Les programmes scolaires correspondent-ils aux besoins, et à quels besoins?
Un programme scolaire [PRS] constitue ce qui est à traiter pour une matière, à un niveau donné et en une année scolaire (a : filières, b : niveaux, c : matières).
Les PRS sont nationaux (les mêmes à Henri IV et à Trappes) et applicables par tous les établissements publics et privés sous contrat (soit 99% des élèves scolarisés), ce qui constitue un point fort de l’éducation républicaine. Ils sont matérialisés par des arrêtés, signés par le ministre, et sont publiés au JO puis au BOEN. Toute modification a d’importantes conséquences économiques : livres, pochettes, cahiers de TP/TD… auteurs.
L’élaboration (par.exemple nouvelle matière : informatique, communication…) ou la modification d’un PRS sont très codifiées, avec cinq étapes :
1. Lancement de l’opération : par le ministre ou son représentant (= décision)
- Conseil national des Programmes (CNP – 1990), puis Haut conseil de l’Éducation (HCE–2005) (sur le plan « scientifique »),
- Direction des enseignements scolaires (DESCO), en matière administrative.
Les deux sollicitent un universitaire, futur président d’un « Groupe d’experts » (GE), composé de 10 à 12 personnes (universitaires, inspecteurs généraux ou régionaux, enseignants).
2. Rédaction : le CNP… et la DESCO présentent une « lettre de cadrage » précisant les objectifs, les raisons et l’échéance.
Le GE élabore alors un « projet provisoire » dont son président assume la responsabilité.
3. Examen du « projet provisoire » qui doit être « conforme aux objectifs, faisable et raisonnable »
- Tous les enseignants concernés l’année n sont soumis à une « consultation nationale ». Les avis et propositions recueillis sont harmonisés par les inspecteurs.
- Le CNP… en discute en séance plénière et émet des remarques et suggestions en direction du président du GE.
4. Texte définitif : le GE dispose de l’ensemble des remontées dont il tient compte ou pas. Il propose un « texte définitif ».
- Le CNP… formule un avis argumenté en séance plénière. S’il y a (à peu près) accord, le texte est alors soumis au Conseil supérieur de l’Éducation (CSE), instance consultative qui traduit son sentiment par un vote.
- La DESCO élabore un arrêté.
5. Décision du ministre qui dispose de l’avis du CNP… et du vote du CSE.
Cette procédure – fort lourde – s’étale sur au moins une année.
L’année suivante, le GE rédige des « documents d’accompagnement » destinés aux enseignants concernés ainsi qu’aux élèves, à leurs parents, aux futurs employeurs…
La mise en œuvre concrète du nouveau PRS intervient au moins douze mois après sa publication. En parallèle, les enseignants sont invités à participer à des stages ad hoc.
Entre 1994 et 2005, les grands chantiers ont été les suivants :
- Tous les PRS des collèges (1995-1999)
- Tous les PRS des écoles et à deux reprises : 1997 et 2002
- L’essentiel des PRS des voies générales et technologiques des lycées (après 1999).
On le ressentira aisément, la cohérence de l’ensemble du système et le maintien d’une progression maîtrisée sont les clés de voûte de l’efficacité des PRS. C’est plus facile à écrire qu’à réussir.
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J’ai souhaité être précis sur les aspects techniques ci-dessus mentionnés afin de disposer d’un socle commun pour nos futurs échanges qui pourraient porter, entre autres, sur :
- comment sont évalués les besoins futurs ?
- pourquoi les professionnels sont-ils, de fait, exclus de la réflexion ?
- y a-t-il continuité dans l’enseignement supérieur ?
- quelles sont les raisons qui font que sont négligées les exigences post-baccalauréat ?
- l’Union européenne – essentiellement utilitariste de ce point de vue – constitue-t-elle un
danger pour les futurs PRS français, actuellement nettement « humanistes » ?
Christian Ferault