Les frères Joseph Ariste Harvey, Arcade Harvie et Delphis Harvé

Ces trois frères aux patronymes différents sont les fils de Grégoire Hervy (1860-1933) à Theodore Hervy (1831-1916) chez François Hervy (1793-1881).  Ils quitteront la vie de pêcheur des îles de la Madeleine pour le Massachusetts après la Grande Guerre.  On ne sait pas ce qui jeta ces trois frères et certaines de leurs sœurs hors des îles.  Après quelques années de pêches infructueuses, s’en était souvent fait économiquement pour ces familles de Madelinots.  Cette dure réalité les entraînait inexorablement vers des migrations forcées.  En août 1922, il ne restait déjà plus sous le toit familial que les deux parents, leur fille sourde et muette et un jeune fils d’une quinzaine d’années[1].    

Arcade Harvie (1891-1971)

Né le 12 octobre 1891 dans la paroisse de Saint-Pierre-de La Vernière à L’Étang-du-Nord aux Îles-de-la-Madeleine, Joseph Arcade Harvie est le second fils parmi les neuf enfants de Grégoire Hervy et Marine Cyr (1860-1942) et le premier de la famille à quitter le métier de pêcheur pour partir travailler aux États-Unis[2].

Après un bref séjour dans une communauté de Madelinots à l’extérieur des îles où il devient travailleur de moulin, Arcade Harvey arrive à Cambridge au Massachusetts en 1918[3].  Il est possible qu’il ait fait le voyage avec un cousin, Alphée Cyr, un neveu de sa mère.  La majorité des Madelinots nés Harvie ou Hervy lorsqu’ils quittent leurs îles, prennent le patronyme Harvey.  Arcade fera de même, lui dont les frères sont nés Harvey et Harvé.

En août 1922, son frère Ariste et sa famille quittent les îles et viennent crécher chez Arcade, le temps de s’établir[4].  Comme le logement est petit, son frère Delphis, qui était aussi du voyage, doit aller loger chez le cousin Alphée Cyr, à quelques portes de distance sur la même rue[5]

Avec le déclin de l’industrie à Cambridge comme partout en Nouvelle-Angleterre durant la Grande Dépression, Arcade revient au Québec toujours célibataire.  En 1935, il travaille déjà depuis un certain temps au moulin de pâte et papier de Clarke City sur la Côte-Nord, à l’instar de plusieurs Madelinots. 

En 1949, il se rapproche de ses deux sœurs, Marie Angéline Harvey (1893-1991) et Marie des Neiges Harvé (1897-1961) qui vivent dans le quartier Hochelaga de Montréal.  Arcade y est journalier et demeure sur la rue Nicolet.  À sa retraite dans les années 1960, il emménage dans un nouveau logement du même quartier et Angéline, sa sœur célibataire, vient le rejoindre[6]Arcade Harvey décède en 1971 dans ce même quartier de la métropole[7]

Joseph Ariste dit Horace Harvey (1889-post.1944)

Né le 15 août 1889 à L’Étang-du-Nord aux Îles-de-la-Madeleine, Joseph Ariste Harvey est le fils aîné de sa famille[8].  


Le 26 octobre 1921, il épouse Hélène Fourgère (1905-1992) dans l’église Saint-Pierre-de La Vernière de L’Étang-du-Nord[9]

Quand il quitte les Îles-de-la-Madeleine avec son épouse et son frère puîné Delphis, en août 1922, il débarque d’abord d’un bateau au port de Saint-Jean du Nouveau-Brunswick.  Il prend ensuite le train pour Boston, avec d’autres Madelinots qui vont s’établir à Cambridge[10].  À leur arrivée, lui et sa femme habitent temporairement dans le logement de son frère Arcade[11]


Puis la famille s’installe en permanence dans un logement de la rue Montgomery, tout près de sa jonction avec la rue Harvey, un coin de la ville largement francophone, peuplé surtout d’Acadien avec une forte représentation de Madelinots.  Les voisins sont des Chiasson, Sirois, Tanguay, Beaudin, Gautreau, Doucette, Cormier et Dussault.  Il faut noter que l’église Saint John the Evangelist est à moins de sept cents mètres, contribuant au regroupement des francophones catholiques.  Sur tout ce bout de rue, il n’y a qu’une seule famille anglophone et il s’agit d’Irlandais[12].  Il ne manque aux Madelinots que leurs îles.  À Cambridge Horace, car c’est ainsi qu’il se fait prénommer aux États-Unis, pratiquera le métier de couvreur.


Dix ans plus tard, les besoins de la famille changent, obligeant Horace à trouver un nouveau logement dans un quartier habité par des Américains.  Lui et sa femme, ainsi que leurs voisins des Boudreau des îles, y sont les seuls originaires du Québec.  Outre leurs cinq enfants, tous nés au Massachusetts, son frère Delphis habitera avec eux pour un certain temps[13].  Après avoir été couvreur pendant plus de vingt ans, alors que la Deuxième Guerre mondiale fait rage, Horace change d’emploi et devient travailleur pour la défense en 1944.  Lui et sa famille occupent un nouveau logement, ce qui n’a rien d’inhabituel, car tout au long de sa vie de journalier il changera régulièrement d’adresse[14].  Il serait décédé au début des années 1990. 

Joseph Delphis Harvé (1899-1990)

Né le 7 octobre 1899 à L’Étang-du-Nord aux Îles-de-la-Madeleine, Joseph Delphis Harvé est le plus jeune des trois fils migrants[15].  

En débarquant du train qui l’avait amené avec son frère Ariste et sa nouvelle épouse de Saint-Jean au Nouveau-Brunswick à Boston au Massachusetts, le 3 août 1922, il loge d’abord chez son cousin Alphée Cyr sur la rue Montgomery à Cambridge, en banlieue de Boston.  Il faut dire que le logement de son frère Arcade était trop petit pour loger trois nouveaux arrivants.  De toute manière, le logement d’Arcade n’était qu’à quelques portes sur la même rue que celui du cousin.  Comme il n’était venu que pour une saison de travail, il repart pour les îles de la Madeleine après six mois[16].  Il revient aux États-Unis avec l’intention d’y rester en mars 1923[17]

Mais Delphis, célibataire tout comme son frère Arcade, ne demeurera pas très longtemps dans la région de Cambridge où il était revenu; il déménage à New York et trouve rapidement un emploi de chaudronnier.  Il habite alors sur la 55e rue, à cinq cents mètres du Carnegie Hall, où il n’a pas les moyens d’entrer, et à moins de six cents mètres de Central Park.  C’est en 1927 qu’il fait sa demande de naturalisation américaine, alors qu’il demeure encore à New York[18]

Delphis viendra vivre chez son frère Horace un certain temps à la fin des années 1930[19].  Il n’y est déjà plus au début de 1942.  C’est en février de cette année que Delphis est enrôlé dans l’armée américaine.  Après seulement un an, le 19 mars 1943, il obtient une décharge honorable en raison d’un doigt coupé à la jointure, un accident assurément survenu en mer dans sa jeunesse, puisque c’est une mutilation qu’il avait déclarée en arrivant aux États-Unis vingt ans plus tôt[20].   En 1942, après sa période d’entraînement militaire, il revient vivre chez son frère Horace à Cambridge[21] et trouve un emploi de machiniste dans une industrie du secteur[22]

On ne connaît pas les détails de sa vie par la suite, mais l’on sait qu’il décédera le 31 octobre 1990 dans la petite communauté isolée du comté de San Joaquin en Californie à environ cent cinquante kilomètres à l’est de San Francisco.  Ramené au Massachusetts, il sera inhumé dans un cimetière de la région de Cambridge[23]

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[1] B.A.C., G., Recensement de 1921, Pôle de Grindstone, paroisse de l’Étang du Nord, microfilm e003072107.

[2] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de La Vernière, 18 octobre 1891.

[3] Canada, Border Crossings from U.S. to Canada, 21 mars 1918, Arcade Harvey.

[4] U.S., Records of Aliens Pre-Examined in Canada, 1904-1954, Ariste Harvey, 3 août 1922.

[5] Ibid.

[6] B.A.C., G., Listes des électeurs, 1935 Clarke City, 1949 Montréal, 1963 Montréal.

[7] Registre du cimetière Le repos Saint-François d’Assise, Montréal, 1971.

[8] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de La Vernière, 15 août 1889.

[9] Ibid., 26 octobre 1921.

[10] U.S., Records of Aliens Pre-Examined in Canada, 1904-1954, Ariste Harvey, 3 août 1922.

[11] Ibid.

[12] 1930, Recensement fédéral américain, État du Massachusetts, comté de Middlesex, ville de Cambridge, rie Montgomery, page 6 A.

[13] 1940, Recensement fédéral américain, État du Massachusetts, comté de Middlesex, ville de Cambridge, rue Market Place, page 1 A.

[14] Cambridge City Directory for the year 1944.

[15] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de La Vernière, 8 octobre 1899.

[16] U.S., Records of Aliens Pre-Examined in Canada, 1904-1954, Delphis Harvey, 3 août 1922.

[17] 1923-3, Registre canadien des passages à la frontière canado-américaine, St John, New Brunswick, Delphis Harvey.

[18] U.S., Records of Immigration, Dossiers de naturalisation fédérale et d’État, New York, 1 avril 1927, Delphis Harvey.

[19] 1930, Recensement fédéral américain, État du Massachusetts, comté de Middlesex, ville de Cambridge, rie Montgomery, page 6 A.

[20] U.S., Records of Aliens Pre-Examined in Canada, 1904-1954, Ariste Harvey, 3 août 1922

[21] U.S., Army Records, Honorable discharge papers for Delphis Harvey, 19 mars 1943.

[22] 1944, Cambridge City Directory, page 463.

[23] Edgell Grove Cemetery and Mausoleum, Framingham, Middlesex County, Massachusetts, mémorial de Delphis Harvey 1990.