10. Timothée Harvey

6.5.7.7.10 Timothée Harvey (1847-1924), 6e génération

Timothée Harvey, de la sixième génération, quittera Saint-Fulgence au Saguenay vers 1894 pour aller vivre à Brunswick au Maine.  Né le 4 octobre 1847 à La Malbaie[1], il est l’un des nombreux descendants de Michel Hervé à tenter sa chance en Nouvelle-Angleterre et particulièrement dans le comté de Cumberland au Maine.  Il est le cinquième fils[2] de Timothée Hervey (1806-1880) à Michel Hervé (1771-1810) chez Pierre Hervé (1733-1799).

Timothée fréquenta un peu l’école, mais pas assez longtemps pour apprendre à lire et écrire[3].

À vingt-quatre ans et toujours célibataire Timothée, comme tous les jeunes hommes de la région, épaule son père sur la ferme l’été et travaille dans leurs chantiers l’hiver[4].  C’est au cours de l’été 1871 que la famille quitte Saint-Étienne de la Malbaie pour s’établir à Saint-Fulgence au Saguenay.  De fait, Timothée père et son gendre, beau-frère de Timothée fils, viennent tout juste d’acquérir, de la famille Price, la ferme Valin de Saint-Fulgence.  Bien que contraire à l’intention originale de développement du Saguenay, William Price avait acquis des terres de culture.  Pas moins de trente pour cent des lots à vocation agricole avaient d’abord été possédés par Price et les autres propriétaires de scierie.  La famille Price à elle seule possédait vingt-deux pour cent de tous les lots à vocation agricole.  Parmi ceux-ci, Price avait mis en valeur la ferme Valin pour approvisionner ses chantiers de la région en fourrage, élevage et céréales.  Cette ferme Valin que la famille de Timothée vient d’acquérir occupe le littoral du Saguenay entre la rivière Valin et la rivière à la Loutre, sur la profondeur du canton Tremblay[5].  La ferme en question comprend plus de cinq mille deux cents acres[6]Timothée père, déjà âgé de soixante-cinq ans au moment de l’acquisition de la ferme Valin, laisse les rênes de son administration à son fils Timothée.  Ce dernier s’occupera de la ferme durant quatre ans, pendant que son beau-frère Adolphe Boudreau et son frère Michel se consacrent aux opérations d’abattage en forêt, de la construction d’un moulin à scie sur la rivière à la Loutre et de son exploitation. 


En 1875, le domaine de la ferme Valin est divisé également en deux entre Timothée père et son gendre[7].  Le même jour devant notaire, Timothée fils est nommé mandataire du patriarche dans l’administration de ce vaste domaine agricole qui vient tout juste d’être divisé[8].   L’année suivante, le 10 avril 1876, la moitié revenant au patriarche et constituant deux mille six cents acres sera donnée à parts égales à Timothée fils et deux de ses frères, Michel (1841-1908) et Joseph (1845-1913).  Cette donation était faite à plusieurs conditions, dont celle de rembourser la dette restante à la Price Brothers Co, soit environ mille six cents dollars[9].

Timothée fils, à vingt-huit ans, vient d’hériter d’une terre de plus de huit cent soixante-six acres bordées par la rivière Saguenay, mais il ne s’arrêtera pas là.  Le même jour, il fait l’acquisition de deux autres terres appartenant à son frère Hermias (1852-post.1931), marchand du canton Harvey.  L’une de ces terres du premier rang du canton Harvey, également sur la rivière Saguenay, est voisine de celle d’Ephrême (1831-1904), son frère aîné.  L’autre est contiguë à la première.  Hermias avait acquis ces terres trois ans plus tôt de son oncle Joseph dit Lélé Hervey (1808-1884) et ne s’était pas encore acquitté du paiement[10]Timothée fils ne semble pas manquer d’argent; la transaction s’élève à «mille piastres courant» qu’il remboursera en cinq paiements[11].

Françoise Bouchard (1809-1879), mère de Timothée fils décède à Saint-Fulgence le 26 avril 1879.  Son père ne survivra pas très longtemps; il meurt le 7 juin de l’année suivante[12].  

En 1881, Timothée, célibataire, vivait seul dans sa maison de Saint-Fulgence[13].

Timothée devint copropriétaire du moulin à scie de la rivière à la Loutre avec son frère Michel lorsqu’Adolphe Boudreau, son beau-frère [marié à sa sœur Honora dite Fedora (1829-1904)], ne put assumer le paiement de sa part de la ferme Valin et fut saisi par les Price.

Timothée emprunte, prête, rachète des dettes et des hypothèques, acquiert des terres et en vend d’autres.  Des dizaines de contrats notariés en font foi[14].

Les entrepreneurs forestiers comme Timothée s’approprient des lots comme réserves forestières.  Par bloc de trois lots de cent acres chacun, la surface maximale pouvant être concédée à un même individu selon les règles en vigueur dans le dernier quart du XIXe siècle, Timothée fait des acquisitions sans relâche.  Plusieurs autres agriculteurs possédaient également des lots qu’il se réservait pour la coupe de bois, une activité saisonnière qu’il pratiquait l’hiver.  Comme on ne retrouve aucun acte notarié où Timothée aurait racheté, pour ses moulins, le bois ainsi coupé sous forme de billot des industriels du coin, il y a tout lieu de croire qu’il employait ses propres bûcherons ou que les transactions se faisaient en liquide de gré à gré.  Conservant, quand cela le servait, son titre d’«agriculteur», il s’appropriera plusieurs lots des trois premiers rangs du canton Harvey.  Il n’est pas impossible que les nombreuses transactions d’acquisitions de terres aient été faites par des prête-noms, surtout les lots qu’il acquit à l’angle nord-est du canton Harvey déjouant ainsi la vigilance des fonctionnaires du ministère de la Colonisation[15]. 

Timothée a déjà trente-cinq ans lorsqu’il épouse le 7 novembre 1882, Marie Emma Gauthier, une fille de vingt-trois ans.  La cérémonie se déroule à l’église Saint-François-Xavier de Chicoutimi, paroisse de la mariée d’où elle est également originaire.  Bien que baptisé de l’unique prénom de Timothée, pour son mariage il se fait appeler «Joseph Henry Thimothé»[16].

À l’automne 1887, son frère Michel, qui se convertit en fromager au village, vend à peu près tout ce qu’il possède comme terres, y compris celles dont il avait hérité de son père.  Il se départit également de la moitié de la valeur du moulin qu’il possédait en copropriété avec son frère sur la rivière à la Loutre.  C’est encore Timothée qui fait l’acquisition des terres et du moulin de même que du droit de moudre le grain au moulin à farine attenant[17].

La chance s’est-elle détournée de Timothée par la suite? À l’automne 1889, pour s’acquitter d’obligations venant à échéance, il doit emprunter à son beau-frère Napoléon Gauthier (1850-1908), frère aîné de sa femme.  Il met en garantie un certain nombre de terrains.  Le document notarié nous apprend qu’il a démantelé le moulin de la rivière à la Loutre[18].  Comme ce genre de moulin est transportable, où a-t-il bien pu le réinstaller?   

Près de huit ans après leur mariage, Emma Gauthier donne naissance à un premier enfant, un garçon le 5 mars 1890.  «Jules Charles François Timothé» est baptisé le lendemain[19]

Après les péripéties du rachat de la ferme Valin de la Price Brothers Co dans les années 1870 et 1880, plusieurs membres de la famille de Timothée quittent la région.  Sa sœur Fedora et son mari Adolphe Boudreau étaient partis vivre à Pointe-au-Père sur la Rive-Sud du fleuve, peu de temps après n’avoir pu assumer le paiement de sa part de la ferme Valin vers 1885[20].  Son frère Ephrême s’est établi avec l’un de ses fils à Saint-André de Kamouraska[21].  Finalement, le cadet Hermias quittera Saint-Fulgence en 1893 pour Causapscal dans la vallée de la Matapédia, après avoir vendu sa terre à Timothée le 12 septembre[22].  Pour sa part, la famille de Timothée est toujours à Saint-Fulgence en avril 1891[23]

Puis, probablement en 1892 ou très tôt en 1893, Timothée quitte le Saguenay lui aussi, mais ce ne sera pas seulement le fleuve qu’il traversera comme les trois autres, mais bien la frontière pour aller s’établir à Brunswick dans l’État du Maine.  Il n’est déjà plus au pays le 11 mars 1893 lorsqu’à sa maison de Saint-Fulgence, Marie Emma Gauthier accouche difficilement d’un deuxième enfant qui est ondoyé sur-le-champ.  «Marie Blanche Emma Juliette» décède le lendemain[24].

On retrouve Timothée à Brunswick en août 1893 où il se déclare résident.  Il y tente probablement sa chance sans avoir liquidé tous ses avoirs au Saguenay, peut-être pour assurer ses arrières.  La tradition orale veut qu’il soit allé en Nouvelle-Angleterre pour y bâtir et exploiter un moulin, mais en 1894, lors du baptême de son prochain enfant, il se dit journalier[25]

Puis, probablement en 1892 ou très tôt en 1893, Timothée quitte le Saguenay lui aussi, mais ce ne sera pas seulement le fleuve qu’il traversera comme les trois autres, mais bien la frontière pour aller s’établir à Brunswick dans l’État du Maine.  Il n’est déjà plus au pays le 11 mars 1893 lorsqu’à sa maison de Saint-Fulgence, Marie Emma Gauthier accouche difficilement d’un deuxième enfant qui est ondoyé sur-le-champ.  «Marie Blanche Emma Juliette» décède le lendemain[24].

On retrouve Timothée à Brunswick en août 1893 où il se déclare résident.  Il y tente probablement sa chance sans avoir liquidé tous ses avoirs au Saguenay, peut-être pour assurer ses arrières.  La tradition orale veut qu’il soit allé en Nouvelle-Angleterre pour y bâtir et exploiter un moulin, mais en 1894, lors du baptême de son prochain enfant, il se dit journalier[25]

Après son départ, une fois établit à Brunswick, il signera une procuration nommant son frère Michel «procureur général spécial» afin que ce dernier liquide un certain nombre de terres et bâtiments que Timothée possède afin de rembourser sa dette envers le Crédit foncier franco-canadien ainsi que la somme qu’il doit à ce procureur lui-même pour la transaction qu’il avait faite avec lui à l’automne 1887 et dont il ne s’est pas encore acquitté.   Si jusqu’à maintenant on ne faisait que soupçonner les mauvaises créances de Timothée, lui qui avait tant acheté au cours de la décennie précédente, sa situation financière est maintenant révélée.  Timothée n’est pas seul à Brunswick, certains voisins de Saint-Fulgence y sont aussi; c’est le cas de Thomas Tremblay un journalier qui lui sert de témoin lors de l’assermentation de la procuration[26].  



Le 13 février 1894, Emma Gauthier accouche à Brunswick d’un troisième enfant, «Rose Anna Beatrix»[27].  Celle qui se fera prénommer Rose Emma à l’âge adulte viendra au pays une première fois pour être présentée à la famille élargie lors d’un voyage au Saguenay l’année suivante[28].

En mai 1894, se déclarant maintenant résident temporaire de Brunswick, Timothée nomme son beau-frère et créancier Napoléon Gauthier comme «procureur spécial» afin que ce dernier liquide un terrain et un immeuble du Saguenay pour veiller au remboursement d’une autre dette envers le Crédit foncier franco-canadien, ainsi que pour rembourser la somme qu’il avait empruntée à ce beau-frère en 1889[29].

C’est aussi en son nom que son frère Michel procède à une première vente en juin 1894.  Ce sont des terres et immeubles du cinquième et sixième rang de Saint-Fulgence qui échappent ainsi à Timothée au profit d’Ernest Tremblay; en revanche, il conserve les moulins[30].  Le même jour devant le même notaire, son beau-frère Napoléon Gauthier, en son nom, procède également à une vente de terrains et d’immeubles au profit de Joseph Tremblay dit Picoté[31].  Ses dettes ainsi remboursées, Timothée pourra donc continuer tenter de se refaire une fortune à Brunswick où il restera jusqu’en 1906[32]

Pour voir de plus près à ses intérêts au Saguenay Timothée effectuera plusieurs retours au pays pendant la période où il vécut aux États-Unis.  À l’hiver 1899-1900, il ramène au pays sa femme Emma Gauthier qui sera hospitalisée à l’Hôtel-Dieu Saint-Vallier de Chicoutimi, où elle décédera à l’âge de quarante ans le 9 janvier 1900[33]Jules et Rose Anna Beatrix sont placés[34].  Si Jules revient habiter avec son père dans une dizaine d’années[35], ce ne sera pas le cas de Rose Anna Beatrix dite Rose Emma.  Cette dernière viendra habiter au village Rivière du Moulin avec son frère Jules célibataire dans une vingtaine d’années, tout juste avant leurs mariages respectifs[36].

Trois mois après la mort de sa femme, à la mi-avril, Timothée se porte acquéreur du moulin à vapeur de son beau-père, le manufacturier François Gauthier (1835-1908) lequel part s’établir au canton de Bergeronnes.  Curieusement lors de son passage chez le notaire pour la transaction, Timothée est qualifié d’«agriculteur de la paroisse de Chicoutimi».  La transaction s’élève à «mille piastres», mais par prudence, Timothée n’avance que «deux cents piastres» s’engageant à payer le reste à quatre personnes différentes ayant des intérêts dans le moulin, «au fur et à mesure qu’il pourra réaliser des revenus du moulin, toutes dépenses payées»Timothée déplacera le moulin de la rivière à Mars sur l’une de ses propriétés[37]

Afin de voir à ses affaires, Timothée prendra un certain temps avant de retourner aux États-Unis.  Celui qui est qualifié de «journalier» au Maine et de «commerçant» ou, le plus souvent, d’«industriel» au Saguenay est toujours à Saint-Fulgence en avril de l’année suivante.  Il réside dans la famille de son neveu Joseph (1862-1947), manufacturier, fils de son frère Ephrême Hervai (1831-1904) lequel demeure maintenant à Saint-André de Kamouraska.  Son fils Jules et sa fille Rose Anna Beatrix que l’on sait vivants ne demeurent pas avec lui et reste introuvable au Québec[38].  Lorsque Timothée ramena sa femme au pays, auraient-ils placé ses enfants à Brunswick dans le comté de Cumberland chez des parents ou des amis? Peut-être, car il faut se rappeler que de nombreux descendants du grand-père Michel Hervé sont en Nouvelle-Angleterre et particulièrement dans le comté de Cumberland au Maine dont son cousin Elie Harvay (1832-1905) et sa famille[39]

L'indomptable Timothée, procède à de nouvelles acquisitions à la fin mai 1901.  Il acquiert d’Ovila Simard, autrefois cultivateur de Saint-Fulgence qui vient de s’établir de Saint-Romuald d’Etchemin, deux terres de grandes dimensions du canton Tremblay, incluant la maison, les installations de ferme et ses équipements.  La transaction s’élève à «six cent vingt cinq piastres»Timothée n’en paie que trois cent vingt-cinq et garde l’hypothèque restante sur le bien.  En août 1902, avant de repartir pour Brunswick on le présume, afin de financer ses projets et probablement pour aussi rembourser quelques emprunts, Timothée revend les deux terres, les bâtisses construites sur ces terres, de même qu’un cheval et en tire un bon profit.  L’acheteur est Théophile Tremblay, un neveu, fils de son beau-frère Charles (1861-1934) marié à Marie Louise Gauthier (1861-1929), une sœur puînée de feu son épouse[40].

À son retour des États-Unis il aura le statut d’industriel à Saint-Fulgence et dans la région; c’est à tout le moins ce que mentionne la majorité des nombreux actes notariés le concernant.

Toujours dans le domaine de l’exploitation forestière, en 1906, année présumée de son retour des States, Timothée achète un deuxième moulin à scie à la Rivière-du-Moulin.  Plutôt que de se concentrer uniquement au sciage du bois, il pourra également se consacrer à la transformation des céréales puisque son achat inclut «une moulange» et un «moulin à carder »[41].

Comme on l’a vu, Timothée s’était marié sur le tard, à l’âge de trente-cinq ans.  En 1907, veuf depuis sept ans, alors qu’il a déjà près de soixante ans, le vieil industriel se trouve une nouvelle compagne et scelle cette union, en séparation de biens, devant notaire le 11 février 1907 à Chicoutimi.  Fait inusité pour l’époque, le contrat comprend même une clause en cas de dissolution de l’union[42].  La cérémonie de mariage entre Céleste Boulianne (1844-1930) et lui a lieu le lendemain.  Comme la mariée est sans famille immédiate, Joseph, le frère de Timothée agit comme témoin de Céleste alors que François Gauthier, son premier beau-père est témoin pour Timothée[43].

Après ses acquisitions de la Rivière-du-Moulin en 1906, Timothée a quitté Saint-Fulgence pour se rapprocher de ses opérations.  En 1911, avec sa nouvelle épouse et son fils Jules ils demeurent sous le même toit à Rivière-du-Moulin.  Le père et le fils qui n’a que vingt et un ans sont tous deux qualifiés d’«industriels»[44].

Bien que le nom de son fils Jules commence à apparaître dans certains actes notariés à compter de sa majorité en 1911, Timothée restera en affaires un certain temps.  Outre ses moulins et les industries qui les entourent, il continue d’être un habile spéculateur, rachetant les dettes de certains, prêtant à qui mieux mieux avec garantie hypothécaire tout en saisissant les biens des mauvais emprunteurs.

Les relations entre Céleste et Timothée avaient tourné rapidement au vinaigre peu après leur mariage.  Les habitudes de vieux garçons du veuf et celles de la vieille fille de soixante-trois ans les conduiront à la séparation.  À la signature du contrat de mariage en 1907, Timothée s’était engagé à remettre à Céleste la somme de «mille piastres» à la demande de cette dernière une fois mariée.  Bien qu’il en avait les moyens, il avait refusé de lui remettre cette somme lorsqu’elle en avait fait la demande.  Céleste après avoir quitté le toit familial entama une poursuite en Cour Supérieure.  Comme en affaires, Timothée l’«industriel» se sortira de ce merdier à son avantage.  Le 14 mars 1916, Céleste renonce à sa poursuite et renonce également au montant de «mille piastres» qui lui était dû.  Timothée de son côté accepte de reprendre Céleste et de payer la pension que Céleste avait payée pendant son absence[45].  À soixante-neuf ans, Timothée se réconcilie donc avec Céleste qui en a soixante-douze.  Une telle séparation dans la famille nantie d’un industriel au début du XXe siècle, difficile à imaginer dans la population agricole et ouvrière, devait avoir entraîné son lot de commérages sur le parvis de l’église de Saint-Fulgence comme sur celui de l’église Saint-François-Xavier de Chicoutimi, alors paroisse du village de la Rivière-du-Moulin.

Timothée cède progressivement sa place dans ses affaires à son fils Jules au cours de la décennie 1910.  Il est absent des greffes notariales dans les années 1920.  C’est à cette époque que Timothée s’efface de la vie publique.

Lorsque son fils unique prend épouse en juin 1922, Timothée n’assiste pas à la cérémonie.  Il faut dire que le mariage de Jules a lieu à Saint-Édouard de Lotbinière, sur la Rive-Sud du fleuve à cinquante kilomètres en amont[46].  Pour Timothée qui a soixante-quatorze ans, dans les conditions de l’époque, il aura jugé le voyage trop astreignant.  Par conséquent, c’est seul avec Henri Savard, son témoin et lointain cousin, que Jules part de Chicoutimi par train jusqu’à Québec pour ensuite reprendre un autre train jusqu’à Deschambault afin d’y effectuer la traverse pour Lotbinière et finir le trajet d’une douzaine de kilomètres jusqu’à Saint-Édouard en calèche, puisque la famille d’agriculteurs de la fiancée ne devait pas encore posséder d’automobile.   

Deux ans plus tard, c’est au tour de Rose Anna Beatrix dite Rose Emma de se marier.  Cette fois-ci le mariage est célébré à l’église Saint-François-Xavier de Chicoutimi.  Bien que le célébrant mentionne la présence des pères, «… Edmond Bouchard et Timothée Harvey, qui ont signés avec nous…», c’est plutôt Jules, frère de la mariée, qui signe le registre[47]Timothée est probablement absent de la cérémonie, car un mois plus tard il décède à l’hôpital Hôtel-Dieu Saint-Vallier où il avait été admis depuis un certain temps.

Il est âgé d’un peu moins de soixante-dix-sept ans à son décès le 11 septembre 1924 à Chicoutimi.  Il est inhumé trois jours plus tard dans le cimetière de Saint-François-Xavier, paroisse où il avait fait le plus clair de sa fortune. 

Timothée aura très peu connu le père Julien Harvey (1923-1998), son petit-fils, qui deviendra fort célèbre dans les années 1960 pour ses luttes contre l’exclusion sociale.

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[1] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 5 octobre 1847.

[2] L’historien Carl Beaulieu dans «Les Harvey entrepreneurs polyvalents et citoyens engagés» fait de Timothée le fils le cadet de la famille.  Il s’agit d’une erreur puisqu’Hermias né en 1852 est le cadet.

[3] B.A.C., G., Recensement de 1861 du Canada, Charlevoix, Malbaie, page 241.  Timothée signera toujours d’un X.

[4] B.A.C., G., Recensement de 1871 du Canada, Charlevoix, Malbaie, microfilm 4395454_00271.

[5] ST-HILAIRE, Marc. Peuplement et dynamique migratoire au Saguenay, 1840-1960.  Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1996, page 108.

[6] A.N.Q., GN. Minutier Élie Angers, no 690 et no 691, 14 juin 1871.

[7] A.N.Q., GN. Minutier Ovide Bossé, no 4279, 5 juillet 1875.

[8] Ibid., no 4299, 5 juillet 1875.

[9] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 1739, 10 avril 1876.

[10] Ibid., no 1208, 4 avril 1873.

[11] Ibid., no 1741, 10 avril 1876.

[12] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Fulgence, 29 avril 1879 et 9 juin 1880.

[13] B.A.C., G., Recensement de 1881 du Canada, Chicoutimi et Saguenay, paroisse de Saint-Fulgence, microfilm e008153260.

[14] A.N.Q., GN. Minutier Jean Gagné, no 4426, 9 mars 1876 et no 5361, 2 décembre 1884; minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 1670, 7 janvier 1876, no 2183, 12 octobre 1883, no 5457, 28 septembre 1889, no 5932, 8 juin 1891 no 6280 et 2 novembre 1892.  Ces références ne sont pas exhaustives; ils ne sont qu’une représentation des dizaines d’actes notariés impliquant Timothée Harvey.

[15] ST-HILAIRE, Marc, Ibid., pages 103-108.

[16] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-François-Xavier de Chicoutimi, 7 novembre 1882.

[17] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 4876, 1 octobre 1887.

[18] Ibid., no 5457, 28 septembre 1889.

[19] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Fulgence, 6 mars 1890.

[20] B.A.C., G., Recensement de 1891, Rimouski, paroisse de Sainte-Anne de Pointe-au-Père, microfilm 30953_148220-00286.

[21] B.A.C., G., Recensement de 1901, Kamouraska, paroisse de Saint-André de Kamouraska, microfilm z000142920.

[22] B.A.C., G., Recensement de 1901, Rimouski, paroisse de Saint-Jacques-le-Majeur de Causapscal, microfilm z000168258.

[23] B.A.C., G., Recensement de 1891 du Canada, Chicoutimi, paroisse de Saint-Fulgence, microfilm 30953_148193-00658.

[24] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Fulgence, 11 et 14 mars 1893.

[25] Bien que les preuves de son passage à Brunwick au Maine soient nombreuses, je n’ai pu trouver de documents d’archives supportant la tradition orale voulant qu’il y ait construit un moulin.

[26] État du Maine, comté de Cumberland, bureau du juge de paix Henry Ragot, 9 août 1893.

[27] State of Maine, Record of Birth for Brunswick, 13 février 1894.

[28] B.A.C., G., Recensement de 1921, Chicoutimi et Saguenay, rivière du Moulin, microfilm e003067974.

[29] Ibid., 24 mai 1894.

[30] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 6789, 5 juin 1894.

[31] Ibid., 6790, 5 juin 1894.

[32] Encore une fois, l’année de son retour est basée sur la tradition orale.  Je n’ai trouvé aucun document d’archives qui aurait pu préciser sa date de retour au pays.

[33] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-François-Xavier de Chicoutimi, 11 janvier 1900.

[34] BAnQ. Saguenay, Cour Supérieure, Chicoutimi, dossier no 330, pièce no 57, 10 août 1905, Tutelle aux enfants mineurs de sieur Thimothé Harvey, fils et de feu Dame Emma Gauthier, Jules Harvey et Rose-Anna Harvey.

[35] B.A.C., G., Recensement de 1911, Chicoutimi et Saguenay, paroisse de Chicoutimi, Rivière du Moulin, microfilm e002049016. 

[36] B.A.C., G., Recensement de 1921, Chicoutimi et Saguenay, paroisse de Chicoutimi, Rivière du Moulin, microfilm e003067974. 

[37] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 10078, 16 avril 1900.

[38] B.A.C., G., Recensement de 1901, Chicoutimi et Saguenay, paroisse de Saint-Fulgence, microfilm z000133451.  Le recensement a débuté officiellement le 31 mars 1901.  Les enfants de Timothée ne sont pas recensés dans les institutions d’éducation de la région où ils auraient pu être placés, non plus qu’ailleurs au Québec. 

[39] 1900, Recensement fédéral américain, État du Maine, comté de Cumberland, ville de Gorham, page 3.

[40] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 11022, 31 mai 1901 et no 12176, 8 août 1902.  Bien que l’on n’en ait aucune preuve, on présume que ces transactions sont effectuées au cours des nombreux voyages de retour au pays qu’aurait effectués Timothée.

[41] BEAULIEU, Carl. Les Harvey, entrepreneurs polyvalents et citoyens engagés. Chicoutimi, Éditions du patrimoine, 2002, page 348.

[42] A.N.Q., GN. Minutier Maurice Ovide Bossé, no 2712, 11 février 1907.

[43] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Fulgence, 12 février 1907.

[44] B.A.C., G., Recensement de 1911, Chicoutimi et Saguenay, paroisse de Chicoutimi, Rivière du Moulin, microfilm e002049016. 

[45] A.N.Q., GN. Minutier Maurice Ovide Bossé, no 6888, 14 mars 1916.

[46] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Édouard de Lotbinière, 27 juin 1922.

[47] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-François-Xavier de Chicoutimi, 7 août 1924.