Quel bilan pour la génération 

Les personnes nées entre 1944 et 1960 (en gros) sont souvent accusées de différents défauts typiques de leur génération, dont le principal serait l'égoïsme. Un hebdomadaire a récemment titré sur sa couverture : « Le casse du siècle : comment une génération a pu vivre aux crochets de la suivante ».
Mon but n'est pas de donner un avis définitif sur cette question, mais de poser les questions et de citer des faits incontestables , pour ouvrir le débat .

Remarquons pour commencer que rares sont les générations à avoir laissé derrière elles une situation florissante. Les guerres de 14-18, de 39-45 ont laissé le pays en triste état, et celle d'Algérie a laissé des traces peu agréables. La génération papy-boom n'a pas fait de guerre.

La dette de la France est de deux mille milliards d'euros, y compris les retraites (environ 1000 milliards), en augmentation constante, c'est à dire pas mal plus que ce que l'on produit en France en une année. Dans cette dette, la partie « extérieure », c'est à dire possédée par des étrangers, doit être de 600 à 700 Milliards d'euros. Mais le patrimoine des Français était, en 2005 et selon l'INSEE, de 8000 milliards d'euros (sujet  à variations saisonnières, 65% étant de l'immobilier). Jamais le patrimoine des Français n'a été aussi important, et ceci est dû à l'absence de guerre.  Il faut ajouter l'énorme patrimoine collectif, l'embellissement des villes, les lignes TGV, les écoles, universités..... ; sur ce patrimoine je n'ai pas trouvé de chiffres.

Mais les inégalités entre Français n'ont jamais été aussi fortes que maintenant. On a vu réapparaître les « clochards » dans les rues et les métros, appelés maintenant « SDF », tandis que les cadeaux de Noël pour quelques uns se chiffrent à quelques centaines de millions d'euros.

Du point de vue politique étrangère :

Du point de vue politique intérieure, le fait majeur a été l'intégration des femmes dans le monde du travail, et pas seulement à des postes subalternes. Les points de départ ont été d'une part l'invention de la « pilule »,  qui a permis aux femmes d'espacer les naissances à leur guise, et d'autre part les progrès de la médecine et de l'hygiène, qui ont pratiquement éliminé la mortalité infantile. Le nombre moyen de grossesses par femme est maintenant réduit à 2, alors qu'il était de 7 en 1900.

Cette révolution féminine a pris quelques décennies, et n'est pas complètement terminée. Il a fallu que l'état mette la main à la poche (d'où une dette accrue), et cela a peut-être créé du chômage. Mais les résultats sont là, que nous envient nos voisins, comme l'Allemagne et l'Italie, beaucoup moins avancés.

A cet égard, tout n'est quand même pas rose : ce changement de statut de la femme a créé de grosses tensions dans des familles, les hommes n'étant pas préparés à renoncer à leur qualité de « chef de famille ». S'en sont suivis de très nombreux divorces, générant d'ailleurs une crise de l'immobilier.

L'économie Française a été touchée comme ses voisines par la mondialisation, et d'autant plus que ses lois sociales sont plus généreuses qu'ailleurs (sauf en Allemagne et dans les pays scandinaves). Les Français, de par leur tradition catholique méfiante à l'égard de l'argent, ont moins donné dans l'économie virtuelle que beaucoup de leurs voisins et devraient, de ce fait, être moins touchés par la « crise ». Enfin, l'accroissement de la longévité a lourdement augmenté le montant total des retraites à verser.

La France possède un des meilleurs système de soins du monde. Ce système a  été complètement rénové après la guerre, et a tenu le coup, malgré son coût de plus en plus élevé.

Côté moral et spirituel, l'événement fondateur a été « Mai 68 », mouvement de protestation contre l'ordre moral et plus généralement contre les contraintes ; les institutions (Eglises, syndicats, partis même), ont perdu une bonne partie de leur substance dans la décennie qui a suivi. La morale dominante à ce jour n'a pourtant pas grand chose à voir avec ce que disaient vouloir les « soixante-huitards », qui prétendaient abolir la « civilisation de consommation ".

 

L'instruction publique n'a jamais été aussi développée. En 1957, seulement 10% de la population arrivait au niveau du bac. C'est maintenant 70% ou plus. Mais le bac a t'il été dévalué ? D'autre part, l'ignorance du fait religieux par les jeunes générations n'est il pas un affaiblissement culturel ?

Pour ce qui est de l'environnement, le bilan semble très négatif : un début d'épuisement des ressources naturelles, une accélération du réchauffement de la planète. Cette  génération a vécu dans l'illusion d'une abondance éternelle, d'une croissance exponentielle, et cette illusion a encore cours pour certains. A sa décharge, on voit maintenant la difficulté de mettre l'humanité entière au travail pour résoudre ces problèmes, même maintenant que des organisations supranationales ont vu le jour (conférences sur l'environnement, études scientifiques, G8, Europe des 27, etc).

Une question pour finir : cette génération a t'elle volontairement ignoré le problème des générations futures ? Il est vrai que les suppressions d'emploi touchent au premier abord les jeunes : si un « plan social » ne prévoit pas de « licenciement sec », cela veut dire qu'on réembauchera ailleurs les travailleurs... à la place des jeunes ; mais de cela, on ne parle pas. Et les dernières « relances » n'améliorent pas la dette de la France, à la charge de nos enfants.

En résumé, je dirais que la génération baby-boom, contrairement à celles qui l'ont précédée, laisse une France non détruite, avec certes des dettes, mais encore plus de richesses ; cependant les richesses personnelles ne sont pas bien partagées. Ses grandes œuvres ont sans doute été l'Europe et l'intégration des femmes dans le monde du travail, qui s'est faite dans la douleur. Ajoutons l'amélioration de l'instruction publique et du système de soins. Pour ce qui est de l'environnement, elle n'a pas fait grand chose, mais pouvait elle faire beaucoup ? Question : a t'elle volontairement ignoré les générations futures ?

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