Mondialisation : faut-il réguler, et comment ?

Précarité, chômage, misère, conflits, insécurité, inégalités ou, au contraire, paix, prospérité, promotion et justice sociale : nous allons voir que la mondialisation est au centre du débat de fond.

La mondialisation, peut être abordée sous plusieurs aspects. Nous verrons un peu plus loin l'aspect économique et ses répercussions sur le plan humain.

 

Le développement de la mondialisation présente un caractère quasi inéluctable, et l'aspect technologique y a une part importante.

 

La finance, devenue internationale et libre (démantèlement des obstacles aux mouvements internationaux de capitaux) fait que les Etats n'ont plus de grandes marges de manœuvre sur le plan politique, fiscal, réglementaire.

Rapide historique :

 

La mondialisation n'est pas nouvelle. A partir du moment où nos lointains ancêtres, constatant qu'ils avaient épuisé les ressources du lieu où ils se trouvaient, se sont mis en marche pour trouver d'autres lieux, alors la mondialisation s'est également mise en marche.

 

Dès l'Antiquité mésopotamienne : existence d'un commerce international. Citons les empires romain, byzantin, carolingien, puis les foires de Champagne au XIIe siècle. Début du XIVe siècle : les banquiers italiens installent des succursales dans toutes les grandes places d'Europe (d'où "rue des Lombards", "Lombard Street"…)

 

Durant les "trente glorieuses" (1945 à 1973), le bloc Ouest, et notamment la France, s'enrichit grâce à une politique Keynésienne basée sur l'intervention de l'Etat et la généralisation des dispositifs de protection sociale.

 

Le premier choc pétrolier (1973/1974) est suivi d'un second choc en 1979/1980. La stagflation (montée simultanée de l'inflation et du chômage) fait son apparition. Cette crise économique remet en cause le keynésianisme. Les "néoclassiques" (libéraux économiques) reviennent en force dans les années 1980. La finance s'internationalise. Les capitaux circulent de plus en plus librement sur les marchés mondiaux.

 

Le capitalisme change peu à peu de visage. Les entreprises possédées par des Entrepreneurs créateurs d'emplois et de richesses, soucieux de la pérennité de leurs entreprises, deviennent souvent des Firmes MultiNationales (FMN). Ces firmes perdent peu à peu leur nationalité.

 

Nous assistons à l'apparition d'un chômage de masse entraînant un développement de la pauvreté et une croissance des inégalités. Cette crise est liée aux avancées de la mondialisation et de la concurrence mondiale.

 

Les Etats cherchent à créer les conditions susceptibles de maintenir ou d'attirer les capitaux chez eux en supprimant les entraves à leur circulation internationale, mais aussi en renonçant à la majeure partie de leurs prélèvements fiscaux sur les revenus du capital.

 

L'OMC, créée en 1995, cherche à maintenir, par la diminution considérable des barrières douanières, la compétition internationale déjà exacerbée par la faiblesse des coûts de transport au regard des écarts des coûts de production.

 

L'Europe, basée sur la concurrence, ne semble pas nous mettre à l'abri des ravages de la compétition internationale.

 

A côté de cela, nous assistons à la montée en puissance de deux mastodontes : la Chine et l'Inde.

Les bénéfices et les inconvénients de la mondialisation :

Tout d'abord, certains voient dans la mondialisation l'espoir d'une paix mondiale avec la suppression totale des frontières. De mon point de vue, j'estime que c'est loin d'être gagné. La montée du communautarisme, les révoltes, les attentats ainsi que les tensions internationales et la prolifération de l'arme atomique me confirment dans ce sentiment.

Certains pensent que la mondialisation peut sortir les pays pauvres de la misère. C'est vrai et faux. La Chine et l'Inde profitent de la mondialisation, mais de nombreux autres pays restent scotchés à la misère, l'Afrique en particulier.

 La planète est capable de nourrir ses 6 milliards d'individus, cependant, la concurrence mondiale fait baisser les prix et génère la pauvreté et la faim.

 

Le nombre d'enfants travaillant dans le monde s'est accru.

 

Au cours du dernier quart de siècle, pendant que les pays asiatiques font une extraordinaire percée sur les marchés mondiaux, les conditions d'emploi et/ou de rémunération se dégradent dans les pays occidentaux.

 En définitive, la concurrence des pays à bas salaires, au lieu de susciter une égalisation par le haut des salaires, provoque un nivellement par le bas.

 

Il faut cependant reconnaître que la mondialisation profite au consommateur (prix bas, diversité de l'offre, innovations etc.) Mais si le consommateur devient chômeur et miséreux, pourra-t-il en profiter ?

 

La mondialisation profite aussi aux grands possédants qui obtiennent un meilleur rendement de leurs capitaux et ont de nombreuses opportunités d'accroître leur fortune. La mondialisation permet aussi une lutte efficace contre l'inflation.

 

Ce qu'il faut faire : réguler - pourquoi ?- comment ? :

 

Je ne préconise pas l'arrêt de la mondialisation, ce serait de toute façon difficile, mais aussi parce qu'elle a ses avantages (sortie de la misère pour certaines populations dans le monde, emplois à l'exportation, prix bas pour certains articles, limitation de l'inflation du fait de la concurrence, etc.). Par contre, la mondialisation telle qu'elle est aujourd'hui a des inconvénients graves qu'il faut éliminer (pertes d'emplois pour certains, moins disant social, pollution incontrôlée dans certains pays, pillage des ressources naturelles, trop de population "scotchées" à la pauvreté, etc.)

 

C'est pourquoi je préconise une solution intermédiaire : la mondialisation régulée.

 

C'est aussi un nouveau système économique.

 

Petit rappel : le 5 janvier 1914 Henry Ford annonce qu'il va diminuer le temps de travail, doubler les salaires et réduire le prix de sa voiture. Cela parait incroyable et pourtant, il l'a fait et cela a marché. Comment ce miracle a été possible ? Grâce aux gains de productivité.

 

Cela nous ramène à la question fondamentale : "que fait-on des gains de productivité ?" Cette question est en rapport avec une autre question fondamentale : "quelle société voulons-nous, pour nous et pour nos enfants ?" Les gains de productivité peuvent être utilisés de diverses façons :

- Baisse des prix : Profite aux consommateurs, moins bon pour le développement durable.

- Baisse du temps de travail : Bon pour la qualité de vie, bon pour la vie de famille, bon pour l'engagement citoyen, pas d'effets néfastes sauf en cas de compétition internationale sauvage comme actuellement, justement…

- Hausse des salaires : Profite aux salariés, mais peut aussi profiter aux entreprises, car il y a hausse de la consommation, donc hausse des opportunités pour les entreprises de faire des affaires. C'est donc bénéfique pour l'économie. Sauf que cela ne peut pas se faire, là aussi, en cas de compétition internationale sauvage…

- Hausse des bénéfices : Deux utilisations : investissement dans l'entreprise ou versement de dividendes aux actionnaires. Les deux ont des effets bénéfiques pour l'économie, sauf si le versement de dividendes n'entraîne pas de création de nouvelles activités et que l'argent va dans la spéculation et la finance, ce qui, hélas, est actuellement le cas.

- Baisse des effectifs : Cela génère du chômage et fait baisser les salaires donc baisse de la consommation, baisse du volume d'affaires pour les entreprises… c'est, hélas, le cercle vicieux que l'on connaît bien. C'est le résultat de la mondialisation ultralibérale actuelle mettant en compétition les Travailleurs du monde entier.

 

Je précise que je prend le terme "Travailleur" comme étant celui qui vit de son travail qu'il soit salarié (public et privé), artisan, commerçant, profession libérale, petit entrepreneur.

 

N'en déplaise à quelques uns nous voyons bien que l'économie n'est pas qu'un débat de spécialistes, mais un débat de fond sur la société que l'on veut.

 

Les ultralibéraux s'appuient sur les théories d'Adam Smith (1723 - 1790 - division internationale du travail et théorie des "avantages absolus") et de David Ricardo (1772 - 1823 - théorie sur les "avantages comparatifs"). Et pourtant Ricardo indique lui-même que, si les capitaux sont libres, alors sa théorie ne fonctionne plus. Or, si les capitaux n'étaient pas libres du temps de Ricardo, ils le sont devenus maintenant… Cela remet en cause bien des discours de la pensée unique.

 

Je ne rejette pas complètement la division internationale du travail, mais quand tout le travail s'échappe de certains pays, cela pose un problème !…

 

Les technologies vont de plus en plus vite à se répandre et ne donnent plus aux pays avancés un avantage concurrentiel. Certains disent "il faut être compétitifs". C'est vrai si on ne régule pas. Dans ce cas, voici des questions à se poser :

 

300 € par mois : c'est déjà un bon salaire dans certains pays de l'Est. Est-ce suffisant pour vivre en France ? Non ! C'est déjà difficile de vivre avec le SMIC (environ 1250 euros par mois brut et 980 euros net). Pourrons nous nous aligner sur les 30, 60 ou 100 € mensuels de la Chine et de l'Inde ? Est-ce souhaitable ? Est-ce réaliste ?

Travailler plus ? 70 heures par semaine ? plus encore ? Suppression des vacances, des WE ? Revoir les conditions de travail ? Faire comme dans les pays émergents : pas de protections ? donc risques d'accidents graves, voire mortels, durée de vie limitée par les diverses inhalations de produits toxiques et autres ? Pollution libre pour être compétitifs par rapport à ceux qui n'ont pas de réglementation ? Devra-t-on faire travailler nos petits enfants dans les mines ?

En mettant en compétition entre eux les Travailleurs du monde entier, on ne fait qu'aller vers l'alignement vers le bas des salaires, des conditions de travail, du niveau social et écologique.

 

D'un autre côté, en laissant les capitaux libres, on fait qu'ils vont se placer là ou cela rapporte le plus.

Les salariés sont ainsi soumis à "la double peine" : d'un côté une pression à la baisse du coût du travail, d'un autre côté une exigence de plus en plus forte du capital pour que cela rapporte.

Un nouveau système économique doit être mis en place. Il faut faire de la régulation économique intelligente.

 

Pour moi l'intervention économique ne doit pas être celle qui est appliquée actuellement : c'est-à-dire laisser faire le marché et chercher de plus en plus difficilement à réparer les dégâts en prélevant de l'argent sur le dos de ceux qui travaillent, ou en augmentant la dette, pour distribuer des miettes aux exclus. Cela ne marche pas, on le voit bien.

 

Il faut avoir une action économique offensive. La conquête de nouveaux marchés passe par l'innovation. Il faut donc organiser une recherche coordonnée et efficace (pas dépenser plus, mais dépenser mieux). En particulier, il faut des recherches dans le domaine médical, sur les énergies renouvelables, le développement durable etc. Il faut également un haut niveau de formation. Avoir une politique de "grands travaux". etc.

 

Mais, vu les énormes écarts salariaux actuels, il faut également réguler l'économie mondiale. Entre la fermeture des frontières et l'ouverture sans discernement, il y a un juste milieu à trouver.

Pour réguler efficacement, et également pour financer notre protection sociale, je préfère les droits de douanes, car ils ne s'appliquent que sur les importations et pas sur ce qui est fait en France. Les droits de douane que je préconise sont :

- Modulables en fonction du niveau salarial et social du pays exportateur (plus c'est mauvais, plus je taxe). Cela incitera les pays à adhérer à une charte sociale et fera monter le niveau social des Travailleurs de la planète au lieu de les livrer à la concurrence sauvage qui nivelle par le bas.

- Modulables en fonction du niveau écologique du pays exportateur (plus c'est mauvais, plus je taxe), cela permettra de faire monter les niveaux écologiques au plus grand bénéfice de la planète (charte écologique) et sera bien plus efficace que les grands discours.

 

D'autres critères peuvent également être pris en compte : la réciprocité, l'aide que l'on veut apporter au pays exportateur, le secteur d'activité, le niveau de ressources naturelles restantes, la balance (positive ou négative) de nos échanges avec le pays exportateur, les gros marchés que l'on souhaite obtenir etc.

Pour ne pas pénaliser les ménages (renchérissement des importations), il faut compenser en retirant les taxes sur les salariés. L'argent provenant des droits de douane sera utilisé pour financer les retraites, la santé, l'éducation, la recherche, le social etc. Les taxes pesant sur le travail seront supprimées en tout ou partie. Les entreprises devront verser aux salariés l'intégralité de la baisse des charges patronales. Les salariés auront donc plus d'argent, consommeront davantage et seront incités à acheter Français, cela fera davantage d'emploi. Devant le dynamisme de l'économie et le fait que ce système ne pénalise pas les entreprises installées en France, ces dernières auront tendance à venir et à rester en France, donc tendance au plein emploi, donc baisse de la précarité et de la misère, salaires net plus élevés et meilleures conditions de travail. Les retraites et les prestations sociales pourront ainsi être relevés. C'est le cercle vertueux de l'économie.

 

Bien entendu, il faudra faire ces transferts prudemment et progressivement afin de ne pas déstabiliser brutalement l'économie. On peut même envisager la montée progressive d'un "mix" droits de douane + TVA sociale ou TVA modulée coordonné avec la baisse progressive des prélèvements qui pèsent sur les Salariés

En vrac, voici quelques autres idées :

 

Pour baisser le nombre de camions et financer le ferroutage, je préconise une taxation des camions entrant sur le territoire français.

 

Pour l'aide aux pays en difficulté, mais aussi pour financer le social des pays dit "riches" ainsi que l'harmonisation européenne, il faut promouvoir la taxe Tobin sur les transactions financières.

 

Sur le plan humain, la meilleure façon de répondre aux problèmes d'immigration qui se posent dans les pays riches est l'aide aux pays pauvres. Par contre, pour que cette aide soit efficace, il faut aider directement en biens et services et pas (ou peu) en argent.

Dans les pays en difficultés et en particulier en Afrique, il faudrait cesser de vouloir à tout prix leur imposer notre mode de vie et notre système économique basé sur le profit et la concurrence. Pourquoi ne pas laisser se développer une économie locale, respectueuse des peuples, des modes de vie traditionnels, des cultures et de l'environnement ?

 

Car, en plus du respect des aspirations des peuples et du respect des cultures et des modes de vie, il faut également se poser la question du développement durable.

Il faut plusieurs planètes pour que le monde entier ait le niveau de vie des Français et encore plus pour que le monde entier vive comme les Américains.

 

De plus, le prix du pétrole et l'hypothèse de sa disparition à terme vont poser la question des transports internationaux.

Il faut également se poser la question suivante : faut-il consommer plus pour être heureux ? Ne peut-on pas consommer mieux et voir aussi la vie sous un autre angle ? Profiter de la vie de famille, de l'amitié, de l'engagement citoyen, de l'art, des paysages, de la nature, de la marche, du sport...

Jean-Marc Nossent

http://ecomondiale.over-blog.com

Revenir au blog et voir les commentaires