Anselme Harvey

7.6.02.6.1.7 Anselme Harvey (1858-1921), 7e génération

Louis Anselme Harvey de la septième génération, âgé de quarante-quatre ans, quittera Saint-Moïse probablement au début de 1903.  Né le 15 mai 1858 à Sainte-Flavie[1] il partira alors rejoindre d’autres compatriotes de son village natal travaillant dans les usines à coton de Fall River au Massachusetts.  Anselme Harvey est l’un des sept fils d’une famille de huit enfants toujours vivants en 1903; il en est le plus jeune.  Il est le fils d’Ephrem Harvey (1824-1902) à Jean Hervé (1798-1862) à François Hervé (1760-1843) chez Dominique Hervé (1736-1812).


 

Anselme travaillait sur les terres de son père et dans les chantiers de la vallée de la Matapédia pendant sa jeunesse jusqu’à ce qu’il rencontre Marie Flavie Saint-Amand (1865-1951), cadette d’une famille de treize enfants dont plusieurs ont quitté le pays pour s’établir à Fall River dans l’état du Massachusetts.  La rencontre ne devait pas être fortuite puisque les époux sont tous deux natifs de Sainte-Flavie et leurs familles respectives ont toutes deux contribué à la fondation de Saint-Moïse où ils sont venus s’établir.  Comme leurs pères étaient cousins, Anselme et Flavie avaient dû obtenir une dispense du troisième au troisième degré de consanguinité de l’évêque de Rimouski pour se marier en juillet 1889.  Comme Anselme n’a pas d’instruction, ce sera Flavie qui tiendra la plume pour correspondre avec les parents en attendant qu’ils aillent s’établir en Nouvelle-Angleterre[2]


 

Pour l’heure, Ephrem, le père d’Anselme, comme pour ses autres fils, avait établi ce dernier au moment de son mariage en lui cédant une terre.  Anselme et Flavie auront six enfants à Saint-Moïse dont cinq survivront à leur enfance.

 

On peut présumer qu’Anselme reprendra le travail dans les chantiers l’hiver quand la famille grandira et que les revenus de la terre ne seront plus suffisants puisqu’il est absent lors de certains baptêmes de ses enfants vers la fin du siècle[3].  La terre n’est seulement suffisante que pour nourrir la famille.  Avec le prix des céréales qui ne fait que chuter en raison de la compétition américaine, Anselme ne fait sans doute pas la sourde oreille à sa femme qui lui parle de la vie que mènent, en Nouvelle-Angleterre, deux de ses sœurs ainsi que trois de ses frères qui habitent Fall River au Massachusetts depuis près de vingt ans.  Les premiers paroissiens de Notre-Dame de Lourdes à Fall River venaient pour la plupart des environs de Sainte-Flavie; Philomène Saint-Amand (1848-1917), l’aînée, son frère Romuald (1850-post.1910) sa sœur Zoé (1861-post.1910), étaient de ceux-là, alors que Clovis (1857-1937) les avait rejoints dans les années 1890 et André (1854-post.1910) avait fait de même après avoir vécu un certain temps à Lawrence au Massachusetts. 


 

La mort du père d’Anselme, le 13 novembre 1902 semble avoir influé le cours de sa propre vie[4].  Peut-être avait-il décidé de partir pour les États-Unis depuis un certain temps, mais n’osait pas le faire de peur de chagriner l’un des fondateurs du village de Saint-Moïse, car après tout, son père en avait trimé pas mal dur et fait bien des sacrifices pour offrir à ses fils une terre bien à eux.  



Toujours est-il que vers 1903, comme pour d’autres Harvey dont les revenus d’une terre n’étaient pas suffisants, Anselme et son épouse décide d’offrir à leurs quatre filles et leur unique garçon des opportunités d’emploi puisque trois sont déjà en âge de travailler dans une filature.  De plus, Anselme est assuré d’y trouver également un emploi plus rémunérateur que ce qu’il retire de sa terre.   Anselme avait été précédé à Fall River par une de ses tantes ; Marie Louise dite Élise Harvey (1836-1907) était établie à Fall River depuis 1875.  

La famille s’embarque donc à la gare de Mont-Joli à bord d’un train de la ligne de chemin de fer Intercolonial qui relie l’endroit à Rivière-du-Loup où la connexion avec la voie du Grand Tronc permet de passer par Lévis et, de là, prendre l’embranchement de Richmond qui les conduits vers Fall River.  À bord de ce train de l’espoir pour la famille, Anselme et Flavie ont avec eux les enfants suivants : Marie Anne Aimée dite Edmée (1890-1972), Doria (1892-1973), Adrien (1893-1927), Marie Anna (1899-1937) et Marie Louise (1902-1940).

À son arrivée dans le quartier Flint de Fall River, il loue un logement du moulin au 355 rue Lawton.  Il est probable que l’une des belles-sœurs avait tout orchestré avant leur arrivée.


 

Le 13 juillet 1907 à Fall River, Flavie donne naissance à Ronaldo Louis, son septième et dernier enfant connu.  Elle avait enchaîné les grossesses tous les deux ans depuis son mariage et avait déjà perdu un enfant alors qu’il n’avait que six mois[5], comme la petite dernière était née en 1902, il est possible que d’autres enfants soient nés aux États-Unis et y soient décédés compte tenu de l’insalubrité des logements et des conditions sanitaires dans le quartier du Petit-Canada de Flint.

Avec un enfant de plus à loger, le couple emménage dans un nouveau logement de compagnie au 83 de la rue Jencks, à deux rues du parc Lafayette.  Anselme connaîtra-t-il Guillaume Hervey (1849-ca.1930), l’autre descendant du migrant français qui demeure dans le même quartier à la même époque?  Probablement puisque les deux logements sont à moins de trois cents mètres l’un de l’autre.  Par contre, comme le premier est natif de Sainte-Flavie et croit être d’origine irlandaise[6] alors que le second est né à Murray Bay de l’autre côté du fleuve et croit probablement dur comme fer être d’origine écossaise comme tous ceux de Charlevoix du temps, il est peu probable qu’ils aient cru partager autre chose qu’un patronyme.  Pourtant, François et David, leurs arrière-grands-pères Hervé étaient frères et voisins à Saint-Roch-des-Aulnaies.


La fin du voyage américain d’Anselme approche.  Après avoir pris des arrangements avec son beau-frère Clovis Saint-Amand qui vit à Fall River, il lui rachète sa terre de Saint-Moïse que ce dernier n’avait pu vendre à son départ pour les États-Unis.  Profitant d’un voyage pour mettre de l’ordre dans leurs affaires à Saint-Moïse, les deux beaux-frères se présentent chez le notaire Michel Philias Laberge de Rimouski le 17 février 1908 pour signer le contrat de vente puis repartent à Fall River[7].


 

Anselme et la famille continueront tout de même de vivre à Flint encore une année entière, peut-être deux, afin de payer cette terre qu’ils ont achetée[8]Anselme et Flavie en ont assez vu des usines américaines et la perte possible d’enfants, entre leur arrivée en 1903 et leur départ, pourrait ne pas être étrangère à la décision.  La famille reprend le train, probablement au printemps 1909, en direction de la vallée de la Matapédia avec leurs enfants.  Seule Doria demeurera un certain temps à Fall River.   Dans leurs bagages, Anselme et Flavie ramènent avec eux Louis l’Américain; ce dernier est parmi la douzaine de Harvey, nés aux États-Unis, de parents qui sont revenus au pays dans cette période d’exode. 


Ils sont définitivement de retour dans la Vallée, car en avril 1911, Anselme et Flavie sont déclarés «de cette paroisse» au mariage d’Edmée qui se déroule à Saint-Moïse.  Elle est la première des enfants à quitter la maison quand elle épouse Joseph Elisée D’Amours (1883-1958), résident de Cedar Hall, récemment devenue Saint-Pierre du Lac (aujourd’hui Val-Brillant)[9]

En juin de la même année, le beau-frère Charles Saint-Amand, un des rares de la famille de sa femme à ne pas être partis pour les States, énumérateur pour l’occasion, inscrit la famille au cinquième recensement canadien.  Anselme est de retour au pays, mais à la case départ.  Inscrit comme cultivateur, il ne déclare aucun revenu alors que les enfants sont maintenant tous sans emplois.  Adrien, Marie Anna, Marie Louise et Louis le cadet américain, sont toujours avec eux[10]



 

Comme prévu à l’acte de vente signée en 1908, Anselme s’acquitte de la balance du paiement pour l’achat de sa terre à son beau-frère Clovis en décembre 1911[11].


 

C’est en 1913 que Doria quitte Fall River et revient à Saint-Moïse.  En mai 1914 elle épousera d’ailleurs son cousin Joseph Saint-Amand, le boulanger de Saint-Rémi de la rivière Métis[12].  Joseph est le fils de l’oncle Charles Saint-Amand (1855-1932), frère de la mère de Doria.


 

En 1921, Anselme cultive toujours sa terre à soixante-trois ans avec l’aide de ses fils Adrien et Louis.  De son côté, Flavie est épaulée par Marie Louise[13].


 

Anselme s’éteint le 8 septembre 1921 ; il n’avait que soixante-trois ans.  On le porte en terre quatre jours plus tard[14]Il ne verra pas sa fille Marie Louise partir pour le Saguenay, son seul enfant à avoir fait sa vie ailleurs que  dans la vallée de la Matapédia.   Flavie décède à son tour trente ans plus tard, le 30 juin 1951; elle part rejoindre son époux au cimetière de Saint-Moïse trois jours plus tard[15].

Anselme Harvey, ses enfants, données généalogiques — 8e génération

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[1] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Flavie, 16 mai 1858.

[2] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Moïse, 2 juillet 1889.

[3] Ibid., 9 décembre 1899.

[4] Ibid., 15 novembre 1902.

[5] Ibid., 1er février 1897.

[6] B.A.C., G., Recensement de 1881, district de Rimouski, Saint-Moïse, microfilm e008137545.

[7] A.N.Q., GN. Minutier Michel Philias Laberge, no 4464, 17 février 1908.

[8] Fall River Directory for 1908, page 435 et Fall River Directory for 1909, page 292.

[9] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Moïse, 24 avril 1911.

[10] B.A.C., G., Recensement de 1911, district de Rimouski, paroisse de Saint-Moïse, microfilm e002085244.

[11] A.N.Q., GN. Minutier Michel Philias Laberge, no 6047, 11 décembre 1911.

[12] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Moïse, 11 mai 1914.

[13] B.A.C., G., Recensement de 1911, district de Matane, paroisse de Saint-Moïse, microfilm e003087583.

[14] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Moïse, 12 septembre 1921.

[15] Ibid., 3 juillet 1951.