Renée Hervet

1.4 RENÉE HERVET (1636-1702), première génération


Comme on l’a vu précédemment, Renée est la quatrième de la famille, baptisée le 18 octobre 1636 à la chapelle Saint-Martin de Blois.  Elle est l’épouse d’Hypolite Thibierge (1629-1700) depuis 1653[1]Hypolite Thibierge son mari, né dans le Bas-Bourg Saint-Jean et baptisé le 14 janvier 1629 en l’église Saint-Solenne de Blois, est le fils d’Étienne Thibierge (1598-1669) et de Madeleine Caillou (1605-1632)Renée et Hypolite proviennent tous deux de familles aisées[2].  

En 1662, le couple vint s’établir en Nouvelle-France avec deux de leurs fils, Gabriel (1654-1726) et Gentien, dit Jean (1656-1715)[3]

Renée donna naissance à trois autres enfants avant son départ pour l’Amérique : Hippolyte en 1658, un enfant anonyme en 1660, lequel ne vécut que huit jours et une petite fille prénommée Anne le 12 juin 1661.  Au départ pour la Nouvelle-France, le couple laisse aux grands-parents paternels, la petite Anne handicapée[4].  Cette dernière restera en France avec son frère Hippolyte dont la santé est bien trop fragile pour supporter l’éprouvante traversée de l’Atlantique.  Il décédera peu de temps après le départ de ses parents et sera inhumé le 28 janvier 1663 dans la paroisse Saint-Solenne de Blois.

Le départ pour l’Amérique en février 1662 n’est pas sans laisser un goût amer dans la famille en France.  Étienne Thibierge, le beau-père de Renée, fait modifier son testament le 15 juin 1662 pour substituer comme légataire, ses petits-enfants à son fils :

          «attendu les mauvais mesnages[5] de Ypolithe Thibierge son fils qui a quitté et abendonné ceste ville il y a en (viron) quatre mois et emmené seullem’ avec luy sa femme (et deux enfants) et laissé en cesd’ ville ses leurs (deux) autres enfants Desirant ledit Estienne Thibierge conserver à sa famille les biens q’ pourra dellaisser au jour de son trespas pour éviter Qlz ne soient conservez par Icelluy Ypolithe Thibierge son filz…»[6]

Considérant leur départ vers février, il est certain que le couple est en Nouvelle-France à l’été 1662.  En effet, Renée Hervet et Hypolite sont présents à la signature du contrat de mariage de Grégoire Deblois (c.1637-1705) et de Françoise Viger (1642-1712) le 3 août 1662.  De fait, le contrat est «…. faict et passé à Kébecq en la maison du dit sieur Thibierge…» en présence du tabellion Audouart[7].  Ce dernier est le premier notaire officiel de la Nouvelle-France, ses prédécesseurs (secrétaires des gouverneurs, greffiers, seigneurs et colons) n’ayant pu exercer le notariat que par tolérance.  Bien que Deblois, le futur époux, soit arrivé en Nouvelle-France depuis 1657, sa promise n’est débarquée à Québec que le 5 juin 1662 par le premier navire à y jeter l’ancre cette année-là, l’Aigle BlancRenée et sa famille ont été passagers sur l’un des quatre navires qui sont arrivés à Québec avant la signature du contrat de mariage.  Comme Deblois et Françoise Viger ne sont pas originaires de Blois ou même de ses environs, il est possible que Renée Hervet et Hypolite aient navigué sur le même navire que Françoise Viger où ils se seraient rencontrés[8].

Sainte-Famille vient tout juste d’être fondée en 1661 et l’on y encourage l’établissement de colons.  Les Jahan dit Laviolette qui s’établirent d’abord à Château-Richer en 1658 déménagèrent à «Sainte-Famille de l’Isle d’Orléans» vers 1660.  Les terres de deux arpents en censive acquises par Hypolite et Renée étaient situées entre celles de Jacques Jahan et de Jacques Baudon dit Lagrange.  Par son numéro de lot, le 36 b, sur la carte de concessions établie en 1667, on peut supposer que Laviolette cède en fait une partie de sa terre originale, le lot 36, qui était fort grande[12].  Les amis Hypolite et Jacques Jahan resteront voisins toute leur vie[13]

Après avoir probablement loué un pied-à-terre à Québec dès leur arrivée, le couple s’établira à «Sainte-Famille de l’Isle d’Orléans»[9], car le 25 du même mois, Hypolite et Renée y font l’acquisition de deux terres.  La première d’un arpent de front et d’environ soixante-dix de profondeur lui est cédée par Jacques Jahan dit Laviolette (1634-1699), un compatriote blésois et parent, tanneur comme Hypolite, avec lequel il s’associera par la suite pour l’exploitation d’une tannerie.  Par sa grand-mère paternelle, ce Jacques Jahan descend des Laurillau, la famille de la mère de Renée.  Il a été baptisé en l’église Saint-Solenne de Blois en 1634, avec pour marraine Marie Bernard, la cousine germaine de Renée Hervet[10].  La seconde terre contiguë à la première est de même dimension et lui est cédée par Jacques Baudon dit Lagrange (1636-c.1678)[11].  

Le 20 août 1663, Renée et Hypolite font baptiser à Château-Richer leur septième enfant, Étienne (Estienne au registre), né à l’Isle d’Orléans le treize, qui sera le premier à naître en Nouvelle-France[14].  Château-Richer est un village situé à trente kilomètres à l’est de Québec, à portée de barque, juste en face de Sainte-Famille de l’Isle d’Orléans.  L’année suivante, le 5 septembre, ils y font baptiser à nouveau.  Cette fois-ci, c’est le tour de Jacques, leur huitième enfant et septième fils né à l’île le deux du même mois.  Le parrain est Jacques Billaudeau (1636-1712), un résident de l’Isle d’Orléans dont nous connaîtrons la femme sous peu[15].  Les registres de la paroisse Sainte-Famille ne seront ouverts qu’en 1666 et pour le temps, ce sont les registres de Château-Richer qui font office de registres religieux pour l’Isle d’Orléans.

Au cours de l’été 1664, Hypolite complète la construction de la maison familiale constituée de pièces sur pièces[16] et qui remplaça la cabane de fortune où habitait la famille depuis son arrivée.  Hypolite Thibierge et Renée Hervet conserveront cette maison et cette terre toute leur vie[17].  Cette maison a depuis été remplacée par une maison de pierres. 

En 1666, la famille est toujours dans la maison de Sainte-Famille à l’île,[18] mais plus pour longtemps.  Hypolite est tanneur, un métier très recherché dans une colonie qui vit principalement de la traite des fourrures.  En revanche, sa clientèle était à Québec, à près de trente kilomètres à l’ouest.

L’année suivante Gabriel Hervet, qui demeurait chez sa sœur Renée depuis son arrivée en Nouvelle-France, fait l’acquisition d’une concession du côté sud de l’île.  Cette acquisition survient alors que la famille emménage à Québec où elle est recensée à la basse-ville en 1667[19]

La famille laisse derrière elle deux terres qu’elle avait acquises en 1662.  Hypolite Thibierge maintenant marchand-tanneur demeurant à Québec, afferme ses terres[20] à partir du 20 septembre 1667.  Le premier bail est accordé à Julien Dumont et Pierre Lafausse moyennant paiement de «la quantité de 30 minots de blé froment pour chacune des trois années»[21].  Un second bail à ferme sera signé à l’automne pour la deuxième terre[22].  L’époux de Renée peut ainsi vaquer à ses affaires à Québec tout en gardant ses terres.

L’acquisition d’une maison sur la rue du Cul-de-Sac au coin de la rue Notre-Dame et du Marché Champlain ne se fait que le 15 juillet 1668.  La façade de la maison qu’ils ont acquise donne sur la rue du Cul-de-Sac, alors que l’arrière donne sur la grève de l’Anse aux Basques[23].   Comme les voisins de la famille sont les mêmes qu’au recensement de 1667, on doit conclure qu’Hypolite avait sans doute d’abord loué cette maison l’été précédent.

Hypolite et Renée continuent d’amasser du patrimoine pour assurer leur prospérité.  Le 26 février 1669, Monseigneur François de Laval leur concède une terre de trois arpents de front du côté sud de l’Isle d’Orléans.  Il est difficile de comprendre les motifs qui ont amené Hypolite à demander une telle concession alors que ses affaires sont à Québec.  Il ne peut pas vouloir établir ses enfants, car son aîné n’a que quinze ans.  Comme il est dans l’obligation «de sy establir y avoir feu et lieu ou autre pour luy», probablement que l’expérience d’affermage de terres qu’il pratique à Sainte-Famille lui apparaît rentable[24].  Peut-être a-t-il tenté de louer cette terre comme les deux autres qu’il possède à l’île.    

En décembre 1675 est assassiné Gabriel Hervet, le frère de Renée.  À la suite d’une longue bataille juridique entamée par son mari, la famille met la main sur les biens du défunt deux ans plus tard. 

Le 3 février 1683, Hypolite Thibierge père constitue une compagnie avec Jacques Jehan dit Laviolette, ce compatriote blésois qui est un peu parent.  Cette compagnie avait pour but d’exploiter une tannerie.  Il fait construire sur sa terre de l’Isle d’Orléans un moulin à tan, partie intégrante de la tannerie[25].  Ses descendants continueront de travailler le cuir pendant plusieurs générations[26].

Renée Hervet, qui avait lutté bec et ongles pour conserver les biens de son frère au décès de ce dernier, léguera par donation une des deux terres que possédait Gabriel Hervet à son fils Gabriel Thibierge (1654-1726) le 30 janvier 1684[27].  Comme il était coutume d’établir ses enfants à cette époque, Renée Hervet et son mari, tenant boutique à Québec et n’ayant aucun usage pour cette terre, avaient laissé leur fils Gabriel Thibierge (1654-1726) s’y établir en 1679[28].  Depuis, ce même fils faisait aussi bon usage de la deuxième terre ayant appartenu à feu son oncle Gabriel Hervet.  

Hypolite développa une importante industrie du domaine du tannage et devint l’un des bourgeois fortunés de l’époque à Québec.  Il était suffisamment fortuné pour que Renée Hervet, parmi une petite poignée de nobles, bourgeois et bourgeoises, puisse faire un don pour la reconstruction du monastère des Ursulines de Québec après le deuxième incendie de l’institution en 1686[29].

Renée Hervet mit au monde quatorze enfants, huit fils et six filles, dont neuf en Nouvelle-France.  Il est important de les nommer, car certains deviendront sous peu des acteurs dans la vie de nos ancêtres.  Les enfants de Renée Hervet sont donc :

Gabriel Thibierge (1654-1726)

Gabriel Thibierge dit Dunord, capitaine de milice, seigneur et procureur fiscal, né le 20 juin 1654 à Blois et baptisé en l’église de Saint-Solenne a immigré en Nouvelle-France avec ses parents.  Il se marie le 23 novembre 1676 à Anne Perrot dit Villedaigre (1661-1687), fille de Jacques Perrot dit Vildaigre et de Michelle LeFlot en l’église Sainte-Famille de l’Île d’Orléans.  Anne Perrot décède le 29 novembre 1687 à Saint-Jean de l’île d’Orléans.  En secondes noces le 2 août 1688, Gabriel épouse Madeleine Lepage (1672-1754), fille de Louis Lepage et Sébastienne Loignon en l’église Saint-François de l’Île d’Orléans.  Gabriel décède le 10 mars 1726 à l’Hôtel-Dieu du Précieux-Sang de Québec à l’âge de soixante et onze ans. Gabriel sera père de dix-huit enfants[30].

Gentien dit Jean Thibierge (1656-1715)

Né Gentien Thibierge, domestique du séminaire des missions étrangères de Québec, né le 10 juin 1656 à Blois et baptisé le même jour en l’église de Saint-Solenne.  Il a immigré en Nouvelle-France avec ses parents.  Il sera aussi erronément prénommé François lors du recensement de 1681[31].  Il sera inhumé le 9 février 1715 dans le cimetière de l’Hôtel-Dieu de Québec.   

Hippolyte Thibierge (1658-1663)

Hippolyte est né le 24 février 1658 et fut aussi baptisé en l’église Saint-Solenne de Blois.  Il n’est jamais venu en Nouvelle-France en raison de sa santé trop fragile pour supporter la traversée de l’Atlantique.  Laissé à la famille paternelle, il décédera peu de temps après le départ de ses parents.  Il décède avant d’avoir atteint l’âge de cinq ans et sera inhumé le 28 février 1663 dans la paroisse Saint-Solenne à Blois. 

Anonyme Thibierge (1660-1660)

Il n’est jamais venu en Nouvelle-France[32].  Un enfant qui ne vécut que huit jours lequel est décédé le 19 février 1660. 

Anne Thibierge (1661-1696)

Anne n’est jamais venue en Nouvelle-France.  Elle est née le 6 juin et est baptisée le 12 juin 1661 en l’église Saint-Solenne de Blois.  Souffrant d’un handicap, elle est demeurée en France lors de l’émigration de ses parents, elle fut confiée, avec son frère Hippolyte mentionné plus haut, à Étienne Thibierge, père d’Hypolite Thibierge, et sa nouvelle épouse Catherine Durand, car la famille de Renée Hervet n’aurait pas été en mesure de les accueillir, son père étant décédé en 1660 et sa mère depuis plus de douze ans[33].  Anne Thibierge s’est mariée le 14 janvier 1687 avec Laurent Filoche, sieur de la Plaine à Saint-Solenne de Blois.  Elle serait décédée sans enfants à Blois en 1696[34].

Étienne Thibierge (1663-1740)

Né Estienne Tiberge, maître-tonnelier et bourgeois de Québec.  Il est le premier enfant de Renée Hervet né en Nouvelle-France le 13 août 1663 et baptisé le 20 août 1663 à Château-Richer.  Il se marie le 18 octobre 1688 à Québec à Jeanne Chasle (1672-1702), fille de Claude Chasle, maître-tonnelier, et d’Andrée L’Épine.  En secondes noces le 2 août 1712 à Québec également il épouse Cécile Elizabeth Cauchois (1684-1717), fille de Jacques Cauchois et Elizabeth Prud’homme.  Estienne décède le 24 février et est inhumé le 26 février 1740 dans l’église Notre-Dame de Québec à l’âge de soixante-dix-sept ans.

Jacques Thibierge (1664-1732)

Jacques Tibierge, apprenti arquebusier chez Nicolas Gauvreau, maître-armurier et arquebusier du roi, est né le 2 septembre et est baptisé le 5 septembre 1664 à Château-Richer.  Jacques se maria le 18 octobre 1688 à Marie Anne Joly (1671-1698), fille de Jean Joly (1646-1691) et Marguerite Amiot (1656-1724) en l’église Notre-Dame de Québec.  En secondes noces, il épouse en la basilique Notre-Dame de Montréal le 15 février 1700 Catherine Cusson, fille de Jean Cusson et de Marie Foubert.  Il demeurera sur la Place du Marché à Montréal de 1716 à 1732.  Jacques décède le 21 avril 1732 à l’âge de soixante-sept ans.

Catherine Thibierge (1667-1681)

Née le 18 avril 1667 à l’île d’Orléans, elle est baptisée le même jour en l’église Sainte-Famille de l’île.  Elle décède à l’Île d’Orléans en 1681 à l’âge de quatorze ans.

Marie Anne Thibierge (1669-1705)

Née le 12 septembre 1669 à Québec et baptisée deux jours plus tard.  Elle se marie le 17 avril 1690 à Martin Cheron (1663-1717), fils de Martin Cheron et Marie Castillon, né à Blois, bourgeois marchand, garde-magasin du Roy et sera élu conseiller du Conseil supérieur de Québec le 5 mai 1710.  Elle fut toujours prénommée Anne comme sa sœur demeurée en France.  Elle est inhumée le 19 janvier 1705 à Québec des complications d’accouchement à l’âge de trente-cinq ans.  Le couple avait eu quatre filles dont les trois cadettes avaient été confiées au tutorat d’Étienne Thibierge au décès de Marie Anne.  Toutes trois entreront en communauté chez les Augustines de l’Hôtel-Dieu de Québec.

Hyppolite Thibierge (1672-1703) marié à Anne Gagnon;

Hyppolite le marchand est né le 1er janvier et est baptisé le 3 janvier 1672 en l’église Sainte-Famille de l’Île d’Orléans.  Il se marie le 17 janvier 1695 à Anne Gagnon (1675-1767), fille de Robert Gagnon et Marie Parenteau dans l’église de son baptême à l’île d’Orléans.  Comme sa mère, il décède d’une maladie contagieuse le 1er janvier 1703 à l’âge de trente et un ans.  Il est inhumé le 7 janvier 1703 dans la paroisse Sainte-Famille de l’île d’Orléans.

Nicolas Thibierge (1673-1702)

Né le 18 décembre à l’île d’Orléans et baptisé le 21 décembre 1673 en l’église Sainte-Famille.  Il se marie le 15 novembre 1701 à Anne Prémont (1684-1703), fille de Jean Prémont et Marie Aubert à Sainte-Famille de l’île d’Orléans.  Il est inhumé le 23 décembre 1702 où il avait été baptisé et où il s’était marié.

Marie Thibierge (1675-1748)

Née et baptisée le 7 mai 1675 en l’église Sainte-Famille de l’Île d’Orléans.  Elle se marie le 8 novembre 1694 à Pierre Gendron (1667-1747), fils de Nicolas Gendron dit Lafontaine et de Marie-Marthe Hubert en l’église Sainte-Famille.  Elle décède le 14 avril 1748 à l’île d’Orléans.   

Angélique Thibierge (1677-1697)

Mère Sainte-Agnès, religieuse hospitalière de l’Hôtel-Dieu de Québec est née et a été baptisée le 22 septembre 1677 à Québec.  Novice le 28 janvier 1696, elle professe le 18 juillet 1697 et décède le 8 septembre 1697 à Québec de la fièvre pourpre apportée par un vaisseau du Roy le 8 septembre; elle est inhumée le 29 octobre 1697[35].   

Marie Catherine Thibierge (1681-1757)

Mère Saint-Joachim, religieuse hospitalière de l’Hôtel-Dieu de Québec est née le 28 février 1681 à Sainte-Famille de l’île d’Orléans.  Elle entre au noviciat le 7 mai 1695, est ordonnée le 2 mars 1697 et sera mère supérieure de 1726 à 1732.  Elle décède le 27 novembre 1757 à l’Hôtel-Dieu de Québec.

Renée Hervet a soixante-trois ans lorsqu’elle et son mari, soixante et onze ans, se donnent le 29 mars 1700 devant notaire à leur fils Gabriel le coseigneur de la «Seigneurie Lepage-et-Thibierge»[36].  Même s’il est probablement emporté par l’épidémie de grippe maligne qui sévira l’hiver suivant, le père de cette grande famille devait sentir la fin venir.  Hypolite Thibierge, décède le 10 décembre de la même année dans sa maison de Sainte-Famille de l’Isle d’Orléans[37].

Fervente croyante, avec deux filles dans les ordres, Renée Hervet, dans ses dernières volontés enregistrées auprès du tabellion Louis Chambalon (1663-1716), s’assure qu’à chaque année après sa mort, deux messes basses de requiem seraient chantées pour le repos de son âme[38].

Deux ans après le décès de son époux, Renée Hervet décède à son tour à l’Hôtel-Dieu de Québec le 11 novembre 1702 à l’âge de soixante-six ans[38a].  Elle est emportée par la petite vérole apportée du Fort Orange[39]Elle est l’ancêtre féminine des familles Thibierge et Thivierge du Québec.

Si une partie de la famille de Renée fut en religion, d’autres s’émoustilleront.  Heureusement, Renée la dévote était trépassée lorsque se jeta l’opprobre sur la famille par le biais de deux de ses petits-enfants; la première accouchera d’un enfant né de père inconnu et aura une deuxième liaison, publique celle-là, avant de fuir en Martinique alors que son cousin entretiendra des liaisons aux quatre vents desquels deux enfants verront le jour[40].

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[1] Fichier Origine, Fédération québécoise des sociétés de généalogie et Fédération française de généalogie.  Son contrat de mariage est signé devant Me Mathurin Gastineau le 14 septembre 1653 et le mariage est célébré le lendemain.  Bien que l’on retrouve en Nouvelle-France l’orthographe d’Hyppolite Thibierge, lors de son baptême, il est prénommé Hypolite avec un seul «p».  Le migrant Thibierge signait Hypolite avec un «p».  C’est donc ainsi que son prénom sera orthographié dans ces textes.

[2] Un livre paru en 2021 tout juste avant le décès de l’auteur Robert Thivierge avec qui j’ai eu le plaisir de collaborer retrace l’histoire et la généalogie de la famille de Renée Hervet et de son mari.  Il est intitulé «1662 de Blois à l’île d’Orléans».  La présente section consacrée à Renée Hervet avait été écrite en 2014.  Elle a depuis été mise à jour grâce aux recherches de Robert Thivierge.

[3] THIVIERGE, Robert. 1662 de Blois à l’île d’Orléans. Montréal, À compte d’auteur, 2021, page 77.  Le couple est toujours à Blois en novembre 1661. 

[4] Greffe du notaire Mathurin Gastineau, testament d’Étienne Thibierge datée du 21 juillet 1651, annoté le 15 juin 1662 cité dans Thivierge, Robert, op.cit.

[5] Mesnage signifie ici, conduite que l’on tient dans l’administration de son bien.

[6]THIVIERGE, Robert, op.cit., page 151.

[7] A.N.Q., GN. Minutier Guillaume Audouart dit Saint-Germain, 3 août 1662.

[8] ASSOCIATION DES THIBIERGE ET THIVIERGE D’ICI ET D’AILLEURS. La famille d’Hypolite Thibierge et de Renée Hervet, [En ligne]. http://thibi-thivierge.com/ [page consultée les 29/11/2014 et 4/12/2020]. Toutes les sources consultées, dont l’Association des familles Thibierge-Thivierge, établissent l’arrivée de Renée et Hypolite en 1662.  Des sources anciennes comme le «Catalogue des immigrants, 1632-1662 de Marcel Trudel», avançaient l’année 1661, mais de la documentation nouvelle réfute cette hypothèse.  Une annotation datée du 15 juin 1662 au testament du beau-père de Renée Hervet mentionne un départ quatre mois plus tôt (février).

[9] Sainte-Famille est à l’époque, de 1661 à 1679, la seule paroisse implantée sur l’Isle d’Orléans, connue sous le nom de «Paroisse de l’Île».

[10] LE MAUFF, Ghislaine. «Des Hervet blésois aux Harvey québécois», Mémoires de la Société généalogique canadienne-française, Volume 62, numéro 2, (été 2011), cahier 268, pages 140-141.

[11] A.N.Q., GN. Minutier Guillaume Audouart dit Saint-Germain, 25 août 1662.

[12] THIVIERGE, Robert., op.cit., page 94. Les terres faisant 142 arpents acquise par le couple sont situées au 2274-2377, chemin Royal de Sainte-Famille sur l’île d’Orléans.

[13] HARVEY, Fernand. Histoire des ancêtres d’Alfred Harvey (1876-1948).  Montréal, Édition privée, 2001, page 90. Et dans : ROY, Léon. Les terres de l’Ile d’Orléans, 1650-1725. Montréal, Éditions Bergeron, 1978, 1951, page 118.

[14] BAnQ., Registre de la paroisse de la Visitation de Notre-Dame de Château-Richer, 20 août 1663.

[15] Ibid., 5 septembre 1664.

[16] RÉPERTOIRE DU PATRIMOINE CULTUREL DU QUÉBEC.  3754, chemin Royal. [En ligne]. http://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=105143&type=bien#.VHXutBt0z3g [page consultée le 25/11/2014].  La maison sur les photos située au 2374 chemin Royal à Ste-Famille-de-l’Île-d’Orléans, adresse d’aujourd’hui, est bien sur la terre de Renée Hervet et d’Hypolite Thibierge.  Elle ne ressemblait pas à cela à son origine.  L’inventaire au décès d’Hypolite suggère qu’une partie était constituée de pièces sur pièces.    

[17] A.N.Q., GN. Minutier Paul Vachon dit Pomerleau, 22 juin 1667, Beauport : Pierre Blais reçoit une terre; ses voisins sont Antoine Poisson et Hypolite Thibierge.

[18] TRUDEL, Marcel.  La population du Canada en 1666 : recensement reconstitué.  Sillery, Éditions Septentrion, 2003, page 228.

[19] LAFONTAINE, André. Recensements annotés de la Nouvelle-France 1666 & 1667. Sherbrooke, A. Lafontaine, 1985, p.211.

[20] Le bail à ferme est un contrat par lequel le propriétaire abandonne l’exploitation de son domaine et où le loyer consiste en une somme préfixée ou dans le cas d’Hypolite, une redevance.

[21] A.N.Q., GN. Minutier Pierre Duquet, 20 septembre 1667. Bail à ferme d’Hypolite Thibierge à Julien Dumont et Pierre Lafausse.

[22] A.N.Q., GN. Minutier Gilles Rageot, 15 novembre 1667.

[23] A.N.Q., GN. Minutier Pierre Duquet, 15 juillet 1668.

[24] A.N.Q., GN. Minutier Paul Vachon dit Pomerleau, 26 février 1669.  Cette concession de trois arpents est située dans le secteur qui deviendra Saint-Jean de l’Isle d’Orléans.  Cet acte est erroné puisqu’elle situe cette terre entre celle de Pierre Blay (1641-1700) et de Gabriel Hervet.  Il s’agirait donc de la terre J31 que Gabriel Hervet acquerra de Martin Poisson (1633-1700) le 25 août de la même année (voir A.N.Q., GN. Minutier Paul Vachon dit Pomerleau, 25 août 1669.  La terre qui est ici concédée et qui aurait appartenu à Hypolite Thibierge n’apparaît pas à la carte dressée en 1689 par Robert de Villeneuve, ingénieur du Roy.  La localisation exacte de cette terre n’a pu être déterminer. 

[25] A.N.Q., GN. Minutier Pierre Duquet, 3 février 1683.  Acte de société entre Hypolite Thibierge et Jacques Jahan dit Laviolette.

[26] B.A.C., G., Recensement de 1851, La Malbaie, comté Saguenay, page 23.  Jean et David Thivierge, cordonnier.

[27] A.N.Q., GN. Minutier Paul Vachon, 30 janvier 1684.

[28] ROY, Léon. Les terres de l’Ile d’Orléans, 1650-1725 : édition revue et augmentée par Raymond Gariepy. Op.cit., pages 237-241 et 428.  Dans cette version revue de Gariepy, ce dernier mentionne que le neveu Gabriel Thibierge possède deux terres contiguës en 1681.  Gabriel entretient et occupe alors deux terres, mais ne les possède pas encore. En 1681, ces deux terres sont toujours entre les mains de ses parents.    

[29] SAINTE-MARIE, sœur et SAINT-THOMAS, sœur. Les Ursulines de Québec depuis leur établissement jusqu’à nos jours. Québec, Éditions C. Darveau, 1878, 4 volumes.  Volume 1, page 528.

[30] Certains documents lui attribuent le nom de Gabriel Thibierge dit Dunord. Le père de Gabriel, Hypolite Thibierge, était installé avec sa famille à Sainte-Famille du côté nord de l’île d’Orléans. Comme une partie de ses descendants (incluant Gabriel) s’établiront à Saint-Jean du côté sud de la même île et qu’il y eut des Gabriel Thibierge parmi cette descendance, on suppose que le «dit Dunord» fut ajouté au nom du premier Gabriel pour le distinguer des autres établis à Saint-Jean (source : Robert Thivierge).

[31] LAFONTAINE, André. Recensements annotés de la Nouvelle-France 1681. Sherbrooke, A. Lafontaine, 1985, p.349.  Cette erreur amènera certaines sources à croire en l’existence d’un sixième enfant né en France.

[32] La plupart des sources mentionnent cinq enfants nés en France.  Gabriel, Gentien, Hypolite, un enfant qui vécut huit jours et qui est décédé le 19 février 1660 et Anne.  Bien que la généalogiste Ghislaine Le Mauff mentionne le décès d’un enfant mort-né en 1660, d’autres sources comme les généalogistes Steven Wesley McRorie, Roger Louis Thivierge, Jean-Marie Germe, Guy Turcotte, Guy Turcotte/Beaudry, Guy Thivierge et Micheline Cante citent un enfant prénommé François qui serait né en 1660, mais l’année de son décès varie selon les sources, 1660, 1700 et 1728.  De plus, ces sources basent leur affirmation sur le recensement de 1681 tenu en Nouvelle-France qui fait état d’un François Thibierge, domestique au séminaire de Québec et âgé de 21 ans.  Il s’agit d’une inscription erronée du prénomet de l’âge; Gentien dit Jean Thibierge, né en 1656 est celui qui fut domestique du séminaire des missions étrangères de Québec et a été le seul à y travailler. La naissance de cet enfant reste introuvable au registre de la paroisse de Saint-Solenne, seul y figure l’acte de décès en date du 19 février 1660 indiquant que l’enfant baptisé par la sage-femme était âgé de huit jours. Dans cet acte de décès, le père est nommé René Thibierge et la mère Renée Hervé et le prénom n’est pas inscrit. Cet enfant aurait été introduit par erreur sous le prénom de François dans le Dictionnaire généalogique des familles du Québec : des origines à 1730 de René Jetté.

[33] LE MAUFF, Ghislaine, op.cit., page 142.

[34] L’année du décès mentionnée provient de LE MAUFF.  De plus, elle est réputée décéder depuis plusieurs années en 1708 lors d’une revendication à sa succession (voir le chapitre Sébastien Hervet – section Une vie active).

[35] TANGUAY, Cyprien.  À travers les registres : notes recueillies. Édition Librairie Saint Joseph, Cadieux & Derome, 1886, page 82.

[36] A.N.Q., GN. Minutier Etienne Jacob, 29 mars 1700. 

[37] PROVENCHER, Jean. Chronologie du Québec. Montréal, Boréal, 1991, page. 59.

[38] A.N.Q., GN. Minutier Louis Chambalon, 30 décembre 1704.  Fondation annuelle de deux messes basses de requiem par Renée Hervet, veuve de HypoliteTibierge, en l’église Notre-Dame de Québec.

[38a] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame de Québec, 11 novembre 1702.  La date du décès ne figure pas au registre.  Puisqu’en période d’épidémie, on prenait soin d’enterrer immédiatement les pestiférés, il est présumé que Renée est morte le jour de son inhumation.

[39] Aujourd’hui, la ville d’Albany dans l’état de New York.

[40] THIVIERGE, Robert., op.cit., pages 205 et 132.