Répartition géorgraphique sur le territoire

Répartition géographique des Harvey au Québec

Les Québécois francophones descendent d’un nombre relativement faible d’immigrants.  Il en résulte que le nombre de patronymes québécois francophones aujourd’hui est très petit par rapport à la France : quelques milliers ici, des centaines de milliers en France.  Tout s’est joué dans les deux premiers siècles de peuplement.

 

Le mouvement migratoire «dont l’arrivée de Louis Hébert en 1617 ne marque que le début, fut au total de faible ampleur, soit environ 10000 personnes jusqu’à la fin du régime français en 1760.»   Il s’est surtout fait en deux phases dans le temps, «avec le quart des arrivées au cours des années 1665-1673, quand la métropole fit des efforts délibérés pour peupler la colonie.»  Un autre quart des arrivants sont les nombreux soldats arrivés durant les dernières années du régime qui se sont établis en Nouvelle-France.  Ajoutons à cela les quelque mille cinq cents Acadiens qui vinrent se réfugier dans cette partie de la colonie pendant et après la Déportation de 1755. Ce schéma migratoire n’est pas sans conférer à la première vague d’arrivées, à laquelle Sébastien Hervet (1642-1714) appartient, une avance importante dans la constitution ultérieure de la population[1].

 

En 2014, des 700000 actes de naissance de la base de données du Programme de recherche en démographie historique (PRDH) de l’Université de Montréal, la fréquence d’apparition chez les baptisés de notre patronyme Harvey avant 1800 était de cent dix-neuf.  Le patronyme était au 832e rang des patronymes les plus présents dans la colonie.  C’est au XIXe siècle que le nombre de Harvey a grandi énormément. 

 

Selon l’Institut de la statistique du Québec, en 2014 notre patronyme était au 128e rang des noms de famille les plus répandus au Québec et constituait 0,122 % de la population de 8215 millions d’alors.  Nous étions donc un peu plus de dix milles à porter le patronyme.  Pour bien comprendre l’influence démographique de la lignée de Sébastien Hervet et sa prédominance numérique relativement aux Harvey originaires des îles britanniques et dont les descendants demeurent toujours au Québec, il faut regarder les chiffres de l’Institut de la statistique du Québec de plus près.  Les Harvey ne se retrouvent parmi les 50 noms de famille les plus fréquents par région administrative que dans une des dix-sept régions du Québec, soit le Saguenay–Lac-Saint-Jean où ils sont au 18e rang et représentent 0,88 % de la population.  Si dans un deuxième temps l’on jette un coup d’œil à la répartition des Harvey dans les MRC, les Harvey sont parmi les 50 noms de famille les plus fréquents dans neuf municipalités régionales de comté (MRC) sur les quatre-vingt-dix-neuf[2] existantes.  Les voici :

Toutes les MRC en question se situent sur la Rive-Nord du fleuve Saint-Laurent en aval de Québec.  Lorsque l’on considère que Sébastien Hervé (2e génération) a vécu à l’Isle aux Coudres où sont nés ses enfants et que deux de ses fils (3e génération) ont vu partir huit de leurs treize fils (4e génération) pour Saint-Étienne-de-la-Malbaie et où leurs enfants (5e génération) ont essaimé dans les neuf MRC en question, on comprend que c’est cette lignée qui a engendré la vaste majorité des Harvey d’aujourd’hui au Québec.  Lorsque l’on remonte l’arbre généalogique des Harvey de ces MRC, on aboutit invariablement à Sébastien Hervé (1695-1759).  Comme en toute chose, il y a bien quelques exceptions, on le verra dans la section traitant des Harvey aux îles de la Madeleine, mais qu’il suffise de mentionner qu’au recensement de 1851 on comptait déjà au moins trois cent vingt-cinq Harvey/Hervay/Harvay/Hervey/Hervé dans ces mêmes régions, tous issus du couple formé de Sébastien Hervé et Rosalie Tremblay[3].

 

Lorsque l’on regarde la répartition des Harvey ailleurs au Québec tel qu’illustré au tableau ci-dessous, on s’aperçoit que les MRC où les Harvey représentent un pourcentage de la population entre 0,2 % à 0,4 % sont presque toutes contiguës aux neuf MRC déjà mentionnées ci-dessus à l’exception de huit.  Quatre de ces huit MRC sont immédiatement voisines d’une MRC qui elle est contiguë aux neuf MRC où les Harvey sont parmi les 50 noms de famille les plus fréquents.  Cette situation s’explique facilement par la migration au XIXe des enfants de la 5e génération pour se trouver une terre.  Encore une fois, en échantillonnant les Harvey de ces endroits, lorsque l’on remonte leur arbre généalogique on aboutit encore au même résultat, la source unique, Sébastien Hervé.  Il reste donc le cas de quatre MRC nécessitant une explication; il s’agit des MRC : La Matapédia, Desjardins, L’Assomption et finalement Coaticook[4].

Dans le cas de la MRC La Matapédia, la population anglophone de la MRC ne constitue que 0,004 % de sa population totale; Il semble qu’aucun ne porte le patronyme Harvey.  La forte présence de porteurs du patronyme s’explique essentiellement par deux migrations francophones aux nombreux enfants survenues au XIXe siècle.
  

Celle en 1849 de Jean Baptiste Hervé (1798-1862) vers Sainte-Flavie dont les enfants ont fondé Saint-Moïse et ce sont par la suite dispersé ailleurs dans La Matapédia.  Jean Baptiste est le fils de François Hervé (1760-1843) établi à Sainte-Anne-de-la-Pocatière, fils de Dominique (1636-1812) de l’Isle aux Coudres, lui-même fils de Sébastien Hervé[5].                

Celle vers 1902 d’Ephrême Hervai (1831-1904) vers Causapscal, puis Amqui.  Ephrême est le fils de Timothée Hervé (1803-1880) de Saint-Étienne de la Malbaie, fils de Michel Hervé (1771-1810) de l’Isle aux Coudres chez Pierre Hervé (1733-1799), lui-même fils de Sébastien Hervé.

Moins important en nombre en raison de leurs arrivées tardives dans la MRC, il y eut également dans la première moitié du XXe siècle la migration d’individus telle que celle des frères Joseph (1917-1978) et Henri (1921-2017) Harvey de l’Isle aux Coudres attirer par les revenus possibles de l’exploitation forestière.  Ils venaient y rejoindre leur oncle et tante Étienne Demeules et Olivine Harvey (1879-1950) qui avaient fondé Saint-Raphaël d’Albertville en 1899.

La MRC Desjardins est située en banlieue sud de la ville de Québec, la présence nombreuse de Harvey à cet endroit n’est qu’une réflexion de leur forte présence à Québec faisant suite au mouvement migratoire vers les banlieues des années 1960-70.  Québec est le pôle migratoire principal des Harvey lorsqu’il quitte Charlevoix, le Saguenay–Lac-Saint-Jean et la Côte-Nord.  L’échantillonnage des Harvey à Québec et dans la MRC Desjardins, démontrent que leurs ascendants sont des lignées des deux frères Hervé, Pierre et Dominique tous deux fils de Sébastien Hervé. La population anglophone n’y constitue que 0,009 % de sa population totale.

Pour ce qui est de la MRC L’Assomption, où la population anglophone ne constitue que 0,014 % de sa population totale, on assiste encore ici à un mouvement migratoire vers les banlieues des années 1960-70.  De la deuxième moitié du XIXe siècle jusqu’au milieu du XXe, nombreux ont été les Harvey de l’Isle aux Coudres et d’ailleurs dans Charlevoix descendants de Sébastien Hervé à venir s’installer dans l’est de Montréal pour travailler au port de Montréal principalement.  Ce sont les enfants de ces derniers qui ont migré en banlieue est de Montréal et qui occupent en grand nombre aujourd’hui la MRC de L’Assomption.

Finalement l’intrigante MRC de Coaticook.  Par son nom et ses origines loyalistes, certains ont pu présumer que les Harvey qui y résident aujourd’hui sont d’origines britanniques.  Bien que des loyalistes fuyant l’indépendance américaine s’y soient installés, 1500 au total dans le vaste territoire alors appelé «Eastern Townships», peu de porteurs du patronyme de cette origine subsistent toujours dans cette MRC, une ou deux familles tout au plus.  Au recensement de 2016, les descendants des loyalistes et autres individus de langue maternelle anglaise ne constituaient plus que 10 % de la population de la MRC.  Au début du siècle dernier, une poignée de jeunes gens de la région de Saint-Fidèle dans Charlevoix migrèrent vers la région de Coaticook pour y trouver un avenir, parmi eux, des Bergeron, Bouchard, Dallaire, Gagnon, Gaudreault, Perron, Savard, Tremblay et finalement trois Harvey, de lointains cousins, Ernest, Henri et Liguori.  Encore une fois ici,  la forte concentration de Harvey dans cette MRC est le résultat des lignées des deux frères Hervé, Pierre et Dominique tous deux fils de Sébastien Hervé

D’abord dans les années 1920, les frères Henri (1892-1978) et Liguori Harvey, fils d’Henri Harvey (1845-1928) chez Cléophas Hervei (1818-1891), natif de L’Isle-aux-Coudres, fils de Michel Hervé (1791-1841) à Pierre Hervé (1733-1799).  Les deux frères ont engendré dix-neuf enfants.  

Et enfin avec ses douze enfants, dans les années 1930, Joseph Ernest Harvey (1880-1945), fils de Guillaume Harvai (1835-1913) et petit-fils de Louis Denis Hervé (1802-1887) chez David Louis Dominique Hervé (1764-1837) lui-même fils de Sébastien Dominique Hervé (1736-1812).

Aujourd’hui, les porteurs du patronyme Harvey dont les origines sont britanniques sont surtout concentrés dans la grande région de Montréal où même là, ils ont été largement dépassés en nombre par ceux d’origine française depuis longtemps. 

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[1] GAUVREAU, Danielle et René Jetté.  Histoire démographique et génétique humaine dans une région du Québec avant 1850. In: Annales de démographie historique, 1992. La démographie de l’Union soviétique, pages 245-267.

[2] DUCHESNE, Louis.  Les noms de famille au Québec : aspects statistiques et distribution spatiale.  Québec, l’Institut de la statistique du Québec, 2006, pages 41, 53, 69, 88, 89, 92, 127 et 164.

[3] B.A.C., G., Recensement de 1851, Canada-Est, district du comté de Saguenay.  Les données de trois des vingt-neuf sous-districts ne sont plus disponibles alors que l’on sait que quelques Harvey s’y trouvaient.  L’énumération connue sous le nom du Recensement de 1851 a débuté officiellement le 12 janvier 1852.  On comptait une trentaine d’autres porteurs du patronyme sur la Côte-du-Sud également issus du couple formé de Sébastien Hervé et Rosalie Tremblay.

[4] Les données démographiques relatives à la langue maternelle sont tirées du recensement révisé de 2016 de Statistique Canada.

[5] Comme partout ailleurs dans le document, l’orthographe des noms et prénoms des ancêtres reflète celui utilisé aux registres paroissiaux lors du baptême des individus.