Nos idéaux républicains sont-ils recevables au sein de toutes les cultures? 

                                                      par André Hans, le 30 Mars 2019

Nos idéaux républicains sont fondés principalement sur la démocratie, les droits de l’homme, l’égalité en droit. En cela ils sont en effet totalement incompatibles avec les usages, les rôles et les statuts assignés à la personne au sein de certaines cultures. Si le modèle occidental a tendance à gagner progressivement par le biais de sa domination économique et culturelle, il n’en reste pas moins une surprenante solidité à nos yeux de coutumes ancestrales en totale opposition avec notre conception du statut la personne humaine.  Des sociétés où la personne est assignée à un rôle en fonction de son sexe et de sa naissance. Les sociétés brahmaniques reposent sur un régime de castes qui perdure en dépit de la volonté des autorités centrale de le supprimer. De même pour les actes les plus intimes comme le choix du conjoint, la décision échappe aux intéressés.  La démocratie est inconcevable aux yeux de certains fondamentalistes qu’ils soient musulmans, hindouistes ou autres.

Nos idéaux républicains se fondent essentiellement sur un idéal de Liberté d’autonomie d’individus libres et égaux en droit, maitres de leur destin. C’est la liberté et le libre arbitre. Ne pas être sous l’emprise, la domination de quiconque. Chacun doit être libre de ses opinions et libre de les faire connaitre. Pour être citoyen d’une république, il faut être apte à juger, c’est-à-dire avoir du discernement pour former une opinion et échapper à la manipulation. Mais la démocratie républicaine ne serait qu’une mascarade sans « La liberté d’information ». Avoir librement accès aux informations est indispensable pour pouvoir se forger un avis, une opinion.

Si l’accès à l’information libre et non partisane est un droit inaliénable, l’engagement civique et citoyen est d’une nécessité absolue afin que vive une démocratie authentique. La république ne peut exister sans l’engagement de personnalités qui possèdent trois qualités indispensables.

-         De l’abnégation et un sens aigu des responsabilités, pour diriger et administrer des petites communes et certains territoires.   

-         De la compétence pour assurer les fonctions auxquelles on prétend. 

-         De la probité pour conserver la confiance des électeurs. 

  

Les autres cultures.

 La diversité des modes d’organisations humaines et des représentations collectives est stupéfiante, même si les moyens de communication actuels ont tendance à les niveler et menacent à terme de les faire disparaitre. La conception linéaire et progressiste du temps avec une origine et un aboutissement (une genèse et une parousie) qui fait du passé un temps révolu sur lequel il n’est pas possible d’intervenir, qui interdit aux acteurs disparus d’interférer avec le présent, et d’un futur que seul des magiciens de fête foraine osent la prédiction. Aucune liberté ne peut s’exercer si notre destin est écrit d’avance. Saint Augustin à l’origine de la philosophie chrétienne de l’histoire remit en cause la conception cyclique du temp de l’Antiquité en élaborant une nouvelle conception désormais tenue pour universelle. En particulier, l’intuition générale du TEMPS, apparait en un écoulement lent, régulier et continu. Toutes parties de l’univers nous semble avancer au rythme d’un métronome unique, (ce que démentent les jumeaux des physiciens) et l’observateur impuissant est emporté dans le courant de la durée. Alors qu’elle tend désormais à s’imposer aux autres civilisations, il persiste bien, même dans la nôtre, des vestiges sous la forme croyances de cette conception qui a prévalu pour tous les peuples. Celle du temps cyclique, fait de perpétuels recommencements et d’apocalypses, celle surtout qui fait du futur un livre déjà écrit, négation de notre faculté de décider de notre avenir. L’appréhension du temps comme une durée linéaire, accumulation d’événements, de progrès matériels et moraux ne s’est imposée en occident que très tardivement. « Le temps devenait linéaire, irréversible ». L’organisation temporelle chrétienne se distinguait aussi bien de la conception antique orientée uniquement vers le passé que du messianisme et de sa vision prophétique du futur, caractéristique de la conception temporelle biblique.  Aux Indes, le renouvellement des temps selon la tradition bouddhique s’opérait par des réincarnations. Plus près Dionysos mourait chaque hiver et ressuscitait chaque printemps. Cette régénération cyclique, accompagnée de la fructification de la terre, promettait la résurrection des morts. Les rites jusqu’au triomphe du Christianisme célébraient ces retours régénérateurs du temps. Pour décider, il suffisait de consulter les augures.  A quoi bon la démocratie. Peu de place laissée par ces croyances au libre arbitre de chacun.

Le choc des cultures (Issu du texte de Kamel Daoud écrivain algérien)
Les événements de Cologne à la Saint-Sylvestre 2015 ont été un révélateur de représentations de la personne humaine en tant qu’altérités autonomes dans deux cultures différentes. C’est la liberté que le réfugié désire, vient chercher, mais n’assume pas. La liberté de la femme en Occident est un point d’autant plus sensible qu’elle est d’acquis récents. Le sentiment d’urgence de certains humanitaires occulte que certains réfugiés transportent inconsciemment le piège culturel du rapport à la femme, nœud gordien dans le monde d’Allah.  Le sexe est la plus grande misère dans le « monde d’Allah ». À tel point qu’il a donné naissance à ce porno-islamisme dont font discours les prêcheurs islamistes pour recruter leurs « fidèles » : descriptions d’un paradis plus proche du bordel que de la récompense pour gens pieux,

Religions et démocratie (repris patiemment du philosophe Y Michaud)

Quand on ouvre les yeux, on est forcé de reconnaître que l’islam n’est pas compatible avec la démocratie. Pour la plupart des musulmans, ne pas croire est un crime, la charia prime sur tout autre droit, et l’apostasie est absolument interdite. Les atteintes à la liberté d’expression ou l’inégalité entre les sexes viennent de ces dogmes. L’immense majorité des pays arabo-musulmans n’ont pas ratifié la Convention universelle des droits de l’homme de 1948. En est-il de même pour toutes les religions ? Oui, sauf que dans l’Europe chrétienne, la construction du théisme puis du déisme est allée dans le sens du rationalisme. Ce fut l’œuvre d’abord des théologiens, puis de philosophes qui ont pensé le contrat social à partir de la fin du XVIe siècle. Je pense à tous ceux qui insistent sur la souveraineté du politique, à Spinoza, Hobbes, Althusius, Locke, Hume, et à Rousseau qui, à la fin, récapitule – à sa manière – cette pensée. Ces philosophes ne sont pas d’accord sur tout, mais ils se posent les mêmes questions : comment constituer une communauté souveraine ? À qui devons-nous obéir ? Que faut-il mettre en commun et que faut-il sacrifier ? Qui détient la légitimité du pouvoir ? Tous se retrouvent sur une idée fondamentale : il faut renoncer au primat des croyances religieuses.

Certains prônent une religion d’État, mais tolérante et assez édulcorée. Le plus radical est Spinoza, pour qui la religion doit rester une affaire intérieure, un peu comme Voltaire. Tenir ces positions ne fut pas facile, il y eut des combats et des persécutions. Spinoza fut victime d’une tentative d’assassinat par un intégriste juif. Cette philosophie, d’abord cantonnée à la sphère du monde intellectuel, a ensuite cherché à penser l’époque de façon concrète.  Le monde musulman n’a pas connu la même évolution. C’est le problème. L’islam refuse toute interprétation du dogme depuis le XIe siècle. La loi divine l’emporte toujours, comme le combat pour étendre l’islam. L’universitaire tunisien Abdelmadjid Charafi, a parfaitement analysé le " retard " historique de l’islam.

Conclusion

L’autonomie de l’individu a été en Europe un long processus qui n’a abouti qu’imparfaitement. La tentation est grande de penser les autres sociétés en vertu de notre propre trajet vers un idéal de droits universels.  Chaque culture a son tropisme, notamment la tendance à se prendre pour le nombril du monde. Ce qui nous semble apriori naturel et universel, n’est que relatif à notre société. Les sociétés occidentales pensent en termes d’universalisme. Leur avance technologique et scientifique leur a conféré un pouvoir de domination sur toutes les autres cultures et pensent que cette domination serait fondée sur une supériorité morale.  Par là même elles s’octroient un devoir d’ingérence reposant sur les justifications éthiques qui sont les siennes, sans même se poser la question de leur relativité au regard des autres.

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