05 Pierre Lumina Hervé

5.6.04.05 Pierre Lumina Hervé (1796-1858), 5e génération 

 

Marie Louise Lebreton dite Lalancette (1769-1865) apporte du bonheur dans la maison tous les deux ans depuis son mariage à David Louis Dominique Hervé (c.1764-1837).  En 1796, elle ne fait pas défaut à cette régularité puisqu’elle met au monde un cinquième enfant.  Celui qui se prénommera «Pierre Lumina» naît le 17 mars 1796.  Le curé Joseph Verreau de Saint-Roch Sud[1] le baptise le même jour, deux ans jour pour jour après le baptême de son frère Joseph François (1794-1890)[2].  L’enfant sera tout simplement prénommé Pierre Lumina pendant toute sa vie.  Son parrain est Pierre Lambert Richard (1758-1822), un voisin, mais surtout un ami des frères Hervé et de leur cousin André Couturier, depuis leurs arrivées à Saint-Roch-des-Aulnaies.  Lambert Richard et sa femme furent souvent appelés lors de baptêmes dans la famille; c’est lui qui avait été le parrain du dernier enfant d’André Couturier et de Marie Geneviève Ouellet en 1793.  André Couturier avait perdu sa femme à la suite de la naissance de cet enfant[3].  La marraine est Marie Madeleine Ouellet (1757-1841).  Le père, David Louis Dominique, avait été parrain du premier enfant de son frère aîné François en 1786 avec, comme marraine, une Marie Madeleine Ouellet, autre que la précédente.  Comme on l’a déjà vu, les Ouellet se retrouvent souvent dans l’entourage des trois frères Hervé à Saint-Roch-des-Aulnaies. 

Pierre Lumina ne vivra pas très longtemps sur la Côte-du-Sud puisqu’il n’a que six ans lorsque la famille quitte Saint-Roch-des-Aulnaies pour s’établir dans la seigneurie de Mount Murray, sur la rive nord du fleuve.  Pour ce qui lui reste d’enfance et tout au cours de son adolescence, il les passera à travailler sur la terre du père ou à bûcher dans les bois environnants, comme ce dernier l’avait fait avant lui.

Geneviève Fortin

«Pierre Lumina Hervey» épouse Geneviève Fortin (1791-1826) le 8 février 1820 à Saint-Étienne de la Malbaie où il est «laboureur»Pierre Lumina a vingt-quatre ans et Geneviève en a vingt-huit au moment du mariage.  Geneviève, qui a pour père Augustin Fortin (1750-1829) et pour mère Marie Anne Duchesne (1756-1822), est une fille de Saint-Étienne de la Malbaie.  Les Duchesne sont très liés à la famille[4]. Outre David Louis Dominique, le père qui assiste au mariage, l’oncle Thimothé Hervé, demi-frère de David agi également comme témoin; ce dernier est de l’âge du marié, car il a près de trente ans plus jeunes que son demi-frère.

La veille du mariage, Pierre Lumina et Geneviève s’étaient présentés devant le notaire Charles Chiniquy (1781-1821) avec leurs parents et une kyrielle de témoins pour la signature de leur contrat de mariage[5].

Le couple aura cinq filles et un garçon, Modeste le 3 novembre 1820, Léocade le 17 novembre 1821, Marie Olive le 24 décembre 1822, Marie Sara le 1er mai 1824, François le 28 juin 1825 et Marie Élisabeth le 2 juillet 1826.  Comme le voulait un peu la tradition, le père de Pierre Lumina sera parrain du premier enfant du couple en novembre 1820. 

À vingt-sept ans, il est probable qu’il soit le «Pierre Hervé» qui, en 1823 et 1824, est sous-voyer des chemins et ponts pour La Malbaye.  En 1803, son père avait occupé ce poste[6].  Comme illustré au tableau ci-contre, ils sont six Pierre Hervé à demeurer dans la paroisse à l’époque. Comme il faut ses entrées pour obtenir ce genre de fonctions, il est probable que ce soit Pierre Lumina, fils de David à qui on avait confié de telles responsabilités bien que rien ne permet aujourd’hui de l’affirmer avec certitude.  

Quatre ans après son mariage, le 18 février 1824 Pierre Lumina procède à l’acquisition d’une terre à bois de son cousin Zacharie Hervé (1803-1837), fils de Dominique Isaïe (1775-1851)[7].   Bien qu’il ait été déclaré «laboureur ou cultivateur» lors de la naissance de ses quatre premiers enfants, comme son père et bien d’autres censitaires avant lui, il rêve de se lancer dans la vente de bois pour s’assurer d’un revenu secondaire, mais en a-t-il les moyens

Sept mois plus tard, Pierre Lumina doit contracter un emprunt auprès du marchand Michel Chaperon (1795-1851) dont les parents étaient britanniques.  Ce dernier est impliqué dans le commerce du bois et est celui qui loue avec Joseph Brassard le moulin d’Amable Bélair de la Rivière Mailloux depuis les déboires de ce dernier[8].  Chaperon, baptisé dans la foi catholique à Baie-Saint-Paul, épouse à cette époque les croyances de la classe dirigeante écossaise de la seigneurie.  Il s’était marié à Constance Simard deux ans plus tôt à l’église anglicane Holy Trinity de Québec.

Pierre Lumina était déjà établi depuis un certain temps comme cultivateur dans la seigneurie de Murray Bay lors de son mariage et la famille y est toujours en 1825.  Lors du passage de l’énumérateur du gouvernement colonial à l’été 1825, quinze censitaires du comté de Northumberland sont descendants de l’un des premiers colons à l’île aux Coudres, Sébastien Hervé (1695-1759); ils habitent l’Isle aux Coudres, Murray Bay et Mount Murray.  Pierre Lumina et dix autres sont inscrits au recensement sous le patronyme Hervé.  Curieusement, quatre autres descendants, recensés par le même énumérateur sont inscrits Arvais, comme s’il ne s’agissait de personne d’une autre famille.  Ces derniers habitent tous Murray Bay et sont tous descendants de Pierre Hervé (1733-1799); il s’agit des frères marchands et entrepreneurs Pierre, Louis, Dominique Romain dit Joseph et de leur neveu Michel qui ne fit qu’un bref passage à Murray Bay; il sera de retour à l’Isle aux Coudres l’année suivante[9].

Dans ce marché du commerce du bois dans lequel s’est lancé Pierre Lumina, la colonie est entièrement dépendante des Britanniques.  En 1825 une crise financière outre-mer survient en raison d’une surabondance des livraisons de bois des années précédentes.  La demande s’effondre donc pour le bois d’œuvre au pays cette année-là.  Si certains aux reins solides peuvent se permettre d’attendre la reprise, il en va tout autrement des gens comme Pierre Lumina qui se sont endettés pour acquérir une terre à bois[10].  Si le commerce du bois avait connu une grave crise en 1820, une autre de moindre nature se fit donc sentir en 1825.  Les moulins n’avaient que faire du bois de Pierre Lumina qui ne trouvait pas preneur auprès des marchands qui ont de la difficulté à l’écouler sur les marchés britanniques[11]

Sans doute faute d’avoir pu écouler le bois qu’il a coupé au cours de l’hiver, à l’automne, il se voit à nouveau en eau trouble.  Il contracte un nouvel emprunt auprès de Julien Bouchard (1780-1839) en novembre 1826[12].

Geneviève Fortin décède entre la naissance de leur dernière fille, le 2 juillet 1826 et le 20 juillet 1827, puisque le notaire Gauvreau procède pour Pierre Lumina et ses mineurs à l’inventaire de la communauté qu’il formait avec Geneviève Fortin[13].  Trois jours plus tard, on procède à la «vente du mobilier de Pierre Hervey et de ses mineurs»[14]

Les créanciers de Pierre Lumina sont-ils à sa porte.  Le 9 octobre, il vend la terre qu’il avait acquise de son cousin Zacharie Hervé au frère de celui-ci Louis Dominique (1806-1890)[15]

On procède à la saisie de l’inventaire des biens ayant appartenu à feue Geneviève Fortin peu de temps par la suite.  Un notaire de Québec exécute une vérification du nombre et de l’état des meubles ayant fait l’objet de l’inventaire le 20 juillet[16].  

Que s’est-il passé.  De quoi Geneviève est-elle morte? Son corps ne sera pas inhumé à Saint-Étienne de Murray Bay.  À l’Isle aux Coudres une telle situation signifiait généralement une noyade pour laquelle le corps n’avait pas été retrouvé, mais à la Malle Baye? Les registres de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie ne contiennent aucune inscription au nom de Geneviève de la naissance de sa fille Marie Élisabeth le 2 juillet 1826 jusqu’à l’inventaire des biens de la communauté qu’elle formait avec son mari le 20 juillet 1827, un an plus tard.  Une disparition par noyade aurait normalement nécessité une autorisation de mariage par l’évêque, mais ce ne sera pas le cas lorsque Pierre Lumina convolera en deuxièmes noces l’année suivante.  Il faut donc conclure que Geneviève ne put être inhumée chrétiennement ou qu’elle fut inhumée ailleurs qu’à Saint-Étienne, bien qu’elle y soit née, s’y soit mariée et y résidait.  Les registres des quatre autres paroisses du comté du Northumberland ne contiennent aucune inscription de décès à son nom.  On peut croire également que son fils François soit décédé dans cette même période, peut-être de la même cause ou de la même façon; né en 1825, il est absent des registres civils et religieux par la suite.  Tout comme pour sa mère, on ne retrouve aucune inscription de sa sépulture aux registres de Saint-Étienne ou des paroisses avoisinantes? On sait que dans le dernier quart du XIXe siècle il existait à La Malbaie un cimetière qui avait été créé afin d’accueillir les corps de personnes mortes à la suite d’une épidémie de picote noire[17].  On croyait alors qu’il fallait ensevelir dans un coin isolé les victimes de maladies contagieuses afin d’éviter la propagation de la maladie.  Même si les contagieux d’alors avaient été totalement isolés du reste de la population au point de ne pouvoir trouver une sépulture dans le cimetière paroissial, cela n’expliquerait pas l’absence d’inscription au registre paroissial comme ce fut le cas à cette époque.  Se pourrait-il que cette croyance ait existé déjà au temps de la mort de Geneviève? Si tel avait été le cas, l’existence d’une telle pratique nous serait connue.  De toute façon, il faudrait d’abord que Geneviève soit morte de maladie contagieuse et l’existence d’une épidémie à cette époque ne nous est pas connue[18].  Si Geneviève ne put être inhumée chrétiennement, est-ce qu’elle aurait pu commettre l’irréparable et amener son fils avec elle?

Le commerce fluctuant du bois en emporta plus d’un.  Certains négociants accumulaient beaucoup d’argent rapidement, mais bien d’autres multipliaient les revers de fortune et disparaissaient de la région.  Comme on l’a vu, Amable Bélair en fut un.  Il y eut également Isaac Guay (1788-1828), le beau-frère d’Elisabeth Herver (1791-1865), fille de Pierre Hervé (c.1759-1857) cousin du père de Pierre Lumina, dont les affaires périclitaient depuis 1825.  On retrouvera d’ailleurs le corps de ce dernier à Québec «found dead and exposed on the beach of the river Saint Laurence having no marks of violence» le 28 octobre 1828.  Le coroner ne put déterminer la raison du décès et permit au curé Duguay d’inhumer ce dernier dans le cimetière de la paroisse, chose qu’il n’aurait pu faire s’il avait conclu à un suicide comme ce fut probablement le cas lors du décès de l’épouse de Pierre Lumina qui ne fut jamais inhumé en terre dite «chrétienne»[19].

Une deuxième épouse, Modeste Couturier

Quoi que fussent les circonstances du décès de Geneviève et après tous ses passages chez les notaires, Pierre Lumina épouse en secondes noces Marie Modeste Couturier dite Sanchagrin le 25 novembre 1828.  Elle est la cadette d’André Couturier, dit Sanschagrin et de Marie Charlotte Saint Amand, dite Lebret (1764-1842)[20].  On se souviendra qu’André Couturier dit Sanschagrin (1767-1843) est le cousin de David Louis Dominique, père de Pierre Lumina.  Ami d’enfance des trois frères Hervé qui s’étaient réfugiés sur la Côte-du-Sud à la fin du siècle dernier André Couturier fut le compagnon d’aventure de David toute sa vie.  Natifs du même village de la Rive-Sud Pierre Lumina, trente-deux ans, et Modeste, trente ans, se connaissent donc depuis leur plus tendre enfance.  Faut-il lire quelques choses dans l’absence, lors de la cérémonie du mariage, d’André Couturier et de David Hervé, cousins et amis d’enfance et surtout pères de la mariée et du marié? Il semble que la famille ait négligé la cérémonie; aucun membre de la nombreuse fratrie de Pierre Lumina, tous résidents du lieu, n’est mentionné au registre. «Ignace Couturier (1793-1866), un cousin de Modeste, et François Tremblay» (1794-1857), un oncle par alliance, semblent être les seuls parents présents et, encore là, ils sont qualifiés d’amis des époux tout comme les deux autres témoins mentionnés[21].

Aux yeux d’aujourd’hui, le mariage de Pierre Lumina et Modeste peut presque paraître une question d’affaires, car à l’époque, il semblerait que l’amour avait son prix.  Quelques jours avant la cérémonie, les futurs époux s’étaient présentés devant le notaire Thomas Louis Duberger (1805-1831)[22] ; Pierre Lumina pour y vendre des meubles à Modeste et cette denière pour lui faire signer un bail.  Le jour même de leur mariage, la fête ne devait pas avoir été trop longue, car ils s’étaient également présentés devant le même notaire pour signer leur contrat de mariage[23].

Dans la seigneurie voisine, cette décennie sera celle de l’apogée des terres à bois.  En 1830, le marchand William Davies avait reçu en concession du seigneur William Fraser (1794-1830), une immense terre le long de la rivière Noire, une surface qui s’étendait par endroits sur une profondeur de quatre-vingt-dix arpents.  Davie opérait déjà un moulin depuis 1829 sur cette même rivière.  Fraser, avait accordé à ce marchand cette vaste concession «avec le droit de prendre indistinctement sur les terres non concédées tout le bois de pinières qu’ils voulaient, tant que les terres ne seraient pas concédées». Ce bail, William Fraser l’accordait sans exiger de rente, mais simplement pour faciliter le commerce et les affaires de Davies[24].  Ce dernier se tourna alors vers de petits producteurs forestiers comme Pierre Lumina qui étaient en mesure d’alimenter son moulin en bois moyennant compensation monétaire.  Pierre Lumina et son frère le navigateur François Arvé (1800-c.1871) sont partenaires dans cette aventure auprès de Davies[25]

Pierre Lumina a toujours demeuré dans le même coin de pays que son frère Joseph François, la Concession de la rivière Mailloux dans la seigneurie de Murray Bay.  Il s’y était établi avant son premier mariage avec Geneviève Fortin.  Depuis, preuve additionnelle qu’il s’emploie à l’industrie forestière, il a fait l’acquisition d’une terre à bois.  En effet, en 1830, lui et deux de ses frères, François et Louis Denis (1802-1887) possèdent des terres contiguës dans la concession Joyeuse de la seigneurie Murray Bay.   Bornée au trait carré de la première concession, sa terre est au sud-ouest de celle de François alors que celle de Denis est voisine de celle de François au nord-est de celui-ci[26]

Dès le début de la décennie, les bonnes terres du littoral de la seigneurie avaient toutes déjà été accordées et comme on l’a vu même ces terres étaient moins productives que celles des autres régions de la vallée du Saint-Laurent.  Les nombreuses familles se retrouvaient donc à l’étroit dans cette vallée resserrée de la Rivière-Malbaie.  Conséquemment, les nouvelles familles, fils et filles des premiers colons de la seigneurie, gagnaient déjà les plateaux intermédiaires.  C’est ainsi qu’en 1827, on avait constitué la paroisse de Sainte-Agnès déjà habité.  D’autres gagnaient déjà le canton de Settrington ou les extrémités de la seigneurie de Mount Murray dans les secteurs qui deviendront Saint-Fidèle et Saint-Siméon[27].  Malgré tout le développement dans la seigneurie de Murray Bay et sa voisine, cela ne suffisait plus, car faute de bonnes terres agricoles, les censitaires cherchaient avant tout un accès à la forêt.  Cette dernière procurait le revenu additionnel nécessaire au support de la famille que la terre en soi ne pouvait fournir.  C’est ainsi qu’en 1829, les censitaires des seigneuries de Murray Bay et de Mount Murray présentèrent aux autorités coloniales une pétition demandant l’obtention de terre dans les Postes du Roi (le Saguenay) largement pour y faire de la «pinière» et prendre pied dans la terre réservée jusque-là à la très britannique Compagnie de la Baie d’Hudson[28].  Si ce ne fut pas la totalité des censitaires qui signèrent la pétition, Pierre Lumina lui le fera comme une centaine d’autres. 

« Province du Bas Canada, District de Québec, Comté du Saguenay

Son Excellence Sir James Kent, Chevalier Grande Croix du très Honorable Ordre Militaire du Bain. Lieutenant Général et Commandant de toutes les Forces de Sa Majesté dans les Provinces du Bas Canada et du Haut Canada et Administrateur du Gouvernement de la dite Province du Bas Canada.

Qu’il plaise à Votre Excellence

Nous les Soussignés les Fidèles cl Loyaux Sujets de Sa Majesté George IV par la grâce de Dieu.

Roi, du Royaume Uni de la Grande Bretagne et d’Irlande Défenseur de la Foi. Convoqués en Assemblée Paroissiale, et tous Cultivateurs et Censitaires de terres dans les Seigneuries Murray Bay et Mount Murray., dans les Comtés et District susdits.

Représentons très respectueusement

Qu’il nous a paru que le Gouvernement de cette Province, dans sa sagesse, a en contemplation

L’Établissement des Postes du Roi dans le dit Comté.

Que la Majorité d’entre nous connaît parfaitement bien le local pour en avoir fait plusieurs fois la visite.

Que les terres que nous habitons actuellement sont presque toutes incultes, par les Mornes, les Buttes, Montagnes et autres inconvénients à peu près équivalents et conséquemment insuffisantes pour y élever les nombreuses familles qui les habitent et qui se multiplient avec rapidité de sorte que ces terres subdivisées d’après le principe des Lois Françaises en force en cette Province, au lieu d’enchérir les propriétaires d’icelles, les empauvrissent à ne jamais en résoudre.

Qu’étant les plus à proximité des dits Postes, Nous pourrions les établir plus facilement et plus promptement que des personnes éloignées d’iceux.

Qu’en outre des présents pétitionnaires, les quatre autres paroisses qui nous avoisinent, sont en général disposés à se joindre à Nous pour les dits établissements, dans le dit Comté.

C’est pourquoi nous supplions très humblement Votre Excellence de vouloir bien prendre la présente en sa considération et nous accorder la préférence des dits établissements si toute fois le Gouvernement se décide à faire établir le dit Comité, de même que nous en sommes informés qui sera certainement avantageux au Gouvernement, et à ceux qui s’y établissent.

Et nous ne cesserons de Prier.

MALBAIE 4 Avril 1829. »

Des signataires on retrouve :

Pierre Hervey, fils de David, Zacharie Hervey, fils de Dominique, Louis Hervey, capitaine, Dominique Romain dit Joseph Hervey, François Hervey, fils de Jean, François Harvey, fils de David et deux garçons, Thomas Harvay, fils de Louis, enseigne, André Hervey, fils de Joseph, Pierre Hervey, fils de Jean, Joseph Hervey, fils de David et Moïse Hervey, fils de Jean

Modeste donnera au moins sept enfants à Pierre Lumina dont, fait assez rare et une première chez les Hervé en Amérique française, deux paires de jumeaux.  Leurs enfants sont Zénobie et Séraphine tous deux nées le 27 octobre 1829, Zoë née le 11 décembre 1831, Émilienne et Michel tous deux nés le 27 septembre 1833, Onezime né le 26 juin 1836 et Joseph né le 1er octobre 1838[29].  Tous les enfants seront baptisés à Saint-Étienne de Murray Bay.

Décidément, Pierre Lumina est sans doute à court d’argent.  En avril, dans deux transactions qu’enregistre le notaire Charles Herménégilde Gauvreau (1787-1839), non seulement il vend des meubles à son frère François qui est pourtant marié depuis près de six ans, mais en plus il lui en loue certains autres[30]

Le complexe contrat de mariage de 1828 aura comme résultat de rendre la maison moins invitante pour les enfants du premier lit.  En effet, en 1831, un seul des enfants que Pierre Lumina eut avec Geneviève Fortin demeure toujours sous son toit avec la nouvelle épouse.  Est-il besoin de rappeler que la première vague d’enfants n’a qu’entre cinq et onze ans? Il est vrai que deux de ces enfants sont des filles de plus de huit ans en âge de travailler auprès d’une famille à cette époque.  Il semble bien que l’un de ces enfants réside chez l’oncle Joseph François.  Pierre Lumina est sans aucun doute avant tout bûcheron comme beaucoup de ses voisins, car trente des soixante-six arpents qu’il possède sont voués à la culture du blé et six à celle des pois.  Son cheptel est à peine suffisant pour les besoins de la famille : deux bêtes à cornes, six moutons et quatre cochons.  Avec son unique cheval, s’il se déplace, les autres membres de la famille demeureront à la maison.  Il n’est pas seul dans cette situation, car quatorze censitaires sur les trente-six de la Concession de la rivière Mailloux sont aussi peu équipés alors que six d’entre eux, journaliers ou fils nouvellement établis, n’ont pas de chevaux et dépendent de parents ou de voisins pour leur transport[31].

Après 1830, le niveau de vie des censitaires décline.   Pierre Lumina continuera tout de même quinze ans à cultiver sa terre peu productive et dont la vente de son produit est affectée par la crise générale de l’économie rurale du début du XIXe siècle[32].  Dans les circonstances, le bois et ses opportunités de travail grandissantes est la seule planche de salut s’offrant à lui; il passera donc ses hivers comme bûcheron dans les chantiers comme il l’a toujours fait en délaissant progressivement la culture qu’il laissera à sa femme et ses enfants. 

Bien que le travail de Pierre Lumina dans les chantiers l’hiver combiné à celui de sa terre suffise à faire vivre la famille, cette dernière n’était cependant pas assez grande pour assurer l’établissement de ses fils.  Si son grand-père Sébastien Dominique (1736-1812) avait réussi à acheter une terre pour chacun de ses sept fils dans l’intention de les établir, c’est que cinquante plus tôt des terres étaient encore disponibles; malgré cela, il n’avait pu en établir que deux à l’Isle aux Coudres où il vivait alors que les autres acquisitions avaient dû se faire sur la Côte-du-Sud, dans la seigneurie de Murray Bay et celle de Mount Murray.

En décembre 1835, un avis de vente par le shérif nous en apprend un peu plus sur la localisation de la terre de Pierre Lumina.  Jacob Gagnon et Michel Chaperon se dispute une terre de «Murray Baie» située entre entre celle d’Alexandre Gagné dans la concession Saint-Charles et celle Pierre Harvey dans la concession de la rivière Mailloux. On peut donc en déduire que sa terre est aux confins de cette dernière concession[33].

Comme le nomme toujours le notaire Charles Herménégilde Gauvreau, «Pierre Lumina, fils de David», vit principalement de l’exploitation des forêts de ses terres tout comme son père d’ailleurs.  En décembre il vend un lot de madriers à Thomas Simard (1796-1862), lié à l’activité forestière le long du Saint-Laurent et qui deviendra l’un des membres fondateurs de la Société des Vingt-et-un[34].   On se souviendra que le père de Pierre Lumina a plusieurs terres à bois; outre celle du Gros Ruisseau qu’il avait acquise en 1801 dans la seigneurie de Murray Bay, une autre est située dans la seigneurie de Mount Murray, au-delà de la concession Sainte-Mathilde à l’est, au tout début de la concession Sainte-Anne dans le secteur qui sera connu plus tard comme Saint-Fidèle.  Cette terre à bois est à proximité d’un coude de la rivière du Port-au-Saumon qui sert à descendre le bois jusqu’au moulin à scie de Port-au-Saumon, construit par le cousin André Couturier (1796-1855) en 1829 pour Thomas Simard[35].  Cette terre du père avait été acquise pour ses fils peu après la construction du moulin, car les chantiers d’exploitation forestière sont créés à l’époque, et pour longtemps encore, sur une base familiale.  Cette transaction impliquant Pierre Lumina concerne peut-être du bois abattu par la famille élargie sur cette terre, car à plus de soixante-cinq ans, le père ne devait plus en mener très large sur le chantier[36].

Même si le nombre de ses enfants a pu constituer le motif de son émigration, contrairement à la plupart des colons, le nombre de ses fils à établir ne constitue pas la raison qui la rend possible, car en raison de leur bas âge, ils ne pourront participer au travail de défrichement qui l’attend au Saguenay et qui demande normalement beaucoup de bras.  C’est sans doute pourquoi Pierre Lumina prendra plusieurs années avant d’y faire venir sa famille.

Deux ans plus tard, le 8 janvier 1837, Pierre Lumina, en association avec ses frères et en leurs noms, signe une entente avec Félix Gauvreau, «entrepreneur de la malle» depuis 1832, pour la livraison du courrier à Québec[37].  Comme le chemin des Caps est difficile l’hiver, on peut présumer que Gauvreau qui fournit la voiture et les chevaux avait perdu son dernier postier, découragé sans doute d’avoir à faire le trajet en raquette quand le chemin était impraticable pour la voiture.  Ce n’était pas la première fois qu’un postier, voyant venir la saison des neiges, abandonnait son engagement.  Louis Mignier dit Lagacé (1807-1907), d’une famille d’amis du père de Pierre Lumina du temps où il vivait sur la Côte-du-Sud, l’avait fait à la fin de l’automne 1832[38]

On avait compris que lorsque Pierre Lumina s’était promis à Modeste Couturier devant notaire en 1828, les choses n’allaient pas être comme dans le plus commun des mariages.  En octobre 1837, son frère François vend une terre à Modeste; une transaction inhabituelle dans un monde où la femme a un statut légal incertain et où habituellement, seules les veuves ou dames de la bourgeoisie peuvent aspirer à ratifier une telle transaction.  On ne connaît pas les tenants et aboutissants de cette transaction et les motifs qui ont amené François à procéder ainsi, mais parions que l’état des finances de Pierre Lumina à la fin des années 1820 a pu amener à une telle prudence[39].  Ce n’était pas la première fois que Modeste Couturier s’investissait dans les affaires familiales, deux ans plus tôt elle avait également acheté une terre de Jean Malteste (1784-1851)[40].   

Ses derniers jours à Murray Bay

Tout comme son frère aîné et pour la même raison sans doute, à cause du manque de moyens et contrairement à ses jeunes frères François et Louis Denis, Pierre Lumina n’investira pas dans la Société des Pinières du Saguenay[41], ce qui ne l’empêchera pas d’être parmi les premiers à débarquer sur les rives de la Grande Baie à l’automne 1838.  Les premiers défrichements de l’été 1838 sur les rives de la Baie des Ha! Ha! allaient conduire à l’exploitation d’une dizaine de scieries gérées par ce qui est connu aujourd’hui comme la Société des Vingt-et-un.  Le Saguenay, réservé aux marchands de fourrures depuis les tout débuts de la Nouvelle-France, s’ouvre enfin à l’exploitation forestière, en raison principalement de la demande de l’Angleterre en bois pour la construction navale dont elle manque désespérément et de la crise politique dans sa colonie du Bas-Canada, canalisée par le mouvement Patriote. 

Pierre Lumina ne semble pas avoir participé aux premiers défrichements de l’été 1838 puisqu’il est toujours à Murray Bay au tout début de l’automne 1838 pour le baptême de Joseph, son tout dernier enfant[42].  Il s’embarque plutôt à la Malbaie pour le Saguenay à la fin d’octobre avec la famille de son frère Joseph François et les autres premières familles de colonisateurs.  La goélette sur laquelle ils voyagent appartient à Jean Baptiste Jean (1812-1901) et transporte quarante-huit personnes.  Contrairement à son frère qui s’établit avec sa famille dans le lieu qui allait devenir Saint-Alexis[43], on présume que Pierre Lumina se joint plutôt à Mars Simard (1805-1862) et Philippe Castagne (1778-1853) de Baie-Saint-Paul et contribue à établir un moulin de l’autre côté de la rivière, rivière qui n’a pas encore de nom, mais qui portera plus tard le nom de ce jeune colon, Rivière-à-Mars, créant ainsi un second foyer de peuplement dans la baie des Ha! Ha! au pied du cap long de plusieurs arpents, aux flancs ponctués de grosses arêtes de granit qui tombent en perpendiculaire et où se tassera plus tard le village de Saint-Alphonse[44], peuplement principalement formé de colons en provenance de Baie-Saint-Paul et des Éboulements[45]

Pour Pierre Lumina, qui conserve sa terre de la seigneurie de Murray Bay dans la concession de la Rivière Maillloux, ce travail de journalier-bûcheron est encore simplement un moyen de subsistance.  Il y préparera par contre le grand dérangement de sa famille.

C’est au cours de cet hiver 1838 que les associés du Saguenay font bâtir le moulin à scie de la Grande-Baie.  Pour ce faire, les associés engagent, en novembre, le forgeron Célestin Gagné (1813-1882), un lointain parent de Pierre Lumina; en effet, le grand-père maternel de Célestin fut marié à Marie Magdeleine Hervé (1739-1858), sa grand-tante[46].  Dès le mois de décembre, l’exploitation de la pinière commence sur les bords de la «rivière à Mars».  Pour Pierre Lumina et ses compagnons, «l’hiver fut laborieux et triste».  Le chantier de la pinière est très pénible.  Les bûcherons ne prenaient que du gros bois et le manœuvraient à main d’homme. Les «petits campes en bois rond construits hâtivement à l’automne, étaient trop étroits pour le nombre de leurs occupants et ils étaient bien peu confortables»[47].  Ces misères du premier hiver n’empêcheront pas Pierre Lumina de finir sa vie au Saguenay.

Le choix de se joindre à Mars Simard et Philippe Castagne peut paraître curieux puisque les colons en provenance de Saint-Étienne de Murray Bay ont plutôt préféré s’installer à la Grande Baie, tout comme son frère qui s’établit là où se jette la rivière Ha! Ha! dans la baie.  Ce dernier lieu comptera déjà cent dix habitants en 1839[48].  Quoi qu’il en soit, Pierre Lumina ne sera pas longtemps à la solde de Mars Simard puisque dès 1842, alors que Simard vend son moulin, on le retrouvera associé aux entreprises du métis Peter McLeod (1807-1852), les moulins à scie de la rivière du Moulin d’abord et de la rivière Chicoutimi plus tard.  Pierre Lumina devint ainsi l’un des premiers pionniers de Chicoutimi puisqu’en 1842, à l’expiration du bail de la Compagnie de la Baie d’Hudson qui interdisait la colonisation, Pierre Lumina s’y trouve à la conversion de ce poste de traite de fourrures en lieu de colonisation par Peter McLeod[49].

Pierre Lumina ne travaillait pas au premier moulin de la rivière du Moulin que le père de McLeod exploitait déjà bien avant l’ouverture du Saguenay.  Le premier moulin datait du temps des Jésuites de la mission de Chicoutimi et avait été construit par les meuniers Langevin.  Il travaillait plutôt à la construction du second avec le cousin André Couturier (1796-1855), maître charpentier et constructeur de moulins, dans ce cas-ci, pour le compte de Peter McLeod.  À l’époque, McLeod était associé de William Price, un commerçant de bois qui, dans quelques années, monopolisera le marché du Saguenay.  L’année suivant la mort de Peter McLeod fils, la construction terminée, Couturier vendra le moulin à «William Price, commerçant de la cité de Québec»[50].  

Mais bien avant cela, à Murray Bay, Marie Olive Hervey, le troisième enfant qu’eut Pierre Lumina avec sa première épouse, décède en mars 1840, loin de son père œuvrant dans les chantiers.  Célibataire, elle était âgée de dix-huit ans.  C’est «François Xavier Desbiens» (1809-1900) qui assumera la sépulture.  François est le frère de l’un des beaux-frères du père de Pierre Lumina.  Peut-être était-ce chez lui que Marie Olive s’était réfugiée à la dislocation de la famille, après le décès de sa mère[51]

À l’automne de cette même année, toujours à Murray Bay, c’est également sans la présence du père, encore au chantier, que Modeste, l’aînée des filles, se marie sans l’autorisation de son père en se déclarant majeure sans l’être[52].  Ses sœurs également mineures, Léocadie et Sara, se marieront respectivement à la fin de l’été 1841 et à la fin de l’été suivante avec le consentement et en présence du père qui est revenu sur sa terre de la concession de la rivière Mailloux, probablement pour de courtes périodes pendant ces étés[53].   

La famille est toujours dans la paroisse Saint-Étienne à la fin décembre 1842 et outre lui et Modeste, six de leurs sept enfants vivent toujours dans la chaumière familiale.  Il n’y a plus aucun des enfants du précédent mariage de Pierre Lumina encore à la maison.  L’une des jumelles, aînées du deuxième lit, ne vit également plus avec eux, travaillant sans doute dans une famille parente.  Le grand projet de 1841 de Lord Durham d’assimiler les Canadiens, revêt plusieurs formes.  Des arpens français ont est passé à l’âcre anglaise et Pierre Lumina n’en cultive que quinze sur les trente-deux acres qu’il possède.  Il s’agit d’une bien petite production lorsqu’on la compare à celle des voisins.  Mais avec des enfants qui ont tous moins de treize ans et le plus vieux de ses garçons qui n’a que neuf ans, il n’est pas surprenant que Pierre Lumina tire ses revenus de la forêt plutôt que de la culture de sa terre.  Des minots que l’on connaissait, on est passé aux boisseaux de Westminster dit boisseaux anglais.  Au cours de l’année qui s’achève, la famille a produit huit boisseaux de Westminster de bled de froment pour faire le pain, trente-cinq de seigle, douze de poids et trente de pommes de terre.  Encore là, une production juste suffisante pour nourrir la maisonnée.  La famille n’a que deux bêtes à cornes, mais deux chevaux; comme il est le plus souvent parti sur les chantiers Modeste peu donc se déplacer.  Ils ont également six moutons et trois porcs.  Modeste et ses filles ont produites douze verges d’étoffes foulées et neuf livres de laine au cours de l’année[54].

Bien que son avenir soit définitivement tracé au Saguenay, Pierre Lumina semble toujours s’investir à Murray Bay et Mount Murray.  En effet, en janvier 1843, alors qu’il est de passage à Murray Bay, il rachète de la veuve Olive Desbiens (1793-1855) la terre de Mount Murray que David, son père, avait dû vendre vingt-sept ans plus tôt dans une période de disette[55].  À cette époque, Olive, une cousine de Pierre Lumina, venait d’épouser Joseph Tremblay (1795-1843) et le couple cherchait à s’établir.  Par cette vente, Olive comble son besoin d’argent tout en remerciant d’une certaine façon la famille de feu David pour le coup de pouce que ce dernier lui avait donné à son départ dans la vie.  Pierre Lumina, pour sa part, mettra la main sur la terre qui l’avait vue grandir[56].  S’agit-il d’un pur geste émotif de sa part ou d’un investissement cadrant dans une stratégie d’affaire du commerce du bois de lui et Peter McLeod avec lequel il est maintenant associé

La Baie des Ha! Ha! de Pierre Lumina

On ne sait pas exactement quand Pierre Lumina se départit de ses terres de la seigneurie de Murray Bay et quand il fit venir sa famille au Saguenay[57].  Il se peut que cette migration ait été progressive pendant qu’il préparait l’arrivée de femme et enfants, mais l’on sait que la famille est déjà arrivée au Saguenay en 1844, peut-être même dès 1843.  Comme Pierre Lumina travaillait à Chicoutimi, il est possible que la famille ait habité l’endroit un court laps de temps avant de s’installer de façon permanente au fond de la baie, mais rien n’est moins certain, car dès son arrivée à la Grande-Baie il avait pris possession d’un terrain dans l’Anse à Philippe [58]; son quatrième voisin était justement Philippe Castagne, l’associé de Mars Simard.  Ce sera ce lot des terres de la couronne qu’il achètera pour une bouchée de pain dans quelques années.   



On sait que Marie Elisabeth, sa fille cadette du premier lit alors âgé de dix-neuf ans, réside déjà à Chicoutimi depuis 1844 ou avant, puisque tôt au printemps 1845, en avril, elle se marie avec un journalier originaire de la région de Québec.  Pierre Lumina est alors qualifié de cultivateur dans la paroisse de Saint-Alexis de la Grande Baie.  Il faut dire que la paroisse de Saint-Alexis est immense et, qu’à l’époque, elle est la seule encore existante dans la région à l’époque.  En 1844, les Pères Oblats avaient été chargés des missions du Saguenay, avec résidence à la Grande-Baie.  L’année suivante, un Père oblat vint demeurer à Chicoutimi alors que s’ouvrent les registres.  Ce sont Pierre Lumina et Peter McLeod qui servent de témoins à Élisabeth [59].  Comment McLeod réputé être un presbytérien protestant acharné a-t-il pu signer un registre catholique en apparente contradiction avec le droit canonique ? Chose certaine, Pierre Lumina devait être suffisamment proche du métis à l’époque pour que ce dernier agisse comme témoin au mariage de sa cadette.  Le nouveau couple ne fera pas long feu au Saguenay puisqu’Élisabeth décédera en 1851 dans la municipalité de la paroisse de Saint-Joseph-de-la-Pointe-de-Lévy où ils s’étaient établis [60].

Pierre Lumina et sa famille ne semblent pas avoir été affectés par le grand feu de l’été de 1846.  Les familles établies au Ruisseau-à-Caille et à l’Anse-à-Benjamin avaient tout perdu et le feu y avait détruit toutes les traces de vie, à un point tel qu’après l’incendie, on avait dû envoyer à Murray Bay une cinquantaine de femmes et d’enfants qui n’avait plus de toit le temps que les hommes reconstruisent. Chez Pierre Lumina à l’Anse à Philippe on s’en sortait indemne[61].

En janvier 1847, lors du mariage de Séraphine, une des jumelles de dix-sept ans du deuxième lit, le célébrant de Saint-Alexis, l’unique paroisse de la Grande Baie à l’époque, précise que «Pierre Harvay et Modeste Couturier sont de St Alphonse», un village en devenir au fond de la Baie des Ha! Ha![62]  Il s’y sera donc défriché un coin de pays tout en travaillant aux entreprises de Mars Simard entre 1838 et 1842.  Trois mois plus tard, c’est Zénobie, la jumelle de Séraphine et fille de Modeste Couturier qui se marie.  Tout comme sa sœur, elle épouse un autre fils d’Étienne Desbiens (1775-1826) et Félicité Savard (1781-1841), un couple de l’Isle aux CoudresPierre Lumina est toujours résident «de St Alphonse en cette mission»[63].

Bien que les colons en provenance de Saint-Étienne de Murray Bay préféraient s’installer à la Grande Baie, le choix du lieu de l’établissement de Pierre Lumina prend tout son sens lorsque l’on considère que la concession de la rivière Mailloux, où il habitait, bien que située dans la seigneurie de Murray Bay, appartenait à l’époque au vaste territoire des Éboulements; c’est à Saint-Alphonse, aux environs de la Rivière-à-Mars, que les colons en provenance de cet endroit s’établirent[64].  Comme tous les colons défricheurs arrivés en 1838, Pierre Lumina s’était approprié une terre, puisqu’à l’époque le territoire était toujours sous l’emprise de la Hudson’s Bay Company.  Au Saguenay, c’est justement dans les cantons de Bagot et de Chicoutimi où l’on retrouve le plus grand nombre de cas de «squatting».  Les problèmes qui en découlent ne seront d’ailleurs totalement réglés qu’en 1867[65]

Comme nous le verrons, son frère Louis Denis avait été d’ailleurs impliqué dans une querelle entre cousins en 1848 pour une question de «squatting»[66]; il en avait été de même pour Mars Simard, ce qui l’avait amené à déménager ses pénates et aller fonder «Grand-Brûlé».  Dans le cas de Pierre Lumina, après les travaux menés par l’arpenteur Duberger, mandaté pour le redécoupage officiel du canton Bagot, c’est le 3 septembre 1851 qu’il se voit attribuer officiellement sa terre de trente-quatre acres, l’acre étant la façon anglaise de mesurer la terre.  Il doit débourser une livre et quatorze shillings pour devenir propriétaire de la terre qu’il a défrichée à l’Anse à Philippe.  C’est bien peu pour une si grande terre; il faut savoir qu’en 1849, le gouvernement voyant l’émigration vers les États-Unis prendre des proportions alarmantes avait réduit le prix des terres[67].  

Pierre Lumina possédera d’ailleurs d’autres lots dans le secteur, les lots numéro neuf et onze dans le quatrième rang nord-est sur l’Anse à Poulette (surnom d’un certain Joseph Tremblay dit Poulette à Picotté).  Aux abords du fjord du Saguenay, l’Anse à Poulette de Pierre Lumina est entourée de murailles, elle se dessine entre une faille géologique et un ruisseau.  Pierre Lumina avait-il vu dans ce ruisseau la possibilité d’y établir un moulin comme son frère Joseph François l’avait fait sur sa terre; sa santé en décidera autrement.  Un peu plus de quatre kilomètres séparent l’Anse à Philippe de l’Anse à Poulette toutes deux dans les onze kilomètres de la baie des Ha! Ha![68]  Peut-être avaient-ils acquis ces lots de ses frères François et Louis Denis qui, bien qu’ils ne se soient jamais installés au Saguenay, ont possédé des lots de défrichement considérables.

Décrire la maison de Pierre Lumina, c’est décrire toutes les maisons du Saguenay de l’époque.  Elles avaient un étage et étaient construites en pièces équarries les unes sur les autres et assemblées à la queue d’aronde.  Comme Pierre Lumina habitait près d’un moulin, les murs de sa maison devaient être en madriers sur le plat.  Le toit était pointu, les rebords recourbés, solidement charpentés et revêtus de bardeaux de cèdre probablement ou peut-être de pin.  Un lambris de planches debout fixées au moyen de lattes couvre les murs en dehors; à l’intérieur, il n’y a rien sur les pièces et les fentes sont calfeutrées d’étoupe.  Les fenêtres sont peu nombreuses et faites à six ou huit carreaux.  La porte en planches doublées est massive et sans ornement.


La maison est divisée en trois pièces : une cuisine et deux chambres.  Les cloisons sont faites de planches non embouvetées; des rideaux y tiennent lieu de portes.  Les planchers sont de madriers de pin qui ne manque pas sur sa terre.  Sous le plancher du haut, les poutres sont visibles.  En dessus, le grenier est divisé en carrés pour le grain.  Comme Pierre Lumina n’a pas une grande famille, il n’a pas encore eu à y installer des lits pour ceux qui n’auraient pas eu de place en bas.  L’ameublement de la famille est simple et fait sur place avec le bois de sa terre.  Il se compose probablement d’une table aux pieds carrés, de chaises droites, de deux chaises berceuses d’une armoire fixée au mur et fermée par un rideau, d’une huche, d’un banc et d’un crochet pour les seaux, d’un «bède», sorte de banc-lit, de couchettes hautes et de coffres pour les hardes et la lingerie.  Comme tous les colons provenant de Murray Bay,

Pierre Lumina avait bien pris soin d’apporter le Galbraith de Modeste, ce poêle à deux-ponts qui trône au milieu de la cuisine et que tous les colons du Saguenay possédaient et qui y était entré dans la région avec la colonisation[69].

À près de cinquante-six ans, en 1852, il y cultive toujours cette terre de cinquante arpents en culture. Aidé de Modeste son épouse, sa fille Émilienne et ses trois fils Michel, Onezime et Joseph la totalité de sa terre est en culture.  Sa production de 1851 a par contre été endommagée par une gelée tardive tout comme ses voisins.  Il est l’un des rares du canton à produire du sucre d’érable en quantité.  Comme la plupart, Pierre Lumina et ses fils continuent de travailler dans l’industrie forestière, la planche de salut de la région[70]

Depuis son établissement à Saint-Alphonse, Pierre Lumina ne manqua plus aucune des cérémonies religieuses impliquant ses enfants.  Comme il l’avait été lors des mariages d’Élisabeth, Séraphine et Zénobie, il fut témoin lors de la sépulture de Séraphine en 1848 et lors du mariage de Zoë en 1850[71].  On peut présumer que la santé de Pierre Lumina commence à lui faire défaut puisqu’il ne fait pas la distance entre Saint-Alphonse et Saint-Alexis pour assister au mariage de son fils Onezime en mai 1856.  Comme tous ses frères et sœurs qui l’on précéder, Onezime, dix-neuf ans, n’est pas majeur lors de la cérémonie qui l’unit à une jeune fille de six ans son aînée.  C’est Louis Simard (1804-1866), un confrère de Pierre Lumina au moulin de la Rivière-à-Mars et un voisin à Saint-Alphonse, qui sert de témoin au marié[72]Pierre Lumina ne semble pas non plus présent lors de la sépulture de Michel, son fils célibataire de vingt-trois ans, en octobre de la même année.  Ce dernier est pourtant inhumé dans le cimetière de Saint-Alphonse[73].  En effet, bien que les registres de la paroisse ne s’ouvriront qu’en 1857, un curé résidant avait été nommé en 1854 et on y inhumait les défunts dans le cimetière de la chapelle.  Il faut se rendre à l’évidence que, Pierre Lumina, malade n’y habite plus; il vit plutôt sous les bons soins de sa fille Sara du premier lit et de son gendre Joseph Tremblay (1819-1874) dans le township de Chicoutimi[74].

La nouvelle année 1858 est difficile pour le colon défricheur à la retraite qui n’a pas encore soixante-deux ans.  Le corps ne suit plus le travail qui se présentait après tous ces hivers passés au froid et à l’humidité dans les bois pour se retrouver dans de petits campes surchauffés une fois la nuit tombée.  N’eût été l’accueil de sa fille à Chicoutimi, il aurait eu devant lui au printemps une terre à cultiver alors qu’il n’avait plus qu’un fils à la maison pour lui venir en aide.  Ce dernier reluquait déjà une petite Pedneault. 

C’est sans doute pour cette raison, alors qu’il est «au lit malade» que Pierre Lumina «dans la vue de la mort et craignant d’en être pris» demande la présence du notaire Ovide Bossé (1828-1909) à son chevet, le 28 janvier 1858, pour rédiger ses dernières volontés.  Il lègue donc à Joseph, ce fils cadet, le seul encore demeurant dans sa maison, l’ensemble de ses biens meubles et immeubles.  Pierre Lumina qui ne jouit d’aucune grande fortune demande à son cadet Joseph de donner à son frère Onezime un poulain en guise d’héritage.  Il exige également qu’il garde sous le toit familial et nourrisse sa sœur Émilienne jusqu’à son mariage.  Son médecin Pierre Cyrille Adolphe Dubois (1815-1890) lui sert de témoins[75].  Curieusement, Pierre Lumina ne prévoit rien pour assurer le futur de sa femme Modeste.  À l’évidence, les époux ne vivent plus dans la même maison; elle est probablement logée chez l’une de ses filles mariées ou elle est hospitalisée[76]

Pierre Lumina aura participé à la création de sa région; de son coin de pays desservi par voie de mission de 1839 à 1854, il contribuera à la venue du premier curé résidant en 1854.  Les registres de sa paroisse s’ouvrent en l’année 1857 et l’érection à lieu le 31 août 1857 à temps pour son inhumation. Alors que Pierre Lumina rédige son testament à Chicoutimi, on procède à l’érection civile de son village de Saint-Alphonse cette même journée du 28 janvier 1858.  Il demeurera alité pour encore près de six mois.  Il aura demandé de mourir dans sa maison de son village de Saint-Alphonse puisqu’il y décède le 14 juin 1858.  Selon ses dernières volontés, il est enterré deux jours plus tard dans le cimetière de Saint-Alphonse-de-Bagotville.  Lors des obsèques, le célébrant prend bien soin de mentionner «domicilié à Chicoutimi décédé à St Alphonse» [77].

Modeste Couturier survivra à Pierre Lumina pendant dix ans.  Elle décède le 16 novembre 1868 à Chicoutimi.  Des quatre témoins à sa sépulture, aucun n’est apparenté[78].  On peut présumer que ses fils sont alors montés dans les chantiers pour l’hiver.

Des fils de Pierre Lumina, seuls Onezime et Joseph auront une descendance et pour chacun, elle remontera à nos jours.  Le premier quittera le Saguenay pour Montréal alors que le second ira finir sa vie aux États-Unis, comme tant d’autres québécois de l’époque.

Pierre Lumina Hervé, ses enfants, données généalogiques — 6e génération 

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[[1] Les habitants des régions avoisinantes ont longtemps désigné ainsi Saint-Roch-des-Aulnaies par opposition à la paroisse Saint-Roch de la Rive-Nord, Saint-Roch de Québec.

[2] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Roch-des-Aulnaies, 17 mars 1796.  Le curé au registre inscrit le père David Louis Dominique comme étant Joseph David et inverse le patronyme de la mère Marie Louise en le notant Lalancette dite Le Breton plutôt que LeBreton dit Lalancette.

[3] Ibid., 20 juillet et 5 août 1793, baptême et sépulture d’André Couturier fils. 21 septembre 1793, sépulture de Marie Geneviève Ouellet.

[4] Marie Anne Duchesne est la sœur de René Abraham père de Quirille Pulchérie mariée à Dominique à David et aussi père de Joseph marié à Geneviève à David.  Comme si ce n’était pas assez, il est aussi le père de René marié à Madeleine à Dominique Isaïe le frère de David.

[5] A.N.Q., GN. Minutier Charles Chiniquy, 7 février 1820.

[6] BAnQ., Registre 15 : Registres de la Voirie du District de Québec, Chevalier Robert d’Estimauville, député Grand-Voyer et Jean-Baptiste d’Estimauville Grand-Voyer du district de Québec (1er janvier 1817 au 31 décembre 1824), f. 263-268.    Liste des inspecteurs et sous-voyers des chemins et ponts pour les années 1823 et 1824.

[7] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, no 197, 18 février 1824.

[8] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, no 345, 21 septembre 1824.

[9] B.A.C., G., Recensement de 1825, district du Northumberland, sous-district Malbaie.  Le recensement du Bas-Canada de 1825 a eu lieu entre le 20 juin et le 20 septembre 1825.

[10] Ouellet, Fernand.  Histoire économique et sociale du Québec 1760-1850, structures et conjoncture.  Montréal, Fides, 1966, page 390.

[11] Pelletier, op.cit., page 97.

[12] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, no 211, 4 novembre 1826.

[13] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, no 167, 20 juillet 1827.

[14] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, no 171, 23 juillet 1827.

[15] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, no 210, 9 octobre 1827.

[16] A.N.Q., GN. Minutier Louis Panet, no 264/2, 23 octobre 1827.  Déclaration servant de recollement à l’inventaire, feue Geneviève Fortin.

[17] Blais, Suzanne. (2004). Les mots de la langue courante en médecine : les noms de quelques maladies contagieuses. Québec français, (133), pages 102–104.  Avec le temps dans le langage populaire au Québec, la petite vérole est devenue la grosse picote dont la picote noire en est une forme.  Ce type de variole est une maladie grave s’attaquant au système immunitaire/lymphatique.

[18] FRENETTE, François-Xavier. Notes historiques sur la paroisse de La Malbaie. La Malbaie, s.é, 1952. 94 pages.

[19] BAnQ., Enquête du coroner Panet, 29 octobre 1828.  Et : BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 2 novembre 1828.

[20] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Roch-des-Aulnaies, 30 mai 1798, Baptême de Marie Modeste Couturier dite Sanschagrin.

[21] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 25 novembre 1828.

[22] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Louis Duberger, no 73 et 74, 17 novembre 1828.

[23] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Louis Duberger, no 77, 25 novembre 1828.  Thomas-Louis Duberger n’a pratiqué le notariat en la Seigneurie de Mont Murray que du 26 novembre 1827 au 30 août 1831.

[24] Pelletier, op.cit., page 132.

[25] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Louis Duberger, no 338, 21 mai 1831.

[26] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Louis Duberger, no 138, 8 janvier 1830.

[27] BOILARD Louise, op.cit., page 11.

[28] BAnQ., COLLECTIF. «Un document historique : Pétition présentée par les citoyens de la Malbaie au sujet des terres du Saguenay en 1829», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, volume 40, N0. 24 (4 février 1926), page 3.

[29] Joseph épousera Delphine Pedneau le 14 septembre 1858 en l’église Saint-François-Xavier de Chicoutimi.  Trente ans plus tard, alors âgé de cinquante ans, il quittera Hébertville au lac Saint-Jean où il s’était établi et migrera à Brunswick dans l’état du Maine en 1888.  Il y finira sa vie avec sa famille.  Seuls un fils et une fille reviendront au Québec.

[30] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, nos 38 et 39, 10 et 11 avril 1829.

[31] B.A.C., G., Recensement de 1831, district du Saguenay, sous-district des Éboulements, concession de la Rivière Mailloux, pages 651 et 652.  Ce recensement fut partiellement nominatif puisque seuls les noms des chefs de familles ou de ménages furent répertoriés; les autres membres des familles ou des ménages ont été comptés et leur nombre total a été inscrit selon la catégorie d’âge et de sexe à laquelle ils appartiennent.  On ne peut donc être certain de la présence d’un enfant de Pierre chez Joseph François; on peut seulement conclure que chez Joseph François, une fille de moins de quatorze ans qui n’est pas la sienne y réside.

[32] OUELLET, Fernand.  Le Bas-Canada, 1791-1840.  Ottawa, Éditions de l’Université d’Ottawa, 1976, page 175.  

[33] BAnQ., COLLECTIF. «Vente par le Shérif», Journal Le Canadien. Québec, volume V, N0. 13 (14 décembre 1835), page 2.

[34] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, no 182, 14 décembre 1835.  Contrairement aux autres notaires, le notaire Gauvreau prend toujours soin d’ajouter au nom de Pierre le qualificatif «fils de David» le départageant ainsi des cinq autre Pierre Hervé.

[35] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, 23 août 1830.  Il n’est pas certain que le cousin André Couturier soit l’associé dans cette construction.  Il pourrait s’agir de son père, André Couturier (1767-1843), les deux étant maîtres charpentiers constructeurs de moulins.  Quoi qu’il en soit, comme ce type de chantier de construction était une affaire familiale, le père, le fils et sans doute le cousin, David Hervé et ses fils y ont été mêlés.  Dans peu de temps d’ailleurs André Couturier fils et Pierre Lumina Hervé s’associeront dans la construction d’un moulin à Port-aux-Quilles.

[36] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Louis Duberger, 24 février 1830.

[37] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, no 13, 8 janvier 1837.

[38] Pelletier, op.cit., pages 154-155 et 193. 

[39] A.N.Q., GN. Minutier Charles-Herménégilde Gauvreau, no 142, 4 octobre 1837.

[40] A.N.Q., GN. Minutier Charles-Herménégilde Gauvreau, no 61, 27 mars 1835.

[41] Aussi nommée «Société des Vingt-et-un».

[42] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 2 octobre 1838.

[43] MARTEL, Louis-Antoine.  Notes sur le Saguenay : manuscrit de l’abbé L.-A. Martel, cure de Saint-Alexis, 1858-1865. Chicoutimi, le Centre d’études et de recherches historiques du Saguenay, 1968, page 15.

[44] Ibid., page 20.

[45] TREMBLAY, Victor. Histoire du Saguenay — Depuis les origines jusqu’à 1870. Chicoutimi, La librairie régionale inc., 1938, page 165.  Un livre traitant des Harvey publié en 2016 mentionne que Pierre, avec sa deuxième épouse Modeste Couturier, installa aussi sa famille à Saint-Alexis, tout comme son frère Joseph.  Cette même source situe son arrivée dans l’une des vagues successives de colons en 1839-40; je n’ai pas retenu cette hypothèse à la suite de mes recherches considérant que l’auteur n’appuie ses énoncés sur aucune source et que Pierre est réputé cultivateur de la paroisse de Saint-Étienne de la Malbaie lors du mariage de ses filles Léocadie et Sara en 1841 et en 1842.

[46] A.N.Q., GN. Minutier Charles-Herménégilde Gauvreau, 9 novembre 1838.

[47] TREMBLAY, Victor. Histoire du Saguenay — Depuis les origines jusqu’à 1870. Chicoutimi, La librairie régionale inc., 1968, page 240.

[48] BOUCHARD Russel et Jean MARTIN. Ville de La Baie, op. cit., pages 19 et 21.

[49] Beaulieu, op.cit.

[50] A.N.Q., GN. Minutier Ovide Bossé, no 213, 7 octobre 1853.

[51] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 25 mars 1840.  Madeleine Hervé, la sœur de David Louis Dominique, est mariée à Vital Desbiens, le frère aîné de François.

[52] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 3 novembre 1840.

[53] Ibid., 14 septembre 1841 et 15 août 1842.

[54] B.A.C., G., Recensement de 1842, district du Saguenay, sous-district de la paroisse de la Malbaie, microfilms 004569589_00152 et 004569589_00172.  Ce recensement fut partiellement nominatif puisque seuls les noms des chefs de familles ou de ménages furent répertoriés; les autres membres des familles ou des ménages ont été comptés et leur nombre total a été inscrit selon la catégorie d’âge et de sexe à laquelle ils appartiennent.  Ce recensement a été terminé le 30 décembre 1842.

[55] A.N.Q., GN. Minutier Charles Chiniquy, 20 février 1816.

[56] A.N.Q., GN. Minutier Jean Gagné, no 1103, 4 janvier 1843.

[57] À l’époque, il y avait six porteurs du patronyme prénommé Pierre : Pierre Hervey (1759) à Pierre (1733), Pierre Hervey fils (1799) à Pierre Hervé (1759) chez Pierre (1733), Pierre Hervey (1796) à David (1764) chez Dominique (1736), Pierre Hervey (1799) à Dominique Isaïe (1775) chez Dominique (1736), Pierre Harvey (1806) à Jean (1775) chez Pierre (1733) et Pierre Hervey (1807) à Dominique Romain dit Joseph (1768) chez Pierre (1733).  Comme l’un d’entre eux était un marchand prospère, il aurait été laborieux d’éplucher les centaines d’actes notariés de vente pour tenter de trouver celle de la terre de Pierre Lumina d’autant plus que le plus souvent les documents ne permettent pas d’établir avec certitude de quel Pierre Harvey il s’agit.

[58] Là où s’élèvera plus tard le village de Saint-Alphonse au fond de la Grande-Baie.

[59] BAnQ., Registre de la mission Saint-François-Xavier de Chicoutimi, 29 avril 1845.  Mariage d’Élisabeth Harvay et de Jean Fleurde dit Côté.

[60] BAnQ., Registre de la paroisse de Saint-Joseph-de-la-Pointe-de-Lévy, 2 octobre 1851.

[61] POTVIN, Damase. La Baie des Hahas.  Chicoutimi, Édition de la chambre de commerce de la Baie des Hahas, 1957, pages 40-43 et 58.

[62] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Alexis de la Grande Baie, 18 janvier 1847.

[63] Ibid., 12 avril 1847.

[64] Le village et la paroisse de Saint-Irénée ne seront créés qu’en 1843.  À l’époque du départ de Pierre pour le Saguenay, la concession de la Rivière Mailloux, bien que plus rapprochée de Murray Bay, appartenait au territoire des Éboulements.

[65] POUYEZ, Christian et Michel Bergeron.  L’étude des migrations au Saguenay (1842-1931) : problèmes de méthode.  Chicoutimi, Université du Québec, 1973, page 47.

[66] BEAULIEU, Carl. Les Harvey, entrepreneurs polyvalents et citoyens engagés. Chicoutimi : Les Éditions du Patrimoines, 2002, page 359.

[67] DUNN, Robert et Derek Hopkins.  Alphabetical index to the land grants by the crown in the province of Quebec from 1763 to 31st December 1890.  Pointe Claire, Quebec Family History Society, 2005. (Livre des lettre patentes; page 57, volume d’index de comté : I, page 252.)  Et dans : PILOTE, François.  Le Saguenay en 1851 : Histoire du passé, du présent et de l’avenir probable du Haut-Saguenay au point de vue de la colonisation.  Québec, Imprimerie Augustin Côté et Cie, 1852, page 90, pour le prix des terres.  Ses frères François et Louis Denis, bien qu’ils ne se soient jamais installés au Saguenay, y obtinrent des lots de défrichement considérables.  Un auteur qui publia en 2016 prétendait que «C’est peut-être par eux que Pierre Lumina obtint la possibilité d’amener sa famille au Saguenay et de l’installer à St-Alexis-de-Grande-Baie vers 1845».  Évidemment sa recherche fut fort limitée puisque comme on le voit ici Pierre Lumina acheta plutôt une terre de la couronne. 

[68] DUNN, Robert et Derek Hopkins.  Alphabetical index to the land grants by the crown in the province of Quebec from 1763 to 31st December 1890.  Pointe Claire, Quebec Family History Society, 2005. (Livre des lettre patentes H ; page 57, volume d’index de comté : I, page 252.)

[69] Inspiré de : TREMBLAY, Victor. Histoire du Saguenay — Depuis les origines jusqu’à 1870. Chicoutimi, La librairie régionale inc., 1968, pages 309-310. 

[70] B.A.C., G., Recensement du Bas-Canada 1851, district du township de Bagot, page 9 et recensement agraire du Bas-Canada 1851, district du township de Bagot, page 99. Pour le Canada-Est, l’énumération connue sous le nom du Recensement de 1851 a débuté officiellement le 12 janvier 1852.

[71] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Alexis de la Grande Baie, 5 février 1848 et 4 juin 1850.

[72] Ibid., 6 mai 1856.

[73] Ibid., 13 octobre 1856.

[74] A.N.Q., GN. Minutier Ovide Bossé, no 694, 28 janvier 1858.

[75] A.N.Q., GN. Minutier Ovide Bossé, no 694, 28 janvier 1858.

[76] Je n’ai pu retrouver Modeste Couturier chez l’un de ses enfants lors du recensement de 1861.

[77] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Alphonse-de-Bagotville, 16 juin 1858.

[78] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-François-Xavier de Chicoutimi, 16 novembre 1868.