant. p. 8.
La vérité, c’est le fait, mais le fait dans sa totalité et son vivant, le fait merveilleux de la vie universelle fondée sur le mystère. L’analyse et l’anatomie réduisent les faits, les minuties, en poussière, oblitérant leur réalité vive. La force de la vérité de don Quichotte réside dans son âme, son âme castillane et humaine, et dans la vérité de sa figure, reflet de cette âme. p. 15.
Tout fait tout, un flux incessant de la grande cause tout entière, la cause et l’effet en même temps, cause-effet ou ni cause ni effet, c’est comme on veut, car au final, tout est un et identique. p. 16-17.
Don Quichotte a vécu et continue de vivre hors de ces pages, et le peintre espagnol digne de faire son portrait pourra surprendre le chevalier à la Triste Figure vivant dans les profondeurs insondables de son propre esprit si sa recherche est faite d’amour et de contemplation profonde. p. 18.
Exister, c’est œuvrer. Et don Quichotte n’a-t-il pas œuvré dans les esprits et ne continue-t-il pas de le faire de manière aussi active et vivante que les chevaliers errants qui l’avaient précédé le faisaient dans son esprit ? p. 19.
L’âme d’un peuple engendre le futur héros avant même que celui-ci ne voie la lumière du jour ; elle le pressent comme la condensation d’un esprit diffus et attend son avènement. Chaque époque, dit-on, voit naître le héros dont elle a besoin. [...] Et si ce n’est pas le héros dont l'époque a besoin, c’est la misère qui l’attend, le mépris, les galères, l’asile de fous, voire l’échafaud. Le héros n’est rien d’autre que l’âme collective individualisée, celui qui, parce qu’il est plus à l’unisson avec le peuple, sent les choses de façon plus personnelle. p. 19 -20.
Il vit avec nous et en nous il respire. Il y a des moments dans la vie où l’on voit surgir le chevalier sur son Rossinante, venir au secours, comme Saint-Jacques à ceux qui l’invoquent. Œuvrer, c’est exister. p. 20.
Le monde, passager et imprévisible, continue de produire dans notre esprit le permanent et le nécessaire ; c’est là sa plus grande réalité. L’histoire entière est l’idéalisation du réel par la réalisation de l’idéal. Est-ce Homère qui a fait Achille ou serait-ce l’inverse ? p. 21.
[Lequel], parmi ces censeurs, n’applique pas à tout moment la maxime occulte du quichottisme : c’est beau, donc c’est vrai ? p. 22.
Rares sont ceux qui, comme Sancho Panza [...] n’arrivent pas à la conclusion quichottesque fondée sur le postulat que ce qui n’est pas funeste est vrai - qu’une doctrine se doit d’être fausse si ses conséquences sont funestes. Note n° 1, p. 22.
Les héros légendaires et romanesques sont, de même que les héros historiques, l’individualisation de l’âme d’un peuple, et comme ils doivent œuvrer, ils existent. Don Quichotte a jailli de l’âme castillane, dont il est l’incarnation vivante. p. 22.
Ce Christ castillan est resté triste jusqu’à sa très belle mort. p. 25.
Mais sa tristesse n’était pas plaintive et geignarde ; [...] la tristesse du lutteur résigné à son sort [...] ; une gravité faite d’affliction et d’allégresse mêlées, qui n’est ni optimisme infantile ni pessimisme sénile, mais une tristesse pénétrée d’une solide résignation et d’une simplicité de vie. p. 25.
Il existe une beauté humaine classique, qui consiste plus ou moins en l’expression athlétique de la bonté de l’animal humain, du barbare qui lutte pour sa survie, du sauvage à peine déguisé ; c’est la beauté de l’équilibre musculaire. Mais un autre concept de la beauté humaine est en train de prendre forme, qui met au jour la bonté de l’homme rationnel et social et reflète la splendeur de son intelligence. p. 27.
L’histoire entière de l’humanité n’est rien d’autre qu’un combat d’adaptation long et triste entre Humanité et Nature, de la même manière que l’histoire de chaque homme se réduit aux vicissitudes de la lutte que se livrent son corps, champ de bataille sanglant, son esprit et le monde qui l’entoure. p. 28.
Le corps n’étant toujours pas le vêtement transparent de l’âme, la beauté future de l’humanité n’a pas fini de prendre forme, et celle qui domine, c’est celle du bipède sans plumes. p. 28-29.
En Espagne, nous disons que le visage est le miroir de l’âme, que le caractère et l’apparence perdurent jusqu’à la sépulture et que l’habit ne fait pas le moine. / À mesure que l’homme devient plus harmonieux, plus parfait, c’est-à-dire plus fini ; à mesure qu’il s’adapte au milieu où il vit et qu’il communie plus intimement avec lui, son visage reflète plus encore le miroir de son âme. p. 29.
UNAMUNO M. de, Le chevalier à la triste figure, Espagne, Casimiro libros, 2016.
Nous ne sommes que les autres. Henri Laborit, Mon Oncle d'Amérique, film d'Alain Resnais.
Notes contemplatives de lecturePatrick Moulin, MardiPhilo, avril 2025.
Philosophie, Mardi c’est Philosophie, #MardiCestPhilosophie, Contemplation, Notes contemplativesNotes contemplatives - Modèle #Philosophie #MardiCestPhilosophie #ContemplationPhilosophie, Filosofía, Mardi c’est Philosophie, #MardiCestPhilosophie, Contemplation, Notes contemplatives, Miguel de Unamuno, Le chevalier à la triste figure, Cervantès, Quichotte, Quijote, Sancho Pança, Panza, Espagne, EspañaNotes contemplatives - Miguel de Unamuno, Le chevalier à la triste figure #Philosophie #Filosofía #MardiCestPhilosophie #Contemplation #Unamuno #Cervantès #Quichotte #Quijote #Sancho #Pança #Panza