Qu'est-ce qu'être français aujourd'hui ?

Commençons par parler d’Histoire.

La notion de nation Française pourrait avoir commencé avec le traité de Verdun en 843 : les descendants de Charlemagne ont séparé l’empire en trois tronçons, dont le plus à l’ouest correspond en gros à la moitié Ouest de la France, la partie médiane à l’autre moitié plus une partie de l’Italie, et la partie Est à l’Allemagne-Autriche. Viennent les rois de France, dont le but principal sera d’agrandir le « domaine royal » d’une part, et d’autre part d’affirmer la cohésion de ce domaine du point de vue législatif. De ce point de vue, l’absolutisme royal marque le début de la nation Française, en opposition aux tendances centrifuges des grands seigneurs, et le roi, mis sur le trône « par la grâce de Dieu », se sent le protecteur de tous les Français contre la rapacité des nobliaux locaux.

Après quelques siècles la royauté décline, sous l’impulsion de Louis XIV, qui, craignant la « fronde » des potentats locaux, les transforme en courtisans ; comme  les sociétés ont besoin d’une élite qui montre le chemin, c’est l’inévitable Révolution, advenue quand les caisses étaient vidées.

Que demandaient les révolutionnaires ? Que les revenus correspondent au mérite, et non plus à l’appartenance à une caste ou à des faveurs accordées au plus filou (par exemple dans l’affaire du collier de la Reine sous LouisXVI). C’est là qu ‘apparaît la notion de « citoyen », qui inclut les notions d’égalité et de solidarité. Les Jacobins, suivis par Napoléon, sont, du point de vue de la centralisation, les continuateurs des rois, et gagnent la partie face aux aux Girondins (pour lesquels « Paris doit être réduit à un quatre-vingt neuvième de la France »).  La République Jacobine mettra encore cinquante ans à s’imposer.

En 1885, Jules Ferry a imposé la scolarisation de tous les enfants. Il fallait pour cela une politique volontariste et il est très émouvant de voir dans les coins les plus reculés de l’Hexagone ces maisons carrées, pas très belles, et toutes faites sur le même modèle. C’est de là que date ce fameux ascenseur social, qui n’est pas totalement en panne. Cette école obligatoire a d’ailleurs parachevé l’évolution commencée au 17ème siècle (sous Richelieu notamment) vers une langue unique, qui marque d’une certaine manière la victoire du centralisme.

En 1905 est apparue une composante fondamentale dans le paysage Français : la laïcité, qui dit que l’Etat ne reconnaît pas les cultes, même s’il n’a pas à s’y opposer. Cette laïcité est vécue de façon « négative » par beaucoup de Français, comme une affirmation de la non-existence de Dieu , ce qui découle du fait qu’elle a été arrachée à l’Eglise ; néanmoins, cette laïcité constitue une valeur très utile pour la vie en bonne harmonie de personnes ayant choisi des fois différentes.

Autre évènement fondateur : la création de l’Union Européenne, une idée Française rappelons le. Robert Schumann, Jean Monnet  et d’autres ont compris (n’est ce pas un peu tard ?) que la France ne pouvait pas se permettre des guerres à répétition avec ses voisins, et qu’il valait mieux se contenter des coupes d’Europe de football. De Gaulle et ensuite tous nos présidents ont compris l’importance de cette construction unique dans l’Histoire.  La difficulté de l’exercice tient à ce que les traditions de nos voisins (Allemagne et  Angleterre par exemple) sont différentes des nôtres. C’est pourquoi l’Europe sert  de bouc émissaire à nos problèmes.

Le modèle Français est combattu de l’intérieur par le « libéralisme », qui a été à la base de la montée en puissance des USA au 20eme siècle . Le libéralisme  prétend remplacer la notion de solidarité par celle d’efficacité économique, la première étant supposée automatiquement assurée par la seconde. Le système qui prévaut officiellement, et pour le moment, en France et en Europe est différent : c’est   « l’économie sociale de marché », un libéralisme tempéré par des lois sociales très importantes, qui promeuvent la « Solidarité » (sécu, allocations chômage, retraites…)… et creusent les déficits. La « Liberté » est toujours là, en est il de même de la « Fraternité » ?

Les tenants du libéralisme se recrutent dans les classes bien éduquées,  et la rapacité de certains n’est pas sans rappeler celle des nobles de l’Ancien Régime, qui, prétendaient pourtant défendre une société fondée sur Dieu (ici sur l ‘ « Efficacité »).

 Nous en sommes là.

 A tous ceux qui veulent poursuivre ce chemin tracé à la Révolution Française, modifié par la loi de 1905, et par l’appartenance à l’Europe,  est ouvert un long chemin à faire ensemble en France. Il faut certes ne pas insulter l’hymne national, ne pas traiter la France de « pays hypocrite » (Anelka),  envoyer les enfants à l’école (y compris les filles), parler la langue Française ou au moins faire des efforts en ce sens, et, c’est le minimum, accepter de se dire Français. C’est ce que font l’immense majorité des immigrés.

A tous ceux qui se trouvent mieux à l’étranger pour ne pas payer leurs impôts, qui refusent le « vivre ensemble » au pays, ou qui ne pensent qu’à se goinfrer de salaires et de bonus hors de proportion avec les services rendus, la question se pose : bien qu’ils parlent Français et soient souvent de racines Chrétiennes, sont-ils vraiment des citoyens Français?

Autre question qui se pose : la France peut-elle intégrer d’autres apports culturels, venus d’autres pays où se pratiquent d’autres religions que ce christianisme qui est au coeur de notre Histoire, d’autres habitudes culinaires, vestimentaires, voire linguistiques ? La réponse est qu’il n’existe pas de pratique culturelle , ni de pratique religieuse, qui soient définitivement meilleures que les autres: tout est une affaire de choix personnel.

Enfin, y a t’il un problème de surpopulation en France tel qu’on aie à refuser toute immigration ? La dessus le café débat du 15 Nov. 2009, « Comment réguler les migrations » a tâché de donner une réponse, et prière de s’y reporter, ainsi qu’au compte rendu de séance. Ce que pour ma part j’en ai retenu, c’est que la régulation des flux migratoires n’est pas une affaire simple à résoudre, puisqu’il s’agit d’êtres humains qui fuient la misère et souvent la guerre, et que l’important, c’est l’intégration, quelquefois difficile, au pays d’accueil.

L’Histoire nous a légué des exemples d’assimilation de peuples par d’autres peuples, souvent après des conquêtes (assimilation de la Gaule à l’Empire Romain par exemple, ou conquêtes coloniales) ; elle nous a aussi légué des génocides: la Shoah, avec sa spécificité d’organisation criminelle industrielle contre un peuple déjà assimilé, génocide indien, Rwanda…. Il y a eu également en France un flux migratoire constant, et bienvenu, qui fait de la France un pays mélangé : wisigoths, mongols, italiens, polonais…

.Il y a un exemple (pas Français) que j’aimerais citer ici comme modèle: l’intégration dans le christianisme naissant des païens, ces rustauds idolâtres qui semblaient incapables d’accueillir le message du Christ dans sa pureté. Le génie de Saint-Paul a été de dire : acceptons les, et même soyons plus favorables à eux qu’à nos pharisiens, ces notables endormis dans leur bonne conscience.

Bien sûr il n’est pas question de renoncer à l’héritage historique de notre pays ou d’accepter des pratiques  comme l’excision, le mariage forcé des fillettes ou même la polygamie. Il est seulement question d’y admettre, dans la liberté de choix personnel, les pratiques culturelles et religieuses citées plus haut, francisées donc (il doit par exemple y avoir une façon Française de vivre l’Islam, qui intègre la tolérance et la laïcité).

Il peut y avoir, il y a déjà,  une façon Africaine d’être Français, ou asiatique, comme il y a eu par le passé des façons italienne, polonaise, ou, en remontant plus loin, bretonne, provençale, ch'ti...

                                                           

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