Vivre sa fin de vie dans la dignité: un droit, un choix, une liberté ?

VIVRE SA FIN DE VIE DANS LA DIGNITE :

Un droit, un choix, une liberté ? Pas si simple …

La loi du 22 avril 2005 - 10 ans déjà – a renforcé les droits de la personne en fin de vie afin que ses volontés soient bien respectées le moment venu.

Or cette loi est mal connue, mal comprise, mal appliquée, alors qu’elle donne le droit à chacun de choisir son destin selon ses convictions les plus profondes et ses valeurs les plus personnelles.

En conséquence, comment rédiger ses directives anticipées pour formuler ses propres souhaits de fin de vie ?

Sources :

Rapport de MM. Claeys et Léonetti de décembre 2015 (site internet « elysee.fr »)

Loi 2016- 87 du 2 février 2016 (site internet « legifrance.gouv.fr »)

Livre « Puisqu’il faut bien mourir » par le docteur Véronique Fournier, Edition La Découverte, 2015.

Contexte :

Nul n’est censé ignorer la loi…. Et pourtant !!!

Le Parlement a voté à l’unanimité en avril 2005 une loi relative à la fin de vie, souvent appelée loi Leonetti, Cette loi avait pour origine l’affaire dite « Vincent Humbert » qui avait été fortement médiatisée au début des années 2000 ; elle avait pour objectifs d’améliorer les droits des patients en fin de vie en affirmant le respect de leur autonomie et en reconnaissant le droit de refuser des traitements disproportionnés.

Dix ans après, un rapport rédigé par deux parlementaires (MM. Clayes et Leonetti), à la demande du Président de la République, a dressé un bilan mitigé de la mise en oeuvre de cette loi, méconnue par le grand public, et donc par les malades et leurs proches, méconnue par le personnel médical, et donc d’une application très incomplète.

Le constat est sévère : inégalités des citoyens devant la mort, formation insuffisante du personnel médical, cloisonnement des soins et surtout, confirmation que le « mal-mourir » persiste en France.

De plus, cette loi n’a pas permis de traiter convenablement les malades sujets de nouvelles affaires très médiatisées en leur temps : Chantal Sébire en 2008, Vincent Lambert en 2012, Jean Mercier en 2015, etc….

D’où le besoin de modifier cette loi en prenant en compte les orientations venues de diverses commissions de travail alimentées notamment par le CCNE (Comité Consultatif National d’Ethique) Après de longs débats au Parlement, une nouvelle loi a été adoptée le 27 janvier 2016 et promulguée le 2 février 2016.

Cette loi renforce et complète la loi de 2005 en reprenant la plupart de ses dispositions et en les renforçant. Elle donne de nouveaux droits à ceux qui se posent des questions sur leur fin de vie, sans rien imposer aux autres.

Les droits en vigueur pour les personnes malades en fin de vie :

(rappel à la fois des droits anciens et mise à jour des nouveaux)

Sans être exhaustive, la liste des 6 points présentée ci-après met en avant les éléments les plus forts de la loi, et chacun de ces points mérite des explications détaillées à présenter et à débattre ; mais chacun doit veiller à les comprendre et à les appliquer en fonction de ses propres convictions.

1 -Toute personne a le droit à une fin de vie digne et apaisée ; les actes médicaux ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable.

2 –Toute personne a le droit au soulagement de la douleur, même si les traitements de sa souffrance ont pour effet d’abréger sa vie ; c’est au personnel médical d’assurer en ce sens un accompagnement palliatif.

3 - Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas subir tout traitement, mais le personnel médical doit l’informer des conséquences de son choix (cette procédure doit être incluse dans son dossier médical)

4 - Toute personne peut rédiger des directives anticipées (DA) ; celles-ci expriment la volonté de chaque personne relative à sa fin de vie (conditions de refus, de limitation ou d’arrêt des traitements et actes médicaux) Elles doivent être écrites, signées et à jour.

Ces DA s’imposent à l’équipe médicale pour toute décision, d’ordre collégial.

Un modèle de DA sera établi par la Haute Autorité de la Santé ; un décret en Conseil d’Etat définira les modalités de gestion de ces DA (validité, confidentialité, conservation, etc…)

5 - Toute personne peut désigner par écrit une personne de confiance, qui sera consultée au cas où la personne concernée serait hors d’état de s’exprimer ; la personne de confiance rend compte de la volonté de son mandant et son témoignage prévaut sur tout autre.

6 - A la demande du patient, une sédation profonde peut être mise en œuvre dans des cas très précis, pouvant provoquer une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès.

Conclusions (bien sûr provisoires) : 

La loi a prévu la production d’un rapport annuel destiné à en évaluer les conditions d’application, ainsi que la politique de développement associé des soins palliatifs.

Ce rapport devrait permettre de dresser un bilan objectif de la mise en œuvre de cette loi et de la compléter si nécessaire, ce que la loi précédente n’avait pas prévu.

Mais il faut espérer qu’elle atteindra ses objectifs, exprimés lors des auditions des nombreuses personnes et des nombreux organismes consultés pendant la phase de préparation de la loi :

-          Liberté de choix, chacun pouvant être maître de ses décisions à travers les DA et la personne de confiance, sans que rien ne lui soit imposé,

-          Egalité de chacun devant sa fin de vie, en particulier pour l’accès aux soins palliatifs,

-          Fraternité de tous face à celui qui souffre et qui doit être soulagé,

-          Laïcité, enfin, pour que chacun de nous respecte le choix de ses concitoyens quelle que soit sa croyance et ses convictions.

Pratiquement, il est plutôt recommandé que chacun de nous réfléchisse à :

-          rédiger ses DA avant que sa propre santé soit trop dégradée,

-          désigner une ou plusieurs personne(s) de confiance,

-          les faire connaître à son entourage (famille, amis, médecin traitant, etc…)

C’est une action minimale à entreprendre pour « mériter une mort dignement ritualisée, socialisée, accompagnée, une mort civilisée, puisqu’il faut bien mourir … » ( extrait du livre précité de V.Fournier)

                                  Sylvain Brouard, le 12 Mars 2016

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