Quels sont les enjeux du télétravail ?

1/ Qu’est-ce que le télétravail ?

 

En France, la pratique du télétravail reste souvent informelle, et il existe de nombreuses définitions qui n’ont pas de fondement juridique. En mars 2012, la Loi Warsman a fixé un cadre réglementaire, et désigne le télétravail comme :

« toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait pu être exécuté dans les locaux de l'employeur, est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication », et ce dans le cadre d'un contrat de travail ou d'un avenant à celui-ci. Le contrat doit s’établir sur la base du volontariat et être réversible.

 

Selon l’enquête annuelle sur les tendances RH en 2014 publiée par Hay Group, 36% des entreprises françaises pratiquent le télétravail, soit 3% de plus qu’en 2012.

En France, la croissance du nombre de télétravailleurs oscille chaque année entre 1,5% et 2% par an.

En 2000, 5,6% de la population active française faisait du télétravail, en moyenne, 1 à 2 jours par semaine maximum.

En 2012, 17% et en 2014, 20%.

 

Cette pratique est le plus souvent informelle, même si on remarque ces dernières années une augmentation des programmes de télétravail construits et encadrés par les entreprises. Quand il est formalisé, l’analyse du télétravail dans les entreprises met en évidence qu’en moyenne 20 à 25% des salariés d’une entreprise pratiquent le télétravail, sauf cas spécifiques (salariés mobiles par définition, localisation très éloignées entraînant des déplacements très longs, etc.).

A horizon 2015, le Centre d’Analyse Stratégique (CAS) estimait dans son étude publiée en 2009 que 50% des employés seraient en télétravail.

 

Toutes les catégories socio-professionnelles peuvent être concernées, à l’exception des salariés exerçant des fonctions de manutention/travaux manuels. Les fonctions nécessitant de fortes interactions avec les autres membres de la société, un travail en équipe récurrent par exemple, je pense aux métiers de la communication du marketing, de l’innovation peuvent être moins éligibles au télétravail.

Enfin, les entreprises confrontées à d’importants enjeux de sécurité des données (métiers de la banque/assurance, de la Défense) ont tendance à restreindre fortement le déploiement du télétravail. Les entreprises doivent donc décider, à partir d’une cartographie de leurs métiers et des critères spécifiques à son entreprise, quelles populations seront éligibles ou non. Cette méthodologie doit être rigoureuse et équitable, puisqu’il faudra pouvoir l’expliquer aux salariés par la suite.

 

2/ Quels sont les principaux freins ?

 

Historiquement, les outils technologiques ont pu contraindre la mise en œuvre de programmes de télétravail. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Sans doute pour la première fois dans l’histoire de nos sociétés modernes, les outils permettent d’organiser les conditions du travail à distance pour un nombre croissant de métiers. Il ne faut cependant pas occulter le fait que de nombreuses entreprises vivent en ce moment ces mutations et n’ont pas encore terminé leur mue. Toutes ne sont donc pas également prêtes à la mise en place du travail à distance.

 

Le frein majeur reste une réticence de principe des instances de Direction et du middle management face à une organisation du travail qui est par nature disruptive et suscite la méfiance. On considère typiquement que le travail sera moins bien réalisé chez soi (devant la télévision, ou entouré des enfants, etc.) et on craint une perte de contrôle sur les salariés et une déstructuration du collectif de travail. Ces pratiques viennent remettre en cause un modèle français de management que l’on peut qualifier de « paternaliste », basé sur le présentéisme.

En caricaturant : « Si demain, je ne peux pas voir mon salarié travailler, je ne peux être certain qu’il effectue réellement son travail ». Le télétravail a encore très mauvaise réputation en France. C’est pourquoi il est nécessaire de préparer sa mise en œuvre très en amont, avec les instances de Direction qui devront être moteur. Il s’agit d’un véritable projet d’entreprise et non pas d’une « mesurette » alors que très peu de personnes en bénéficient. Il faut un appui fort de la Direction pour que ces pratiques se généralisent et s’inscrivent durablement.

 

Il faut également bien préciser que les programmes de télétravail reste le plus souvent limités à 1 à 2 jours par semaine, et comportent des dispositifs de réversibilité à l’initiative du manager ou du salarié. Ceci permet souvent de désamorcer les peurs relatives à la perte du lien avec l’entreprise, avec des exemples extrêmes comme Yahoo ! qui avait décidé de rapatrier tous ses salariés au siège, après plusieurs années de pratiques de travail à distance à outrance.

 

Les syndicats sont aujourd’hui de plus en plus volontaires puisque le télétravail est une demande des salariés : 75% des salariés sont favorables au télétravail (enquête Nationale Tour de France du Télétravail 2012). Cependant, le climat social peut être un frein dans certains cas spécifiques de blocages sur d’autres sujets en cours : il est plus difficile de lancer une consultation sur le sujet du télétravail quand l’agenda social est déjà fortement encombré.

 

Côté salariés, le télétravail peut parfois poser des problèmes de visibilité, d’isolement, de manque de frontière entre vie professionnelle et vie personnelle. Il pose également les questions des conditions de travail au domicile : tous les salariés ne disposent pas du même espace, des mêmes équipements, ou de la même capacité de travailler à domicile. Ce sont des effets qu’il faut mesurer pour les contrôler pendant les programmes de télétravail, et proposer des alternatives au domicile quand celui-ci n’est pas adapté.

 

Il existe peu de contraintes à la mise en place du télétravail dès lors que des outils technologiques suffisamment performants sont mis à disposition des salariés et que l’entreprise a décidé d’en faire un réel projet d’entreprise.

 

3/ Selon une enquête menée par la société LBMG, 90 à 95% des entreprises ayant mis en œuvre le télétravail sont satisfaites.

Les avantages du télétravail sont à décliner pour le salarié et pour l’entreprise.

 

Le principal avantage du télétravail pour le salarié est le gain de temps : entre 1 et 1h30 de temps de transports en moins par jour. Les études montrent que ce temps gagné est réinvesti dans la vie personnelle et professionnelle à proportion égale. On observe que les salariés en télétravail se sentent d’ailleurs particulièrement redevables auprès de leur entreprise. Ils s’investissent davantage et se sentent obligés d’accroître leurs performances par rapport aux autres salariés de l’entreprise qui ne sont pas en télétravail. Même si la notion de productivité peut être subjective, nos études, entreprise par entreprise, montrent un gain de productivité de 10 à 15%.

 

Pour l’entreprise, le télétravail a également un impact positif sur l’absentéisme.

Il permet aussi de réduire le turn-over des salariés, notamment lors d’un déménagement. Pour certaines entreprises, proposer le télétravail constitue un véritable atout, une marque employeur forte, pour attirer les salariés et plus particulièrement ces talents, et se différencier de ses concurrents. En matière de politique RH, le télétravail contribue à renforcer une image moderne d’une entreprise qui fait confiance à ses équipes. Au-delà de ces dimensions sociales, le télétravail est une initiative qui peut s’inscrire dans une démarche de Responsabilité Sociale (RSE) ou de Développement Durable puisqu’elle participe à la réduction des déplacements, à décongestionner les axes de transports et donc à réduire les émissions de CO2.

 

Jusqu’ici, le télétravail constituait souvent une mesure d’accompagnement forcée en cas de déménagement. On peut citer le cas d’Alcatel-Lucent, qui à la suite d’un déménagement, a essayé de répondre aux problématiques de déplacement de ses salariés par le télétravail, en réduisant les temps de trajet parcouru. 40% des salariés d’Alcatel-Lucent sont en télétravail. Mais ces moments restent rares pour une entreprise et ne permettent pas une mise en place optimale du télétravail parce qu’il est souvent mis en place de manière réactive. Il faut étudier la question très en amont pour pouvoir accompagner véritablement la stratégie de l’entreprise et bénéficier des effets de leviers de cette nouvelle organisation du travail.

C’est pourquoi ces projets sont de plus en plus portés des équipes transverses, impliquant Ressources Humaines, Immobilier / Services Généraux, IT et soutenu par le COMEX (ou CODIR). Plus globalement, le télétravail peut servir à accélérer/accompagner une évolution des modes d’organisation du travail. La tendance aujourd’hui est de faire évoluer les modes de management et favoriser le bien-être des salariés.

 

En parallèle, la réduction des coûts étant prégnante aujourd’hui, le télétravail, favorisé par les outils technologiques, est un des moyens pour justifier une réduction des surfaces au poste de travail. Le télétravail devient alors un système gagnant-gagnant offrant flexibilité et bien-être aux salariés et permettant une évolution des modes de management tout en réduisant les coûts. C’est pourquoi cette tendance devrait se développer. En France, en 2012, 50% des entreprises du CAC 40 ont passé un accord de télétravail.

 

4/Tiers-lieux, de quoi parle-t-on exactement ?

 

La notion de tiers-lieu englobe tous les espaces qui ont pour dénominateur commun la gestion flexible d’espaces de travail avec une capacité à mélanger des publics variés, indépendants, TPE-PME, salariés de grands groupes. Ces espaces proposent généralement des services, et une animation importante.

Sous la dénomination tiers-lieux, il existe 410 sites en France que nous distinguons en trois types d’espaces :

 

- les espaces de coworking portent de fortes valeurs sociétales, d’économie collaborative et de développement durable (comme b-libre coworking à Saint-Quentin-en-Yvelines). Ces sont des espaces partagés de petite taille, dynamiques et agiles. Et beaucoup résultent d’une initiative privée.

On en recense 280 en France en 2014 contre une dizaine en 2011.

Certains acteurs des espaces de coworking s’industrialisent et disposent des surfaces importantes (de 600m² et de 1.200m²) ;

 

- les télécentres ;

 

- Les centres d’affaires ne sont pas des tiers-lieux car assez peu proposent une animation locale, des espaces partagés et des box de confidentialité en location à l’heure ou à la journée. Néanmoins un certain nombre d’acteurs des centres d’affaires (grands groupes immobiliers) se repositionnent. 

 

Les tiers-lieux ont connu une croissance importante entre 2011 et 2014 et nous observons aujourd’hui une grande porosité entre les différents modèles. On voit apparaître des offres mixant les usages (espaces de coworking, bureaux partagés, bureaux individuels, etc.).

 

Néanmoins, les principaux utilisateurs des tiers-lieux restent les indépendants et les TPE-PME, voire les start-ups. Seul 6% de leurs utilisateurs sont issus de grandes ou moyennes entreprises (Enquête Nationale 2012). L’absence d’offre claire et de mise en réseau de ces espaces contribue à un manque de lisibilité et une méconnaissance des tiers-lieux auprès des salariés des grands groupes. Peu savent ce qui existe près de chez eux.

 

 

Vana ELLIS- Fondatrice de B-libre coworking- Saint-Quentin-en-Yvelines.

Tour de France du Télétravail par LBMG Worklabs, partenaire de B-libre coworking.

 

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