11. L'avenir des Harvey est assuré

L’avenir des Hervet est assuré 

En janvier 1695, Françoise donnera à Sébastien Hervet un deuxième fils.  «Sébastien Hervé», le fils, a pour parrain « Nicolas Joseph Bochart de Servigny » (1686-1702), fils de l’intendant de l’époque Jean Bochart de Champigny (1643-1720).  C’est Angélique de Comporté (1680-1717) qui est sa marraine.  Le père d’Angélique est un noble qui a occupé plusieurs postes importants au service du roi et sa mère, noble également, n’est nulle autre que Marie Bazire (1638-1687) la sœur du Sieur Charles Bazire avec qui, comme on l’a vu, Sébastien père a brassé de nombreuses affaires à Montréal.  De plus, la jeune Angélique qui n’a que quinze ans a comme tuteur François Hazeur[1], un ami de ses parents décédés tous deux en 1687 et une relation d’affaires importante de Sébastien père.

Deux semaines plus tard, Louise Philippeau (1674-1702), la cadette des sœurs de Françoise, épouse à Québec le 4 février le maçon Jean Baptiste Maillou dit Desmoulins (1668-1753).  Sébastien et Françoise assistent à la cérémonie.  Il devait s’agir de la première grande sortie de notre ancêtre Sébastien, fils.

Un mois plus tard, Sébastien s’entend avec son beau-père, ses beaux-frères et belles-sœurs, tous héritiers de feu Jeanne Esnard, pour permettre à Charles Trépagny (1659-1702) de prendre dix-huit pouces de terre sur leur emplacement provenant de ladite Esnard à la Basse-Ville «pour un pignon rendu mitoyen»[2].

Françoise Marien (1677-1749), la fille de Françoise Philippeau ancêtre maternelle des Harvey du Québec, se marie le 19 septembre 1695.  Elle épouse Sébastien Grena dit Lachapelle (1666-1698).  Du clan des Philippeau présents, outre Françoise, on compte le grand-père de la mariée Claude Philippeau (1638-1713) et sa nouvelle épouse, Anne Philippeau (1669-1703) et son époux Thomas Barthélemy (1669-1722) et le célibataire Jacques Philippeau (1672-1704), frère de la mariée.  Du côté des Hervet, Sébastien, le beau-père de la mariée, est accompagné de sa sœur Renée (1636-1702), de ses neveux Étienne (1663-1740) et Jacques Thibierge (1664-1732) et leurs épouses et de Charles Chabaudier dont on ne sait que dalle[3].  Le père François Dupré, curé, officie la cérémonie.  Françoise Marien ne sera pas mariée très longtemps puisque son époux décède trois ans plus tard, le 13 novembre 1698.  Ce dernier, tombé malade en août, était hospitalisé depuis le début d’octobre[4].  La maison de Sébastien s’agrandit ainsi, mais la mère perd une aide précieuse.  Françoise pouvait compter sur sa fille de dix-sept ans, afin de l’épauler dans la maisonnée où vivaient huit personnes, dont notre jeune Sébastien qui a exactement huit mois. 


Le 8 septembre 1697, comme ce fut souvent le cas à Québec, la peur s’empare à nouveau de la population.  Des passagers de la Gironde sont débarqués et amenés à l’Hôtel-Dieu pour y être soignés, ils sont atteints du «pourpre»[5].  Ce vaisseau du Roy apporte à Québec la maladie qui fait un grand nombre de victimes. 

Le «pourpre»

Le «pourpre», terme vieilli, appelé aujourd’hui le «purpura» est une lésion hémorragique de la peau ou des muqueuses, de couleur rouge à pourpre.  Son traitement était inconnu au XVIIe siècle.

Le 28 octobre suivant, c’est toute la famille Hervet qui est triste lors de l’inhumation de l’une des leurs.  Angélique Thibierge (1677-1697), la fille de Renée Hervet devenue religieuse à l’Hôtel-Dieu de Québec et connue sous le nom de Mère Angélique de Sainte-Agnès mourait victime du «pourpre» contracté en soignant des passagers du vaisseau la Gironde.  Entrée à l’Hôtel-Dieu l’année précédente à la suite d’une peine d’amour, elle s’éteignait alors qu’elle venait tout juste d’avoir vingt ans[6].

«Nous reçumes en 1695 mes Sœurs Catherine Tibierge de St Joachim, et Louise Angelique Dailleboust de St Raphaël, et en 1696, ma sœur Angelique Tibierge de Ste Agnes. Celle cy étant l’aînée; elle ne sentoit aucun penchant pour la religion, ou se plaisoit à l’étouffer, quand sa sœur entra.  Mais quelques mois plus tard les affaires de son mariage étant conclûës, Dieu permit que celui qu’elle devoit épouser mourut. Cette mort la frappa; elle cru que Dieu ne la vouloit point dans le monde, et elle fit ce qu’il fallait pour devenir Religieuse.  On examina sa vocation, et enfin l’on reconnu que la grace agissoit en elle, on la recut.» [7]




Le 28 janvier 1698, Françoise met au monde le quatrième enfant de la famille Hervet«Marie Charlotte Hervé» sera baptisée le lendemain.  Les Hazeur sont encore de la fête.  Cette fois-ci, c’est la jeune Marie Anne Ursule Hazeur (1692-1743) qui est la marraine.  Cette dernière, qui n’a que six ans, est la fille de François Hazeur l’ami de Sébastien, éminent marchand de Québec, entrepreneur, seigneur, membre de la Compagnie du Nord qui sera l’un des directeurs de la Compagnie de la colonie et aussi futur conseiller au Conseil supérieur.  Le parrain de Marie Charlotte est Charles Cheron (1690-post.1737), le fils de Martin Cheron (1663-1717), Blésois comme le père de la baptisée.  Cheron est marié à Anne Thibierge (1669-1705), la nièce de Sébastien Hervet.  Il est pour l’instant bourgeois marchand et garde-magasin du Roy; il deviendra membre du Conseil souverain de la colonie de 1710 à 1717[8]

Cinq jours après la naissance de son quatrième enfant, on retrouve une nouvelle fois Sébastien impliqué dans le processus judiciaire de la Nouvelle-France alors qu’il signe comme témoin une procuration de Raymond Cornu à l’huissier Étienne Marandeau (1671-1714), écrivain du roi, pour que ce dernier s’adresse à la Prévôté de Québec en son nom[9].  De 1787 à 1702, la période où Jean Bochart de Champigny sera intendant, on aura régulièrement recours à Sébastien comme témoin, arbitre ou procureur dans les greffes des notaires et sur le parquet de la Prévôté de Québec.  Ce dernier est éduqué et qui plus est, il est Français, un avantage certain auprès de gouvernants qui le sont également, tout comme la majeure partie de ceux qui constituent la bureaucratie d’alors en Nouvelle-France.

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[1] NISH, Cameron. «Riverin, Denis». Dictionnaire biographique du Canada. 1re édition 1969, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 2003, 15 volumes, volume II (Décès de 1701-1740).

[2] ROY, Antoine.  Inventaire des greffes des notaires du Régime français : Louis Chambalon. Volume XVIII, Québec, 1956, page 108-109, 8 février 1695.

[3] Charles Chabaudier n’apparaît que dans le seul registre de ce mariage.  On ne trouve aucune trace de lui en Nouvelle-France.  Était-il un parent de passage, un matelot hébergé? Il y a bien un Charles Chevaudier (1675-1743) né d’une famille établie à Champlain près de Trois-Rivières dont le père s’est installé à Québec après le décès de sa première femme.  Il pourrait s’agir du même jeune homme puisqu’il est de l’âge approximatif des mariés.  Cependant, le curé François Dupré connaît ses ouailles et n’est pas du genre à faire ce genre d’erreur?

[4] FOURNIER, Marcel et Gisèle MONARQUE. Registre journalier des malades de l’Hôtel-Dieu de Québec. Montréal, les éditions Archiv-Histo, 2005, pages 402, 407, 410, 413. 

[5] Le «pourpre», terme vieilli, appelé aujourd’hui le «purpura» est une lésion hémorragique de la peau ou des muqueuses, de couleur rouge à pourpre.  Son traitement était inconnu au XVIIe siècle.

[6] ASSELIN, Jean-Pierre. «Tibierge, Marie-Catherine». Dictionnaire biographique du Canada. 1re édition 1969, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1974, 15 volumes, volume III (Décès de 1741-1770).

[7] SAINT-IGNACE, mère, A.M.J. Les annales de l’Hôtel-Dieu de Québec, 1636-1716. Hôtel-Dieu de Québec, Québec, 1939, page 282.

[8] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame de Québec, 29 janvier 1698.

[9] BAnQ., Rapport des Archives nationales du Québec 1971, Tome 49, page 74.  Tiré de l’inventaire de la Prévôté de Québec.