Chapitre13

Les Harvey des îles de la Madeleine

François Hervy (c.1793-1881)

Les porteurs du patronyme Harvey vivants aux Îles-de-la-Madeleine ou dont la descendance est originaire de ces îles ne sont pas des descendants de Sébastien Hervet et de Françoise Philippeau comme la grande majorité des Harvey québécois.  Ils sont des Hervy et non des Hervet ce qui n’en fait pas moins des Harvey d’origine française.  Plusieurs personnes n’ayant pas de racines acadiennes sont parties des îles Saint-Pierre et Miquelon pour s’établir aux îles de la Madeleine.  Pourtant, François Hervy dont la famille est établie à Saint-Pierre, est probablement parti de France pour épouser Ester Vigneau aux îles de la Madeleine en 1817[1].

Le patronyme Hervy est surtout présent dans l’ouest de la France. Il y est aussi rencontré sous la forme Hervi.  D’ailleurs, dans certains documents provenant de Saint-Pierre et Miquelon, le patronyme de l’ancêtre venu en Amérique est orthographié ainsi.  Hervy ou Hervi, tout comme Hervin, sont des variantes ou des diminutifs de Hervé.  En France, on retrouve plusieurs graphies de ce patronyme; outre Hervy et Hervi, on y trouve les Ervy, Ervi, Ervie, Ervis, Heruy et Haruy.  Il semble que seules les formes Hervy ou Hervi soient traversées de ce côté-ci de l’Atlantique.  Quoi qu’il en soit, aux Îles-de-la-Madeleine, les descendants de François Hervy aujourd’hui, écrivent leur patronyme sous deux formes Harvie et Harvey[2].  

Harvie et Harvey 

Selon l’Institut de la statistique du Québec, en 2006, les Harvie constituaient un peu moins d’un pour cent de la population des Îles-de-la-Madeleine  [0,63 %], soit moins de cent personnes [82], les Harvey beaucoup moins.  Le patronyme Harvie se situait au trente-sixième rang des patronymes présents aux îles et au 3,800e rang parmi les patronymes présents au Québec avec 0,002 % de la population du Québec qui le portait encore[3].  Les descendants de François Hervy n’ont jamais été beaucoup plus nombreux  Seulement seize familles aux îles de la Madeleine au début du siècle dernier et trois ayant déjà migré hors des îles; un total de cent vingt descendants[4].

Cette situation s’explique par l’arrivée relativement tardive au pays de François Hervy, contrastant avec les autres familles des îles, Acadiennes surtout, dont les vagues migratoires dataient de deux cents ans plus tôt, leur conférant une avance importante dans la constitution ultérieure de la population.

Aux îles de la Madeleine, le patronyme Hervy n’a pris que deux générations pour, dans certains cas, se transformer en Harvey.  Dès la deuxième génération, le dernier enfant de François né en 1842 portera d’ailleurs le patronyme d’Hervey.  Lorsque des descendants de François quittèrent les îles pour aller s’installer ailleurs au Québec, leurs enfants se voyaient baptisés le plus souvent avec le patronyme Harvey.


En 1844, l’abbé Alexis Bélanger (1808-1868), natif de Saint-Roch-des-Aulnaies et missionnaire aux îles depuis cinq ans, baptise un premier enfant portant le patronyme Harvey le 14 juillet 1844 : Hippolyte Harvey (1844-1916) à Casimire Harvy (1818-1868) chez le migrant François Hervy (c.1793-1881). 


La forme originale du patronyme du migrant Hervy ne survivra pas l’épreuve du temps.  La dernière inscription d’un baptême au patronyme Hervy s’est faite en 1935.

Si l'on comptait déjà des porteurs du patronyme Harvey aux îles dès 1844[4a], la transformation du patronyme Hervy en Harvie prendra un certain temps.  Il apparaît une première fois lors du baptême de Gabriel Harvie le 2 mars 1870 sous la plume d’Azade Trudelle (1835-1913) officiant comme célébrant à la mission de Havre-aux-Maisons (1868-1871) cette journée-là[4b]. Le père Trudelle est un prêtre d’origine québécoise qui œuvra dans quelques missions insulaires entre les années 1860 et 1880, dont l’Île-du-Prince-Édouard où le patronyme Harvie existait déjà.   Gabriel Harvie est le fils d’Hippolyte Harvey (1844-1916) à Casimire Harvy (1818-1868) chez François Hervy (c.1793-1881).  Ce seul baptême utilisant la forme du patronyme Harvie de la décennie de 1870 sera suivi de quatre autres dans la décennie suivante.  Puis cette forme du patronyme fut par la suite utilisée plus régulièrement, mais moins souvent que celle de Harvey.  Ce ne sera qu’après la Seconde Guerre mondiale où elle prendra toute sa place.   

Les îles ont connu plusieurs missionnaires avant qu’un curé permanent ne s’y établisse.  Les ancêtres étant pour la plupart illettrés, on peut penser que les célébrants de passage écrivaient au son ce qu’il entendait associant souvent le patronyme Hervy aux formes du patronyme qu’ils avaient entendu ailleurs (Hervé, Harvé, Harvey).  Ce ne sera qu’au début des années 1890 que l’Acadien Jean Chiasson, curé de Saint-Pierre de La Vernière à L’Étang-du-Nord pour une courte période (1889-1891), croyant avoir affaire à deux familles distinctes, baptisera deux enfants dans le même mois, l’un au patronyme Harvie et l’autre avec celui de Harvey; une légende venait de naître.  Ainsi, pour longtemps, plusieurs porteurs des patronymes Harvie et Harvey en sont venus à croire qu’ils descendaient de lignées différentes.  Encore récemment certains le croyaient encore.  Lors de ma dernière visite aux îles (2022), ayant mal entendu l’échange d’une caissière avec une cliente, mon tour venu, je lui dis, vous êtes donc une Harvey des îles, moi je suis un Harvey descendant d’un Harvey d’une autre île, L’Isle-aux-Coudres.  La caissière me reprit gentiment avec la courtoisie des Madelinots en me disant qu’elle n’était pas une Harvey, mais une Harvie, s’empressant d’ajouter que les deux familles n’étaient pas apparentées.  

Si les Harvey descendants de Sébastien Hervet prennent tous le patronyme Harvey à partir de la Seconde Guerre mondiale, les descendants de François Hervy pour leur part choisiront deux formes du patronyme, celui de Harvie, plutôt présent aux îles et celui de Harvey[4c].

Depuis l’arrivée de François Hervy aux Îles de la Madeleine en 1817 jusqu’à la fin de seconde guerre mondiale, environ six cent trente descendants seront issus de son mariage à Ester Vigneau (1799-1874).  

De ce nombre de six cent trente, la forte prédominance des porteurs du patronyme Harvey s’explique en partie par le fait d’une migration de Madelinots vers la Côte-Nord dans les années 1850, donc avant l’apparition du patronyme Harvie aux îles.  Ces Hervy ayant ainsi migré et leur descendance prendront en grande partie les formes du patronyme, Hervé, Harvé et Harvey.

Avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Hervy/Harvey constituaient 5,51 % du nombre total de descendants des deux lignées de Harvey soit celle de François Hervy et celle de Sébastien Hervet.

Le migrant François Hervy et sa famille avant son arrivée aux îles





L’arrivée aux Îles de la Madeleine d’un Hervy survient près de cent cinquante ans après celle des Hervet à Québec.  Bien que d’origines françaises tout comme Sébastien Hervet, leur ancêtre était d’abord débarqué aux îles Saint-Pierre et Miquelon qui forment encore de nos jours une collectivité française d’outre-mer.  

On en connaît très peu sur les ancêtres bretons des Harvey des îles de la Madeleine.  Ce que l’on sait c’est que les Hervy sont gens de mer.  « Guillaume Hervy » (1699-post.1733), l’arrière-grand-père du migrant, dont on n’a pas de preuve qu’il a mis les pieds en Amérique bien qu’il ait été marin, était marié à Julienne Lemarchand (1704-post.1733)[5]« Jean Hervy » (1729-1775) son fils est capitaine de navire.  Il épouse Marie Françoise Chabant[6] à Saint-Malo le 26 février 1754.  Jean et Françoise demeurent à Saint-Malo quoique Jean, par son métier, y soit rarement.  Le couple a un premier enfant prénommé « Guillaume René » à Saint-Malo en 1756.  Marie Françoise Chabant y accouchera de trois autres enfants Hervy : « Jean François » en 1759, « Michel Rene » en 1761 et « Malo » en 1762.  Elle décède par la suite puisque son époux se remariera en 1767[7].

C’est à cette époque que ce capitaine de navire s’amène en Amérique et s’installe à Saint-Pierre avec son fils Guillaume René.  Sa profession lui avait probablement donné l’occasion de faire halte aux îles françaises auparavant.   Jean Hervy fut habitant de Saint-Pierre de Terre-Neuve[8] entre 1767 et 1775.  Il épouse en secondes noces Marie Jérôme Rosse le 3 septembre 1767 à Saint-Pierre[9].  Le couple aura un enfant, « Noel Casimire Hervy » qui naît le 12 juin 1768 à Saint-Pierre et décède tout jeune le 4 novembre 1774 dans son île de naissance[10].  Six mois plus tard, Jean Hervy décède à son tour le 27 avril 1775.  Il est inhumé le lendemain[11].







Celui qui nous intéresse et qui assurera la postérité des Hervy/Harvey aux îles de la Madeleine, « Guillaume René Hervy » (1756-post.1819), le fils de Jean, fait son apparition dans les registres d’Amérique française une première fois alors qu’il épouse à Miquelon la jeune Anne dite Élisabeth Cormier (1769-1842), le 20 mai 1787[12].  Anne, qui est enceinte, est la fille d’un Acadien, Joseph Cormier dit Lemeilleur (1732-1804)[13].  Marie Anne Vigneau dite Maurice (1738-1779), sa mère est aussi native d’Acadie, mais son grand-père est né à l’île d’Orléans[14] (voir l’encadré ci-contre).

Le couple formé de Guillaume René Hervy et de Anne dite Élisabeth Cormier semble s’être établi à Saint-Pierre.  Le territoire avait été restitué à la France en 1783 avec la signature du traité de Versailles.  Ils auront sept enfants connus, dont « Casimir Joseph », né le 25 septembre 1787, et « Isabelle Jeanne » le 9 juin 1790[15].  Comme les baptêmes de ces enfants sont enregistrés à Saint-Pierre, cela confirme que le couple y réside plutôt qu’à Miquelon[16]

En 1792, Guillaume René Hervy et sa famille sont toujours à Saint-Pierre puisqu’il assiste à deux assemblées générales de la commune des Isles Saint–Pierre et Miquelon et qu’il en signe les procès-verbaux[17].




En 1793, Saint-Pierre vivait à l’heure républicaine.  Le 31 janvier, la guerre est à nouveau déclarée entre la France et la Grande-Bretagne. En mai, les Britanniques reprennent l’archipel des îles Saint-Pierre et Miquelon.  La déportation de la population est longue et fastidieuse s’étendant sur plus de douze mois.  Les habitants sont essaimés à tout vent, Halifax, Cap-Breton, Guernesey et même Saint-Malo à la suite d’une révolte des prisonniers sur l’un des navires.  Ils furent transportés en France l’année suivante.



Le couple formé de Guillaume René Hervy et de Anne dite Élisabeth Cormier auront un enfant prénommé, Jean François[18], le seul qui assurera la postérité des Hervy aux îles de la Madeleine.  Il est peu probable que François soit né aux îles françaises de Saint-Pierre et Miquelon, vers 1791, comme nous le laisse croire son registre d’inhumation.  En effet, à son décès en 1881, il sera mentionné qu’il était âgé de quatre-vingt-onze ans.  Les registres des îles françaises de Saint-Pierre et Miquelon, aujourd’hui accessibles, étaient très bien tenus; ils ne font pas état de la naissance de Jean François avant la déportation de 1793.  Au recensement de 1861, ce dernier déclarera être né en France tout comme son fils François Silvain le fera en 1891, déclarant que son père était né en France.  On peut croire qu’il serait né après la déportation des habitants des îles Saint-Pierre et Miquelon par les Britanniques, celle survenue en 1793[19].  On sait par contre qu’il sera majeur lors de son mariage en 1817 ce qui situe assurément sa naissance en 1796 ou avant[20].  Ayant vécu en exil le plus clair de sa vie d’enfant, il est évident que Jean François connaissait très peu de détails relatifs à sa naissance. 

On ne sait pas où la famille Hervy aboutit lors de cette nouvelle déportation, peut-être dans plusieurs endroits entre Halifax, les îles Anglo-Normande et l’Angleterre, car ces réfugiés seront trimbalés ainsi sur plusieurs années avant d’aboutir en France.  On les sait en Bretagne à Port-Liberté vers le début du siècle suivant avec plusieurs autres expatriés[21]Jean François pour sa part fut un temps prisonnier en Angleterre[22].  Est-ce parce qu’il avait tenté de revenir aux îles Saint-Pierre et Miquelon qu’il fut emprisonné en Angleterre loin des siens pendant un certain temps?

L’archipel de Saint-Pierre et Miquelon redevient officiellement français en 1815; la famille Hervy, mais pas tous ses membres, à bord du navire La Caravane, retourne chez elle en 1816[23].  Quand est-il de François (1re génération)? Il n’est pas à bord du même navire et s’il est débarqué à Saint-Pierre, ce n’est pas avec ses parents et ce ne sera pas pour longtemps, car ce pêcheur de métier sera établi sur l’île du Havre-Aubert aux îles de la Madeleine lors de son mariage, en septembre de l’année suivante, alors qu’il y est qualifié de«… domicilié de cette mission»; il y était possiblement dès 1815[24].  L’endroit est le lieu de la première occupation permanente des Îles (1762).  On penchera donc davantage vers l’hypothèse qu’il serait revenu de France directement vers les Îles de la Madeleine avec des Acadiens qu’il avait côtoyés en exil et qui décidèrent d’y tenter leur chance plutôt qu’à Saint-Pierre et Miquelon.  Selon toute vraisemblance, François Hervy ayant vécu loin des siens un certain temps et n’ayant jamais connu les îles françaises de Saint-Pierre et Miquelon, peu de chose le rattachait à cette terre.

À son arrivée aux îles de la Madeleine, l’archipel ne compte qu’environ soixante-dix familles réparties en sept petits hameaux[25].

Il épousera le 9 septembre 1817[26] une Acadienne, Ester (1799-1874), dont la famille est établie aux Îles de la Madeleine dans le hameau de la Grave sur l’île du Havre-Aubert[27].  Née « Louise Ester Vigneau » le 9 janvier 1799[28] et dite « Esther Vignot » lors de son mariage, elle est la fille de François Vigneau (1776-1862) et d’Ursule Cormier (1774-1846).  Cette dernière est apparentée de façon lointaine à Anne Cormier (1765-1842), la mère de François Hervy, puisque toutes deux ont le même ancêtre acadien, le charpentier Thomas Cormier (1636-1689), leur arrière-arrière-grand-père.  Déjà lors de son mariage, François voit son patronyme de Hervy se transformer en Harvy[29].

C’est donc dire qu’à son arrivée dans l’archipel des îles de la Madeleine, François Hervy était en pays de connaissance et de parenté pas très éloignée.  Probablement installés sur l’île du Havre-au-Ber, originalement où étaient les premiers Acadiens, il y est déclaré «pêcheur du lieu» en 1818 et 1821[30] et qui plus est, résident du «grand bassin» sur cette même île en 1826[31].  

François a-t-il gardé contact avec ses parents maintenant revenus dans l’archipel français de Saint-Pierre et Miquelon? Qui sait! La distance peut paraître grande, mais pour ces pêcheurs qui, en mer, se rendaient où les bancs de poissons les amenaient, les distances étaient coutumes.  L’embarcation pontée que devait posséder François, comme la plupart des autres insulaires, lui permettait une grande mobilité jusqu’aux Grands Bancs de Terre-Neuve et tout le long du littoral nord-côtier du Labrador.  On sait les autres membres de la famille de François à Saint-Pierre de Terre-Neuve puisqu’ils y ont laissé de nombreuses traces dans les archives.  Sa mère y décédera en 1842 et son père en 1843[32], son frère cadet Théodore (1806-1884) y aura au moins six enfants avant d’y finir sa vie[33].  Comme nous le verrons, l’une des filles de Théodore viendra rejoindre son oncle François dans quelques années.  Également, l’un des petits-fils de ce dernier, « François Marie Hervy », vivra un court temps aux îles de la Madeleine, moins de dix ans, mais suffisamment longtemps pour y prendre épouse[34].  Il y avait donc encore des échanges entre les Hervy des deux archipels au moins jusqu’à la fin du XIXe siècle.  L’avenir nous démontrera que le migrant François Hervy avait conservé des liens familiaux avec les Hervy de Saint-Pierre de Terre-Neuve.  

François et Esther auront plusieurs enfants (2e génération), neuf connus, dont trois seront baptisés sous le patronyme Harvy, une forme du patronyme qui n’aura pas pris et qui disparaîtra assez rapidement.  Trois porteront le patronyme Hervy amené de France alors que les autres recevront les patronymes Arvis, Hervis et Hervey à leur baptême[35].  

Les enfants de François Hervy et d’Esther Vigneau

Les baptêmes de deux premiers enfants sont inscrits au registre de la mission Notre-Dame de la Visitation du Havre-au-Ber, la première paroisse des îles de la Madeleine fondée en 1793, une année seulement après l’arrivée de l’abbé Alain et ses quelque deux cent vingt-trois fidèles venus de Miquelon.  Ces enfants sont « Casimire Harvy » né le 28 août 1818 et « Narcis Arvis » le 7 avril 1821[36].  Puis les baptêmes des autres enfants seront inscrits au registre de Sainte-Madeleine du Havre-aux-Maisons, mission dont les registres sont nouvellement ouverts en 1824.  Ce sont, « Eléonore Hervis » née le 4 septembre 1824, « François Silvain Harvy » baptisé le 8 octobre, mais né en septembre 1826 à une date que le célébrant ne connaît pas et « Clément Siméon Harvy» né le 6 janvier 1828[37]. 

Mais où vivent donc les Hervy? Ont-ils déménagé? La distance entre les deux chapelles fait un bon trente kilomètres aujourd’hui par la route, mais à cette époque c’est en bateau qu’on allait d’un endroit à l’autre, donc une distance d’environ dix-neuf kilomètres.  On aurait pu croire à un déménagement dès 1824 sur la foi des inscriptions de baptêmes des enfants, mais il n’en est rien probablement parce que le déménagement n’eut lieu qu’entre 1827 et 1831.  Comme il se passe des semaines, voire plusieurs mois, entre les naissances et les baptêmes, le lieu du baptême est sans doute tout simplement relié à l’endroit où le missionnaire était installé lors de son passage aux îles, car il s’agit encore à cette époque de missionnaires.  Ils y venaient pour de courtes durées et résidaient le plus souvent à Havre-Aubert; ils se rendaient d’une chapelle à une autre selon les aléas du climat et les moyens de transport à leur disposition.  La réponse quant au nouveau lieu de résidence de la famille se trouve à mi-chemin sur l’île du Cap-aux-Meules, sans doute plus près de la petite chapelle de Sainte-Madeleine du Havre-aux-Maisons. 

François étant pêcheur, il y a fort à parier qu’il demeure quelque part sur les rives de la baie du Cap-Vert près du Grand-Ruisseau où il est recensé par Pierre Doucet le 30 septembre 1831, avec sa famille complète [38]; le recenseur utilise déjà le patronyme « Harvey » en l’inscrivant.  Aucun enfant n’a encore quitté le toit familial.  « François Harvey » a beau être pêcheur, cela ne l’empêche pas d’occuper une terre de quarante-deux arpents.  Il a su mettre cette terre à profit sans doute à l’aide de son cheval et des bras de ses deux plus vieux, car douze acres sont en culture.  Pour nourrir sa famille, outre la pêche, il possède quatre bêtes à cornes et deux cochons.  Esther peut vêtir ses enfants grâce à la laine de ses six moutons[39]« Angélique Hervey » née le 25 décembre 1841 sera le dernier enfant de François et d’Esther à voir le jour pour lequel on retrouve une trace aux registres paroissiaux[40].  Combien de fois Esther a-t-elle enfantées entre la naissance de Clément en 1828 et celle de sa dernière en 1841? On ne le sait pas précisément[41].  Mais l’on sait cependant qu’au moins trois autres enfants, peut-être quatre[42], sont nés de cette union; Theodore vers 1831[43], Charles vers 1837 et Elizabeth vers 1839[44].    

Après la naissance de la dernière en 1841, leur neuvième enfant connu, François Hervy et Esther Vigneau poursuivront leur vie aux Îles pour encore assez longtemps.  François assumera son rôle de patriarche du clan Hervy plus d’une fois.  Ainsi en 1860, lors de la naissance du sixième fils de son aîné, alors que ce dernier est en mer, c’est François qui ondoie l’enfant[45].  On les retrouve également avec une partie de leur famille encore une fois aux Îles de la Madeleine en 1861.  Les trois plus jeunes enfants, Charles qui a vingt-quatre ans, Elisabeth qui en a vingt-deux et Angélique vingt, vivent toujours sous leur toit.  Le fils aîné Casimire, son épouse et huit de leurs enfants sont les voisins de François et d’Esther[46]; Theodore, leur cinquième fils, vit également chez son frère aîné avec son épouse.  Certains ont prétendu que le couple eut jusqu’à onze enfants, mais ces affirmations ne sont supportées par aucune source.  Seuls neuf enfants sont clairement identifiés par la combinaison des registres paroissiaux, du recensement de 1861 et des suivants. 

Éléonore et Clément Siméon n’apparaissent pas au recensement de 1861.  Ces deux autres enfants ne sont apparus qu’une seule fois dans les registres religieux aux îles, et cela lors de leur baptême respectif en 1824 et 1828.  On les sait toujours vivants lors du recensement de 1831.  On peut probablement les présumés morts en bas âge dans la période de 1831 à 1838, celle pour laquelle les registres de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons ne sont plus disponibles.  De plus, comme les Madelinots n’ont pas été recensés en 1842 et que les documents du recensement de 1851 pour les îles de la Madeleine n’ont pas survécu, il est difficile d’établir avec certitude ce qui est arrivé à ces deux enfants[47].  Quoi qu’il en soit, on ne retrouve pas de traces d’eux chez aucun des membres de la famille et aux recensements subséquents.

En 1859, lors de l’épidémie qui emporta une trentaine de Madelinots de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, aucun Hervy ne fut du nombre[48]

Lors du passage de l’évêque de Charlottetown pour la cérémonie de confirmation du 4 septembre 1848, Théodore, née en 1831 est confirmé.  À son prochain passage le 8 novembre 1860, seuls Charles (1837), Elisabeth (1839) et Angélique (1841) sont confirmés[49].

Pour ce qui est de Charles, le recensement de 1861 sera sa dernière apparition dans les registres civils ou religieux du pays.  Il ne semble pas avoir traversé la frontière non plus.  Pêcheur comme son père et ses frères, aurait-il pu disparaître en mer? Bien qu’il ne s’agisse que d’une hypothèse, elle demeure la plus logique des explications.  Il est peu probable qu’Éléonore, Clément Siméon et Charles, comme bon nombre de Madelinots, se cherchant un avenir meilleur, se soient expatriés vers la baie Saint-Georges à Terre-Neuve, sur les côtes du Labrador, à Lac-au-Saumon dans la vallée de la Matapédia, au Saguenay ou tout simplement se soient fondus dans la foule des Canadiens français des usines et manufactures de la Nouvelle-Angleterre.  On connaît aujourd’hui la trace de tous les Madelinots qui l’on fait et ils ne sont pas parmi eux.    

Au cours des vingt dernières années, les quatre fils de François Hervy et d’Esther Vigneau qui assureront leur descendance se sont mariés.  Casimire et Théodore feront leur vie aux îles de la Madeleine.  François Silvain, après avoir tenté sa chance hors des îles, y sera de retour pour y finir la sienne dès 1881[50].  Nous verrons sous peu ce qui arrivera de Narcis.

Une fois mariés ces fils ont à leur tour des enfants (3e génération) dont certains furent baptisés avec le patronyme qui aura déjà pris la forme Harvey.  Ce sera le cas pour plusieurs enfants de Narcis qui naîtront hors des îles et de deux des enfants de Casimire.  Par contre, la majorité des enfants de ce dernier tout comme tous ceux de Silvain et de Théodore continueront de porter le patronyme Hervy du grand-père.  On retrouve tout de même des enfants nés aux îles portant le patronyme Harvey dès 1844.  Comme l’attestent les registres des différentes paroisses, François et ses fils ne savaient pas signer.  On peut donc comprendre que l’orthographe du patronyme allait au gré des vents qui apportaient les missionnaires, Arvis, Hervy, Harvy, Arvis, Hervis, Hervey et Harvey et cela sans compter l’orthographe utilisée par les recenseurs comme Harvis.  Il faut noter que l’orthographe Harvie encore en usage aujourd’hui n’était pas encore apparue dans les registres à la troisième génération; elle prendra naissance sur l’île du Havre-aux-Maisons à la quatrième génération.

On sait que François et Esther sont toujours aux îles à la fin de 1864 puisque leur fille Elisabeth qui a migré à la Pointe-aux-Esquimaux au Labrador, s’y marie et ses parents sont alors réputés résidents « du havre aux Maisons dans les îles de la Magdeleine »[51].  Ils y sont encore au décès de leur aîné Casimire le 1er mai 1868 alors que François assiste à son inhumation deux jours plus tard[52]François venait de perdre l’un de ses partenaires de pêche.  Sans doute celui qui était maître à bord puisque lui et son fils Sylvain quitteront les îles peu de temps par la suite.  À plus de soixante-dix ans, il ne se voyait sans doute plus capable de reprendre la mer sans lui.  C’est alors que François décidera de partir se réfugier avec sa femme sur les côtes du Labrador, là où vivent déjà deux de ses enfants.       

Pour ce qui est du cadet Théodore, l’autre fils de François et d’Esther, il continuera à pêcher aux îles de la Madeleine jusqu’à sa mort en 1916[53]Angélique, sa sœur cadette demeurée aux îles après le départ des parents, demeurera chez lui jusqu’à son décès.  D’ailleurs tous les enfants de Théodore feront leur vie aux îles de la Madeleine. 

Avant de reprendre un élan dans les années 1880, ils ne seront plus, en 1871, que quatorze descendants de François aux îles de la Madeleine répartie dans quatre familles, toutes résidentes de l’île du Cap-aux-Meules; celle de Théodore, celle de la veuve de feu Casimire avec ses enfants non mariés et celles de deux de ses enfants mariés[54].   

Les petits-enfants de François Hervy et d’Esther Vigneau


Des petits-enfants de François Hervy et d’Esther Vigneau (3e génération), dix-neuf seront baptisés « Hervy » et neuf autres « Harvey ».  Deux porteront le patronyme « Harvis » au baptême et un seul sera baptisé « Harvy », une erreur sans doute, car le même célébrant utilisa la forme « Hervy » lors des autres baptêmes qu’il officia.

Pour la plupart, les descendants de François Hervy et d’Esther Vigneau sont demeurés aux îles de la Madeleine, du moins au XIXe siècle.  Au siècle dernier cependant, la vague migratoire s’intensifia au point où, de nos jours, le nombre de descendants hors des îles est plus grand que le nombre d’insulaires descendants de François Hervy

Les tableaux ci-dessous présentent des données généalogiques relatives aux petits-enfants de François Hervy et d’Esther Vigneau.  Ils sont les enfants de leurs quatre fils, feu Casimire, Narcis, Silvain et Théodore, ceux qui se sont mariés et ont assuré la descendance de François Hervy au Québec. 

Tous les enfants de feu Casimire, Silvain et Théodore sont nés aux îles de la Madeleine.  Dans le cas de Narcis, les six premiers y sont nés alors que les six derniers sont nés à Kegashka au Labrador[51] où lui et sa famille partiront s’établir en 1854, avant que ce territoire soit concédé par la couronne britannique à sa colonie de Terre-Neuve en 1926. 

L’orthographe des patronymes est celle utilisée aux registres paroissiaux lors des baptêmes.  On remarquera que la forme «Harvie» du patronyme, largement en usage au XXe siècle, n’était pas encore apparue à cette troisième génération. 

Les enfants de Casimire Harvy et d’Edélire Poirier

Les enfants de Narcis Arvis et d’Henriette Boudreau

Les enfants de Silvain Harvy et de Geneviève Fugère

Les enfants de Théodore Hervy et d’Eulalie Arseneau

Les migrations des Hervy hors des îles


En 1798, Isaac Coffin (1759-1839), un ancien commandant de navire de la marine anglaise, avait été nommé seigneur des Îles-de-la-Madeleine par les autorités britanniques de Québec.  Coffin voulait des colons anglophones pour ses îles, mais ne pouvait les attirer.  Il tenta en vain de faire déporter vingt-deux des familles venues de Saint-Pierre et Miquelon sous prétexte qu’ils étaient Français, ennemis du Roi et faisaient de la contrebande avec les Américains.  Il tentera plus tard de vendre ou de louer les îles aux États-Unis.  Il proposera également d’annexer les îles à la Nouvelle-Écosse[56].  Jamais les Madelinots ne reconnaîtront l’autorité conférée à ce seigneur par les autorités britanniques.  Coffin obligea les Madelinots à payer des rentes pour occuper les terres qu’ils avaient défrichées et occupées depuis plus de vingt-cinq ans.  Les Madelinots acadiens résistaient au paiement du loyer.  Après la mort du vieux seigneur, ce fut son neveu qui administra sa médecine aux gens des îles.  Au nom de Coffin et de ses descendants, des gérants se succédèrent : Colbeck, Doucet et John Menzie.  Sous ces derniers, le régime des rentes était encore acceptable.  Mais avec l’arrivée de l’italien John Fontana comme gérant au milieu du siècle, tout devint révoltant.  Fontana abusa tyranniquement de son pouvoir et tourna la vie des insulaires en un esclavage unique dans la province en instituant l’expulsion comme châtiment si le censitaire passait plus d’une année sans payer sa rente.  À cette domination féodale s’ajoutait celle des marchands qui pratiquaient une exploitation éhontée des pêcheurs qui tentaient de vendre leur poisson, la rareté du bois, les mauvaises récoltes et de la surpopulation aux îles[57].  Une disette avait sévi en 1847 et l’hiver qui avait suivi avait été très difficile pour les insulaires. 

À la suite de ces misères, les Madelinots se mettent à émigrer.  Dès 1850 un mouvement migratoire s’entame et quelques Madelinots partent s’établir sur la côte ouest de Terre-Neuve à la baie Saint-Georges[58].  Alors que le régime seigneurial avait été aboli en 1854, aux îles il perdurera encore longtemps.  Les Hervy qui demeureront aux îles devront attendre 1898 pour devenir propriétaires de leurs terres.  Si le régime administré aux Madelinots par Coffin et ses héritiers a stimulé les premières vagues d’exode des Hervy/Harvey, la surpopulation et le manque de ressources justifieront les autres vagues, car ils émigreront continuellement par la suite.  La survie des Madelinots de l’époque semble avoir passé par des vagues successives d’émigration du surplus de sa population que les îles n’étaient en mesure de faire vivre.  À chacune des vagues de migration, quelques Hervy/Harvey y prendront part comme nous le verrons[59].

Le Labrador

Cette série de misères et injustices qui perdurèrent pour plus de trente ans et auxquelles étaient soumis les Madelinots explique l’émigration de plusieurs d’entre eux vers de nouvelles terres ou devrions-nous dire vers de nouvelles mers, car les Hervy sont pêcheurs.  La disparition d’un monopole, celui de la Compagnie de la Baie d’Hudson en 1853, allait permettre le peuplement de la Côte-Nord et plus particulièrement les côtes inhospitalières de l’intérieur de la péninsule du Labrador par des gens rêvant d’une vie libre et plus prospère loin du joug des tyrans des îles de la Madeleine à la solde de la famille Coffin.  Il semble bien qu’aucun d’entre eux ne partageait les vues de Jacques Cartier qui, apparemment moins sensible à la rude beauté du lichen, décrivait la région trois siècles plus tôt en « Terre que Dieu a donnée à Caïn » pour le punir[60].

Au Labrador, les Hervy qui n’étaient pas déjà des Harvey le deviendront, car c’est ainsi que le patronyme s’orthographiera pour la plupart dans cette nouvelle contrée.

Commence alors une forte vague migratoire en provenance des îles de la Madeleine.  Les premiers contingents de Madelinots s’établissent à Kegashka[61] et à Blanc-Sablon dès 1854, puis à Natashquan en 1855 et à Pointe-aux-Esquimaux (aujourd’hui Havre-Saint-Pierre) en 1857 et Sept-Îles en 1872.  Ils vont ainsi fonder plusieurs villages de la Côte-Nord.  C’est dans ce contexte qu’en 1854, Narcis (1821-1890), le deuxième fils de François, Henriette Boudreau sa femme et leurs six enfants[62] quittent les îles de la Madeleinepour aller s’établir à Kegashka sur la Côte-Nord du golfe du Saint-Laurent, une cinquantaine de kilomètres par mer à l’est de Natashquan, en face de l’extrémité est de l’île d’Anticosti.  Narcis devient ainsi l’un des trois fondateurs de Kegashka avec Jean Boudreau et Urbain Bourgeois, tous trois originaires de l’Étang-du-Nord, arrivés sur la même goélette[63]Narcis y vivra de pêche à la morue et au hareng ainsi que de la chasse au loup-marin.  Ce sont cent vingt familles des îles qui s’établissent ainsi dans des villages de la Côte-Nord dont trois sont fondés par eux, Kegashka, Natashquan et Pointe-aux-Esquimaux. 

Alors que les pêches ne sont plus ce qu’elles étaient depuis quelque temps à Kegashka, Narcis aura deux bouches de moins à nourrir quand il marie les deux plus vieilles de ses filles en 1869.  Marie (1846-1934) l’aînée épouse Bertrand Derapse (1840-1914), un Madelinot ayant migré au Labrador comme elle et sa famille. Sophronie (1847-1934), la seconde, se laisse enjôlée par François Désiré Champion (1831-1906), un chanteur de première force qui a beaucoup diverti les familles de pêcheurs avec ses chansons depuis son arrivée au Labrador vers 1856.  Il a pour surnom La Clef.  Ce français d’origine natif de Dammartin-en-Goële, petite commune à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Paris, est sans doute passé d’abord par l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon.  Il est établi non loin, à l’ouest de Cocochoo[64].  Le double mariage est célébré à Kegashka[65].

Elisabeth (1838-1916), sœur de Narcis, quant à elle s’établira à la Pointe-aux-Esquimaux un peu après 1861.  En 1864, plutôt que de piger comme mari l’un des nombreux Madelinots, plus souvent d’origines acadiennes débarquées au Labrador comme elle, Elisabeth choisit l’exclusivité, l’un des deux Canadiens français qui y résident[66].  Mathias Roberge (1839-c.1892), originaire de Saint-Pierre de l’Île-d’Orléans, était venu au Labrador « garçon en 1860 à bord de la “Mermaid” » pour se faire pêcheur[67]Elisabeth après la mort de son frère aîné aux îles de la Madeleine en 1868, ne tardera pas à faire venir ses vieux parents, car en 1871, on retrouve François Hervy et son épouse Esther Vigneau chez elle à la Pointe-aux-Esquimaux au Labrador[68]

Incohérence accidentelle d’un recenseur qui avait toute une côte à énumérer en parcourant de longues distances par bateau, Esther Vigneau fut inscrite deux fois au même recensement.  Elle se trouvait chez son fils Narcis à Kegashka, probablement à préparer le grand départ de la famille qui s’apprêtait à quitter les lieux, lors du passage de l’énumérateur[69].  Comme aux îles de la Madeleine, une fois au Labrador, François Hervy continuera de vivre de la pêche. 



C’est à cette même époque, le 27 mai 1871, qu’arrive des îles de la Madeleine une nièce de François à bord de la «Victoria» avec deux autres familles.  La goélette était partie pour les îles de la Madeleine vers le 15.  « Eliza Jane Hervy » (1849-1921) est la fille de Théodore (1806-1884), le frère cadet de François demeurant toujours à Saint-Pierre de Terre-Neuve dans l’archipel français de Saint-Pierre et Miquelon.  Eliza Jane dite Élisa débarquait avec son mari, un français nommé « Pierre Chéri Demasson » (1839-191
6), charpentier de navire de son métier.  Eliza après son mariage à Saint-Pierre, s’était établie avec sa famille pour quelque temps aux îles de la Madeleine.  Elle était venue rejoindre son oncle François et sa famille au Labrador.

François avait donc gardé contact avec sa famille de Saint-Pierre de Terre-Neuve comme on l’avait supposé[70].  Le contraire aurait été surprenant compte tenu de la contrebande à laquelle s’adonnent les pêcheurs du Labrador avec les gens de l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon depuis leur arrivée sur ces côtes.  Cette contrebande de boisson et autres produits est une source de revenus importante se substituant aux poissons quand la pêche est misérable.  La goélette la Sainte-Anne de Narcis, malgré son nom, servira à ce trafic de boisson.  On cachait alors la cargaison en quelques endroits connus des capitaines jusqu’à son départ pour les villes en amont sur le fleuve, surtout Québec[71]

 

Cette contrebande dure depuis que l’archipel est française et que le Canada ne l’est plus.  Pendant longtemps comme on l’a vu, les Harvey, navigateurs de l’île-aux-Coudres, descendants de Sébastien Hervet l’on pratiquer.  Dans ma jeunesse, la mère et la grand-mère d’un copain, résidants en face de chez-moi, étaient toutes deux des Saint-Pierraises de l’archipel.  J’ai retenu leur patronyme, car il différait de ceux de mon entourage : elles étaient des Mainguy.  Chaque année, la famille recevait, je ne sais de quelle façon, un arrivage de produit de France.  Mon père qui était ami avec le père de cette famille profitait à sa façon de ce qu’il disait être de la boisson de contrebande.

 

Mais revenons à Élisa Hervy.  Cette dernière entretiendra des liens étroits avec la famille de son oncle.  En 1874 par exemple, lors du baptême de sa fille Marie Egilda en la chapelle Saint-Pierre de la Pointe-aux-Esquimaux, elle choisira «Absolon Harvy, fils de Casimir Harvy pêcheur des Isles de la Madeleine, représenté par Mathias Roberge» comme parrain.  Le parrain n’étant pas présent, puisqu’il est en mer, est représenté par l’époux de sa cousine Elisabeth qui vit à cet endroit[72].  Eliza Jane Hervy sait écrire et elle orthographie le patronyme selon la forme originale des îles Saint-Pierre et Miquelon, soit « Hervy ».  D’ailleurs lors du baptême on insistera probablement sur ce détail puisque son patronyme est inscrit « Hervy » alors que celui d’Absolon, le parrain et de Casimire, le père d’Absolon est inscrit « Harvy ».  Eliza Jane n’était pas la première Hervy de la famille à se réfugier sur les côtes de l’intérieur de la péninsule du Labrador et elle ne sera pas la dernière[73] puisque le flot des arrivants des îles est constant depuis quelques années en raison en autres de la surpopulation.  Cette année-là, à la Pointe-aux-Esquimaux uniquement, c’est onze familles qui sont arrivées des îles[74].

 

Dix-sept ans après sa fondation, le village de Kegashka est abandonné par sa population[75]. L’endroit se vide définitivement à la suite d’une épidémie de diphtérie et d’une mauvaise année pour la pêche.  Narcis aura perdu un fils emporté par cette épidémie.  Les expatriés expliqueront leurs départs de l’endroit par l’éloignement du bois de chauffage et de construction, l’insuffisance du havre où les goélettes ne pouvaient tenir convenablement à l’automne et l’éloignement d’un prêtre qu’on peut rejoindre en cas de maladie.  Narcis et sa famille, à bord de sa goélette nommée la « Day Spring », ainsi que quatre autres familles, quittèrent Kegashka le 10 novembre 1871 pour aller s’établir à Betchouane[76], lieu situé à un peu moins de vingt-cinq kilomètres de la Pointe-aux-Esquimaux[77], entre cette pointe et Piastre Baie[78].  Betchouane était inhabité à leur arrivée; il y avait bien eu un français nommé Laruelle qui s’y était établi dès 1858, mais en 1865, il avait déserté le lieu pour s’établir à la Pointe-aux-Esquimaux.  Dix ans plus tard, il y avait déjà à Betchouane une trentaine de familles.   Outre toute la population de Kegashka qui y était arrivée en bloc, un certain nombre de parents madelinots et de Canadiens de la Côte avaient grossi le nombre d’habitants.  Celui que l’on surnommait Coco[79], n’y sera pas en reste de malheurs.  En novembre 1875 la goélette de Narcis, la «Day Spring», s’échoue sur la côte par un coup de vent d’est; elle sera hivernée sur l’île du Phantome[80], à une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Betchouane, le temps de la radouber pour repartir le printemps venu[81].  

L’année précédente avait bien mal commencé pour la famille du patriarche François Hervy.  Au printemps, la famille apprenait la nouvelle du décès de la cadette Angélique restée aux îles de la Madeleine.  La célibataire s’était éteinte le 14 février au Havre-aux-Maisons à l’âge de trente-deux ans[82]François et Esther n’ont plus que quatre enfants vivants.  François continuera de vivre de ses prises en mer jusqu’à la fin de ses jours ou du moins jusqu’à la mort de sa femme, à la fin de cette même année funeste alors qu’il est encore qualifié de pêcheur.  En effet, le 1er décembre 1874, Esther Vigneau, la matriarche du clan, s’éteint à l’âge de soixante-quinze ans[83].  Son époux lui survivra six ans.

Toujours à Betchouane l’année suivante, Narcis perd sa fille Luce, morte en couche sans secours médical en plein mois de février 1875.  L’endroit, éloigné de cinq lieues de la Pointe-aux-Esquimaux, est alors si peu fréquenté qu’il faudra attendre en janvier de l’année suivante pour qu’on bénisse la fosse[84].  Elle le fut par un jeune missionnaire en Minganie et à l’Île d’Anticosti qui avait Pointe-aux-Esquimaux comme port d’attache, Joseph Arthur Chalifour, parti de la pointe en traîneau à chien, atteignit Betchouane en trois heures[85]

 

Pendant ce temps, à la Pointe-aux-Esquimaux, le mari d’Elisabeth Hervy s’en tire assez bien.  En août 1875, Mathias Roberge achète la goélette la « Marie-Louise » des marchands Turgeon & Corriveau.  Il possédait déjà la « Marie-Anne ».  Alors que ses deux goélettes sont déjà à l’eau claire dans le havre le 1er février 1876, il peut espérer des revenus intéressants pour sa famille[86].

François Hervy, le patriarche de la famille arrivé de France aux îles de la Madeleine décède le 16 février 1881.  Il est inhumé sous le nom de « François Harvey » le même jour dans le cimetière de sa nouvelle terre d’accueil à la Pointe-aux-Esquimaux[87].  Son gendre Mathias Roberge marié à sa fille Elisabeth et Pierre Demasson époux de sa nièce de l’archipel Saint-Pierre et Miquelon, débarqué au Labrador depuis dix ans, procèdent à son inhumation.  Bien que le géniteur de cette grande famille française ait fini sa vie sur les côtes du vieux Labrador, en 1881, huit familles porteuses de son patronyme vivaient toujours aux Îles-de-la-Madeleine.  En comptant François et Esther dans ce petit nombre des Hervy expatriés, déjà quatre familles de sa descendance résident maintenant hors de l’archipel, celles de Narcis et celles de ses fils Benoni et Thadée qui sont sur la Côte-Nord au Labrador[88].

Parmi les descendants de François Hervy, les côtes du Labrador ne firent pas qu’attirer son fils Narcis et sa fille Elisabeth.  Certains des enfants de ses autres fils vinrent y rejoindre le clan Hervy qui y est depuis trente ans.  Ce fut le cas, en autres, de Philippe (1855-1925) chez son fils Silvain (1826-1911) avec sa famille vers 1882[89].

Au printemps 1883 Jean Thadée, un des garçons de Narcis, se noie alors qu’il était à la chasse au loup-marin; il n’avait pas trente ans et laissait une femme, Marie Desneiges Gallant, et quatre ou cinq orphelins derrière lui.  Quelques semaines plus tard, «durant la première quinzaine de juin» Narcis «était en frais de partager avec son équipage la poudre qui lui restait du voyage du loup-marin, et pendant que la poudre était dans des plats et assiettes pour la partager, quelqu’un passa au-dessus avec sa pipe allumée, la poudre a pris feu et les quatre murs de la maison avec le toit ont tombé, et tout ce qu’il y avait de vaisselle et de vitre a été cassé».  Quelques occupants de la maison eurent la «figure brûlée ou aveuglés pour sept ou huit jours»[90].  Comble de malheurs, il doit se départir de sa deuxième goélette, la Sainte-Anne, afin de s’acquitter de ses dettes envers Turgeon et Corriveau, des traiteurs de peaux de Québec établis au Labrador[91].

Ces épreuves et des années de mauvais rendement à la pêche et de la chasse amenèrent Narcis et les autres à vivre en nomade et s’installer à différents endroits sur la Côte-Nord là où l’on croyait que les prises allaient être meilleures.  Après l’incendie de sa maison, avec ce qui lui reste de famille, il se réfugie alors à l’île d’Anticosti chez son fils Jean Édouard (1857-1916)[92]. 

Dans les années 1880, après le décès du patriarche François, la vie de pêcheur sur les côtes du Labrador pour certains des enfants n’avait plus réussi à mettre suffisamment de pain sur la table pour le nombre de petits Harvey qui y naissaient.  La pêche et le prix de son fruit étaient en chute libre.  Depuis le début de la décennie, la chasse au loup marin et la pêche à la morue étaient à peu près nulles, et l’hiver de 1885-86 fut terrible à passer[93].  Le rêve d’une vie libre et prospère, affranchi d’un seigneur tyrannique ne s’était pas davantage réalisé au Labrador.

La Beauce

C’est alors qu’une migration aussi importante que celle de 1854 s’opère.  En effet en 1885, l’abbé François de Borgia Boutin (1847-1919), natif de Saint-Georges de Beauce arrive à Natashquan comme missionnaire.  Devant la misère et la disette des pêcheurs causée par les pêches infructueuses, ce dernier organise, avec l’aide du gouvernement, le déplacement de toute une population, pour les installer sur des terres de la couronne dans la région de la Beauce. 

C’est en 1886 que la débandade commença à Betchouane, comme ailleurs sur les rives de l’intérieur de la péninsule du Labrador; «on s’en allait à Québec, à la Beauce, aux îles de la Madeleine, à la Gaspésie, à Goynish[94] et ailleurs.».  Cette migration s’étalera sur deux ans.  À l’automne de 1889, il ne restera plus qu’un habitant à Betchouane, lui-même abandonna alors sa place et alla s’établir à la Pointe-aux-Esquimaux[95].  Le reste de cette côte de l’intérieur de la péninsule du Labrador se videra de la moitié de sa population.

1886 c’est aussi le départ de quarante-cinq familles qui quittent les côtes du Labrador.  Parmi elles, plusieurs des Hervy/Harvey de 2e, 3e et 4e générations.  Le matin du 26 septembre, le vapeur Napoléon III les prendra à son bord alors qu’elles partaient pour s’établir en Beauce « résolues d’échanger filets et barques contre la hache du bûcheron et la charrue du laboureur ».  Au premier quai, celui de Pointe-aux-Esquimaux les deux premières familles s’embarquent dont celle de Philippe Hervé (Hervy) à Silvain[96], le dernier des descendants de François à être débarqué au Labrador.  Après s’être rendu à Betchouane, à Piastre Baie, à Aguanish, puis à l’île à Michon, le Napoléon III accoste à Natashquan où plusieurs familles étaient parées pour le long voyage.  De là, le bateau se rendit à l’île d’Anticosti pour l’ultime arrêt, où les derniers passagers allaient se joindre aux autres familles avec lesquelles ils feraient le voyage.  Narcis, sa femme, les célibataires Louis André et Philomène, Joseph Cléophas le cadet et Édouard, orphelin de feu son fils Thadée, se trouvaient également à bord comme la majorité des familles migrantes s’y trouvaient[97].  Ils ne sont pas seuls, car c’est tout le clan de Narcis qui émigre.  Du moins ce qu’il en reste, car trois de ses enfants ont laissé leur peau sur les côtes du Labrador.  Ceux qui partent et qui se feront Beaucerons sont les familles de François Bénoni de Betchouane, Christine et Marie Louise de Natashquan, Sophronie de Pointe-aux-Esquimaux, Marie Esther et Jean Édouard de l’île d’Anticosti[98].

Le voyage fut long et pénible en raison des vents.  Après avoir remonté le fleuve Saint-Laurent, le vapeur fait son entrée dans le bassin Louise à Québec le 6 octobre où ils débarquent.  Ils sont amenés à Lévis où ils logent à l’Anse Tibbits, dans les hangars des émigrés, au terminus du chemin de fer du Grand-Tronc.  Huit ou dix jours plus tard[99], ils sont dirigés par train, vers un hôtel de Saint-François-de-Beauce[100] où ils sont pris en charge pour quelque temps.  Une fois que la terre leur est attribuée, au sud de Saint-Georges ils traversent à gué la rivière du Loup où des paroissiens de Saint-Côme et de Saint-Georges les transportent avec leurs voitures pour les amener à Saint-Côme de Kennébec.  Ils seront accueillis à la maison des mines de Saint-Côme avant de se bâtir, s’installer pour passer du métier de pêcheur/chasseur à celui de cultivateur[101].  La plupart s’installent à Saint-Zacharie-de-Metgermette dans le rang II, la concession des Acadiens[102], d’autres à Saint-Théophile qu’ils contribuent à fonder; un certain nombre choisiront Saint-François.

Parmi les Harvey ayant pris racine en Beauce, on note Sophronie (1847-1934), fille de Narcis et d’Henriette Boudreau. Mariée à François Désiré Champion en 1869 à Natashquan, elle et sa famille avaient migré en Beauce en même temps que son père en 1886.  Deux de ses neuf enfants y verront le jour.  On a vu que les Hervy/Harvey gardaient contact.  Que ce soit entre les deux archipels, celle de Saint-Pierre et Miquelon et celle des îles de la Madeleine ou avec leurs parents du Labrador.  Preuve qu’ils continueront ce réseautage familial, en 1906, dix-neuf jours après le décès de l’époux de Sophronie, des lettres arrivées à bord du navire «King Edward», annoncent sa mort aux Harvey des côtes du Labrador[103].  Sophronie « Hervé » née Hervy quant à elle, décédera le 12 mai 1934 dans son village d’adoption de Saint-Zacharie.  Fille de pêcheur, elle s’était faite femme de fermier[104].  

Peu des Harvey du Labrador demeureront en Beauce comme nous le verrons.  Louis (1864-1946), un jeune frère de Sophronie de dix-sept ans son cadet, y fera des séjours épisodiques.  Venu avec sa famille lors de l’exode du Labrador de 1886, alors qu’il n’était pas encore marié, il s’y trouva une épouse deux ans plus tard[105].  C’est donc marié à Salomée Lebel qu’il repartit vers les côtes du Labrador avec la plupart des pêcheurs de sa famille moins de dix ans plus tard.  On le sait de retour à Aguanish sur la Côte-Nord en 1895[106].  En avril 1909, leur fille Philomène qui travaille à Rivière-Pentecôte se marie.  Louis qui assiste au mariage n’en repartira plus.  Après que Salomée eut donné naissance à son dernier enfant l’année précédente à Aguanish et après en avoir perdu un autre la même année, Louis et Salomée repartent avec leur fille Clarisse, mariée depuis 1908[107].  Il établit donc sa famille dans ce village de Rivière-Pentecôte sur la Haute-Côte-Nord, à quatre cents kilomètres plus à l’est d’Aguanish. 

Il était pêcheur, mais à Aguanish il se fait journalier.  Lui et Salomée ainsi que quatre de leurs enfants demeurent toujours à Rivière-Pentecôte en 1911.  Louis travaille au moulin de pulpe[108].  Il n’y sera pas longtemps puisqu’en 1912 il se fixe à Clarke City où il est journalier[109].  Encore une fois, il n’y sera pas dix ans.  Louis et une partie de la famille retournent à Saint-Zacharie-de-Metgermette en Beauce.  Ils y sont dès 1916.  Ses fils y trouvent facilement du travail comme bûcheron de l’autre côté de la frontière à Jackman au Maine.  Comme bien d’autres Harvey de la région, on retrouve de nombreuses traces de leurs multiples passages à la frontière[110].  Mais Salomée a assez donné; Louis ira où il voudra, pour elle la route prend fin en Beauce alors qu’elle y décède le 19 septembre 1918.  Elle n’avait que cinquante-deux ans[111]

Deux ans plus tard, Louis perd Cléophas (1892-1920), son aîné, qui décède accidentellement à Saint-Zacharie[112].  En 1921, Louis et son fils Alphonse (1897-1986), maintenant marié[113], sont voisins dans cette même paroisse et tous deux cultivateurs[114].  C’est ce fils qui en quelque sorte est devenu son poteau de vieillesse.  Le couple aura sept enfants en Beauce.  Le 22 février, alors que son épouse est enceinte, Alphonse est parrain de Marie Marguerite Aurore Harvey, née de parents inconnus cinq jours plus tôt[115].  Est-ce la raison de l’éclatement de la famille? On peut en douter, car le départ des Harvey de Saint-Zacharie au milieu de cette décennie s’inscrit dans la suite d’un autre de ces mouvements migratoires qui ont caractérisé la famille. 

La Beauce se vide donc de ses Harvey, du moins de ceux venus du Labrador.  Alors que ses enfants Philomène, Clarisse et Alphonse partent avec leur famille respective pour Saint-Romuald de Moffet au Témiscamingue, Louis, à près de soixante-dix ans, reprend le bâton de pèlerin et part vivre avec Philias, le plus jeune de ses fils, dans la région de Matane où sa fille Résine (1895-1982) est établit avec son second mari.  Il décédera le 9 novembre 1946 à Saint-René-de-Matane au Bas-Saint-Laurent.  Il avait quatre-vingt-deux ans.  Louis, qui vécut à de nombreux endroits, est une caricature assez exacte des tribulations de bien des Hervy/Harvey à la recherche d’un avenir meilleur. 

Les Hervy/Harvey ne furent pas nombreux à demeurer à Saint-Zacharie-de-Metgermette ou à Saint-Théophile.  Néanmoins, il y a encore aujourd’hui des descendants de Narcis (1821-1890) en Beauce.

Le Manitoba

Si la famille de Narcis et quelques-uns de ses neveux ont quitté le Labrador pour la Beauce, la cousine française Eliza Jane Hervy et sa famille prennent une tout autre direction, soit le Manitoba.  Pierre Cheri DeMasson, son mari charpentier de navires, y obtiendra une concession de cent quatre-vingts acres en 1892[116].  Comme il fit la demande pour cette terre de Wakopa le 29 avril 1889, on peut présumer que la famille quitta le Labrador à la même période que les autres Hervy/Harvey ou peu de temps par la suite.  L’endroit où la famille d’Eliza s’établit est à l’époque encore un poste de traite et un point de jonction sur l’ancien sentier de la Commission des frontières à moins de dix kilomètres des États-Unis.  On vient tout juste d’y construire le premier moulin à farine de la région dont la famille fera largement usage puisqu’elle deviendra un riche clan d’agriculteurs.  La présence à compter du début du siècle prochain d’une gare du Great Northern Railway entre le Dakota du Nord et Brandon au Manitoba favorisant le transport et la vente du blé contribuera grandement à la richesse de la famille.  La nièce du migrant François Hervy, fille du pêcheur Théodore de Saint-Pierre et Miquelon, avait donc ainsi tiré son épingle du jeu.

Retour à la mer, le vieux Labrador 

Comme on l’a vu avec Louis à Narcis chez François le migrant, alors que certains Harvey prendront racine en Beauce pour au moins une cinquantaine d’années, plusieurs n’y seront pas dix ans.  Ils quitteront Saint-Zacharie de Metgermette et reviendront sur les côtes de l’intérieur de la péninsule du Labrador une fois les problèmes des pêches terminés.  Ils continueront de peupler le vieux Labrador du temps, aux confins de la Haute-Côte-Nord d’aujourd’hui, à la porte de la Basse-Côte-Nord.  Plusieurs de ces Harvey pêcheurs ne souffrir pas longtemps de la nostalgie de la mer.  On ne transforme pas facilement en agriculteurs des pêcheurs dont la tradition séculaire de vivre de la mer remonte à sept générations.


Narcis à François quant à lui reviendra à la mer alors qu’il a plus de soixante-quinze ans, cette fois-ci soixante-quinze kilomètres plus à l’est, à Aguanish.  Certains de ses enfants le suivront à nouveau.  Narcis, le père de cette famille que l’on surnommait Coco, y finira sa vie en 1898[117].  Il était « le plus ancien des colons qui ont habité Kegashka en 1854, c’est-à-dire un des trois premiers qui ont quitté les îles de la Magdeleine pour venir habiter la côte du nord »[118].  

Sa famille se dispersa.  Outre les enfants de feu son fils Thaddée (1853-1883), trois de ses enfants vivront au Labrador : Édouard (1857-1916), Christine (1861-1938) et Joseph (1868-1950), deux finiront leur vie à Néguac au Nouveau-Brunswick, un autre à Saint-René-de-Matane, un à Avon au Maine et un au Témiscamingue.  Finalement, un seul de ses enfants finira ses jours en Beauce.  

D’autres Hervy/Harvey des îles de la Madeleine se joindront à ceux qui sont déjà établis sur les côtes du Labrador au fil des décennies, mais au début du XXe siècle, c’est surtout à Clarke City que de nombreux Madelinots vinrent travailler à l’usine de pulpe des frères Clarke.  Signalons la présence d’un deuxième fils de Silvain (1826-1911) à François.  En effet, François (1867-1918), son cadet, arrivé depuis peu à Clarke City pour y travailler, y décède le 16 octobre 1918 après avoir contracté la grippe espagnole [119].

Beaucoup des descendants de ceux qui sont revenus au Labrador pratiquent toujours le dur métier de pêcheur sur la Côte-Nord de nos jours. 

Vallée de la Matapédia

À la fin du XIXe siècle, le nombre d’individus aux Îles de la Madeleine à beaucoup augmenter.  Comme à plusieurs reprises dans la courte histoire des îles, les ressources ne sont plus suffisantes pour faire vivre toute sa population.  En 1896, une nouvelle migration s’organise.  Profitant de l’aide qu’offrait le gouvernement pour s’établir sur des terres fertiles, une vingtaine de familles partent s’établir comme colons dans la vallée de la Matapédia au Bas-Saint-Laurent.  Ils arrivent donc par train le 7 août 1896 pour défricher et coloniser un endroit qui allait devenir dans quelques années Lac-au-Saumon.  C’est dans le rang numéro trois du canton Humqui, dans ce qui n’était alors qu’une forêt, qu’une bonne partie de la horde de Madelinots échoue.  D’autres familles suivront. 

Ainsi, Silvain (1826-1911) à François voit ainsi partir deux de ses filles, Séraphine d’abord et Lédée par la suite.   Séraphine (1857-1908) avec ses neuf enfants nés aux Îles débarquent du train au printemps 1898 avec dans ses bras, son plus jeune né au mois de novembre précédent.  Son mari, Placide Cyr (1855-1942), arrivé l’été précédent, vient de compléter la construction de leur maison située sur le lot vingt-deux du rang IV du canton Humqui.  Lédée (1864-1912) quant à elle arrive à Lac-au-Saumon en 1902 avec Dominique Cummings (1867-1907) son mari et ses trois enfants.  La famille s’installe dans le troisième rang du canton Humqui.  Les deux sœurs Hervy (Hervey dans la Vallée) finiront leur vie dans la vallée de la Matapédia[120].

Témiscamingue

La crise économique de 1929 a comme conséquence une grande misère.  Le gouvernement du Québec offre alors des primes d’aide aux défrichements de terres sauvages.  Le Témiscamingue est parmi les terres envisagées pour l’établissement de colons.  Des subventions sont attribuées pour l’ouverture de chemins.  L’abbé Louis-Zéphirin Moreau (1887-1960) est nommé missionnaire colonisateur pour le Témiscamingue, poste qu’il occupera de 1930 à 1933. 

En 1930, il parcourt le sud du Québec afin de recruter des colons.  À Saint-Zacharie en Beauce, il fait une grosse prise : vingt familles de l’endroit quittent tout leur acquis pour aller s’établir à un endroit du Témiscamingue qui deviendra sous peu Moffet.  Saint-Zacharie de Beauce n’avait pourtant que cinquante ans; sans doute que la terre et ses forêts avoisinantes n’y offraient plus l’avenir souhaité pour ces cultivateurs bûcherons.  Il faut dire qu’avec la crise économique le travail dans les chantiers l’hiver, source majeure de revenus, avait passablement diminué.  

À l’automne 1931 ces Beaucerons, encouragés par les « primes de défrichement et de premiers labours », effectuent « le voyage à pied et en charrettes tirées par des chevaux. »  Ils deviennent des squatters, car ils ne possèdent pas encore de titres de propriété.  On tentera de les déloger, mais le missionnaire interviendra.  Ils bâtissent des cabanes et travaillent aux chantiers avoisinants. Certains d’entre eux retournent en Beauce chercher leurs familles.  Ils prendront un camion pour emmener leurs familles sur leurs nouveaux lots de colonisation.  Cette vingtaine de familles qui s’établissent autour du lac Rond et en bordure du lac des Quinze dans le canton Brodeur, fondent Saint-Romuald de Moffet[121].   

Parmi ces premières familles beauceronnes à s’établir dans la région, on compte celle de Philomène Harvey (1866-1943) à Narcis (1821-1890) chez François.  Huit de ses enfants, dont sept déjà mariés, suivront la famille dans l’aventure.  Deux autres de ses filles mariées resteront derrière, l’une d’elles finira sa vie en Beauce et l’autre à Willimantic au Connecticut.  En trois générations, une descendante du migrant Hervy partie de la France pour s’établir aux îles de la Madeleine arrive dans le nord-ouest du Québec après être née au Labrador et avoir vécu en Beauce.  

Trois des enfants mariés de sa sœur Sophronie Harvey (1847-1934) à Narcis (1821-1890) chez François le migrant sont aussi partis du premier contingent de Beaucerons parti fonder Moffet.  C’est donc dire que la prise du missionnaire colonisateur s’était largement fait chez les Harvey puisque des vingt familles qui partent, sept sont apparentés à Philomène; en comptant la sienne et trois à sa sœur, c’est la moitié du contingent provenant de la Beauce.

Quelques années plus tard Odina, l’une des filles de Philomène Harvey, mariée à son neveu Alphonse Harvey (1897-1986) à Louis (1864-1946) chez Narcis vient s’établir à Saint-Romuald de Moffet avec sa famille de sept enfants.   On se souviendra que l’année avant leur arrivée au Témiscamingue, Alphonse avait été parrain de Marie Marguerite Aurore Harvey, née de parents inconnus alors que son épouse était enceinte.  Quoique l’on ne puisse établir de lien entre cet évènement et le départ de la famille pour Saint-Romuald de Moffet, on peut se demander pourquoi cette famille n’avait pas quitté la Beauce en même temps que les autres, alors que des primes aux défrichements étaient encore offertes.  Alphonse ne part pas seul avec sa famille, il est accompagné de sa sœur Clarisse (1890-1975) et de sa famille également[122].

Les descendants de ces familles se sont dispersés au Témiscamingue, en Abitibi et dans les villes avoisinantes de l’Ontario. 

Saguenay

En 1911, on entame la construction des installations d’une usine de pâtes et papiers de la Price Brothers and Company à l’endroit où, l’année suivante, allait être érigée la municipalité de Kénogami.  L’endroit est rapidement envahi par de jeunes Madelinots en quête d’un travail payant.  Entre 1912 et 1922, le nombre de maisons à Kénogami passera de quarante à trois cents, si bien qu’en 1925, on y comptera déjà cent quarante familles provenant des îles de la Madeleine.

En 1925, c’est au tour de l’Alcan d’ouvrir ses portes à Arvida pour produire de l’aluminium en 1925.  Encore là par le réseautage familial, d’autres Madelinots sont attirés au Saguenay et ils continueront ainsi pendant plusieurs années.  La plupart venaient des îles, mais certains étaient de Clarke City.  Partis des îles, comme on l’a vu, plusieurs Harvey madelinots on fait des passages dans cette ville de la Côte-Nord où ils travaillaient pour le moulin de pâte et papier avant d’aller s’établir ailleurs. 

Parmi ces familles venues au Saguenay on compte encore une fois des Hervy/Harvey.  Entre autres, « Paul Harvie » à Gabriel Harvie (1870-1914) à Hippolyte Harvey (1848-1916) chez Casimire (1818-1868).  Célibataire, il part rejoindre d’autres Harvey travaillant à l’usine de pâte et papier de Clarke City sur la Côte-Nord.  Il y est en 1921[123].  Il n’y sera pas longtemps puisqu’il se marie à Kénogami en 1926[124].  Il fera sa vie au Saguenay où le couple y aura tous ses enfants entre 1926 et 1944.  En 1941, une grève éclate à l’usine d’Arvida.  Les ouvriers font la grève durant cinq jours et occupent l’usine. Les ouvriers de la construction suivent le mouvement et débraient également. Le mouvement de grève atteint vingt mille personnes. Le secteur de l’aluminerie est alors considéré comme essentiel à l’effort de guerre.  Le gouvernement intervient alors rapidement en dépêchant l’armée en vertu de la Loi sur les mesures de guerre.  Des dissensions importantes surviennent dans la communauté des Madelinots de la région en raison de cette grève.  Paul et sa famille quittent la région pour le nord-ouest de l’Ontario.  Il décède à Nipigon en 1964.  D’autres également : « Paul Émile Harvey » (1920-1989) à Saül (1893-post.1838) à Uriel (1864-1926) chez Théodore (1831-1916) qui se marie à Kénogami en 1943[125] et reviendra mourir aux Îles-de-la-Madeleine; aussi, des enfants d’Étienne Harvey (1889-1964) à Louis (1846-1927 chez Casimire (1818-1868) comme Léonora (1920-2013) qui se marie à Kénogami en 1944[126].  Elle y passera toute sa vie.

Mauricie

L’expérience des Madelinots pour le travail dans les moulins de pâte et papier ne se limite pas à leurs passages à Clarke City sur la Côte-Nord ou à Kénogami au Saguenay.  Ils s’établiront dans la région de Trois-Rivières en Mauricie également.  En 1924, ils sont déjà une quarantaine de familles originaires des îles de la Madeleine établies au Cap-de-la-Madeleine autour de l’usine de pâte et papier de la St-Maurice Paper Co.  Plus tard, alors que les hommes travaillent toujours dans les moulins et les différentes industries de la région, bien des femmes profiteront de l’ouverture de la Canadian T.S.R. of Lyons en 1928 et des centaines d’emplois qui s’offre à eux.  Un grand nombre de filles et de femmes originaires des îles viendront y travailler à tisser la soie.



Parmi les familles dans le secteur à cette époque, on compte celle d’Alfred Harvé (1894-post.1964) à François Hervy (1867-1918) chez Silvain Harvy (1826-1911).  Alfred ne fera qu’un passage de quelques années au Cap-de-la-Madeleine.  Marie Rosalie Harvé dite Rosela (1898-post.1964) à Absolon Hervy (1854-1916) chez Casimire Harvy (1818-1868), son épouse et petite-cousine, y aura deux enfants en 1923 et 1926[127].  Ils repartirent par la suite s’établir à demeure à l’ombre d’un autre moulin, celui du quartier Limoilou à Québec.    

Si Alfred ne fit que passer en Mauricie, d’autres y laisseront de nombreux enfants et y finiront leur vie.  C’est le cas de Wellie Harvé (1895-1967) à Mathias Hervy (1866-1915) chez Théodore Hervy (1831-1916).  Après s’être marié aux îles de la Madeleine en 1927, on le retrouve dès 1929 au Cap-de-la-Madeleine où lui et Gertrude Arsenault auront plusieurs enfants, le dernier en 1951[128].

Plus tard, il y eut aussi Placide Harvey (1918-1968) à Théodore Harvey (1888-1919) à Hyppolite Harvey (1844-1916) chez Casimire Harvy (1818-1868).  En 1940, il épouse, au Cap-de-la-Madeleine, une fille des îles y ayant aussi migré.  Le couple fera sa vie à cet endroit où ils auront neuf enfants entre 1941 et 1955[129].

Québec

Québec et Montréal, bastions de l’industrie manufacturière au tournant du XXe siècle attireront des Madelinots comme bon nombre de jeunes gens des campagnes de partout au Québec.  On l’a vu jusqu’à présent, les Madelinots ont souvent été attirés par les endroits prometteurs d’emploi.  L’ouverture de moulins à pâte et papier en attira plusieurs, que l’on pense à Clarke City ou Kénogami par exemple.  C’est en 1927 que naît l’usine de papier de Limoilou, avec la construction par l’Anglo Canadian Pulp and Paper près de l’endroit où la rivière Saint-Charles se jette dans le Saint-Laurent.  Le quartier Limoilou de Québec devient alors un autre pôle d’attraction pour les Madelinots.  Bien avant cela par ailleurs, des Hervy/Harvey des îles ont fait de Québec leur chez-soi. 

Ce fut le cas d’Elisabeth (1839-1916) marié à Mathias Roberge.  Elisabeth est celle qui avait hébergé son père, le patriarche François Hervy, à Havre-Saint-Pierre à la fin de sa vie; elle avait choisi de ne pas partir vers la Beauce comme son frère Narcis et sa famille en 1866.  Il faut dire qu’au départ des Harvey, en septembre 1866, sa fille Esther est enceinte de sept mois[130].  Le printemps venu, Elisabeth et son mari choisissent plutôt de partir du Labrador avec la famille pour s’établir sur l’Isle-aux-Reaux[131], la discrète voisine de l’île d’Orléans.  Sa fille mariée à Cyrille Boudreau s’établit pour sa part à Québec[132].  Mathias Roberge y est navigateur; il ne le sera pas très longtemps puisqu’il décède peu de temps après leur arrivée.

Heureusement, Elisabeth peut compter sur ses trois fils majeurs : Ambroise, Théodore et Prudent, tous navigateurs demeurant avec elle.  Après le décès de Mathias, Elisabeth se réfugie avec ses fils dans la paroisse Saint-Jean de l’Isle d’Orléans.  Comble de malheur, le 3 juillet 1892, son fils Ambroise, alors second maître à bord de la goélette « Midnight » se noie emporté par une bourrasque.  Son corps n’est pas retrouvé[133].  Sa fille aînée et ses deux fils toujours vivants cèdent à leur mère leurs parts du petit héritage qu’avait laissé Ambroise[134].  Le seul autre enfant de François Hervy parti des îles et devenu bien malgré elle chef de famille se retrouve dans la ville de Québec au tournant du siècle, voisine d’une famille de Madelinots ayant passé par le Labrador également[135].  Elle vit seule avec William, le plus jeune de ses fils[136].  Elle s’établira chez sa fille Esther peu de temps par la suite.  Résidente de la paroisse Notre-Dame de Québec, elle s’éteint à l’âge de soixante-dix-huit ans le 14 août 1916[137].  

Le neveu de cette dernière fit également ce choix.  Philippe Hervy (1855-1925) à Silvain (1826-1911) chez François le migrant, qui était arrivé au Labrador peu de temps après son mariage en 1880, avait choisi de partir pour la Beauce en 1886.  En 1889, bien avant que la plupart des Harvey repartissent pour le Labrador au milieu de la décennie suivante, Philippe avait déménagé avec sa famille à Québec où ils vivront jusqu’en 1911[138]Il repartira aux îles de la Madeleine après le décès de sa femme laissant derrière lui ses deux uniques enfants, mariés et toujours vivants, sur les neuf que sa femme lui avait donné.  Il épousera une autre insulaire en 1912 [139].  Bien qu’en 1921, lui et sa nouvelle compagne vivent toujours à Havre-aux-Maisons[140], Philippe quitte les îles pour revenir vivre à dans le quartier Limoilou de Québec où il s’éteint le 27 juillet 1925[141].

Puis, l’année suivant l’ouverture du moulin de Limoilou, Alfred Harvé (1894-post.1930) à François (1867-1918) chez Silvain (1926-1911) et sa famille vinrent s’établirent dans ce quartier de Québec comme tant d’autres Madelinots[142].  Alfred rejoint ses cousins et cousines puisqu’il est le neveu de feu Philippe (1855-1925).  Comme on l’a vu, Alfred avait d’abord fait son nid dans une autre ville de pâte et papier, le Cap-de-la-Madeleine, avant de finalement s’établir à Québec.     

Montréal

De tous les endroits au Québec ayant drainés des îles de la Madeleine les plus grandes portions de son potentiel humain, Montréal vient en tête de liste.  Comme pour Québec, le nombre de manufactures et d’industries en tout genre pouvait procurer une alternative plus stable que la pêche.  L’exode vers cette grande ville prit de l’ampleur dès le début du XXe siècle.  En 1960, on comptait environ mille familles de Madelinots dans la grande région de Montréal.  Évidemment, les Harvey des îles étaient nombreux parmi ce nombre.  Les villes de Verdun et celle de Côte-Saint-Paul étaient pour eux les pôles d’attraction à une certaine époque.


Parmi les hommes qui n’optaient pas pour les manufactures, plusieurs choisirent les métiers du port de Montréal.  Peut-être était-ce une façon pour eux d’être le plus près qu’ils le pouvaient de la mer qui leur manquait sûrement.  D’ailleurs, on retrouvera un bon nombre de Harvey des îles descendants de François Hervy dans le quartier Hochelaga et des Harvey descendants de Sébastien Hervet à Montréal dans les années 1920.  Ils sont nombreux à avoir pris le chemin du Cimetière de l’Est comme endroit de dernier repos[143].

Plusieurs Madeliniennes célibataires débarquées à Montréal venaient y travailler pour aider les leurs, restés aux îles.  Nombreuses ont été les Hervy/Harvey travaillant comme domestiques dans de riches familles de l’ouest de la ville dans le premier tiers du siècle dernier.  Puis viendra la Seconde Guerre, comme de partout ailleurs, les filles célibataires des îles arrivèrent également en grand pour travailler dans les usines qui contribuaient à l’effort de guerre.

Les Hervy, Harvie et Harvey des îles de la Madeleine prendront à peu près tous le patronyme Harvey à Montréal.  Ceux qui y finiront leur vie sont trop nombreux pour tous les énumérer ici.  Néanmoins en voici quelques-uns choisis au hasard.

Descendant de Casimire Harvy (1818-1868) :

Descendants de Silvain Hervy (1826-1911) :

Descendants de Théodore Hervy (1831-1916) :

Nouveau-Brunswick

Toujours pour les mêmes raisons que dans le cas des migrations précédentes, en 1899, une demi-douzaine de familles des îles de la Madeleine partirent s’établirent au Nouveau-Brunswick.  C’est sur les rives de la rivière Miramichi que s’installèrent ces Madelinots.  Parmi eux, on retrouve dès 1901[144], l’aîné François Benoni dit Beloni Harvey (1844-1913) chez Narcis Arvis (1821-1890).  On se souviendra que ce dernier avec ses parents avait d’abord pris la direction du Labrador dans les années 1850.  Trente-six ans plus tard, une fois marié, lui et sa propre famille avaient suivi les Hervy/Harvey du Labrador dans leur migration vers la Beauce.  Contrairement aux autres de sa famille élargie qui étaient retournés au Labrador dans la décennie suivante, Beloni prit la route du Nouveau-Brunswick pour s’établir à l’embouchure de la rivière Miramichi avec les autres Madelinots. Curieusement, un certain Dominique Hervé, enfant illégitime, est baptisé à Rogersville au Nouveau-Brunswick le 28 mars 1898. Une courte distance sépare les deux villages.  Je n’ai pu trouver d’autres Hervy/Harvey dans la région.  Chef de famille, Beloni vit avec sa femme et la famille de sa fille Octavie (1879 — ) mariée à Jean Baptiste Muise (1879 —).  Beloni qui était menuisier s’éteindra à Néguac le 21 janvier 1913.  Lorsqu’il avait quitté la Beauce pour le Nouveau-Brunswick, Beloni n’était pas parti seul; sa sœur Esther (1855-1912), avec son mari Gabriel Muise et leur famille étaient également du voyage.  Ces derniers vivront également au village de Néguac jusqu’à la mort d’Esther le 29 mars 1912.  

Comme pour les autres endroits où les insulaires ont migré, d’autres Madelinots sont venus joindre les premiers dans la région.  De ce nombre, on compte les deux fils orphelins de Julien Harvé (1872-1898) à Hippolyte Harvey (1844-1916) chez Casimire Harvy (1818-1868).  Les frères Absolon Harvé (1896-1961) et Julien Harvey (1898-1943).  On ne sait pas quand, qui ou quoi attira les deux orphelins sur les rives de la Miramichi, mais ils y sont depuis un certain temps puisqu’en août 1920, le cadet Julien épouse Esther Muise à l’église Saint-Mary de Newcastle sur les rives de la Miramichi[145].  L’épouse, bien que née à Néguac, est la petite fille de Beloni Harvey (1844-1913) mentionné plus tôt.  

Absolon épousera Basilice Roussel le 23 février 1925, également à l’église Saint-Mary de Newcastle[146].  Les frères ne feront pas leurs nids au Nouveau-Brunswick.  Après une dizaine d’années passées dans sur les rives de la Miramichi, ils auront déjà quitté la région de Newcastle en 1927.  On retrouvera Julien avec sa famille et des membres de la famille de sa femme à l’île d’Anticosti cette année-là[147].  L’année suivante, ils s’établiront dans la nouvelle municipalité de paroisse de Sainte-Jeanne-D’Arc au Bas-Saint-Laurent.  Pour sa part, Absolon retournera aux Îles le temps que sa femme accouche de leur deuxième enfant à l’été 1927[147a].  Il reviendra rapidement à Chatham Head au Nouveau-Brunswick, sur la rive sud de la rivière Miramichi face au village de Newcastle, pour encore quelque temps.  Il y est toujours au décès de son épouse en février 1929.  Par la suite, il rejoindra son frère au Bas-Saint-Laurent.  En 1936, on retrouve les deux frères dans le secteur de la Mission Romieu, plus précisément à l’endroit où l’année suivante sera fondé le village de Saint-Paulin-Dalibaire.  Ils seront donc parmi les colons fondateurs de ce village.  Preuve additionnelle que les Madelinots voyagent en groupe lorsqu’ils s’installent à de nouveaux endroits, Absolon épousera Marie Bathilde Longuépée, aussi native des îles, le 15 février 1939 à la Mission du nouveau village.  Moins d’un mois plus tard naîtra Marie Paule Bessie Harvey, le premier enfant du couple[148].  Absolon décédera à Saint-Paulin-Dalibaire en 1961, dix ans avant que son village soit rasé par le gouvernement en 1971.  Julien et sa famille quant à eux, y étaient toujours en 1942.  L’année suivante, ils quittent Saint-Paulin-Dalibaire pour la plupart et s’établissent à Shawinigan en Mauricie.  Julien n’y vivra pas un an, il décède en novembre 1943[149].

D’autres vivront au Nouveau-Brunswick toute leur vie.  C’est le cas de Marie Alma Harvie (1900-1933) à Narcisse Hervy (1860-1919) chez Casimire Harvy (1818-1868).  Cette cousine du père des deux orphelins avait servi de témoins lors du mariage d’Absolon en 1925.  Arrivée au Nouveau-Brunswick peu de temps après le décès de son père, après s’être mariée en 1925, elle décédera des suites d’un accouchement en 1933[148].

Abitibi

La situation aux îles de la Madeleine est encore une fois difficile dans les années 1940.  L’abbé Chouinard, curé de Havre-aux-Maisons, cherche une solution auprès de la Société de colonisation de la Gaspésie, mais sans succès de ce côté-là.  C’est par le ministère de la Colonisation qu’il la trouvera.  La situation n’est guère différente des quatre autres occasions où le gouvernement est intervenu dans le passé.  Les îles connaissent un problème de surpopulation par rapport aux ressources limitées que l’archipel peut fournir, ce qui amène une grande pauvreté.  Comme il l’a fait à quelques reprises par le passé, le gouvernement offre aux Madelinots volontaires de les relocaliser.  Cette fois-ci, s’il accepte l’offre, c’est en Abitibi qu’ils seront transportés.  On promet de leur fournir une maison et une terre et aussi un cochon et des poules chaque année[149].

L’abbé Chouinard encourage ses paroissiens à quitter les îles.  Il trouve quatorze familles volontaires qui se disent prêtes pour le grand changement et qui laissent derrière eux l’archipel dès 1941. 

Le gouvernement croyant tirer des leçons de l’histoire et voulant éviter une répétition de la migration ratée des Madelinots du Labrador vers la Beauce cinquante ans plus tôt, offre à ses familles de s’établir sur une île.  Le ministère de la Colonisation les transporte donc à l’île Nepawa située sur le lac Abitibi, pensant que ces familles de pêcheurs seraient moins dépaysées.

Même si ces nouveaux arrivants connurent des difficultés lors de leur installation, treize autres familles totalisant cent trois personnes vinrent les rejoindre l’année suivante[150].  Comme pour leurs compatriotes l’année précédente, ils durent emprunter navire, trains et chaland avant d’arriver à destination, à plus de deux mille kilomètres de l’archipel.  Certains des Madelinots s’établissent dans le village face à l’île, celui de Sainte-Anne-de-Roquemaure.  S’ils ont quitté une certaine misère, ils s’établissent dans des terres de roches entourées d’eau et de bois.

C’est donc plus de deux cents Madelinots qui quitteront ainsi un archipel d’une centaine de kilomètres de long, dans le golfe Saint-Laurent, pour une île de huit kilomètres de long par un kilomètre de large en 1941 et 1942.


La majorité des Madelinots demeurèrent en Abitibi, si bien que jusqu’aux années 50, ils formaient le plus grand regroupement de colons dans cette région.  Délaissant la terre, malgré sa prétendue richesse à cet endroit, les Hervy/Harvey Madelinots quitteront peu à peu l’île Nepawa et Sainte-Anne-de-Roquemaure pour partir s’établir à Malartic, La Sarre, Rouyn, Val-d’Or.   Certains partiront même travailler dans les mines aussi loin que Matagami, si bien qu’aucun ne finira ses jours dans les deux premiers villages d’adoption de l’Abitibi[151].

Parmi les Hervy/Harvey venus en Abitibi, on compte plusieurs descendants de Casimire Harvy (1818-1868) chez François :

Tous ces Hervy/Harvey mentionnés étaient accompagnés de frères et sœurs dont l’histoire à quelque peu oublié leur nom.  C’est le cas de Marie Harvey inhumé à Malartic en 1949.  D’autres n’ont fait qu’un bref passage en Abitibi.  Certains sont retournés aux îles de la Madeleine alors que d’autres ont poussé leur quête d’un avenir meilleur plus à l’ouest dans le Timiskaming ontarien.

Les cousins Hervy/Harvey migré au Témiscamingue dix ans plus tôt ne semble pas avoir retrouvé ceux qui étaient arrivés en 1940 et 1941 en Abitibi.  Même si certains ont habité les mêmes villes de ce qui constitue aujourd’hui la région de l’Abitibi-Témiscamingue, ils l’ont fait à différentes périodes.  Ainsi, Clarisse Harvey (1890-1975) à Louis Harvis (1864-1946) chez Narcis Arvis (1821-1890) par exemple, s’était établie à Moffet avec sa famille et viendra finir ses jours à Malartic dans les années 1970[155].

États-Unis

Contrairement aux endroits du Québec pour lesquels des migrations de groupes de Madelinots s’étaient organisées en vue de vaincre la surpopulation aux îles de la Madeleine, il n’y a pas eu de vague d’émigration vers les États-Unis.  À l’opposé de ce que les Hervet/Harvey descendants du migrant Sébastien Hervet (1642-1714) ont connu, seul un très petit nombre de Hervy/Harvey madelinots ont pris cette direction.  Certains individus tenteront tout de même leur chance vers les États.






La première Hervy/Harvey à y avoir mis les pieds à demeure semble être « Marie Harvey » (1846-1934), l’aînée chez Narcis Arvis (1821-1890).  On se souviendra qu’elle et son mari avaient quitté le Labrador en même temps que tout le clan de son père pour aller vivre en Beauce en 1886.  L’expérience ne dut pas être heureuse à cet endroit pour ce couple.  Alors que la majeure partie du clan repartira pour le Labrador dans quelques années, Marie et sa famille devance les autres et traverse la frontière de Jackman dès 1892.  Ils aboutiront à Winslow au Maine quelque deux cents kilomètres plus au sud comme l’on fait des milliers de Québécois au XIXe siècle en empruntant le Chemin du Vieux-Canada pour trouver un emploi saisonnier qui se transformera bien souvent en lieu permanent de vie dans la vallée de la rivière Kennebec.  Pour Marie et son époux, ce sera l’ouverture d’un moulin de pâte et papier de la Hollingsworth & Whitney Company en 1892 qui sera déterminant dans leur décision de partir dans cette direction puisque l’on y recrute de la main-d’œuvre en grand nombre selon ce qu’il s’en dit en Beauce.  Sans doute arrivé trop tard pour le recrutement, son mari y sera travailleur de ferme[156].  Vingt ans après son mari, Marie s’éteindra en 1934 et sera inhumée dans le village de Rangeley du comté de Franklin dans cette même région[157].

Contrairement au reste du Québec qui a vu partir près de trois quarts de million des siens pour travailler dans les filatures de Nouvelle-Angleterre avant le tournant du siècle, les Madelinots attendront au lendemain de la Première Guerre mondiale pour s’intéresser au rêve américain.  Marie fut l’exception chez les Harvey des îles et encore là, sa première destination comme adulte fut la région frontalière de la Beauce à moins de vingt kilomètres de l’aventure américaine.

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Pour en connaître un peu plus sur la vie de Marie Harvey, cliquez ICI

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Quelques autres Hervy/Harvey tenteront leur chance aux États-Unis.  C’est le cas du cadet « Nelson Pierre Harvé » (1896-1931) à « Louis Harvey » (1846-1927) chez Casimire Harvy (1818-1868).  Nelson se dirige d’abord à Côte-Saint-Paul, un quartier de Montréal où, comme on l’a vu, une forte concentration de Madelinots est établie.  Il y est commis depuis un certain temps en 1920 alors qu’il tente une première incursion aux États-Unis avec un autre Madelinot de quarante ans.  Arrivé à la frontière à St Albans au Vermont, il se dirige vers Détroit.  Malgré la probabilité d’un fort accent francophone, il déclare être d’origine irlandaise et de langue anglaise[158].  Il reviendra à Côte-Saint-Paul, probablement en 1922, pour y travailler comme électricien, un métier qu’il a sans doute appris aux États-Unis.  En 1923, il épouse Imelda Brouillard à Sainte-Justine-de-Newton, soixante-quinze kilomètres à l’ouest de chez lui, en Montérégie[159].  Le couple part immédiatement s’établir aux États-Unis.  Sept ans plus tard, ils sont établis à Chicago en Illinois où Nelson est toujours électricien[160].  L’aventure américaine de Nelson sera de courte durée.  Un an plus tard, devenu vendeur, Nelson se noie dans le lac Michigan avec un copain électricien originaire du Québec[161].  Sa femme, accompagnée de ses deux jeunes enfants revient au Québec.  Elle ramène Nelson pour être inhumée dans le cimetière de la paroisse Sainte-Justine-de-Newton où il s’était marié[162].  Vivant chez ses parents un certain temps, elle se trouvera un emploi de coiffeuse à Montréal.  En 1935 elle retourne à Chicago pour une période de deux mois, peut-être à la recherche d’un emploi.  Quoi qu’il en soit, elle revient au Québec et en 1943 on la retrouve traductrice à Windsor en Ontario.  Sa fille étudie au collège UFC de Détroit de l’autre côté de la rivière-frontière et elle lui rend visite régulièrement[163].  Elle s’éteint chez son fils le 13 décembre 1963, à Long Island, New York.  Selon ses souhaits elle est ramenée à Saint-Justine de Newton où elle repose auprès de son mari[164]

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Pour en connaître un peu plus sur la vie de Nelson Harvé, cliquez ICI

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Au moins sept autres Hervy/Harvey, tous apparentés, franchissent la frontière américaine.  Ils se dirigeront vers la ville de Cambridge au Massachusetts. 

Parmi eux, les frères « Arcade Harvie » (1891-1971), « Joseph Ariste Harvey » (1889 — ) et « Delphis Harvey » (1899-1990) à « Grégoire Hervy » (1860-1933) chez Theodore Hervy (1831-1916).  Après un bref séjour dans une communauté de Madelinots où il devient travailleur de moulin, Arcade arrive à Cambridge au Massachusetts en 1918[165].  Il est possible qu’il ait fait le voyage avec un cousin, Alphée Cyr, le neveu de sa mère.  En août 1922, son frère Ariste et sa famille quittent les îles et viennent crécher chez lui le temps de s’établir[166].  Le logement est bien petit; il faut donc que son frère Delphis qui a aussi fait le trajet aille se loger chez le cousin Alphée Cyr, à quelques portes sur la même rue[167].  Ariste fera sa vie au Massachusetts. Il décède au début des années 1990.  Delphis, le frère cadet, viendra vivre avec son frère et sa famille une fois cette dernière établie.  Après avoir participé à la Seconde Guerre mondiale, il revient vivre chez son frère à Cambridge[168].  On ne connaît pas les détails de sa vie par la suite, mais l’on sait qu’il décédera le 31 octobre 1990 dans la petite communauté isolée de San Joaquin en Californie.  Ramené au Massachusetts, il sera inhumé dans un cimetière de la région de Cambridge[169].  De son côté, Arcade est de retour au Québec dès 1935 alors qu’il travaille au moulin de pâte et papier de Clarke City sur la Côte-Nord comme tant d’autres Madelinots l’ont fait[170].  En 1949, il est journalier à Montréal où il finira sa vie alors qu’il décède en 1971 dans le quartier Hochelaga qui l’avait accueilli à son arrivée dans la métropole[171].

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Pour en connaître un peu plus sur la vie de ces trois frères Harvey, cliquez ICI

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Il y eut également trois cousines des trois frères précédemment mentionnés qui choisirent cette ville, les sœurs Sara Harvé (1896-1973), Minnie Harvey (1907-1991) et Arilda Harvie (1908-1975) chez Uriel Hervy (1864-1926).  Arilda tout comme Sara feront leur vie dans la région de Cambridge, Minnie pour sa part reviendra aux îles.  Plus tard, une autre parente se joindra également aux deux trios.

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Pour en connaître un peu plus sur la vie de ces quatre autres Harvey, cliquez ICI

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La descendance de François Hervy

Bien qu’il n’ait pas eu une descendance aussi nombreuse que celle de Sébastien (1642-1719) de la lignée Hervet et qu’il ait commencé sa famille près de cent trente ans plus tard que Sébastien ne l’a fait, François (c.1793-1881), de la lignée Hervy, aura tout de même neuf enfants et trente petits-enfants avant 1869.  Trois des fils de François ayant fondé une famille vécurent aux îles de la Madeleine.  Un quatrième fils migra avec son clan, le plus nombreux, dans l’ancien Labrador québécois, aujourd’hui la Côte-Nord et par la suite ailleurs au Québec comme on l’a vu.  Les mouvements migratoires de la descendance de François et Esther furent nombreux par la suite et durent toujours. 

François et Esther ont une descendance qui se poursuit aujourd’hui.  Parmi les plus connus des leurs, un Québécois illustre du XXe siècle : Azade Harvey (1925-1987), poète naturel et grand conteur de légendes et d’histoires des gens des îles de la Madeleine. 

François, le migrant venu de France et arrivée aux îles de la Madeleine en 1815, compte deux centenaires parmi ses descendants.  Marine Harvey (1884-1991), la doyenne des centenaires chez les Harvey au Québec et Alphéda Harvey (1916-2018).

Les Hervy/Harvey d’exceptions


Tout comme Azade Harvey (1925-1987), plusieurs Hervy/Harvey ont marqué leur temps.  Certains l’ont fait de bien humble façon et sont ainsi passés sous le radar de l’histoire. 

En voici une, Belzémire Harvie, cliquez sur le lien pour entendre le récit de sa vie :

[1]CARBONNEAU, Pauline. Découverte et peuplement des Îles-de-la-Madeleine. Îles-de-la-Madeleine, Les Éditions la morue verte, 2016, 272 pages.

[2] BOUDREAU, Dennis M.  Dictionnaire généalogique des familles des Îles-de-la-Madeleine.  Québec, 1760-1948, volume IV, Société de généalogie de Québec, 2001, pages 3174-3211.

[3] DUCHESNE, Louis.  Les noms de famille au Québec : aspects statistiques et distribution spatiale.  Québec, l’Institut de la statistique du Québec, 2006, pages 53, 66 et 164.

[4] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Gaspé, sous-district Étang-du-Nord, pages 2-5 et 8; district de Chicoutimi et Saguenay, sous district de Natashquan, page 11; district de Chicoutimi et Saguenay, sous district de Pointe-aux-Esquimaux, page 39; district de Québec Est (Cité), sous-district quartier Jacques-Cartier, page 2.

[4a] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre-aux-Maisons, îles de la Madeleine, 14 juillet 1844 et 26 décembre 1844. 

[4b] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre-aux-Maisons, îles de la Madeleine, 2 mars 1870.

[4c] On retrouve sur l’île de Montréal une forte communauté de Madelinots établis dans les secteurs de Verdun, Côte-Saint-Paul, LaSalle et Sainte-Cunégonde.  Parmi eux des Harvie et Harvey venus rejoindre ces communautés après la Seconde Guerre mondiale.

[5] Marchan dans certains documents.

[6] Au registre du second mariage de son mari, elle est nommée Chaban de Meuvant, « vf de Françoise Chaban de Meuvant, de St-Malo».

[7] Archives nationales françaises d’outre-mer, état civil numérisé, Saint-Pierre-et-Miquelon, registre des mariages de Miquelon, 1763 à 1791.

[8] Nom donné à la colonie à une certaine période.

[9] Archives nationales françaises d’outre-mer, état civil numérisé, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Pierre, 3 septembre 1767.  Marie Jérôme Rosse est née en Nouvelle-France, à Louisbourg plus précisément, le 29 septembre 1740.  Louisbourg est alors la capitale de l’île Royale.  Elle est décédée après le recensement de 1797 où elle apparaît.  Son contrat de mariage qui la lie à Jean Hervy fut signé le 25 août 1767 devant le notaire Mounier.

[10] Ibid., 16 juin 1768 et 5 novembre 1774.

[11] Ibid., 28 avril 1775.

[12] Archives nationales françaises d’outre-mer, état civil numérisé, Saint-Pierre-et-Miquelon, Miquelon, 20 mai 1787. 

[13] Joseph Cormier dit Lemeilleur est né vers 1732 à Beaubassin en Acadie française et est décédé le 27 mars 1804 à Port-Liberté (aujourd’hui Port-Louis, Bretagne) en France.

[14] Anne Vigneau dite Maurice est née vers 1738 quelque part en Acadie.  Elle est la fille de Jacques Vigneau dit Maurice (1702-1772) et la petite-fille de Maurice Vigneau (1674-1747) natif de Sainte-Famille de l’île d’Orléans.  Elle est décédée en avril 1779 très peu de temps après son retour forcé en France.  Elle est inhumée à Saint-Nicolas de La Rochelle le 22 avril 1779.

[15] Archives nationales françaises d’outre-mer, état civil numérisé, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Pierre, 27 septembre 1787 et 9 juin 1790.

[16] Jean François, Élisabeth (probablement Isabelle Jeanne déjà mentionnée), Salé, Jean-Marie, Nicolas et Théodore sont parmi les autres enfants mentionnés dans : POIRIER, Michel.  Les Acadiens aux Îles-St-Pierre-et-Miquelon 1758-1828. Moncton, les éditions d’Acadie, 1984, 527 pages.

[17] Archives nationales françaises d’outre-mer, Assemblée générale de la Commune des Isles Saint–Pierre et Miquelon, 13 janvier et 22 février 1792.

[18] Né Jean François.  À son mariage en 1817 il est prénommé François, «pêcheur domicilié de cette mission, fils majeur de Guillaume Harvy, pêcheur et de Élisabeth Cormier de St Pierre-et-Miquelon».

[19] BAnQ., Registre de Saint-Pierre de la Pointe-aux-Esquimaux, 16 février 1881. Lors de l’inhumation de François Hervie, il est mentionné au registre qu’il est âgé de quatre-vingt-onze ans.  Par contre, au recensement de 1861 on note que François Hervie est âgé de 75 ans; une erreur de dizaine sans doute.  Il déclarera à ce recensement de 1861 être né en France tout comme son fils François Silvain le fera en 1891, déclarant son père être né en France.  On peut facilement conclure qu’il serait né après la déportation de 1793. Ayant vécu en exil le plus clair de sa vie d’enfant, il est évident qu’il connaissait très peu de détails relatifs aux conditions de sa naissance.

[20] BAnQ., Registre de Havre-Aubert, 9 septembre 1817.

[21] Aujourd’hui Port-Louis.

[22] POIRIER, Michel.  Les Acadiens aux Îles-St-Pierre-et-Miquelon 1758-1828. Moncton, les éditions d’Acadie, 1984, page 421.

[23] Ibid., page 458.  Dans l’ouvrage de Michel Poirier sur les Acadiens des îles-St-Pierre-et-Miquelon l’auteur indique que la famille a trouvé refuge temporairement en France lors des différentes périodes de déportation entre 1758 et 1828. Dans trois de ces listes, on retrouve Guillaume Hervy et sa famille, à Port-Liberté (Port-Louis) dans le Morbihan en France au début des années 1800, puis sur la flûte du Roy «La Caravane» de retour à St-Pierre-et-Miquelon en 1816, et finalement, sur la liste des rations distribuées par le magasin du roi aux habitants des Îles-St-Pierre-et-Miquelon en 1819. Ces extraits révèlent le nom de l’épouse et des enfants de Guillaume. Sur ces listes, sa femme se nomme tantôt Anne et tantôt Élisabeth. Ses enfants sont Casimir, Jean-François, Élisabeth (Jeanne-Isabelle), Salé, Jean-Marie, Nicolas et Théodore.

[24] FOURNIER, Marcel. Les Français au Québec, 1765-1865 : un mouvement migratoire méconnu. Québec, Les éditions du Septentrion, 1995, page 188.  Fournier, sans révéler sa source, avance 1815 comme année d’arrivée de François aux îles de la Madeleine.  Il faut prendre cette estimation pour ce qu’elle est, une estimation, car c’est aussi cet historien qui le déclare originaire de Saint-Pierre, né en 1786 alors que son père n’avait pas encore rencontré sa mère et que les Archives nationales françaises d’outre-mer ne supportent aucunement ces affirmations.

[25] VIGNEAU, Placide. «L’Histoire ou Journal de la Pointe aux Esquimaux 1854-1926», Rapport des archives du ministère des Affaires culturelles de 1968.  Tome 46 (1969), page 19.

[26] BAnQ., Registre de la mission Notre-Dame-de-la-Visitation de l’île du Havre-Aubert, îles de la Madeleine, 9 septembre 1817.

[27] La Grave est le berceau du peuplement des Îles.  Elle s’étend le long d’une petite plage de galets dans un isthme en forme d’hameçon de quelques mètres de largeur reliant la pointe Shea et le cap Gridley, en bordure du golfe du Saint-Laurent dans la partie est de l’île du Havre Aubert, qui est la plus grande de l’archipel des îles de la Madeleine.  Une «grave» est un rivage où l’on fait sécher les morues au soleil.  Le mot «grave» vient du vieux français du sud de la France et est tiré du mot latin gravât qui veut dire rivage. Disparu du langage courant, il est toutefois encore utilisé par beaucoup de Gaspésiens, de gens des Îles-de-la-Madeleine et des Maritimes.

[28] BAnQ., Registre de la mission Notre-Dame-de-la-Visitation de l’île du Havre-Aubert, îles de la Madeleine, 7 juillet 1799.

[29] Si le patronyme de François était inscrit «Harvy» lors de son mariage ce n’était assurément pas parce que l’officiant Beaubien l’avait entendu ainsi de la bouche du marié, car d’autres prêtres qui baptiseront les enfants de François utiliseront les formes Arvis Hervis, Hervy et Hervey.  Dans un ouvrage publié en 2016, l’auteur tente d’expliquer la transformation du patronyme Hervé en Harvey en avançant que la langue française parlée au Canada aurait vu la prononciation de la syllabe «her» suivie d’une consonne produire une phonétique se rapprochant de «har».  Se basant sur le registre de mariage de François et celui du baptême de l’un de ses fils, officié par le même prélat, il avance même que dans le cas des Hervy, on assisterait au même phénomène.  Cette analyse est un peu courte puisque si l’auteur y avait regardé de plus près il aurait constaté que plutôt de subir une telle transformation le patronyme de l’ancêtre François avait repris ses droits dès la 3e génération alors que la vaste majorité de ses petits-enfants, une vingtaine, seront baptisés «Hervy».  Il est simple de comprendre que dans un pays où les habitants étaient pour la plupart analphabètes, les prêtres écrivaient les patronymes au gré de leur connaissance. 

[30] BAnQ., Registre de la mission Notre-Dame-de-la-Visitation de l’île du Havre-Aubert, îles de la Madeleine, 30 août 1818 et 22 juillet 1821. 

[31] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre-aux-Maisons, îles de la Madeleine, 8 octobre 1826.

[32] Archives nationales françaises d’outre-mer, état civil numérisé, Saint-Pierre-et-Miquelon, registre des décès de Saint-Pierre de Terre-Neuve, 28 juin 1842 et 13 octobre 1843.

[33] Archives nationales françaises d’outre-mer, état civil numérisé, Saint-Pierre-et-Miquelon, registres des naissances, mariages et décès de Saint-Pierre de Terre-Neuve, année 1830 à 1872 pour la famille de Théodore Hervy.  Le nom de François Hervy n’apparaît pas comme témoins aux registres des naissances, mariages et décès retrouvés à Saint-Pierre ce qui est tout à fait normal considérant les moyens de communication limités entre les deux archipels à l’époque.  Néanmoins, cela n’exclut pas que les membres de la famille se soient rendu visite considérant qu’ils étaient tous capitaine de navire et en avaient donc le moyen. 

[34] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre-aux-Maisons, îles de la Madeleine, 11 décembre 1891. 

[35] Des petits-enfants de François Hervy et d’Esther Vigneau (3e génération), quatre seront baptisés «Harvey» et une vingtaine d’autres «Hervy».  Un seul sera baptisé «Harvy», une erreur sans doute, car le même célébrant utilisa la forme «Hervy» lors des autres baptêmes qu’il officia. 

[36] BAnQ., Registre de la mission Notre-Dame-de-la-Visitation de l’île du Havre-Aubert, îles de la Madeleine, 30 août 1818 et 22 juillet 1821.

[37] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre-aux-Maisons, îles de la Madeleine, 14 novembre 1824, 8 octobre 1826 et 3 février 1828.

[38] B.A.C., G., Recensement de 1831, district de Gaspé, sous-district Magdalen Islands, Meules et Ruisseau, feuillet#4.

[39] Histoire et généalogie des îles de la Madeleine, Recensement de 1831, Meules et Ruisseau.  Également, au recensement de 1861, sa fille Elizabeth déclare être née au Cap-aux-Meules.  Est-ce un hasard si aujourd’hui on retrouve le Chemin des Harvie et le chemin de Prudent Harvie à la rencontre du Grand Ruisseau à Fatima sur l’île du Cap-aux-Meules?

[40] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre-aux-Maisons, îles de la Madeleine, 30 janvier 1842.

[41] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre aux Maisons, îles de la Madeleine.  Les registres de cette paroisse pour les années 1831 à 1838 inclusivement ne sont plus disponibles.  Comme ces registres sont disparus, on ne peut savoir si d’autres enfants que Theodore, Charles et Elizabeth ont pu naître dans cette période.  Si cela était le cas, ils auraient pu quitter les îles sans laisser de trace avant le premier recensement encore aujourd’hui accessible, celui de 1861.  Certains ont prétendu que le couple eut jusqu’à onze enfants; par contre, ces affirmations ne sont supportées par aucune source.  Seuls neuf enfants sont clairement identifiés par la combinaison des registres paroissiaux et du recensement de 1861.

[42] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, 18 septembre 1852.  Lors du baptême de Benjamin Alfred Hervy, fils de Casimire Harvy, une certaine Geneviève Hervy agit comme marraine.  Cette Geneviève n’apparaît pas au recensement de 1861 ni dans aucun autre document antérieur ou subséquent.  Elle ne semble pas être une nièce du migrant François, du moins on n’en trouve pas sa trace dans les registres aux îles Saint-Pierre et Miquelon parmi les enfants de son frère.  Pourrait-elle être une fille du migrant François? Rien dans les registres ne le suggère.  Un auteur avance qu’elle serait née vers 1833, période pour laquelle les registres de Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons ne sont plus disponibles.  Si tel était le cas, elle aurait eu 19 ans au moment du baptême.  Cependant, les registres aux îles sont disponibles après le baptême de 1852 où elle est marraine et son décès n’est inscrit dans aucun de ces registres.  L’évêque de Charlottetown ne passe que rarement pour administrer ses sacrements (1841, 1848, 1860).  Lors du passage de l’évêque de Charlottetown pour la cérémonie de confirmation du 4 septembre 1848, Théodore, née en 1831 est confirmé; la dénommée Geneviève ne l’est pas.  Lors d’un nouveau passage de l’évêque le 8 novembre 1860, Charles (1837), Elisabeth (1839) et Angélique (1841) sont confirmés, encore une fois, cette Geneviève n’est pas du nombre.  Elle n’est pas non plus de la trentaine de décès de l’épidémie de 1859? Pourrait-elle être une cousine ou une nièce que nous ne connaissons pas à ce jour et qui était de passage aux Îles cette année-là? Cette hypothèse est bien possible, car la famille de François demeurera en relation avec leurs parents des îles Saint-Pierre et Miquelon encore longtemps.  D’autres seront ainsi de passage.

[43] Au recensement de 1901, il déclarera être né le 12 décembre 1831.

[44] B.A.C., G., Recensement de 1861, district de Gaspé, sous-district des Îles-de-la-Madeleine. 

[45] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre-aux-Maisons, îles de la Madeleine, 14 février 1860.

[46] B.A.C., G., Recensement de 1861, op. cit.

[47] BIBLIOTHEQUE ET ARCHIVES CANADA. Recensements de 1842 et 1851 [En ligne].

https://www.bac-lac.gc.ca/fra/recensements/1842-canada-est/Pages/propos-recensement.aspx#tab1 et https://www.bac-lac.gc.ca/fra/recensements/1851/Pages/canada-est.aspx#g [pages consultées le 15/02/2021].

[48] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, 1859.

[49] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, 8 novembre 1860.

[50] Aujourd’hui, certains de leurs descendants demeurent toujours aux îles de la Madeleine.

[51] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de la Pointe aux Esquimaux, 1er décembre 1864.

[52] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, 3 mai 1868.

[53] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de Saint-Pierre de La Vernière de l’Étang-du-Nord, 3 avril 1916.

[54] B.A.C., G., Recensement de 1871, district Magdalen Islands, sous-district Grindstone Island. 

[55] Dans la période qui nous intéresse, celle de la première migration des Hervy/Harvey hors des îles de la Madeleine, les endroits où ils s’établirent, Kegashka, Natashquan ou Pointe-aux-Esquimaux, étaient encore parti du Labrador avant que ce territoire ne soit concédé par la couronne britannique à sa colonie de Terre-Neuve en 1926. 

[56] DOUGLAS W. A. B.  «Coffin, Sir Isaac». Dictionnaire biographique du Canada. 1re édition 1969, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1988, 15 volumes, volume VII (Décès de 1836-1850).

[57] VIGNEAU, Placide., op.cit., page 19.

[58] GAGNÉ, Marc.  Gilles Vigneault : bibliographie descriptive et critique, discographie, filmographie, iconographie, chronologie. Sainte-Foy, les Presses de l’université Laval, 1977, page 739.

[59] CARBONNEAU, Pauline. Découverte et peuplement des Îles-de-la-Madeleine. Îles-de-la-Madeleine, Les Éditions la morue verte, 2016, 272 pages.  Beaucoup de détails relatifs à l’identification de certaines vagues de migration des Madelinots proviennent de cet ouvrage.

[60] BENOIST, Émile.  Rimouski et les pays d’En-Bas. Montréal, Les éditions du Devoir, 1945, page 39.

[61] Aujourd’hui, orthographier Kegaska ou Kégaskâ.

[62] Les baptêmes de ces six enfants sont inscrits dans trois registres.  D’abord le premier au registre des Acadiens utilisé pendant quelques années par les missionnaires de passages; ce registre n’était attaché à aucune paroisse et se retrouve à l’archevêché de Québec.  Puis pour la plupart au registre de Saint-Pierre de la Vernière et un dernier baptême à la mission du Bassin attachée à la paroisse de Saint-Pierre de la Vernière de l’Étang du Nord.

[63] VIGNEAU, Placide., op.cit., page 20.

[64] Ibid., page 30.

[65] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame-des-Indiens de Natashquan, 2 septembre 1869.

[66] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de la Pointe-aux-Esquimaux, 1er décembre 1864.

[67] VIGNEAU, Placide., op.cit., pages 59-60.

[68] B.A.C., G., Recensement de 1861, province de Québec, district du Labrador, sous-district de la Pointe des Esquimaux.

[69] B.A.C., G., Recensement de 1861, province de Québec, district du Labrador, sous-district de Natashquan.

[70] Au recensement du sous-district de la Pointe-aux-Esquimaux en 1881, elle est inscrite comme étant née aux îles Saint-Pierre et Miquelon.  Par contre, elle n’apparaît pas à l’état civil numérisé des Archives nationales d’outre-mer pour Saint-Pierre-et-Miquelon puisque le baptême fut inscrit au village de Codroy à Terre-Neuve où le missionnaire ayant procédé au baptême tenait registre. 

[71] VIGNEAU, Placide., op.cit., pages 124 et 127.

[72] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de la Pointe aux Esquimaux, 24 juillet 1874.  Eliza Jane Hervy sait écrire et elle orthographie le patronyme selon la forme originale des îles Saint-Pierre et Miquelon, soit Hervy.  D’ailleurs lors du baptême on insistera probablement sur ce détail puisque son patronyme est inscrit Hervy alors que celui d’Absolon, le parrain et de Casimire, le père d’Absolon est inscrit Harvy.  

[73] VIGNEAU, Placide., op.cit., page 66.

[74] PERRON, J.O. «Missions de la Pointe-aux-Esquimaux, Labrador, 1872», Rapport sur les missions du diocèse de Québec et du diocèse de Rimouski et autres missions qui en ont ci-devant fait partie, Volume 21, mai 1874, page 64.

[75] DUHAIME, Gérard.  Le Nord : habitants et mutations. Québec, les presses de l’Université Laval, 2001, page 30.

[76] Aujourd’hui, le plus souvent écris en anglais, Betchewun.

[77] VIGNEAU, Placide.  op.cit., page 69.

[78] Aujourd’hui Baie-Johan-Beetz.

[79] AUGER, Roland-J., op.cit., page 168.

[80] Aujourd’hui l’île du Fantôme.

[81] AUGER, Roland-J., op.cit., page 70.

[82] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Havre-aux-Maisons, île du Havre-aux-Maisons, îles de la Madeleine, 15 février 1874.

[83] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de la Pointe aux Esquimaux, 3 décembre 1874.

[84] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Joseph de la Tabatière, 16 janvier 1876.

[85] BÉLANGER, René. «L’évêque de Rimouski sur la Côte Nord en 1875», Sessions d’étude - Société canadienne d’histoire de l’Église catholique, Volume 34, 1967, page 21.

[86] VIGNEAU, Placide., op.cit., pages 85-86.

[87] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de la Pointe aux Esquimaux, 16 février 1881.

[88] B.A.C., G., Recensement de 1881, Province of Quebec, district 39, Etang du Nord (sept familles inscrites Harvis); Recensement de 1881, Province of Quebec, district Chicoutimi & Saguenay, Pointe-aux-Esquimaux (une famille insctite Hervey et l’autre Haray); et BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Jean-Apôtre, Rivière-Saint-Jean, 27 janvier 1877 (une famille inscrite Arvey).

[89] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de la Pointe aux Esquimaux, 23 octobre 1882.  Son fils Édouard né en juillet 1881 aux Îles décède au Labrador en septembre 1882.  Philippe est alors qualifié de pêcheur du lieu.

[90] VIGNEAU, Placide., op.cit., page 120.

[91] VIGNEAU, Placide., op.cit., pages 124 et 127.

[92] Idem, pages 112, 115 et 127.

[93] HUARD, Victor-A.  Labrador et Anticosti : journal de voyage, histoire, topographie.  Montréal, Éditions Beauchemin et fils, 1897, page 391.

[94] Aujourd’hui Aguanish.

[95] HUARD, Victor-A., op.cit., page 346.

[96] MUNICIPALITÉ DE SAINT-THÉOPHILE. L’arrivée des Acadiens. [En ligne]. https://www.sainttheophile.qc.ca/pages/larrivee-des-acadiens [page consultée le 15/02/2021].

[97] En 1886, le gouvernement avait affrété plusieurs vapeurs pour transporter cette population.  Nous ne savons pas sur quel navire Narcis et sa famille firent le voyage; à bord du Napoléon III, du Other, sur la goélette du capitaine Joncas ou sur l’une des nombreuses autres goélettes privées faisant l’aller-retour des côtes du Labrador à Québec.  Quoi qu’il en soit, il réside dans le canton de Metgermette en 1891. On sait Narcis déjà installé en Beauce en 1887, du moins sa fille Sophronie qui y accouche d’un enfant.  En 1888, il assiste au mariage de son fils André à Saint-Zacharie de Beauce le 29 octobre 1888 il est mentionné au registre qu’il est cultivateur de cette paroisse.

[98] B.A.C., G., Recensement de 1891, district Dorchester, sous-district Saint-Zacharie-de-Metgermette, pages diverses.

[99] Dans la plupart des récits tirés de la même source, on mentionne huit jours.

[100] Aujourd’hui Beauceville. 

[101] GARANT, André. «La Beauce, l’Acadie et l’Abitibi-Témiscamingue», Beauce Magazine. 24 mars 2016.

[102] COLLECTIF. Saint-Zacharie de Metgermette : Hier, aujourd’hui, demain. Québec, Imprimerie de l’Action sociale limitée, 1919, page 26. Le rang II, la concession des Acadiens, devient le rang Sainte-Marie en 1892.

[103] VIGNEAU, Placide., op.cit., page 211.

[104] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Zacharie-de-Metgermette, 14 mai 1934.

[105] Ibid., 29 octobre 1888.

[106] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame-des-Indiens de Natashquan, 5 juin 1895.

[107] Ibid., 23 février et 6 septembre 1908.

[108] B.A.C., G., Recensement de 1911, district Chicoutimi et Saguenay, sous-district Pointe-des-Monts, microfilm e002050301.

[109] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Cœur-de-Marie de Clarke City, 24 novembre 1912.

[110] U.S. National Archives and Records Administration. Records of the Immigration and Naturalization Service, RG 85. Washington, D.C., U.S., Border Crossings from Canada to U.S., 1895-1960.

[111] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Zacharie-de-Metgermette, 21 septembre 1918.

[112] Ibid., 26 mars 1920.

[113] Ibid., 27 mai 1919.  Mariage d’Alphonse Harvey et Odina Cormier.

[114] B.A.C., G., Recensement de 1921, district de Dorchester, sous-district Saint-Zacharie, microfilm e003070067.

[115] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Zacharie-de-Metgermette, 22 février 1933.

[116] Registre d’accord de terre de la couronne du Manitoba, 1872-1930

[117] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame de Natashquan, 26 juillet 1898, sépulture de Narcisse Harvey, Aguanis.   Et : AUGER, Roland-J., op.cit., pages 168.

[118] VIGNEAU, Placide., op.cit., page 147.

[119] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Cœur-de-Marie de Clarke City, 17 octobre 1918.  Information sur la cause du décès obtenue de Marilyne Chiasson, l’une de ses petites-filles, le 24 novembre 2022.

[120] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Edmond du lac au Saumon, 3 janvier 1908 et 27 janvier 1912.  Différentes sources avancent qu’une vingtaine de familles ont alors quitté les Îles pour partir s’établir à Lac-au-Saumon.  Radio-Canada, dans son édition web du 7 août 2022 intitulé «Lac-au-Saumon inaugure la Place de l’Acadie, en mémoire de ses ancêtres madelinots», mentionnera plutôt quarante familles.

[121] RIOPEL, Marc.  Le Témiscamingue : son histoire et ses habitants.  Montréal, les Éditions Fides, 2002, page 118.

[122] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Romuald de Moffet, 1932 à 1943.

[123] B.A.C., G., Recensement de 1921, district de Chicoutimi et Saguenay, sous-district du canton Arnaud, paroisse Sacré-Cœur, Clarke City, microfilm e003068334.

[124] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Famille de Kénogami, 17 novembre 1926.

[125] Ibid., 24 novembre 1943.

[126] Ibid., 16 février 1944.

[127] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Cap-de-la-Madeleine, 9 septembre 1923 et 11 mai 1926.

[128] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine du Cap-de-la-Madeleine, 28 novembre 1929.

[129] Ibid., 14 juillet 1940 et 1941 à 1955.

[130] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de la Pointe aux Esquimaux, 26 novembre 1886.

[131] Au cours de l’histoire, le nom de l’île Reaux a été orthographié de plusieurs façons : Ile Rhéaux, au Ruau, Ros, etc.

[132] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame de Québec, 15 avril 1889.

[133] A.N.Q., GN. Minutier Georges Émile Larue, no 980, 18 novembre 1892.

[134] Ibid., no 981, 18 novembre 1892.

[135] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Québec-Ouest, sous-district St. Peters Ward, microfilm z000165132.

[136] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Québec-Ouest, sous-district de St-Peter Ward, microfilm z000165132.

[137] BAnQ., Registre du cimetière Saint-Charles de Québec, 16 août 1916.

[138] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Québec-Ouest, sous-district Jacques Cartier Ward, page 2 et Recensement de 1911, district de Québec-Ouest, rue St-Paul, page 4.

[139] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine de Havre-aux-Maisons, 9 janvier 1912.

[140] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Gaspé, sous-district de la paroisse de Havre-aux-Maisons page 4.

[141] BAnQ., Registre du cimetière Saint-Charles de Québec, 29 juillet 1925.

[142] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pascal-de-Maizerets, 13 novembre 1928.

[143] CIMETIÈRE DE L’EST DE MONTRÉAL. Aujourd’hui le repos Saint-François d’Assise. [En ligne]. https://www.rsfa.ca/recherche-d-un-defunt.html [page consultée le 1/10/2012].  

[144] B.A.C., G., Recensement de 1901, Nouveau-Brunswick, district de Northumberland, sous-district d’Alnwick Parish, microfilm z000027994.

[145] Archives provinciales du Nouveau-Brunswick, statistiques de l’état civil tirées de documents gouvernementaux, 18 août 1920.  Le nom de la mère de la mariée est erroné au certificat.

[146] Ibid., 23 février 1925.

[147] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame-de-l’Assomption de l’île d’Anticosti, 11 septembre 1927.

[147a] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de La Vernière de l’Étang-du-Nord, 9 juillet 1927.

[147b] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul-des-Capucins, 15 février et 10 mars 1939.  Les registres de Saint-Paulin-Dalibaire n’ouvriront qu’en 1947.  Le village fut desservi par voie de mission jusque-là.

[147c] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Jeanne-D’Arc, 30 septembre 1928; registre de la paroisse Saint-Paulin-Dalibaire, 13 avril 1942; et registre de la paroisse Christ-Roi de Shawinigan, 17 novembre 1943.

[148] Registre de la paroisse Notre-Dame-du-Mont-Carmel de Bathurst, 5 avril 1933.

[149] PRINCE, David. «Des Îles-de-la-Madeleine à l’Abitibi en bateau et en train», Journal de Montréal.  (Montréal, mardi, 5 janvier 2016), spectacles, cinéma.

[150] LAFRANCE, Céline et Sylvio BÉNARD.  Des îles de la Madeleine à l’île Nepawa. L’Étang-du-Nord, Éditions de la Morue verte, 2017. 325 pages.

[151] Registres des cimetières de l’Île de Nepawa et de Roquemaure.

[152] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Martin de Tours de Malartic, 3 novembre 1945.

[153] Ibid., 17 juin 1950.

[154] Ibid., 9 août 1950.

[155] Ibid., 4 février 1975.

[156] National Archives and Records Administration Federal Population Schedules for the Twelfth Census of the United States, Maine, Kennebec County, Winslow Town, 9 juin 1900.

[157] Maine, Faylene Hutton Cemetery Collection, Rangeley, Franklin, 17 mars 1934.

[158] U.S., Border Crossings from Canada to U.S., 1895-1960, St Albans, Vermont, Avril 1920, Nelson Harvey.

[159] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Justine-de-Newton, 4 juin 1923.

[160] National Archives and Records Administration Federal Population Schedules for the Fifteenth Census of the United States, Illinois, Cook County, Chicago, 4 avril 1930.

[161] COLLECTIF. «Mourn Lake Victim», The Chicago American. (16 septembre 1931), page 6.

[162] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Justine-de-Newton, 21 septembre 1931. 

[163] U.S., Border Crossings from Canada to U.S., 1895-1960, Détroit, Michigan.  Manifestes de passage à la frontière, 4 septembre 1935-10 mai 1943, Imelda (Brouillard) Harvey.

[164] Registre du cimetière de Sainte-Justine de Newton.

[165] Canada, Border Crossings from U.S. to Canada, 21 mars 1918, Arcade Harvey.

[166] U.S., Records of Aliens Pre-Examined in Canada, 1904-1954, Ariste Harvey, 3 août 1922.

[167] Ibid.

[168] U.S., Army Records, Honorable discharge papers for Delphis Harvey, 19 mars 1943.

[169] Edgell Grove Cemetery and Mausoleum, Framingham, Middlesex County, Massachusetts, mémorial de Delphis Harvey 1990.

[170] B.A.C., G., Listes des électeurs, 1935 Clarke City, 1949 Montréal, 1963 Montréal.

[171] Registre du cimetière Le repos Saint-François d’Assise, Montréal, 1971.