Peut-il exister une responsabilité collective sans responsabilité individuelle?
Il mintéresse de traiter ce sujet en deux parties en minterrogeant dabord sur la dualité « Collectivité Individu » avant de passer à la problématique de la responsabilité.
1) Lhomme a définitivement choisi de vivre en collectivité, mais pouvait-il en être autrement ?
Létat de nature dont parle J.J.Rousseau est un état dans lequel il ny a pas dhommes capables den asservir dautres, car personne na besoin de personne pour survivre. Cest lhomme sauvage.
Passer de létat naturel à la société civile entraîne droits et devoirs de chaque individu. Nous ne pourrons jamais revenir à létat de nature. Nous sommes des individus qui ne pouvons exister en dehors de la société. Pour Aristote, lhomme, pour atteindre son humanité, doit être un citoyen (membre de la cité).
Face à la société quil a créée et qui a son propre dynamisme, lindividu va se trouver, soit « dépassé », soit « intégré », voire « dévoré » ou peut-être se sentir rejeté, mais son destin reste lié à celui de la collectivité.
2) En tout état de cause, nous ne pouvons être responsables que de nos propres actes. Comment alors parler de responsabilité collective ? Peut-être parce que nos propres actes résultent des conséquences qui vont peser sur lensemble de la communauté.
Larticle 1384 du Code Civil français dispose quon est responsable non seulement du dommage que lon cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre ou des choses que lon a sous sa garde.
Cest pour cela que le « responsable, mais pas coupable » de la Ministre en poste au moment de laffaire du sang contaminé a suscité nombre dinterrogations.
Dans une société totalitaire, lindividu devient un des rouages de son fonctionnement. Cétait la position de défense dEichmann pendant son procès : « Jai obéi aux ordres. Jai fait mon travail. Je navais pas dautres choix. » Et cela tenait la route dans une certaine logique !
Le totalitarisme vise à dépersonnaliser lindividu qui est un des éléments du mécanisme et nest donc plus responsable de ses actes au plan individuel Il est alors couvert, légitimé, voire encouragé par le système.
Trop facile !!!
Et notre libre-arbitre ? Et notre conscience ? Tout ce qui fait de nous des êtres humains
« Limportant nest pas ce quon a fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce quon a fait de nous ».
John Locke* admet lidée que le peuple et donc les individus qui le composent soient déliés de leur devoir dobéissance face à la tyrannie. Il est alors licite de résister au pouvoir.
Dans le processus dextermination des juifs, chacun a eu sa part de responsabilité : la concierge qui a dénoncé par lettre anonyme, le fonctionnaire qui a apposé sa signature au bas des ordres de transport, lhomme qui a conduit le train vers les camps de la mort, etc
Il suffit pourtant quun des rouages dune machine senraye pour quelle cesse de fonctionner.
(Jai utilisé la métaphore : rouage mécanisme machine, pour appuyer mon propos. La conscience de lhomme est un obstacle absolu à sa robotisation mentale).
Et je nai pas abordé le problème de la pollution de la planète, la faim dans le monde, la misère, lexclusion, tous ces fléaux pour lesquels on ne peut nier que chacun dentre nous nait une part de responsabilité, si minime soit-elle
Voici plusieurs formulations de linterrogation initiale :
- Sommes-nous collectivement responsables ?
- Sommes-nous individuellement responsables de la collectivité ?
- La responsabilité collective est-elle faite de la responsabilité personnelle de chacun des individus qui la composent ?
* John Locke a écrit un « Traité du gouvernement civil » qui est un manifeste contre le pouvoir absolu. Il a été une référence pour les philosophes des Lumières. Il sera à lorigine dun mouvement qui débouchera, un siècle plus tard, à la Révolution Française.
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