02. La seigneurie de La Chesnaye

Le traité de paix de 1667, signé entre les Français et les Iroquois, allait permettre de coloniser les seigneuries de la vallée du Saint-Laurent, principalement celles qui étaient situées autour de l’île de Montréal.   Dans ses efforts de peuplement de la Nouvelle-France vers la fin des années 1660, l’intendant Talon recommande de scinder les seigneuries de trop grande taille, ce qui permet d’augmenter le nombre de fiefs à distribuer. C’est aussi dans ce contexte qu’intervient Charles Aubert, Sieur de La Chesnaye (1632-1702), personnage influent et riche marchand de Québec. Arrivé dans la colonie en 1655, il fait sa fortune comme marchand, trafiquant de fourrure et financier. Il joue également un rôle primordial dans la colonisation de la Nouvelle-France. Possédant déjà plusieurs navires et seigneuries, il acquiert à cette époque quatre-vingt-dix pour cent[1] de la seigneurie de Repentigny et la désigne sous le nom de «La Chesnaye»[2].

C’est sûrement dans cette vague de peuplement qu’au lieu de s’établir dans la région de Québec tout de suite comme son frère Gabriel et sa sœur Renée, Sébastien va passer plusieurs années dans la région de Ville-Marie où il est cité pour la première fois, «à Montréal», tout comme un certain François Hervet[3], le 21 janvier 1673 «à l’occasion du mariage» d’un soldat de la compagnie de Laubia du régiment de Carignan débarqué au pays en 1665[4]. «Pierre Verrier» dit la Saulaye, maintenant maître charpentier, épouse «Roberte Gadois»[5].

Charles Aubert sieur de La Chesnaye, bien qu’habitant à La Rochelle durant quelques années (1672-1678), se réserva alors un vaste domaine seigneurial de trois quarts de lieue de front[6] qui consiste à une large pointe de terre en bordure de la rivière des Prairies, entre la terre qui sera attribuée à l’ouest à son procureur et fermier, Pierre Perrotin (1650-1704), la pointe de l’île Jésus, et l’embouchure de la rivière L’Assomption.  Ce domaine était alors situé au centre de sa seigneurie[7] qui, aujourd’hui, correspondrait au territoire situé entre Terrebonne et L’Assomption.  Aubert, par l’entremise de Charles Bazire (1641-1677), son associé, qu’il charge de gérer ses affaires pendant son absence en France, ne tarde pas à implanter des colons, mais avant de ce faire il y envoie quelques hommes pour préparer le terrain.  Les gens d’Aubert et de Bazire semblent pour la plupart être des engagés dans le domaine des fourrures.  En autres[8], Perrotin était coureur des bois avant de devenir fermier du domaine seigneurial et retournera à ce métier pour François Hazeur (1638-1708) vers 1685[9] ; il décédera plus tard lors d’une expédition de traite au pays des Outaouais.

Charles Aubert de La Chesnaye (1632-1702)

Charles Aubert de La Chesnaye, est fils de Jacques Aubert, conseiller du roi, intendant et contrôleur général des fortifications d’Amiens.  Il arrive en Nouvelle-France en 1655 pour représenter un groupe de marchands de Rouen.  Son rôle dans l’essor économique de la Nouvelle-France est important (commerce de fourrures et autres, finance, agriculture, pêche).  Les commerçants de La Rochelle firent au Canada des affaires d’or, tellement que dans les années qui précèdent 1670, lorsque la colonie manqua de crédit, ce furent Charles Aubert de la Chesnaye, Charles Bazire et trois autres, tous intéressés dans le commerce, qui avancèrent les fonds[1].  Aubert de la Chesnaye possédera de nombreuses seigneuries.  Ses principaux fiefs seront La Chesnaye, Rivière-du-Loup, Kamouraska, et certaines seigneuries des environs de Québec.  D’abord marchand à Québec, il est négociant de fourrures à Tadoussac de 1663 à 1666.  Puis il devint commis général de la Compagnie des Indes occidentales en 1666 et cela jusqu’en 1669.  Il possède une exploitation forestière au lac Saint-Jean, puis une briqueterie.  Il s’installe à La Rochelle en 1672, ce qui lui permet d’établir des relations commerciales avec plusieurs pays européens et de devenir propriétaire de plusieurs navires.  Charles Bazire son associé et ami gère ses affaires en Nouvelle-France pendant cette période.  Dès 1675, il détient le monopole des fourrures de castor, qui constituent la première richesse de la Nouvelle-France.  Il crée la Compagnie du Nord ou Compagnie de la Baie d’Hudson en 1682 dont il est le principal actionnaire.  Membre du Conseil souverain, il est devenu le principal et plus riche homme d’affaires et le plus grand propriétaire foncier de la colonie.  De bourgeois, il devient gentilhomme.  Son apport considérable à l’essor économique de la Nouvelle-France lui vaut d’être anobli par le roi Louis XIV qui lui accorde ses lettres de noblesse en 1693.  

[1] BAnQ., Jugements et Délibéraltions du Conseil Souverain, 1, page 636.

Les premiers à s’établir dans la seigneurie de «La Chesnaye», dont Sébastien, arrivent à l’été 1672.  La première mention d’un colon dans la seigneurie apparaît aux registres de Ville-Marie à la paroisse Notre Dame, le 31 octobre 1672, lors du baptême de Jean Minson, fils de Nicolas Minson dit Lafleur (c.1639-post.1686) et de Gilette Mignolet (c.1646-post.1686)[10].  Ces derniers se disent résidants de «La Chesnaye», tout comme Jean Préjean[11] et Jeanne Chartier (1636-1695) épouse de Tec Cornelius Aubrenan (1638-1687).  Bien qu’à cette date, le sieur Bazire n’ait fait aucune concession dans la seigneurie, il semble bien que quelques colons s’y soient déjà établis au cours de l’été 1672.  Ont-ils obtenu un billet de concession? Quoi qu’il en soit, ils se feront confirmer une censive sous peu.

L’agent de Charles Aubert, seigneur de La Chesnaye, Pierre Perrotin concède les douze premières terres en février 1673 à l’ouest des terres réservées pour le domaine seigneurial.  Sébastien Hervet y habite déjà.  «… Ce dernier vend au Sieur Sébastien Herve aussy demeurant aud. lieu…» [12]. Sébastien devait faire partie de la poignée d’hommes arrivée avec Perrotin à l’été 1672, celui auquel Bazire avait confié la tâche d’ouvrir la seigneurie.  Il est permis de croire que Sébastien était proche d’Aubert et surtout de Bazire comme nous le verrons. 

Le caractère du pays

Les colons français s’adaptent de mille manières à la vie en Nouvelle-France et Sébastien n’y fera pas exception.  Ce faisant, il découvre de nouvelles libertés et une nouvelle identité.  Les colons comme lui mènent une vie différente de celle de leurs ancêtres français.  Ils affrontent des hivers plus froids, mais ils mangent mieux, subissent moins d’ingérence de la part de leurs seigneurs et peuvent se permettre davantage de produits de luxe.  D’ailleurs, Sébastien ne percevra jamais Charles Aubert de La Chesnaye comme un maître et s’en fera avec le temps un ami.  Les visiteurs de passage venus de France ou d’ailleurs remarqueront les changements culturels découlant de ces réalités.  Sébastien notera que les Français nés ici se distingueront rapidement des paysans en France par leur façon de s’exprimer et de se vêtir.  Sébastien n’échappera pas à ces changements.  Aux yeux des autorités d’outre-mer et des maîtres de la Nouvelle-France, les gens d’ici venus de France ou nés au pays ont la réputation d’être indépendants.

Lorsque, le 6 février 1673, Pierre Perrotin concède les douze premières terres de la «coste de La Chesnaye»[13], le long de la rivière des Mille-Îles, c’est trois arpents de front sur vingt de profond chacun qu’il concède pour lui-même d’abord, puis à François Cotineau dit Lorier (1645-1722), Guillaume Vanier dit Lafontaine (1645-1687), Jean Garenne, La Garenne[14], Jean Guilbert dit Laframboise (1647-1727), Jacques Ferron, Julien Garnier (1655-1702), Nicolas Minson dit Lafleur, un dénommé Lefebvre et deux autres dont les noms sont illisibles dans l’acte du notaire[15], assurément Jean Duval (1641-post.1692) que nous découvrirons en juin et probablement Cornelius Aubrenan qui y était déjà en 1672.

La seigneurie de La Chesnaye en 1673

Le 11 juin 1673, Sébastien Hervet s’établit donc sur une terre de soixante arpents en superficie[16] que lui vend, au prix de trois cents livres, Jean Daluzeau dit Lagarenne (1638 — )[17].  Le contrat est passé devant Thomas Frérot de Lachenest (1641-1706), notaire.  Ce Daluzeau est un ancien soldat de la garnison de Montréal; il était au pays bien avant l’arrivée du Régiment de Carignan-Salières en 1665.  Lagarenne est devenu un propriétaire terrien qui revend sa terre pour en tirer profit avant de repartir définitivement pour la France[18].  La terre de Sébastien de la côte[19] de «La Chesnaye» (aujourd’hui le chemin Saint-Charles) comprend une cabane, un hangar et cinq arpents désertés face à la «rivière Jesu quy conduit a la riviere des prairies aux milles isles»[20]Sébastien promet de débourser les trois cents livres dans les mains de son créancier en partance pour la France, par l’intermédiaire du financier Charles Bazire que nous reverrons plus tard.  La concession de Sébastien est bordée par celle de Jean Guilbert dit Laframboise et de l’autre côté, celle de Jean Duval, l’un des censitaires dont le nom était illisible sur l’acte de concession du notaire en février dernier.  Duval est un frère d’armes de Pierre Verrier dit la Saulaye pour lequel Sébastien fut témoin de son mariage en janvier dernier[21].

L’année suivante, en plein hiver, le vendredi 9 février 1674, Sébastien est à la Pointe aux Trembles.  Depuis le début des années 1660, les Sulpiciens, seigneurs de l’île de Montréal, encourageaient le peuplement de cette partie de l’île et de nombreuses concessions y sont accordées depuis longtemps.  Etienne Benoist dit Lajeunesse (1637-1691) et Nicole Chandoiseau (1648-1711) qui habite la Pointe aux Trembles y font baptiser leur enfant Marie.  Benoist avait été engagé à Dieppe en 1665 par les Sulpiciens et était devenu l’un de leur domestique à Ville-Marie en 1666 et 1667.  Estienne Benoist n’eut donc aucune difficulté à obtenir une concession des Sulpiciens.  Le couple s’était marié quelques jours après l’arrivée de Nicole Chandoiseau, cette fille du Roy, débarquée à Québec vers le 29 août 1670 du navire Saint-Jean-Baptiste de Dieppe[22]Sébastien est choisi comme parrain de la nouvelle née[23].  Comment Sébastien connaît-il le couple? Bien que le curé-missionnaire de Ville-Marie Gilles Pérot (1625-1680) inscrit à son registre que Sébastien est résident de «La Chesnaye», on sait qu’il n’y avait qu’une cabane sur sa concession au début de l’été précédent; Sébastien a-t-il eu le temps de se construire une habitation au cours de l’été ou peut-être que ce dernier réside pour l’hiver à la Pointe aux Trembles dans la famille d’Etienne Benoist.  Assiste également au baptême le père de la marraine, André Charly dit Saint-Ange (1631-1688), un soldat de la garnison de Montréal arrivé au pays depuis 1651. 

La filleule de Sébastien périt accidentellement avec sa sœur dans l’incendie de la maison de son père[24] au mois de septembre de la même année alors que le père sera enlevé puis tué en 1690[25] dans une attaque du chef Chaudière Noire et de cent cinquante de ses guerriers Onontagués[26], l’une des tribus de la confédération iroquoise des Cinq-Nations[27].

Un mois plus tôt, Sébastien était de passage à Boucherville au domicile du notaire Thomas Frérot de Lachenest.  Il tentait de revendre sa terre pour deux cent quatre-vingts livres, le 24 août 1674, à Jean Levert (1633-post.1691), mais ce dernier ne donne pas suite immédiatement[28].  Levert et son épouse s’y établiront l’année suivante comme nous le verrons.  C’est également à la fin de l’été que Sébastien perd son voisin vers l’est Jean Duval; ce dernier qui est un ancien soldat de monsieur de Saint-Ours au régiment de Carignan, vient d’obtenir un contrat pour la construction d’une église dans la nouvelle seigneurie sur la Rivière Saint-Louis (aujourd’hui rivière Richelieu) que s’est vu accorder en 1672 son capitaine Pierre de Saint-Ours[29]Sébastien perdra son voisin de vue pour une courte période, car ce dernier reviendra à la «coste de La Chesnaye» durant quelques années une fois l’ouvrage terminé.  

Pour autant que Sébastien vit encore sur sa terre initialement concédée, en 1675 il a de nouveaux voisins.  Ceux-ci s’établissent sur la terre qui avait été concédée à Jean Duval.  Ces nouveaux censitaires sont en provenance de Québec.  Mathieu Hubou dit Deslongchamps (1626-1678) s’installe avec sa famille; son épouse, Suzanne Betfer (1626-1694) et certains de leurs enfants qui sont avec eux, dont Charles qui a onze ans, Mathieu le fils qui a vingt-deux ans et Jean Baptiste qui en a vingt.  Comme la plupart des censives ont été et continueront d’être concédées à des célibataires pour la plupart, la jeune histoire de la seigneurie est faite de ventes et d’échanges de terres.  Jean Duval, revenu de la seigneurie de Saint-Ours où il était parti construire une église, restera encore un certain temps dans la seigneurie, vivant de son métier de charpentier pour le seigneur, sans y avoir de concession pour autant. 

C’est justement entre 1673 et 1676, que Charles Aubert sieur de La Chesnaye fait construire sur son domaine[30] un petit manoir seigneurial dans lequel prend place la première chapelle, un moulin à vent banal[31] et quelques bâtiments de ferme à la jonction de la rivière La Chesnaye (Mille-Îles) et des Prairies. Le moulin est d’une grande utilité pour les colons et constitue le pôle d’attraction social et économique de la seigneurie.  La main-d’œuvre ne manque pas, car outre les journaliers de Perrotin puisés à même les engagés et voyageurs de Bazire pour les Pays-d’en-Haut qui sont de passage, la seigneurie compte déjà un maçon, un menuisier et trois charpentiers.

C’est en 1675 également que Jean Levert s’établit sur la concession acquise de Sébastien en 1674 et pour laquelle il n’avait pas encore versé paiement.  Le couple est bel et bien installé dans la seigneurie, car la femme de Levert accouche en décembre et que lors du baptême, le curé prend bien soin de noter que les parents sont de la Chenaye[32].  L’année suivante, Levert obtiendra une deuxième concession plus à l’ouest dans la seigneurie, mais de toute évidence puisqu’épargné lors du massacre de 1689, il continuera de vivre avec sa famille sur la terre vendue par Sébastien près du domaine seigneurial.

Sébastien demeura dans la seigneurie de «La Chesnaye» durant un peu plus de sept ans.  Si Levert et sa famille ont maintenant pris possession de la censive que Sébastien avait acquise en juin 1673, où ce dernier habitera-t-il dorénavant

Le Conseil souverain vient tout juste de décréter le 22 avril 1675 qu’il est interdit de faire la traite des fourrures à toutes les personnes qui ne tiennent pas «feu et lieu»; de plus, le gouverneur ne délivre plus de permis de chasse à ceux qui n’ont pas d’habitation.  Si Sébastien se consacre au commerce de la fourrure comme il est permis de le croire, il se doit de posséder une censive.  En juin 1676 il est déjà établi sur une autre concession dans la seigneurie[33].  C’est le 4 août 1676 qu’il obtient officiellement les titres de cette nouvelle concession[34].  Cette fois-ci, la censive est localisée aux confins ouest de la seigneurie, à plus de deux kilomètres et demi du domaine seigneurial[35]

Bien que certains de ceux qui s’étaient vus octroyer une concession en 1673 ne respectèrent pas les conditions de colonisation, si bien qu’ils perdirent leurs censives, l’excellente qualité de ces terres et la jonction des rivières, où passent engagés et coureurs des bois arrivant des Pays-d’en-Haut par l’Outaouais chargés de fourrures et voulant éviter le Sault Saint-Louis[36] et son long portage, en font un lieu recherché, si bien que les deux tiers des terres de la seigneurie sont déjà concédés en 1676.  De fait, depuis 1672, cinq hommes ont quitté la seigneurie; Jean Préjean pour lequel aucun acte de concession n’existe; Jean Daluzeau dit Lagarenne, qui a vendu sa concession à Sébastien (1673)[37]; Jacques Ferron a aussi vendu sa concession en 1675.  Deux autres individus ayant demeurés dans la seigneurie depuis 1672, pour lequel aucun acte de concession n’existe, Jacques Le Masson et un dénommé Lanoix.  Ces derniers se sont probablement enfuis au Pays-d’en-Haut, car ils étaient poursuivis par le bailli de Montréal[38].  

La seigneurie de La Chesnaye en 1676

Au début de l’été 1676, Sébastien n’est tout de même pas seul dans la seigneurie puisque de nouveaux colons se sont ajoutés depuis son ouverture, mais ils sont pour la plupart célibataires[39].  La petite population répartie sur près de quatre kilomètres se compose de cinquante-trois personnes, vingt-quatre hommes, dont dix-sept sont célibataires, seulement sept femmes qui sont toutes mariées et vingt-deux enfants[40].  Deux des célibataires ne sont pas censitaires, ils habitent chez le fermier Perrotin. 

Voici ce à quoi ressemblait la distribution des censives le 30 juin 1676 en commençant à l’ouest vers le domaine seigneurial à l’extrémité est de la seigneurie :   

28) Jean Baptiste Fonteneau dit Saint-Jean, 29 ans

Il s’agit d’une deuxième censive pour Jean-Baptiste Fonteneau dit Saint-Jean qui au fil des ans accumulera les terres.  Il vit plus à l’est voisin de Sébastien Hervet.

 

27) Julien Garnier, 27 ans

Il s’agit d’une deuxième censive pour Julien Garnier.  Lui et sa famille vivent voisins de son beau-père plus à l’est. 

 

26) Jean Levert, 43 ans

Il s’agit ici de la deuxième censive de Jean Levert.  Lui et sa famille vivent sur la terre plus à l’est que lui avait vendu Sébastien Hervet en 1674.  

 

25) François Le Boulanger dit Lafortune, 40 ans

Célibataire, il était auparavant domestique des Sulpiciens de Montréal tout comme Jean Duval. Il décédera dans la seigneurie en 1698; il était demeuré célibataire.


24) Jacques Chevalier, 35 ans

Maintenant charpentier, cet ancien soldat du régiment Carignan arrivé en 1665 s’établit en 1675 sur la terre concédée à Jean Muloin.  Le Plan terrier de la seigneurie de La Chesnaye en 1676, illustrant la localisation des terres des premiers colons établit par l’historien Claude Martel ne supporte pas l’affirmation que Chevalier se serait établi sur l’une des terres de Jean Muloin.  Cependant, il est possible que ce dernier s’y soit installé préalablement et qu’il ait fait comme de nombreux autres célibataires, s’établir plus à l’ouest plus tard dans la seigneurie où il est situé sur le Plan terrier.  Il déménagera en 1680 sur la terre de sa nouvelle épouse à Rivière-des-Prairies. 

23) François Resout dit Le Masson, 25 ans

Célibataire, il exerce le métier de maçon; il est inscrit à l’Aveu et dénombrement de 1676 sous le nom de François Le Masson dit Regnault et le sera sous celui de François Resout en 1681.  Il est surtout connu par son surnom, Le Masson. Il décédera dans la seigneurie en 1714.

 

21 et 22) Nicolas Minson dit Lafleur, 40 ans

Il vit avec son épouse, Gilette Mignolet, trente ans, et leurs deux enfants.  Il possède deux censives voisines l’une de l’autre. Nicolas Minson sera avec sa femme Gilette et leurs enfants Anne, 12 ans, Jean Baptiste, 12 ans, Marguerite, 15 ans et Marie Thérèse, 10 ans, toutes victimes du massacre de La Chesnaye en 1689. Jean Minson, 17 ans, quant à lui avait été tué au mois d’août 1689 dans une attaque précédente des Agniers.

 

20) Jean Baptiste Fonteneau dit Saint-Jean, 29 ans

Menuisier de Québec, il continue à exercer ce métier dans la seigneurie en plus de cultiver sa terre.  En 1681, il épousera Madeleine Martin, la veuve de Nicolas Forget, laquelle décède en 1688.  Jean Baptiste Fonteneau sera l’une des victimes du massacre de La Chesnaye en 1689.

 

19) Sébastien Hervet, 34 ans

Sébastien Hervet est inscrit Hervé dans l’Aveu et dénombrement de la seigneurie.  Alors qu’il a trente-quatre ans, il est déclaré en avoir vingt-huit.  Il possède maintenant une censive située beaucoup plus à l’ouest de la première.  Je n’ai pu retrouver l’acte de concession de cette dernière, mais le Plan terrier de l’historien Claude Martel le situe bien à cet endroit en 1676.  Comme tous les premiers arrivants, il avait acquis une concession près du domaine seigneurial en 1673, car le procureur Perrotin avait concédé les censives l’une à la suite de l’autre en débutant par la sienne voisine du domaine seigneurial en allant vers l’ouest.  On sait que Sébastien demeure déjà à Ville-Marie en 1681.  Il se départira de cette deuxième concession à la fin de 1682 en la vendant à son voisin Jean-Baptiste Fonteneau.   Sur le plan terrier de la côte de La Chesnaye de 1676, superposé sur une carte d’aujourd’hui, la terre de Sébastien, marquée d’une flèche, est la deuxième à l’est de ce qui est connu aujourd’hui comme la Montée Dumais.  Elle s’étend presque jusqu’à l’autoroute 640.

 

18) Bernard Mercier dit Lafontaine, 31 ans

Il s’agit ici de la deuxième censive concédée à Lafontaine.  Il semble qu’avec le temps les célibataires se dépossèdent de leur terre située plus près du domaine seigneurial au profit des familles.  Ce fut le cas de Sébastien en 1674 et ce sera le cas de Lafontaine également puisqu’il sera le voisin de Sébastien lors de la vente de sa concession. 

 

17) Jean Guilbert dit Laframboise, 29 ans

Il s’agit de la deuxième censive de Jean Guilbert dit Laframboise.

 

16) François Ethier, 23 ans

Célibataire, il est le frère de Léonard, lequel possède déjà deux terres dans la seigneurie. Il est permis de croire que François est établi sur l’une d’elles, celle voisine de Jean Muloin.  François Estier épousera en 1686 Jeanne Pilet. François et deux de ses enfants, Marie Françoise, 2 ans et Jacques, 6 mois seront des victimes du massacre de La Chesnaye en 1689.

 

15) Jean Muloin, 35 ans

Célibataire, il épousera en 1679 Marguerite Forget, fille de Nicolas.  Il s’est vu concéder deux censives voisines l’une de l’autre. Jean Muloin sera l’une des victimes du massacre de La Chesnaye en 1689.

 

14) Nicolas Forget dit Despatie, 56 ans

Il vit avec son épouse, Madeleine Martin, trente-cinq ans et leurs six enfants.  Le couple a successivement habité Québec, Montréal, puis Contrecœur, avant de s’établir dans la seigneurie en 1674.  Nicolas meurt en 1680.

 

13) Julien Garnier, 27 ans

Il vit avec son épouse, Geneviève Hubou dit Deslongchamps, vingt ans, fille de Mathieu Hubou dit Deslongchamps.  Le couple s’était marié à la Pointe aux Trembles le 29 octobre 1675, soit à l’église la plus proche de la seigneurie à ce moment-là. Julien, sa femme Geneviève et leurs enfants Charles, 5 ans, Jeanne, 6 ans, Marguerite, 1 an, Michel, 4 ans et Pierre Garnier, 10 ans, seront des victimes du massacre de La Chesnaye en 1689.

 

12) Tec Cornelius Aubrenan, 44 ans

D’origine irlandaise, Tec Cornelius vit avec son épouse, Jeanne Chartier, quarante-quatre ans et leurs quatre enfants.  Ils figurent parmi les premiers habitants de la seigneurie.  Au recensement de 1681, Tec figurera sous le nom de Jacques Tecaudry; au fil des ans, ce patronyme se transformera en Aubry.  La famille quitte la seigneurie en 1683 pour la Pointe aux Trembles.

 

11) Henri Derby dit La Ronce

Célibataire, il vivait sur une concession dans la seigneurie de Sainte-Anne (La Pérade) depuis 1668; cet ancien soldat de monsieur de Saint-Ours impliqué dans une affaire de traite d’eau-de-vie avec les Indiens aux Trois-Rivières quelques années plus tôt, achète la terre qui avait été concédée à Jacques Ferron, mais il décède, possiblement en 1677, sans laisser d’héritiers.

 

10) Jean Guilbert dit Laframboise, 29 ans

Célibataire, ce voisin demeurant sur la terre voisine à l’ouest de celle de Sébastien en 1673 quittera la seigneurie en 1684 pour Montréal.

 

9) Jean Levert, 43 ans

Charpentier, il vit dans la seigneurie avec son épouse, Françoise De Lastre, vingt-trois ans et leurs trois enfants.  Il s’approprie en 1674 une terre initialement concédée à Jean Daluzeau dit Lagarenne qu’il acquit de Sébastien Hervet qui lui l’avait achetée en juin 1673 de Lagarenne.  Le couple ne s’installera dans la seigneurie qu’en 1675. 

 

8) Mathieu Hubou dit Deslongchamps, 50 ans

Deslongchamps est installé dans la seigneurie depuis 1675 avec son épouse, Suzanne Betfer, cinquante ans et certains de leurs enfants qui sont avec eux dont Charles qui a douze ans, Mathieu le fils qui a vingt-trois ans et Jean Baptiste qui en a vingt et un.  Il a acquis la censive initialement concédée à Jean Duval, le voisin vers l’est de Sébastien en 1673.  Suzanne Betfer et son fils Charles seront parmi les victimes du massacre de La Chesnaye en 1689.

 

7) Bernard Mercier dit Lafontaine, 31 ans

Ancien soldat de la compagnie de La Tour au régiment Carignan, arrivé en 1665 il avait quitté Québec le 23 juillet 1665 pour le Richelieu, il participa à la construction du fort Saint-Louis (Chambly) et resta cantonné jusqu’à son départ en 1668.  Il décède en 1703, toujours célibataire.

 

6) Léonard Ethier, 35 ans

Savetier de son métier, il vit dans la seigneurie avec son épouse, Elisabeth Godillon (1649-1715), vingt-cinq ans, et leurs quatre enfants.  Tout comme Sébastien, Elisabeth est native de Blois ce qui suppose qu’ils se connaissaient. Léonard sera l’une des victimes du massacre de La Chesnaye en 1689.

 

5) Guillaume Leclerc, 31 ans

Domestique en 1666.  Ce célibataire épousera le 21 novembre 1676, Marie Thérèse Hunault dit Deschamps, treize ans, à Montréal.  Sébastien sera témoin de la signature du contrat de leur mariage. Marie Thérèse Hunault dit Deschamps sera tuée au mois d’août 1689 dans une attaque des Agniers avant le massacre de novembre.

 

4) François Cotineau dit Lorier, 35 ans

Il épousera Madeleine Milot, quinze ans, à Montréal en 1677.  François s’établit à Lachenaie en 1676.  Il est l’ancêtre de Wilfrid Laurier, premier ministre du Canada. Deux de leurs enfants Angélique, 5 mois et Louis, 2 ans seront des victimes du massacre de La Chesnaye en 1689.

 

3) Jean Duval, 35 ans

Ancien soldat de la compagnie de Saint-Ours, tout comme son frère d’arme Pierre Verrier dit la Saulaye pour lequel Sébastien fut témoin à son mariage en 1673, il se fit domestique charpentier des Sulpiciens à Ville-Marie après avoir quitté la vie militaire tout comme Étienne Benoit, le père de l’enfant dont Sébastien est le parrain.  Ce célibataire charpentier est l’un de ceux qui avaient obtenu une concession dans la seigneurie à l’origine et qu’il a vendu en 1675 à Mathieu Hubou.  Bien qu’il ne possède plus de censive, il demeure toujours dans la seigneurie au moment de l’Aveu et dénombrement en juin 1676 affairé à la construction du manoir seigneurial et de ses dépendances.   Il quittera la seigneurie peu après pour partir vivre dans la seigneurie de Saint-Ours.   

 

2) Jacques Dehay dit Linot, 31 ans

Domestique chez Pierre Perrotin. Il ne possède pas de terre et sera, en 1683, banni à perpétuité du gouvernement de Montréal pour une affaire criminelle.

 

1) Pierre Perrotin, 26 ans

Célibataire, il est le procureur du seigneur; il agit à titre de fermier du domaine seigneurial; il possède d’ailleurs la terre voisine du domaine.  Coureur des bois et engagé, il deviendra « engageur » pour les Pays-d’en-Haut en 1694.  Il décédera d’ailleurs lors d’une expédition au pays des Outaouais en 1704.

Sébastien toujours à La Chesnaye à l’été 1676

Sébastien sert encore une fois de témoin.  On sait qu’il habite toujours la seigneurie de «La Chesnaye» le 9 août 1676, comme en fait foi le contrat de mariage signé devant le notaire Bénigne Basset dit Deslauriers entre Guillaume Leclerc (1645-1723) et Marie Thérèse Hunault dit Deschamps (1663-1689)[41] :

«Pardevant Bénigne Basset nottaire royal, de Ile de Montreal en la Nouvelle France et tesmoings soubzsignes, furent presens,... de la part dudit Guillaume Leclerc, le sieur Pierre Le Perrotin, Sebastien Hervet, François Cottineau, demeurans en ladite seignneurie de Laschesnaye; et de la part de ladite Marie Therese Hunaut, ledit Toussaint Hunaut son pere, Thomas Chartan, son beau frere, maitre Jean Baptiste Migeon de Branssat, licentie es loys et advocat en parlement…[i]».

Marie Thérèse Hunault est une femme qui deviendra tristement célèbre :

«Dès le début des conflits, le gouverneur et l’intendant ordonnent vainement aux habitants de ne pas s’éloigner seuls de leurs habitations et, surtout, de ne pas le faire sans armes. Certains l’apprennent à leurs dépens! Marie Thérèse Hunault est tuée cruellement dans sa grange en août 1689 par les Agniers[42].  La mort de Marie Thérèse Hunault survient seulement une douzaine de jours après que le village de Lachine ait été cruellement attaqué et brûlé en 1689 et où 97 colons furent tués».[43]

On perd la trace de Sébastien

Sébastien n’a que trente-quatre ans quand on perd sa trace à l’automne de cette même année, car il n’assiste pas au mariage de ses voisins et amis de «La Chesnaye» Guillaume Leclerc et Marie Thérèse Hunault qui est célébré le 24 novembre 1676.  Où est-il

Au cours des années 1670, nombreux sont les accrochages entre Iroquois et coureurs des bois. Le commerce des fourrures en est la principale cause.  La seigneurie de «La Chesnaye» est un lieu clef par son emplacement géographique. La seigneurie, faut-il le rappeler, est avant tout un poste de traite stratégique pour son seigneur. Elle est située en profondeur des terres et se trouve sur la principale voie de commerce des Amérindiens, entre le fleuve et les Pays-d’en-Haut.  L’histoire de la seigneurie est enracinée dans la traite des fourrures et Charles Aubert de La Chesnaye[44] est engagé dans cette activité.  Sébastien y est-il mêlé et a-t-il remonté l’Outaouais? On n’en aura aucune nouvelle durant plus de trois ans. 

Puis le «deuxième octobre» 1679, la prévôté de Québec rend une sentence dans l’affaire de Charles de Monseignat (1652-1718) commis de René Robert Cavelier sieur de La Salle (1633-1687), écuyer et gouverneur du fort Frontenac.  La carrière de Charles de Monseignat continuait donc de se dérouler dans le perpétuel climat de chicaneries qui la caractérisa.  Lui qui était arrivé en Nouvelle-France avec La Salle à titre de «commis» de l’explorateur avait alors comme tâche principale de faire patienter les créanciers de ce dernier[45].  Encore une fois, c’est ce que De Monseignat avait tenté de faire avant que la prévôté de Québec ne le déboute en faveur d’un certain nombre de créanciers, dont Jean Soulard (1643-1710), maître Jean Baptiste Migeon (1636-1693) et François Hazeur, tant en son nom que pour Sébastien Hervet.  Les biens et deniers de Cavelier de La Salle, protégé du gouverneur Frontenac, furent saisis par le greffier de la prévôté, mais comme il l’avait fait à maintes reprises Charles de Monseignat se présenta en cour pour obtenir un sursis d’exécution de saisie[46].  L’affaire sera entendue dans les mois qui suivent.  Sébastien a donc refait surface et cette affaire reliée au commerce de peaux et de fourrures au fort Frontenac nous amène à croire que Sébastien était sans doute passé à Cataracoui (aujourd’hui la ville de Kingston en Ontario, là où était situé le fort Frontenac)[47]. 

Sébastien en justice aux Trois-Rivières

Le 8 janvier 1680, Sébastien se présente sur le parquet de la juridiction royale aux Trois-Rivières alors que le fleuve est gelé.  Dans ces conditions, comment et quand s’est-il rendu aux Trois Rivières, un autre poste de traite stratégique? Qu’y faisait-il? Autant de questions sans réponses.  On n’en sait rien.  Cette juridiction royale ne couvre pas le territoire de la seigneurie de «La Chesnaye».  Pourtant, les parties en présence devant le juge résident d’une part à Ville-Marie et d’autre part en la seigneurie de«La Chesnaye»; il y a de ces secrets du passé que l’histoire ne nous révélera jamais.    

Quoi qu’il en soit, Sébastien y est condamné à payer à maître Jean Baptiste Migeon, sieur de Branssat[48] une dette qu’il avait précédemment contractée auprès de lui.  Branssat y est représenté par Joseph Petit, Sieur de Bruno, son procureur.  Sébastien, «habitant de La Chesnaye », doit payer « la somme de 57 livres et 10 sols, y compris 7 livres et 10 sols que le sieur Boette (Bouet) a transporté audit demandeur, et à la somme de 13 livres de frais légitimes, lequel défendeur à fait défaut, ordonné que, de par son défaut, ledit défendeur paye la somme de 57 livres et 10 sols, avec les intérêts, et 16 livres pour frais légitimes au demandeur, plus les dépens taxés à 10 sols.»[49] 

Il est donc clair que Sébastien réside toujours sur sa terre de la seigneurie de «La Chesnaye» en janvier 1680 puisqu’aux fins de justice il est reconnu comme y habitant.  En revanche, pour Sébastien qui avait disparu depuis trois ans, «résider» semble un bien grand mot.

On a peut-être une réponse du pourquoi de la présence de Sébastien à cet endroit considérant que Jean Baptiste Migeon, Sieur de Branssat, est en autres le juge civil et criminel au bailliage de Ville-Marie pour l’île de Montréal.  Peut-être aura-t-il trouvé plus convenant d’aller gagner sa cause aux Trois Rivières devant un collègue.  Migeon est aussi marchand; il s’occupe de traite des fourrures et fait de nombreuses transactions immobilières[50]

On se souviendra que Sébastien connaissait Migeon puisqu’ils avaient été tous deux témoins lors de la signature du contrat de mariage signé entre Guillaume Leclerc et Marie Thérèse Hunault dit Deschamps en 1676.  De plus, Migeon était aussi créancier de Cavelier de La Salle dans l’affaire de Charles de Monseignat au mois d’octobre précédent.  De quelle nature était la dette de Sébastien envers Branssat? Le registre des audiences de la juridiction royale des Trois-Rivières n’en donne pas le détail.  Était-ce relié à la traite des pelleteries? On ne le sait pas, mais les indices reliant Sébastien aux gens de la fourrure et à son commerce s’accumulent.  D’abord son beau-frère Hypolite Thibierge qui semble avoir vécu uniquement du tannage de peaux issues de la traite des fourrures; puis sa relation avec son seigneur Charles Aubert de La Chesnaye qui est négociant de fourrures et commis général de la Compagnie des Indes occidentales (1666-1669) laquelle détenait le monopole des fourrures de castor et d’orignal en Nouvelle-Francealors que Sébastien réside dans sa seigneurie, un poste de traite stratégique; ensuite sa proximité avec Charles Bazire qui succéda en 1669 à Aubert comme l’agent de la Compagnie des Indes occidentales (1670-1674) et qui, comme on le verra, ira jusqu’à coucher Sébastien sur son testament; et maintenant ce Branssat, marchand de fourrures...

Dans un peu moins de quarante ans, l’un des fils de Sébastien à naître prendra le chemin du Pays-d’en-Haut comme voyageurs (coureur des bois).  Tentera-t-il d’imiter son père pour y faire un coup d’argent?

En plein hiver, Sébastien ne retourna probablement pas à sa concession de la seigneurie de «La Chesnaye», sachant que des changements s’y trament comme nous le verrons.  Il prendra plutôt la direction de Ville-Marie où on le retrouvera dans moins de dix jours. 

Le mois suivant, l’intendant Jacques Duchesneau de la Doussinière et d’Ambault annonce sa décision dans l’affaire de Charles de Monseignat le 19 février.  Il se rend aux arguments soumis par la douzaine de notables dont Jean Soulard, que nous reverrons plus tard[51], François Hazeur toujours, tant en son nom que pour ceux d’un certain Pougnet Grignon et de Sébastien Hervet.  L’appel en sursis à faire droit logé par De Monseignat quatre mois plus tôt est en revanche maintenu jusqu’à l’arrivée des navires, car l’explorateur La Salle, qui est derrière toute cette affaire, en est à son deuxième voyage de découverte des Grands Lacs depuis août 1679; il se rendra jusqu’à la rivière Illinois l’affluent principal du fleuve Mississippi et ne reviendra pas avant mai 1680.  Duchesneau dans sa décision «sursis à faire droit sur les prétentions dudit Soulard, les choses demeurant en état à son égard», mais, lui octroi la somme de trois cents livres sur les deniers qui sont en mains du greffier de la prévôté appartenant au sieur de La Salle et autorise les autres créanciers dont Sébastien de se rembourser à même les effets saisis.  Comme il va à l’encontre des intérêts d’un protégé du gouverneur, il va de soi que l’intendant se laisse une porte de sortie à savoir qu’advenant que lors du jugement final il en soit décidé autrement, Soulard et Sébastien et les autres créanciers devront rapporter les biens et deniers.  Il semble bien que Cavellier de La Salle ne pousse pas plus loin cette affaire, car le Conseil souverain ne rendra pas de décision dans cette affaire par la suite.  À l’époque des faits, Soulard est toujours arquebusier, orfèvre et armurier de Québec; il n’est pas encore devenu le grand marchand qu’il sera[52]

Changement de garde à la seigneurie de La Chesnaye

Son seigneur de «La Chesnaye» et son entourage, les connaissances et amis de Sébastien, s’apprêtent à changer.  Sachant ce qui s’en vient, Pierre Perrotin, le fermier et procureur de la seigneurie acquiert une maison sur la rue Saint-Paul à Ville-Marie en janvier[53].  Puis le 13 août 1680,

 

«/... /Le Sieur de La Chesnaye cède, vend et transporte au sieur Le Gardeur, acquéreur, le fief, justice, terre et seigneurie de La Chesnaye/... /Le sieur de La Chesnaye vend en outre au sieur Le Gardeur tous les meubles, vaisselles, batteries, fusils, bestiaux de toutes espèces, harnois, ustensiles de ménage, qui sont à présent dans ladite seigneurie de La Chesnaye, sans qu’ils soient ici déclarés par le menu, le sieur vendeur consentant à ce que le sieur acquéreur s’en fasse rendre compte par le fermier de la seigneurie, en vertu de l’inventaire qui en été fait les 20 et 24 septembre 1676. La vente est faite aux conditions suivantes : l. La foi et hommage à sa Majesté/... /moyennant la somme de 20000 livres payables par le sieur Le Gardeur au sieur de La Chesnaye en sa maison de Québec. Le sieur de La Chesnaye fera entrer le sieur de Repentigny en jouissance au 1er octobre prochain; s’il arrivait qu’il en fût empêché par le sieur Perrotin, fermier de la seigneurie, dont le bail expire seulement le 1er novembre 1681, suivant le contrat passé devant Becquet, le sieur Le Gardeur sera tenu de se contenter de revenu de la ferme/... /»[54].

 

Bien que l’on sache que Sébastien a vécu dans la seigneurie de «La Chesnaye» un certain temps entre juin 1673 et la fin de l’été 1676, on ne peut présumer de rien par la suite, jusqu’en 1681, année où il est recensé à Ville-Marie.  Lorsqu’il vendra sa concession plus tard, on apprendra qu’une maison y était bâtie.  Est-ce lui qui l’avait construite aidé des charpentiers Jean Duval, son ancien voisin, Jacques Chevalier et Jean Levert qui avaient été engagés par Bazire pour la construction du manoir seigneurial et de ses dépendances, ou les avait-il employés pour la construction de cette maison? On apprendra également au moment de la vente, en décembre 1682, que six arpents sont en labour.  Or Sébastien n’habite plus sa concession depuis des lunes, quelqu’un a bien dû labourer cette terre.  Considérant le caractère de l’ancêtre que nous découvrirons au fils des années, il est possible qu’il n’ait jamais cultivé ou défriché un seul arpent et qu’il ait plutôt engagé d’autres pour le faire, comme il le fera une fois rendu à Ville-Marie.  Pierre Perrotin, le fermier d’Aubert de La Chesnaye a à sa solde quelques journaliers[55] ; Sébastien a pu engager un journalier pour voir aux travaux ou simplement troquer les bras du futur acheteur de sa concession sur le prix de vente, son voisin qui veut agrandir sa terre, le menuisier Jean Baptiste Fonteneau dit Saint-Jean (1647-1689), car Sébastien spécule sur ses avoirs bien plus qu’il n’est fermier. 

En 1681, la population de la seigneurie de «La Chesnaye» atteindra soixante-douze personnes et vingt-trois censives sont déjà concédées.  Loin d’avoir été épargnée par la guerre franco-iroquoise, provoquée par la déclaration de guerre entre la France et l’Angleterre en 1689, la seigneurie de «La Chesnaye» est celle qui fut la plus éprouvée en Nouvelle-France : «Après cette guerre, en 1701, il ne restait plus que la moitié de la population soit 32 âmes.» [56]

Dans la nuit du 13 novembre 1689, Sébastien, qui sera alors très loin du drame, allait perdre plusieurs de ses anciens amis de «La Chesnaye» quand environ cent cinquante guerriers iroquois, arrivés par l’amont de la rivière des Mille Îles, profitent d’une nuit d’épaisse poudrerie pour faire irruption à l’ouest de la seigneurie, là où Sébastien s’était vu accordé sa seconde concession en 1676.  Ils allaient surprendre les habitants dans leur sommeil, détruire et piller tout sur leur passage et tuer pas moins d’une trentaine de colons.

*******************************************************************************************

Pour passer à la section suivante de la vie de l’ancêtre, cliquez ICI

*******************************************************************************************

[i] Contrat de mariage entre Guillaume Leclerc et Marie Thérèse Hunault 

Date : 1676-08-09, Notaire Bénigne Basset 

« Pardevant Bénigne Basset nottaire royal, de Ile de Montreal en la Nouvelle France et tesmoings soubzsignes, furent presens, Guillaume Leclerc, habitant de la seigneurie de Laschesnaye, de present en cette ville de Montréal, fils de Anthoine Leclerc, organiste de Sainte Claire a Rouen, y demeurant rue St Martin, Serrenole paroisse St Jean et de deffunte Marie Heranbot, ses pere et mere, en son nom d’une part, et Marie Therese Hunaut, fille de Toussaint Hunaut, habitant de la cote St François en la ditte Ile de Montreal, et de Marie Lourgueuil, ses pere et mere, pour elle et en son nom, d’autre part, lesquelles partyes en la presence et du consentement de leurs parens et amis pour ce assumbles d’une part et d’autre, sçavoir, de la part dudit Guillaume Leclerc, le sieur Pierre Le Perrotin, Sebastien Hervet, François Cottineau, demeurans en ladite seignneurie de Laschesnaye, et de sieur Pierre Perthuy, habitant dudit Montreal ; et de la part de la dite Marie Therese Hunaut, ledit Toussaint Hunaut son pere, Thomas Chartan, son beau frere, maitre Jean Baptiste Migeon de Branssat, licentie es loys et advocat en parlement, Gilbert Barbier, maitre charpantier au dit Montreal, reconnnurent et confesserent avoir fait et accorde les traitte et promesses de mariage qu’il en suivent c’est a sçavoir ledit Guillaume Leclerc avoir promis, prendra la ditte Marie Therese Humaut, a sa femme et espouse comme aussy, la ditte Marie Therese Hunaut, avoir promis prendre ledit Guillaume Leclerc a son mary et espoux, et le mariage faire et solemnisee en face de Ste Eglise Catholique Apostolique et Romaine, le plus tost que faire se pourra et qu’il sera advise et dellibere entre eux leurs dits parents et amys sy Dieu et Notre Mere Ste Eglise sy consentent et accordentt pour estre uns et commiuns, en tous biens meubles acquets et conquest immeubles suivant la coustume de Paris suivie et gardee en ce pays, ne seront tenus des debtes et hypotecques l’un de l’autre faittes et creees avant la solleeemnitee de leur mariage, ainssy auccune y ai seront seront payees et acquictees par celuy qqui les aura faites et creees et sur son bieen, prendra ledit futur espoux, la ditte future espouse avec tous ses droicts, noms, raisons, et actions en quelques lieux et endroicts qu’il pussent estre, scis, scitues et assis ; sera douee la ditte future espousee de la somme de deux cent livres tournois de douaire prefix et pour une fois payer, ou de douairee coustumier suivant ladite coustume a son choix ; ei faveur dudit future mariage, les futurs se font par ces presentes don, entre vifs et irrevocable au survivant d’eux deux de tous et chacuns les biens de leur communauté, a quelques somme et valleur, que le tout se puisse monter, et en quelques lieux et endroicts qu’ils se trouvent assis, sans aucuns des dits biens en reserver, pour en jouyr, par le survivant, comme de son propre et loyal acquest, pouveu toultesfois qu’au jour de la dissolution de leur mariage il n’y ayt aucon enfant vivant d’eux deux, et pour faire, insinuer et, car ainsy a este accorde, entre les dites partyes leurs dits parens et amis, promettans et obligeans chacun en droict soy et ce renonçans et fait et passe au dit Montreal, estude du dit notaire, l’an mil six cent soixante et seise le neuvieme jour d’aoust apres midy en presence des sieurs Jean Gervaise et Pierre Caille tesmoins y demeuranss et soubzsignes avec ledit sieur Perotin, les dit Hervet, Perthuys, Migeon, Barbier de de Lavaux sa femme, les dit futurs espoux, leurs parens et autres amis sus nommes ayant declares ne sçavoir escrire ny signeer, de ce enquis selon l’ordonnance.

P Perotin [paraphe] S Hervet, Perthuys, Gilbert Barbier, Catherine de Vaux, Migeon, Basset [paraphe] »

[1] MARTEL, Claude et al. Lachenaie, 300 ans d’histoire à découvrir 1683-1983. Lachenaie. Édition Corporation du Tricentenaire de Saint-Charles-de-Lachenaie, 408 p. Ici p. 59.

[2] «La Chesnaye», Lachenaie en vieux français. Charles Aubert de La Chesnaye prend en main la seigneurie de Lachenaie en 1670.

[3] Lebel, Gérard. Nos ancêtres. Biographies d’ancêtres. «Sébastien Hervé». Sainte-Anne de Beaupré, Les éditions de La Revue Sainte-Anne de Beaupré, Volume 18, 1983, page 86.  «Son nom (Sébastien) apparaît... à Montréal, à l’occasion du mariage de Pierre Verrier et de Roberte Gadois...»  On trouve au registre du mariage le nom et la signature d’un individu nommé François Hervet et non d’un deuxième Hervet.  Le document est une copie qui a été retouchée.  Le patronyme semble comporter le «t» final propre aux signatures des Hervet.  Gérard Lebel a pu avoir accès à une autre source d’information pour établir la présence de deux Hervet à la cérémonie du mariage.

[4] Embarqué sur le navire la Justice, Pierre Verrier dit la Saulaye est débarqué à Québec le 14 septembre 1665.

[5] BAnQ., Registre de Montréal, 21 janvier 1673.  À cette époque, la paroisse de Notre-Dame-de-Montréal comprenait toute l’île de Montréal.

[6]  Trois kilomètres.

[7] De cette grande seigneurie naîtront les paroisses de Lachenaie, Mascouche, Saint-Roch-de-l’Achigan, Saint-Esprit, Saint-Lin, Saint-Paul l’Ermite (Le Gardeur), Charlemagne, de même que des parties de L’Assomption, La Plaine, L’Épiphanie, Saint-Alexis et Sainte-Julienne.

[8] Également, un autre engagé de la fourrure, Jacques Dehay dit Linot arrivé dans la colonie en 1653 qui sera banni du gouvernement de Montréal pour une affaire criminelle.

[9] A.N.Q., GN. Minutier Hilaire Bourgine, 15 juillet 1686. Les sieurs Pierre Perrotin et Antoine Bazinet dit Tourneblanche s’équipent pour la traite.

[10] BAnQ., Registre de la paroisse Notre Dame, 31 octobre 1672.

[11] Il est peut-être apparenté à Fabien Presseau dit Préjean de l’île d’Orléans (1652-1712) mais on ne le retrouve pas dans les annales de la colonie.  Il s’agit sans doute d’un engagé de Bazire des Pays d’en Haut qui devait travailler pour Perrotin à l’époque. 

[12] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Frérot de Lachenest, 11 juin 1673.

[13] Aujourd’hui le chemin Saint-Charles.

[14] L’acte notarié parle de Jean Garenne et un certain La Garenne.  On sait que le premier est Jean Daluzeau dit Lagarenne.  Ce pourrait-il que ce dernier se soit vu offrir deux concessions ce qui serait contraire aux règles du régime seigneurial qui prévoyaient que chaque censitaire devait tenir feu et lieu sur sa censive.  Daluzeau aurait-il financé l’achat de deux concessions alors que Perrotin savait que la deuxième irait à Sébastien au début de l’été? Curieusement dans cette seigneurie, on retrouve dans les actes de concessions quelques individus qui s’en sont vu accorder deux.  Il est peu probable que le deuxième La Garenne soit Maximilien Chedeville (1644 — ) dit La Garenne résidant à Ville-Marie à l’époque le seul autre porteur de ce surnom dans la région ou Bertrand Chesnaye de La Garenne (1622-1683), marchand de Québec et aussi partenaire dans la Compagnie des Indes occidentales.

[15] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Frérot de Lachenest, 6 février 1673.

[16] La concession faisait trois arpents de largeur sur la rivière par vingt arpents en profondeur.   0,175 par 1169 Kilomètres.

[17] Surnom attribué à Jean Daluzeau alors qu’il était militaire.

[18] TRUDEL, Marcel. La seigneurie de la Compagnie des Indes occidentales, 1663-1674.  Anjou, les éditions Fides, 1963, page 308. D’origine inconnue, selon Trudel, il serait arrivé en 1662 à l’âge de vingt-quatre ans; sa première mention au pays est contenue dans une promesse de défrichement datée du 21 novembre 1662; il se fait ensuite soldat de la garnison de Montréal du 8 août 1663 au 30 septembre 1668.  (CI : 497; DGFQ : 299).  Celui qui ne sait pas signer est probablement repassé en France en 1673 après la vente de sa concession à Sébastien.

[19] Le dictionnaire indique que le mot «côte» signifie le bord de l’eau, la rive, le rivage et que, dans un autre sens, il désigne une montée, une pente. C’est la première définition qu’il faut considérer.

[20] A.N.Q., GN. Minutier de Thomas Frérot de Lachenest, 11 juin 1673.  La rivière des Mille-Îles était appelée la rivière Saint-Jean jusqu’en 1637, puis rivière Jésus par les ecclésiastiques à compter de 1674 et rivière La Chesnaye par les habitants de la seigneurie.  Elle prendra son nom actuel au cours du XVIIIe.  Le notaire mentionne que la transaction inclut cinq arpents désertés.  On pourrait comprendre ici qu’ils s’agissent d’arpents qui ont été défrichés puis abandonner par le propriétaire, donc sur lesquels aucune culture n’est faite.  Cependant comme Daluzeau n’a obtenu sa concession qu’en février et que la région comporte de grandes prairies depuis assez longtemps selon les sources, il est plus probable que la concession qu’acquiert Sébastien soit un pré.

[21] Duval, tout comme son frère d’armes Pierre Verrier dit la Saulaye, s’était aussi embarqué sur le navire la Justice et était débarqué à Québec le 14 septembre 1665.  Ancien soldat de la compagnie de Saint-Ours, il se fit domestique charpentier des Sulpiciens à Ville-Marie après avoir quitté la vie militaire tout comme Étienne Benoit, le père de l’enfant dont Sébastien sera le parrain. 

[22] Les Filles du roi majoritairement en provenance de l’Hôpital général de Paris (La Salpêtrière) étaient acheminées par bateau sur la Seine vers Rouen ou Dieppe, puis passaient en Nouvelle-France. 

[23] BAnQ., Registre de Montréal, 9 février 1674.  Les registres de la paroisse Saint-Enfant-Jésus-de-la-Pointe-aux-Trembles s’ouvrent en l’année 1674, mais pas à temps pour le baptême de Marie.  La Pointe aux Trembles étant desservie par les Sulpiciens, c’est à Montréal qu’est enregistré le baptême.

[24] TANGUAY, Cyprien. Dictionnaire généalogique des familles canadiennes depuis la fondation de la colonie jusqu’à nos jours. Québec, Éditions Eusèbe Senécal, 1871-1890, Vol. 1, Sect. 1 : A-Hel; Page : 41.

[25] TANGUAY, Cyprien. Dictionnaire généalogique des familles canadiennes depuis la fondation de la colonie jusqu’à nos jours. Québec, Éditions Eusèbe Senécal, 1871-1890, Vol. 1 Sect. 1 : BEN; page 41. «Il fut fait prisonnier et mise à mort en 1690.» et dans : BAnQ., Registre de la paroisse Saint-enfant Jésus de la Pointe aux Trembles, 29 novembre 1691.  «… feu etienne Benoi pris par les Iroquois…»

[26] AMERICAN-FRENCH GENEALOGICAL SOCIETY. «Guillaume Leclerc and Marie-Therese Hunault : Pioneers of Ile-Jesus and Lachenaie», Je Me Souviens. (Printemps 1998), page 86.

[27]  Les Onontagués aussi appelés Onondagas en anglais sont l’une des cinq grandes nations iroquoises, qui sont, d’est en ouest : Les Agniers, aussi connus sous le nom franco-anglais de Mohawks; les Onneiouts, aussi appelés Oneidas en anglais; les Onontagués, les Goyogouins, aussi appelés Cayugas en anglais ou Guyohkohnyo (peuple du grand marais) dans leur propre langue et; les Sénécas (Senecas en anglais), jadis les Sénèques en Français, aussi appelés Tsonnontouans d’après leur nom autochtone.

[28] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Frérot de Lachenest, 24 août 1674.

[29] A.N.Q., GN. Minutier Pierre Mesnard dit Saint-Onge, 16 août 1674.

[30] Aujourd’hui le 4054, chemin Saint-Charles, Terrebonne.

[31]  Moulin auquel un seigneur avait le droit d’obliger tous les habitants de sa seigneurie à venir moudre leurs grains.

[32] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Enfant Jésus de la Pointe aux Trembles, 28 décembre 1675.

[33] BAnQ., Aveu et dénombrement de la seigneurie de La Chesnaye, 30 juin 1676.

[34] Dans : LANGLOIS, Michel. Dictionnaire biographique des ancêtres québécois (1608-1700).  Sillery, Édition La Maison des ancêtres québécois, 1998-2001, Tome II, p.460, il est mentionné que le 4 août 1676, Sébastien obtient une concession dans la seigneurie de Tilly.  Il s’agit d’une erreur, l’auteur s’étant mépris sur le nom de la seigneurie sur l’unique base de l’acte de vente, datée du 16 décembre 1682, d’une terre qui était en fait celle acquise en 1676 à la seigneurie de La Chesnaye.  Le 13 août 1680, Charles Aubert de La Chesnaye avait vendu la seigneurie de La Chesnaye à Pierre-Noël Le Gardeur de Tilly.  Comme habituellement les seigneuries prenaient le nom du seigneur, le notaire Claude Maugue avait présumé dans l’acte de vente du 16 décembre 1682 que le nom de la seigneurie avait été ou serait changé à seigneurie de Tilly, nom de son nouveau propriétaire.  La seigneurie de La Chesnaye sera une exception à cette coutume puisqu’elle gardera le même toponyme jusqu’à l’abolition du régime seigneurial dans plus de cent soixante-dix ans puisqu’Aubert de La Chesnaye l’a rachètera en 1684.  D’ailleurs lors du recensement de l’intendant en 1681, le nouveau seigneur, Pierre-Noël Le Gardeur de Tilly, est déclaré résidant de la seigneurie de La Chesnaye.  Hélène Andrée BIZIER et Jacques LACOURSIÈRE dans la rédaction d’un article concernant Sébastien Hervet en 1981 dans «Nos Racines, l’histoire vivante des Québécois. Chapitre 92, Nos grandes familles, Les Harvey» n’ont fait que répéter l’erreur de Michel Langlois.  Finalement, comme si cela n’était pas suffisant, la seigneurie de Tilly sur la Rive-Sud près de Québec n’existait pas en 1676 lors de l’achat par Sébastien de sa deuxième concession et pas plus en 1682 lors de sa vente; elle ne prendra ce nom qu’en 1700 alors que Pierre-Noël Le Gardeur de Tilly l’achète de Claude-Sébastien de Villieu (il s’agit du même Le Gardeur de Tilly qui avait acheté la seigneurie de La Chesnaye en 1880 et qu’il ne garda pas).  La Seigneurie de Tilly près de Québec portait le nom de Villieu jusqu’en 1700.

[35] La terre de Sébastien se situe entre les 3142 et 3663 du Chemin Saint-Charles à Terrebonne. On y retrouve aujourd’hui l’école et l’église Saint-Charles-Borromée de Lachenaie.  La paroisse fut fondée en 1683, un peu après le départ de Sébastien.  Le 29 août 2014, huit générations plus tard, je soupais sur cette terre dans le petit parc qui fait face à l’église sur le bord de la rivière en compagnie de mon épouse, Céline Thériault.

[36] Aujourd’hui appelé les rapides de Lachine.

[37] Les sources se méprennent peut-être en attribuant à Jean Daluzeau deux concessions, mais on se rappellera qu’en 1673 deux concessions ont été accordées, l’une à Jean Garenne et l’autre à La Garenne.  Il est peu probable qu’ils s’agissent d’individus différents portant le surnom militaire de Lagarenne.  Jean Daluzeau dit Lagarenne était en partance pour la France en 1673 quand il a vendu une terre à Sébastien en juin 1673, il a bien pu se départir de la seconde également sans que l’acte de vente nous soit parvenu.

[38] Ils ne seront pas répertoriés au recensement de 1681 et ils n’apparaissent pas non plus comme passagers en partance pour les vieux pays dans les archives connus des navires ayant quitté la Nouvelle-France entre 1672 et 1681.

[39] MARTEL, Claude et al. Op.cit.

[40] BAnQ., Aveu et dénombrement de la seigneurie de La Chesnaye, op.cit.

[41] A.N.Q., GN. Minutier Bénigne Basset, 9 août 1676.

[42] Les Agniers en français ou, Kanien'kehá:ka (peuple des étoiles) dans leur langue, sont aussi connus sous le nom franco-anglais de Mohawks.  Aujourd’hui ils se désignent eux-mêmes par ce nom franco-anglais signifiant «mangeurs d’hommes» dans la langue de leurs rivaux Abénaquis.

[43] MARTEL, Claude, « Lachenaie, du fort à la ville », Collection Histoire des municipalités, Région de Lanaudière, No 1, Terrebonne, 1994, 48 p.

[44] ZOLTVANY, Yves F. «Aubert de la Chesnaye, Charles». Dictionnaire biographique du Canada. 1re édition 1969, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1969, 15 volumes, volume II (Décès de 1701-1740).

[45] MOOGK, Peter N. «Monseignat, Charles de». Dictionnaire biographique du Canada. 1re édition 1969, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1969, 15 volumes, volume II (Décès de 1701-1740).

[46] BAnQ., Prévôté de Québec, Pièces détachées, 2 octobre 1679.

[47] Aujourd’hui la ville de Kingston en Ontario.

[48] Branssat est chef de la noblesse et de la justice ou autrement dit, l’officier de longue robe-chef de justice subalterne de l’île de Montréal.

[49] BAnQ., Registre no 5 des audiences de la Juridiction royale des Trois-Rivières, p. 119-120., le 8 janvier 1680.

[50] LEFEBVRE, Jean-Jacques. «Migeon de Branssat, Jean Baptiste». Dictionnaire biographique du Canada. 1re édition 1966, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1966, 15 volumes, volume I (Décès de 1000-1700).

[51] Dans une quinzaine d’années, Sébastien habitera une maison près de celle de Jean Soulard, située rue du Cul-de-sac à Québec.

[52] BAnQ., Registre no 3 des arrêts, jugements et délibérations du Conseil souverain de la Nouvelle-France (11 janvier 1677 au 23 décembre 1680), f. 133v-134, 19 février 1680.

[53] Centre canadien d’architecture, groupe de recherche sur Montréal, le projet Adhémar.  Fiche biographique, Perrotin Pierre. Coordonnées géographiques et temporelles # 62 de l’ancien terrier de la ville de Montréal. Acquisition par achat le 23 janvier 1680.  Perrotin, une fois rassurer sur les intentions du nouveau seigneur, revendra cette maison le 1er mai 1682.

[54] A.N.Q., GN. Minutier Pierre Duquet, 13 août 1680. Par cet acte, Charles Aubert vend la seigneurie de La Chesnaye à Pierre-Noël Le Gardeur de Tilly.

[55] Jean Tremau, Jacques Linot et Michel Charbonneau à tout le moins.

[56] NADON, Mario, «Le premier demi-siècle de Lachenaie (1670-1724)», Thèse de maîtrise (histoire), Université de Montréal, 1983, 131 pages.