Chapitre 03

Nos ancêtres français

L'origine en France des Hervet (Hervé, Harvé, Harvey)

Selon le père Gérard Lebel, biographe, plusieurs Hervé vinrent en Nouvelle-France sous le Régime Français.

Lorsque l’on fouille un peu les registres du Régime Français, on s’aperçoit qu’un bon nombre d’entre eux étaient des matelots, tout comme Jacques Hervé (1679-1724) noyé le 3 septembre et Louis Hervé (1710-1732) aussi noyé le 7 juillet[1] et d’autres, recensés sur la liste des malades de l’hôpital de l’Hôtel-Dieu de Québec ayant le même métier et qu’ils ne sont demeurés que quelques semaines ou mois, tout au plus, en Nouvelle-France.    

Dans la deuxième moitié du XVIIe, les ecclésiastiques et les notaires de Nouvelle-France utiliseront plutôt le patronyme Hervé dans leurs écrits même pour les cas des individus nés Hervet, il en résultera une certaine confusion.  D’ailleurs très rapidement, c’est cette forme que prendra, pendant longtemps, notre patronyme avant d’épouser sa forme définitive Harvey.


D’ailleurs, tous les autres Hervé arrivés en Nouvelle-France, après l’ancêtre de la majorité des Harvey du Québec dont le patronyme s’écrivait Hervet, sont nés avec le patronyme Hervé en France. 

Outre les «Hervet» de ma lignée, présentés plus loin dans ce chapitre, quatre Hervé sont effectivement venus s’établir en Nouvelle-France.  Bien que les deux patronymes fussent apparentés il y a très longtemps en France, l’origine de notre ancêtre «Hervet» est probablement différente de celle des Hervé venus en Nouvelle-France, contrairement aux croyances du biographe Gérard Lebel[2].

Il est improbable que les Pierre Hervé, dit Lepetit Paquault[3], Jean Baptiste Hervé dit Laliberté[4], Jean Baptiste Hervé dit Saint-Jean[5], et Julien Hervé[6] soient parents de notre ancêtre Sébastien Hervet.  Ils étaient tous natifs, de provinces différentes et éloignées, de la ville de Blois dans la province de l’Orléanais de notre ancêtre et ils n’étaient pas «Hervet», mais bien Hervé.   

Quoi qu’il en soit, aucun de ces Hervé n’a laissé de progéniture en terre de Nouvelle-France qui aurait permis de perpétuer la lignée de leur patronyme jusqu’à aujourd’hui.

Toute l’attention de ceux qui se sont intéressés aux Harvey[7] et à leurs origines s’est plutôt portée sur Gabriel Hervet probablement né vers 1596[8], dans la commune de Mer, à moins de quatre lieues de Blois[9].  Des documents conservés aux Archives municipales de Blois[10] permettent de suivre la piste de nos ancêtres aussi loin dans le passé qu’en l’année 1628 lorsque, le 2 juillet, fut signé le contrat de mariage entre Gabriel Hervet, maître-potier d’étain, et Marguette Laurillau sa première épouse[11]Gabriel et Marguette se sont probablement mariés dans l’église Saint-Nicolas de Blois, Évêché de Chartres en Orléanais.  C’est dans l’Orléanais que se trouvent les plaines fertiles de la Beauce, surnommées les greniers de Paris.  À l’époque de Gabriel et Marguette, la ville la plus importante de la province est Orléans. Viennent ensuite Chartres, qui fait un grand commerce de blé et finalement Blois sur la Loire, avec son château et la cour de Gaston, duc d’Orléans, troisième fils du roi Henri IV et de Marie de Médicis, et frère du roi Louis XIII.

Bien que de peu d’importance pour l’histoire des Harvey francophones du Québec qui sont issus de deux souches françaises, celle de Sébastien Hervet (1642-1714) pour la plus grande majorité et celle de François Hervy (c.1793-1881), des Hervé sont aussi venus en Nouvelle-France :

Aussi de bien peu d’intérêt pour notre histoire, on trouve, en particulier dans le registre journalier des malades de l’Hôtel-Dieu de Québec (1689-1760), une vingtaine de Hervé qui ont effectué un passage éphémère en Nouvelle-France, ils étaient des marins ou des militaires.  Mentionnons en autres, Louis Hervé, un engagé de la famille Juchereau de Montréal qui, en 1722, sera chargé avec trois autres, pour porter des provisions à Jean-Baptiste-René Legardeur De Repentigny, enseigne en poste au fort de Michillimakimac.  Il acquit plus tard une concession dans la seigneurie de la Prairie-de-la-Madeleine, mais repartit par la suite pour la France[12].  Il y en eut certainement d’autres avant et après 1689 qui sont passés, car Québec à cette époque était le port d’arrivée des navires en provenance de France et des colonies des mers du sud, mais l’histoire n’a pas retenu leurs traces s’ils n’ont fait que boire une chopine au port.

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[1] TANGUAY, Cyprien.  À travers les registres : notes recueillies. Édition Librairie Saint-Joseph, Cadieux & Derome, 1886, pages 119 et 129.

[2] Il faut remarquer que les ecclésiastiques de Nouvelle-France utilisent le patronyme Hervé, probablement plus connu, plutôt que le patronyme Hervet.  L’évolution phonétique du «et» en «é» de la langue française de l’époque peut en être la raison.  D’ailleurs, tous les autres Hervé arrivés en Nouvelle-France après notre ancêtre Hervet sont nés avec le patronyme Hervé en France.  Une autre raison, celle que je retiendrai, est que l’origine de notre ancêtre est différente de celle des «Hervé» contrairement aux croyances du biographe Gérard Lebel.  Il ne faut pas négliger le «T» final du patronyme Hervet de notre ancêtre.  À cause de cette ambiguïté, des associations erronées ont été faites.  Ce T a pourtant son importance, car il identifie bien la famille et permet d’éliminer des événements concernant des Hervé qui n’ont fait qu’un passage temporaire en Nouvelle-France.  Toutes les signatures de Sébastien se terminent par cette lettre qui était caractéristique de la famille.  Les documents retrouvés en France le concernant et concernant son père portent ce «T» caractéristique.   Le patronyme Hervet représente une très ancienne variante régionale française d’Hervé (de la région centre-ouest).  Le patronyme Hervet existe d’ailleurs toujours en France dans la région de Blois.

[3] Pierre Hervé dit Lepetit Paquault est né en 1673 à La Prade dans la province de l’Angoumois sous le patronyme Hervé et non Hervet.  Il est arrivé en Nouvelle-France vers la fin du XVIIe siècle et il finit sa vie dans la région de Laprairie. Il se marie à Ville-Marie (Montréal), le 22 novembre 1698, à Catherine Patissier.  Devenu veuf, il épousa en secondes noces Marie Leber.  De sa première union, il a bien eu un fils, Louis né en Nouvelle-France, mais ce dernier a eu trois filles, ce qui a mis fin à sa lignée du patronyme. 

[4] Jean Baptiste Hervé dit Laliberté est né le 20 février 1678 à Jallais dans la province d’Anjou.  Il apparaît dans les registres en Nouvelle-France vers 1705.  Il s’établit sur l’île de Montréal au Sault-au-Récollet. Il s’est marié à deux reprises.  Il a bien eu un fils de sa deuxième union, mais ce dernier, bien que marié, est demeuré sans postérité.

[5] Jean Baptiste Hervé dit Saint-Jean est un soldat de la Compagnie de Périgny né en 1697 à Pons dans la province de la Saintonge.  Il apparaît dans les registres en Nouvelle-France vers 1717.  Il s’établit sur l’île de Montréal probablement à la Côte Saint-Laurent.  Il a bien eu un fils, Joseph né en Nouvelle-France, mais ce dernier a eu un fils qui demeura célibataire, ce qui a mis fin à sa lignée du patronyme.  

[6] Julien Hervé est né en 1723 à Trévérien dans la province de Bretagne.  Il apparaît dans les registres en Nouvelle-France vers 1747.  Il s’établit à Saint-Pierre de la rivière du Sud.  Il y eut une fille, Marie Reine.  Il décède en 1791 à Saint-Roch-des-Aulnaies.

[7] Fernand Harvey, lorsqu’il était étudiant à Paris en 1973, a fait des recherches à la bibliothèque du château de Blois pour trouver les actes de naissance des enfants de Gabriel Hervet et a ainsi pu confirmer nos origines.  Fernand Harvey est un sociologue et historien québécois né en 1943 qui a publié de nombreux ouvrages.  Mon arrière-grand-père et le sien étaient frères. La sœur de son grand-père, Clarisse Harvay, était la marraine de mon grand-père.  Et comme si ce n’était pas assez de cousinage, mon grand-père était le parrain de la tante de Fernand Harvey, Marie Anne Harvey qui sera connue sous le prénom d’Anna.  Il m’a gentiment partagé ses recherches faites en France.

[8] LE MAUFF, Ghislaine. «Des Hervet blésois aux Harvey québécois», Mémoires de la Société généalogique canadienne-française, Volume 62, numéro 2, (été 2011), cahier 268, pages 135.  L’année de naissance de l’ancêtre a été estimée en fonction du contrat de mariage de 1628 où il est inscrit qu’il a trente-deux ans.  Les détails de sa naissance ne nous sont pas parvenus.

[9] Mer est une commune française de la couronne de Blois (18,6 km), qui comptait 6 238 habitants en 2017.  Elle se situe dans la petite région agricole de «la Beauce».

[10] Blois est une commune française, située à 179 kilomètres au sud-ouest de Paris, chef-lieu du département actuel de Loir-et-Cher en région Centre.  À l’époque de l’ancêtre Gabriel Hervet (1596-1660) et de sa femme Marguette Laurillau (1611-1650), la chapelle Saint-Martin appartenait probablement à la paroisse Saint-Solenne de Blois de l’Évêché de Chartres dans la région naturelle de la Beauce française, province de l’Orléanais. 

[11] Contrat de mariage au greffe Philippe Bernard.  On doit la découverte de ce document aux fructueuses recherches de madame Ghislaine Le Mauff, secrétaire générale du Cercle généalogique de Loir-et-Cher.  

[12] BAnQ., Fonds Juridiction royale de Montréal, TL4,S34,P46, 2 juin 1722, Louis Hervé.