1. Dominique Hervay

5.6.4.1 Dominique Hervay (1789-1824), 5e génération 


Lors de leur mariage en mars 1888, David Louis Dominique Hervé (1764-1837) et Marie Louise LeBreton dite Lalancette (1769-1865), s’étaient installés à Sainte-Anne-de-la-Pocatière, probablement chez les parents de Marie Louise comme le voulait la coutume à l’époque, quand les enfants n’avaient pas encore leur propre lopin de terre.  Marie Louise y accouche de leur premier enfant le 16 janvier 1789; ce fils sera le seul enfant de la famille à voir le jour à Sainte-Anne-de-la-Pocatière.    

Nommé «Dominique Hervay», il sera baptisé le lendemain et portera le prénom commun au père et au grand-père.  Son parrain est «Pierre Denis dit Kimper», un futur parent.  «La marraine Angélique Bouchard » est la grand-mère de l’enfant[1].  Pierre Denis dit Quimper (1740-1819) deviendra sous peu le beau-père de Joseph Sébastien, le jeune oncle de l’enfant qui a rejoint le clan des Hervé installé sur la Côte-du-Sud à sa majorité l’été précédent.  

Dominique est le premier à porter le patronyme sous la forme «Hervay» et le seul au XVIIIe siècle.  Une quinzaine d'individus seront ainsi nommés au cours du XIXe siècle, surtout dans les paroisses de Saint-Étienne de la Malbaie.  On n’en trouve que cinq au XXe siècle[2].  Ses frères et ses sœurs seront des Hervé, Arvé et Hervey

En 1802, Dominique a déjà treize ans lorsque sa famille quitte la Côte-du-Sud pour s’établir sur la rive nord du fleuve, dans la seigneurie de Mount Murray.  Sa mère y accouchera de sept autres enfants, mais Dominique trouvera l’amour et quittera le domicile familial bien avant la naissance des plus jeunes. 

Il est possible que Dominique ait longtemps fréquenté celle qui deviendra sa femme.  Lorsque sa mère donne naissance à une sixième fille le 17 mars 1809, curieusement, « Quirille Pulcherie Duchesne», celle qu’il épousera dans plus de deux et demi est choisie comme marraine de l’enfant prénommée «Sara» lors de son baptême le lendemain[3].

«Dominique, laboureur» de la paroisse de Saint-Étienne de la Malbaie dans la seigneurie de Murray Bay, y épouse Quirille Pulcherie Duchesne (1786-1872) le 5 novembre 1811.  Pulcherie est la fille de René Abraham Duchesne dit Samson (1760-1825) et de Félicité Véronique Desbiens (1769-1810) de l’Isle aux Coudres.  Félicité Véronique est la fille de Françoise Tremblay, la cousine du père de Dominique

Quirille Pulcherie était enceinte lors du mariage puisque le 12 juin suivant naît une petite fille que l’on prénommera, Josephe.  Lors du baptême, le mois suivant, le curé prend bien soin de mentionner que «Josephe Hervey est la fille naturelle de Dominique Hervey laboureur et de Pulcherie Duchesne»[4], comme le voulait la prescription et semblerait-il, à la discrétion du célébrant[5].  En effet, lors du premier mariage célébrer par le curé Le Courtois à son arrivée, le père de la mariée, le seigneur Malcom Fraser, protestant, assista et signa le registre.  Le Courtois se gardera bien de souligner la naissance illégitime de la mariée cette journée-là ce qu’il ne se privera pourtant pas de faire régulièrement dans le cas de ses plus humbles paroissiens.  Le Courtois est l’un de ces prêtres français qui pendant la Révolution française, refusèrent de prêter le serment de fidélité à la Constitution civile du clergé tel que l’Assemblée nationale constituante l’exigeait depuis le 1er octobre 1791.  Comme bien d’autres, il s’exila en Angleterre et fut envoyé dans la colonie devenue anglaise grâce à la connivence du clergé et des autorités anglaises qui s’accommodaient de prêtres plus favorables à la royauté, quelle qu’elle soit.  Le Courtois fera honneur à ses protecteurs britanniques et se rangera toujours derrière les seigneurs écossais de Murray Bay et de Mount Murray.  Il sera particulièrement actif lors du recrutement des miliciens dans la guerre de 1812[6].  

On en sait peu sur la terre que Dominique s’est vu accorder dans la paroisse Saint-Étienne de Murray Bay.  On sait que la famille vit dans la «Concession Saint-Charles» de la seigneurie de Murray Bay.  Lui et Pulcherie résideront toute leur vie dans la seigneurie de Murray Bay.  Ils y auront au moins huit enfants, tous baptisés à l’église de Saint-Étienne de la Malbaie, la seule paroisse ouverte à l’est de Baie-Saint-Paul à l’époque, puisque celle des Éboulements n’ouvrira qu’en 1815.  Outre Josephe déjà mentionnée, naîtront Éléonore Hervey le 16 février 1814, Christine Hervey le 6 mars 1815, Flavien Hervey le 25 septembre 1816, une certaine Béatrice née vers 1819 et dont on ne trouve pas l’inscription du baptême[7], puis Marie dite Marie Hermine Hervey le 18 septembre 1820, Éléonore Hervey le 6 août 1822 et enfin Cirille le 13 juillet 1824.  De ses huit enfants, le couple en perdra trois en bas âges et deux autres alors qu’ils n’auront pas encore atteint vingt-cinq ans.   

Quirille Pulcherie met au monde son dernier enfant le 13 juillet 1824 par la naissance de «Cirille Hervai».  Puis le malheur s’abat sur la famille.  La maladie s’y introduit sournoisement et le couple perd une fille neuf jours plus tard, la deuxième Éléonore[8]

«Dominique Hervai qui est cultivateur» n’a que trente-cinq ans lorsqu’il décède deux mois après sa fille Éléonore le 13 septembre 1824.  Deux jours plus tard, Thimothé Hervé (1790-1867), oncle du même âge que lui, et le bedeau Mathieu Savard (1778-post.1832), un petit-cousin[9], agissent comme témoins à son inhumation deux jours plus tard, dans le cimetière de la paroisse[10]

Deux mois jour pour jour après le décès de Dominique, la seigneuresse Christiana Emery (1743-1828) accorde à son l’oncle Dominique Isaïe (1775-1851) la terre voisine de la sienne dans la concession Saint-Charles.  L’oncle et sa famille quittent donc le Cap-à-l’Aigle pour la seigneurie voisine de Murray Bay[11]Quirille Pulcherie Duchesne ne sera pas seule avec ses six enfants pour passer l’hiver.

Le printemps suivant, Quirille Pulcherie perd le fils qu’elle avait eu l’été précédent; il ne lui en reste plus qu’un et quatre filles[12]« Quand vient l’été, la veuve de Dominique Hervey fils de David, se présente chez le notaire Charles Herménégilde Gauvreau (1787-1839); Kerie Duchesne partage le patrimoine familial entre ses enfants et elle-même»[13].

Pulchérie se remarie le 7 novembre 1826 à Jean Lavoie (1799-1833) de qui elle aura au moins un autre enfant[14]Pulchérie ne sera pas heureuse très longtemps, car son second mari s’éteint au même âge que le premier, trente-cinq-ans, « journalier du lieu décédé accidentellement» au milieu de l’été 1833[15].

Josephe dite Josephte qui s’était mariée à l’âge de quinze ans en 1827, accueillera sa mère et sa sœur Christine chez elle jusqu’au départ du couple pour Chicoutimi à la fin des années 1860[16]Christine s’invitera chez sa sœur Béatrice après le mariage de cette dernière en 1841[17].   

À la fin des années 1860, avec sa fille célibataire Christine, Pulchérie se réfugiera chez Béatrice, sa fille probablement adoptive, à Saint-Fidèle de Mount Murray et y finira sa vie[18].  Elle décède à l’âge de quatre-vingt-six ans, le 19 octobre 1872[19]

Cette lignée de Hervay/Harvey s’arrête au décès du célibataire Flavien, le 1er juillet 1837.  Il était le seul fils survivant de la famille[20].


Dominique Hervay, ses enfants, données généalogiques — 6e génération

[1] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Anne-de-la-Pocatière, 17 janvier 1789.

[2] BAnQ., Paroisses diverses.  On retrouve également des individus portant le patronyme «Hervay» à Chicoutimi (1), à Saint-Fulgence (1) et à Montréal (1).

[3] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 18 mars 1809.

[4] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 20 juillet 1812.  La phrase prescrite pour les registres par l’archevêché dans le cas des baptêmes est «née le… du légitime mariage de…».  Après le décès de son mari, toujours cordonnier à quatre-vingt-trois ans, le 22 avril 1886 à Chicoutimi,Josephe sera placée à l’Asile Saint-Michel Archange de Québec où elle décédera le 9 décembre 1887.  Il faut noter qu’elle n’avait pas été déclarée «atteinte d’aliénation mentale» au recensement de 1881. 

[5] COLLECTIF, Église catholique. Appendice au Rituel romain.  Réédité par ordre des pères du premier Concile plénier de Québec.  Québec, Imprimerie de l’Action sociale limitée, 1919, page 204 «Enfant illégitime».  Habituellement, le nom des parents, dans de tels cas, est omis.  La législation ecclésiastique prévoyait les deux situations : mentions des parents naturels lorsqu’une demande formelle est faite par le père et la mère, soit par écrit, soit devant témoins, ou omissions des parents «que l’enfant soit (alors) mentionné, au registre des baptêmes, comme enfant d’un père inconnu ou de parents inconnus» comme on l’a vu quelques fois dans les registres à l’Île aux Coudres et très souvent dans ceux de Saint-Étienne de la Malbaie.  Ici, Dominique et Pulcherie firent la demande pour la mention de leur nom au registre.

[6] BABIN, Basile J. «Le Courtois, François-Gabriel». Dictionnaire biographique du Canada. 1re édition 1966, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1987, 15 volumes, volume VI (Décès de 1821-1835).

[7] Il n’y a aucun enfant portant le patronyme et prénommée Béatrice inscrit au registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie entre 1811 et 1825.  À l’époque, seuls les registres de la paroisse Saint-Étienne sont ouverts à l’est des Éboulements.  Les registres de cette paroisse, de ceux de Baie-Saint-Paul et de l’Isle-aux-Coudres ne sont pas plus révélateurs de cette naissance.  Le couple n’a pas eu d’autres enfants, outre ceux mentionnés, tous baptisés à Saint-Étienne de la Malbaie.  Pourrait-il s’agir d’un enfant adopté? Après la mort de son mari en 1877, Béatrice vivra chez son fils Georges Dallaire à Saint-Fidèle de Mount Murray; elle y est recensée en 1881.  On perd sa trace par la suite.   

[8] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 24 juillet 1824.  Sépulture d’Éléonore Hervai.

[9] Mathieu Savard est de fait le fils de Mathieu Savard (1742-1831), un neveu du père de Thimothé par sa première union avec Geneviève Savard. 

[10] Ibid., 15 septembre 1824. 

[11] A.N.Q., GN. Minutier Charles Pierre Huot, no 1751, 13 novembre 1824.

[12] Ibid., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 13 avril 1825.  Sépulture de Cirylle Hervai.

[13] A.N.Q., GN. Minutier Charles Herménégilde Gauvreau, 30 juillet 1825.

[14] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 7 novembre 1826. 

[15] Ibid., 18 juillet 1833.

[16] B.A.C., G., Recensement de 1851, comté Saguenay, Saint-Étienne de la Malbaie, microfilm e002315003.

[17] B.A.C., G., Recensement de 1851, comté Saguenay, Saint-Étienne de la Malbaie, microfilm e002315078.

[18] B.A.C., G., Recensement de 1871, district de Charlevoix, Saint-Fidèle, page 4.

[19] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Fidèle de Mount Murray, 22 octobre 1872.  Sépulture de Marie Quéri Duchesne.

[20] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 3 juillet 1837.