1.Michel Harvay 

Saint-Coeur de Marie

Michel Harvay (1846-1938) et Saint-Cœur de Marie


Lorsque naît Michel Harvay à Sainte-Agnès dans Charlevoix le 27 octobre 1846, Roger Hervey (1809-1900) son père est absent, monté dans les chantiers pour l’hiver afin de faire vivre sa famille.  Probablement décidé à l’avance, sa mère Zoë Bergeron (1816-1898), demande à un voisin Léon Amiot dit Villeneuve (1810-1887), frère de sa belle-sœur Marie Anne Villeneuve (1802-1860) mariée à Pierre (1799-1853) frère de Roger, d’agir comme parrain.  C’est Basilice Laberge (1808-1887), voisine immédiate mariée au cousin de Zoë, Joseph Bergeron (1809-1876) qui agit comme marraine[1].  Coïncidence ou preuve additionnelles qu’à l’époque les gens migraient en clan, les grands-pères paternels de Roger et Zoë, Pierre Hervé (1733-1799) et André Bergeron (1727-1801), étaient des voisins immédiats à l’Isle-aux-Coudres.

Outre son père, Roger Hervey (1809-1900), Michel Harvay a comme généalogie patrilinéaire son grand-père l’entrepreneur Pierre Hervé (1759-1857) et les autres générations qui les ont précédés, le cultivateur insulaire Pierre Hervé (1733-1799), le colon Sébastien Hervé (1695-1759) et le migrant Sébastien Hervet (1642-1714).

Le père de Michel est journalier et de condition modeste, si bien que Michel sera placé en bas âge dans une famille d’adoption, celle de Philibert Tremblay (1819-1906) et de sa femme Marie Gauthier (1818-1849), un couple de cultivateurs des Éboulements qui, semble-t-il, ne peut avoir d’enfant[2].  Mariée à Philibert depuis six ans[3], Marie n’avait d’ailleurs pas eu d’enfant au cours de son précédent mariage qui dura trois ans avant que son mari ne décède[4].  Ils acceptent donc bien volontiers de prendre Michel Harvay à leur charge.  Celle qui fait figure de mère pour Michel depuis sa naissance s’éteint en août 1849 en tentant de mettre un enfant au monde[5]Michel n’a pas encore trois ans.   

Michel ne sera pas le seul de sa famille à devoir ainsi quitter le nid familial pour permettre à la famille de survivre; ce sera également le cas de sa sœur Arthémise (1837-1913). 

Lorsqu’en 1850 le père adoptif Philibert Tremblay épouse la veuve Éléonore Potvin (1822-1891) en secondes noces[6], la jeune femme a déjà un marmot, Xavier Rochefort, qui n’a pas trois ans.  La donne semble avoir changé pour Michel après l’arrivée de la nouvelle épouse : au passage du recenseur aux Éboulements en 1852, alors qu’il n’a que cinq ans, Michel est qualifié de « domestique »[7].  Erreur du recenseur ou réalité de l’époque? Il y a fort à parier que Philibert est dans les chantiers pour l’hiver et que c’est la nouvelle épouse qui décrit ainsi la place qu’occupe Michel dans la famille, du moins à ses yeux. 

Sainte-Anne de Chicoutimi

Quoi qu’il en soit, la famille où vit Michel part s’établir au Saguenay peu de temps par la suite, car Philibert vend terre et maison en février 1853[8].  Ils sont alors sept familles des Éboulements à partir vivre aux limites sud-est du Township Simard[9] dans un territoire qui sera plus tard inclus dans la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi.  Plusieurs y seront installés depuis un certain temps en 1855[10].  À l’arrivée de Michel dans le secteur, la population du canton est d’une centaine de personnes et sept d’entre elles sont de la famille de Philibert.  La paroisse Saint-François-Xavier de Chicoutimi regroupe alors quant à elle les cantons Chicoutimi, Jonquière, Kénogami, Tremblay, Simard et Harvey avec une population totale d’un peu plus de deux mille habitants.  Le canton Simard, où Michel et la famille de Philibert sont établis est borné au sud-ouest, par la rivière Saguenay; au nord-ouest, par le canton Bourget; au sud-est, par le canton Tremblay et au nord-est, par les terres vacantes de la couronne.  Il sera compris dans les limites de la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi lors de la création de cette dernière en 1860. 

Philibert se met rapidement en société pour exploiter la carrière de pierre à chaux qui se trouve sur sa terre du lot numéro trente-six dans la quatrième concession du canton Tremblay.  Il deviendra un important producteur de chaux de la région[11].

En 1855, afin d’accéder au statut de municipalité et d’en tirer les avantages, les cantons Simard et Harvey sont annexés jusqu’en 1872 au canton Tremblay en raison de leurs faibles populations.  L’un des premiers conseillers de cette nouvelle entité est un certain Joseph Fleury qui prendra une place importante dans la vie de Michel une quinzaine d’années plus tard.  

En 1859, Michel est encore le seul Harvey établit dans le canton[12].

Au début des années 1860, il y a deux familles, un total de quinze personnes à habiter dans la petite maison de bois construite à la hâte à leur arrivée huit ans plus tôt.  En effet, outre sa propre famille, Philibert a accueilli chez lui la sœur du mari décédé de sa femme et sa famille.  Adèle Rochefort, son mari Grégoire Jean et leur fille complète donc la maisonnée avec une domestique.  À quatorze ans, Michel Harvay est aussi toujours au service de la famille qui l’a accueillie et continue de travailler sur la terre de Philibert[13].  Le rang 2 où habite Michel, se poursuit dans le canton voisin de Tremblayoù la troisième et la quatrième voisine sont toutes deux de petites-cousines, les filles de Thomas Erver (1795-1832) chez Louis (1762-1842).  L’une d’entre elles, Marie (1827-1901), est mariée à Nazaire Boucher, agriculteur, entrepreneur forestier et homme d’action politique sur plusieurs plans.  Ce dernier sera actif pour la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi qui vient tout juste d’être constitué en 1860; il sera maire de la municipalité de canton de 1864 à 1870[14].  Comme tout ce qui touche à la famille de Michel, cette filiation chez les Harvey ne semble pas l’avoir servi.

En 1863, la population du canton Simard a presque doublé depuis l’arrivée de Michel; elle s’établit maintenant à cent quatre-vingt-dix-huit individus.  Plus de onze cents acres de terre sont maintenant défrichées.  Le canton voisin, celui de Tremblay, beaucoup plus populeux a déjà dix rangs et sa population s’élève à cinq cents individus[15].    

En hiver, dès qu’il fut en mesure de le faire, Michel monte aux chantiers pour y travailler et accumuler le pécule nécessaire à l’acquisition de sa propre terre le temps venu.  On ne sait pas combien de temps encore Michel continua de vivre sous le toit de Philibert, mais rien n’indique qu’il soit parti bien avant de rencontrer celle qu’il allait épouser. 

Peu après sa majorité qui survient tard à l’automne 1867, on peut le présumer, Michel procède à l’acquisition d’une terre pas très loin de chez Philibert, dans le canton Tremblay.  De fait, il s’agit d’une terre de cent acres que Philibert Tremblay avait acquise à son arrivée dans le secteur et qu’il avait donnée en garantie en 1857, lors d’une reconnaissance d’obligations, pour les achats qu’il avait faits au commerce de William Price à la rivière du moulin[16].  La vente est faite sous seing privé.  On ne sait pas si Michel travailla à l’entreprise de production de chaux de son bienfaiteur Philibert.  Le simple fait que la terre qu’il achète touche la carrière à pierre de chaux de ce dernier indique peut-être les intentions de Michel à long terme.  Il serait surprenant que le sous-sol de cette terre ne contienne pas également la pierre à chaux essentielle, car la carrière de pierre à chaux la mieux connue et la plus ancienne s’étend sur un espace d’environ trois mille, à travers les 3e et 4e rangs des cantons Simard et Tremblay[17].  À l’époque, la chaux est très demandée, car elle sert à la fabrication du mortier et au blanchissage de l’extérieur des bâtiments. 

C’est en début de soirée le 19 mai 1870 que le Grand feu qui avait débuté à Saint-Félicien au matin atteint les hauteurs qui entourent Chicoutimi.  Le village était cerné par le brasier et Sainte-Anne de Chicoutimi était située sur le chemin de son itinéraire.  On sait que le village de Sainte-Anne ne fut pas atteint puisque le feu s’est arrêté sur les hauteurs du Cap, mais il n’en fut pas de même dans les rangs du canton et de ceux avoisinants.  Dans tout le Saguenay et au lac Saint-Jean, cinq cent cinquante-cinq familles ont perdu leur logis et sept personnes en furent victimes[18]. Selon un témoignage de l’époque, « Toutes les maisons des rangs au-dessus du village (Sainte-Anne) ont passé au feu, excepté deux »[19].  Pour le canton, les rapports définitifs après le feu furent moins alarmants que ce témoignage, mais ils faisaient néanmoins état de quarante-sept maisons consumées au total à Sainte-Anne et Saint-Fulgence[20].  Par contre, le couvert forestier des cantons de Simard et de Tremblay a été complètement détruit[21].  Comment Michel, à vingt-trois ans, a-t-il vécu cette épreuve?   On en apprendra suffisamment dans peu de temps pour savoir que Michel demeurait toujours chez Philibert à l’époque et que ce dernier a tout perdu quand sa maison et ses bâtiments furent rasés par le Grand feu.  On sait en plus que dans les mois qui suivirent, Michel procédera à l’acquisition et la vente d’au moins deux lots.  Il est bien possible que l’empressement de Michel soit aussi relié à un autre type de feu, car dans moins d’un an, il prendra épouse.  

Comme on l’a vu, Michel avait acquis de Philibert Tremblay une terre dans le canton Tremblay à la fin de la décennie 1860, puisque lors d’une deuxième acquisition de terre le 27 septembre 1870 il est réputé cultivateur du canton Tremblay[22].  Comme on sait que les deux copies de cette transaction fait « par acte sous seign privé que les vendeur et acquéreur déclarent avoir été détruit dans l’incendie du dix neuf mai dernier », il faut donc conclure que la maison de Philibert est également partie en fumée[23].  Ce jour-là, Xavier Rochefort, le fils qu’avait eu Éléonore Potvin d’un premier mariage, celui avec qui Michel a grandi chez Philibert Tremblay, lui cède la moitié sud-est du lot de terre numéro onze du troisième rang du canton Simard.  Cette portion de lot de cinquante acres pourrait bien être l’héritage que Xavier avait reçu de Philibert son beau-père, lors de son mariage en 1867.  Quoi qu’il en soit, Xavier a besoin de liquidité et Michel paie le jour même « vingt deux louis argent courant » pour son lot[24]Michel achètera un deuxième lot dans ce canton dans quelques années. 

Il est intéressant de noter que la terre acquise par Michel, tout comme celle qu’il achètera huit ans plus tard dans ce même canton, sont traversées par la carrière de pierre à chaux la plus ancienne, celle qui s’étend sur une distance d’environ trois milles[25], à travers les 3e et 4e rangs des cantons Simard et Tremblay.  Peut-être trouvera-t-on un jour dans le minutier d’un notaire de la région un élément qui démontrera l’implication de Michel dans la production de chaux, car, « il s’est fait de la chaux à Sainte-Anne avant ailleurs. Au commencement, toute la chaux venait d’ici. Georges Gauthier (le chantre), Eusèbe Gauthier, Philibert Tremblay en ont fait… » [26]

Le plus proche voisin de Michel dans le canton Simard est le veuf Joseph Fleury (1821-1891), ancien conseiller et futur beau-père[27].

Un mois plus tard, c’est au tour de Michel de vendre une moitié de terre de cinquante acres à l’un des enfants de Philibert Tremblay.  Il s’agit de la moitié sud-est du lot numéro trente-sept dans le troisième rang du canton Tremblay.  On peut donc présumer que la partie avant de cette première terre acquise par Michel se situait dans le rang deux, ce même rang où habite justement Philibert Tremblay.  C’est ce dernier qui procède à l’achat au nom de son fils Charles qui est toujours mineur.  Cette vente par Michel n’est pas désintéressée.  Bien que Philibert veuille établir l’un de ses fils, Michel de son côté a besoin de liquidités pour s’établir sur sa terre du canton Simard.  La transaction s’établit à « cent vingt piastres en argent courant » dont dix-huit sont reçus sur-le-champ.  Michel a l’esprit mercantile.  Il demande comme balance de paiement que Philibert s’engage « à construire une grange de trente pieds sur vingt six » sur la terre de Michel « dans le Township Simard » construction qui devra être complétée pour la récolte de l’année suivanteMichel semble développer rapidement le sens des affaires, car à l’acte notarié sont attachées plusieurs conditions.  Ainsi, tous les détails requis pour cette grange sont décrits au sujet des portes, des planchers, des bardeaux, etc.  Philibert s’engage de plus, une fois la grange terminée, à livrer à Michel : « une vache, trois moutons, une paire de roues de grande charrette ferrées, une charrue grée (charrue anglaise) »[28].  Il ne restera plus pour Michel qu’à se construire une maison.

En cette fin de décennie, il semble bien que Michel traîne toujours du côté de cette nouvelle terre et surtout où habite pas très loin une famille, celle du veuf Joseph Fleury (1821-1891).  Joseph vient de perdre Marie Josephte Guay (1827-1869) sa femme, en août 1869.  Marie Eliza Fleury, qui se fait prénommée Élise, la plus vieille des filles toujours à la maison, a pris la relève de la mère pour veiller aux besoins de ses cinq frères et sœurs puînés.  Cependant, à dix-huit ans, elle ne semble pas prête à se sacrifier très longtemps.

Le 9 janvier 1871, à l’église Sainte-Anne de Chicoutimi du canton Tremblay[29], Marie Eliza Fleury épouse Michel Harvay.  Philibert Tremblay, décrit comme « ami » au registre, sert de témoin à l’époux alors que le père d’Élise[30] consent au mariage de sa fille toujours mineure.  Le curé dans son registre nous confirme que Michel, si cela avait été l’intention de Philibert et de sa première femme, n’a jamais été adopté officiellement puisqu’il est toujours décrit comme « fils majeur de Roger Harvay et Zoé Bergeron »[31].  Il aura donc été au service de cette famille qui l’avait accueilli pendant près de vingt-cinq ans.  Michel demeurera toujours assez près de la famille de Philibert; les enfants de ce dernier seront, presque à coup sûr, choisis comme parrains et marraines de ses propres enfants, en pair avec les frères et sœurs d’Élise.  

Il semble que Joseph Fleury, qui a toujours cinq enfants de sept à dix-huit ans à la maison sans épouse à ses côtés, ait pu garder sa fille aux alentours, car Michel est voisin de son beau-père.  Alors que le nouveau couple demeure chez le beau-père, Michel, dès le printemps, y construit une maison; les travaux sont d’ailleurs fort avancés à la mi-avril[32]

L’année suivant leur mariage Élise Fleury mettra au monde un garçon (Onésime), puis un deuxième (David) en 1873[33].  En parallèle, deux de ses frères, maintenant mariés, ont eux aussi des enfants, si bien que chacun des trois couples envisage l’établissement de toute cette marmaille plus tard.

Si plus de trois cents résidents de Sainte-Anne quittent la paroisse pour aller se chercher un avenir aux États-Unis entre 1875 et 1880, ce ne sera pas la direction que prendront Michel et sa famille élargie[34].

Mistouk

Lorsque naît le troisième fils de Michel (Guillaume) en février 1878[35], il n’assiste pas au baptême.  Lui et Joseph Wilbrod Fleury (1849-1926), son beau-frère, sont partis avec quatre autres voisins à près quinze lieues[36] en amont sur le Saguenay; Charles Guimond, Jacques Tremblay, Désila Bouchard et Émile Tremblay sont également du voyage.  Le groupe explore alors le territoire au nord de la Grande-Décharge pour y trouver des terres suffisamment fertiles et une forêt prometteuse afin d’y installer leurs familles respectives.  Ils montent jusqu’à la rivière Mistouk, affluent de la Grande-Décharge dans le canton De l’Isle[37].  Ils font rapidement le constat que les nombreuses chutes de la rivière seraient en mesure de faire tourner plusieurs moulins à farine et à scie.   Ils notent également les nombreux ruisseaux qui traversent le canton et qui rendent le sol remarquablement bon et arable[38].  Il découvre aussi que les cours d’eau avoisinants regorgent de poissons, ce qui pourrait s’avérer utile si la terre manquait de générosité à certaines périodes.  Le premier jour, ils se rendent jusqu’au « lac des Hervey »[39] et ne trouvent pas « le trait carré » établit par l’arpenteur Duberger en 1861, un des objectifs du voyage[40].  Ils couchent à Mistouk pour la nuit.  Le lendemain, ils retournent aux alentours du « lac des Hervey », toujours avec la ferme intention d’y trouver le trait-carré.  Peine perdue.  Ce n’est que l’année suivante que le trait-carré sera trouvé lors d’une deuxième exploration.  À la fin de cette deuxième journée, Michel et le groupe couchent aux « lac des Hervey », entre la rivière aux Harts et la rivière aux Chicots.  La troisième journée est pluvieuse et le groupe s’abrite pour la nuit sous une structure d’écorce montée à la hâte au « rapide Gervais »; la précipitation est telle que l’un des voyageurs se blesse et le groupe devra rentrer le lendemain à Sainte-Anne de Chicoutimi avec un éclopé s’aidant d’une béquille de fortune[41].  La venue du groupe dans ce secteur spécifique n’est pas un hasard.  La compagnie Price et Peter McLeod de Chicoutimi ont exploité le secteur nord du lac Saint-Jean, dont le canton De l’Isle à compter de 1850.  Comme Michel, son beau-père et ses beaux-frères ont tiré leur gagne-pain d’hiver comme bûcherons dans ces chantiers, il est certain qu’ils furent du lot de ces hommes venus y bûcher et c’est probablement ces premières découvertes du territoire qui les ont incités à revenir explorer plus à fond le secteur[42].  Quoi qu’il en soit, au retour des beaux-frères, la décision est prise : les familles partiront dès que ce sera possible pour s’établir dans le canton De l’Isle[43].

S’il fut l’un des initiateurs du projet de fonder un établissement au lieu-dit de Mistouk, Michel par contre, ne semble pas encore prêt pour le grand départ. 

Au printemps, lui qui est maintenant décrit comme un « cultivateur résidant dans le canton Simard » acquiert d’Antoine Dechêne une nouvelle terre dans ce canton.  On peut donc présumer avec assurance que Michel et sa famille se sont installés sur la terre que ce dernier avait achetée, en 1870, le lot numéro onze du troisième rang.  Sa nouvelle acquisition, le lot numéro douze du quatrième rang qu’il achète le 20 mai 1878, fait cent acres et il est traversé par un ruisseau important, affluent de la rivière des vases (aujourd’hui rivière aux vases)[44].  Les deux terres qu’il possède dans ce canton sont pratiquement contiguës (voir l’illustration ci-dessous).

C’est dans ce qui deviendra les rangs deux et trois du canton De l’Isle que les trois beaux-frères semblent avoir arrêté leur choix.  Pour Michel Harvay, ce sera quatre lots sur lesquels il mettra la main.  Du gouvernement, il fait l’acquisition des deux premiers lots, les numéros 17a et 17b dans le rang deux, dès le printemps suivant[45].  Ces deux lots sont particulièrement intéressants pour Michel, car la rivière Mistouk traverse sa terre et se déverse dans la Grande Décharge à l’extrémité de celle-ci.  Outre du pin blanc, le bois marchand de grande qualité qui, il y a plusieurs années, abondait dans cette partie du pays, avait déjà été enlevé et exploité par Price et ses acolytes en 1861[46].  Le bois dont Michel et ses beaux-frères se serviront pour leurs constructions et celui qu’ils exploiteront sera donc celui que les hommes de Price avaient négligé trente à quarante ans plus tôt et celui qui avait poussé depuis.

Pour au moins les quatre années suivantes, Michel, comme ses beaux-frères, conservera sa maison dans la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi au canton Simard tout en profitant des temps morts à la ferme pour monter défricher sa nouvelle terre dans le canton De l’ile (Delisle) plus précisément à Mistook[47]Michel, qui a maintenant près de trente-deux ans, ne lambine pas; dès la fin de l’été 1878, il retourne à Mistouk commencer les défrichements avec son beau-frère Joseph Wilbrod Fleury, vingt-neuf ans et le jeune frère de celui-ci, Thomas, qui n’en a que dix-huit[48].  S’il était monté dans les chantiers des autres depuis son adolescence, dorénavant ce sera dans le sien. 

 «Après les durs travaux des champs sur les établissements…, on partait pour Delisle, traversant, sur un parcours d’une quinzaine de milles, un pays inhabité... Écrire les misères sans nombre qu’on eut à endurer serait difficile; le récit de toutes les traverses de ces hommes courageux remplirait un volume»[49].

Si ces beaux-frères sont demeurés chez leur père toutes ces années, Michel et Élise sont toujours dans le canton Simard en 1881 et ils le seront pour encore un certain temps[50].  Le couple a maintenant quatre fils, Onésime neuf ans, David sept, Guillaume dit William trois et Louis pas tout à fait un an. 

À compter du 22 novembre 1882 s’installe en permanence à Mistouk la première famille, celle du beau-frère Joseph Wilbrod Fleury et de sa femme Marie Tremblay, avec leurs sept enfants âgés de un à dix ans[51].  Ils sont accompagnés de Lydia, la sœur d’Élise et de ses frères Eugène, Thomas et Delphis.

La deuxième famille s’installe à Mistouk en janvier 1883. Les autres suivront lentement par la suite.  Ainsi au cours du printemps, c’est au tour du beau-père et des plus jeunes frères et sœurs d’Élise toujours à la maison de remonter le sentier avec leurs hardes pour partir s’établir à Mistouk.

Les premiers colons, comme le beau-frère et le beau-père de Michel qui partent de Sainte-Anne de Chicoutimi et du canton Tremblay, faute de chemins carrossables, transportent leurs effets et provisions sur leurs dos[52].  Ils suivent la route jusqu’à Saint-Charles où vivent déjà quelques familles. De là jusqu’à Mistouk, on suit péniblement un petit sentier qui serpente à travers la forêt. Avec le temps ce sentier devient plus ou moins carrossable[53].  Il faut dire que les habitants de Sainte-Anne et de Mistouk resteront en relations pour au moins une génération, puisque des parents sont restés derrière et que le premier endroit demeurera fournisseur du second pour encore un certain temps.  De plus, plusieurs propriétaires comme Michel ne sont pas résidants de Mistouk, mais s’y rendent régulièrement pour travailler leur terre.

En juillet 1883, Élise accouche d’un cinquième fils (Ernest).  Lors du baptême le lendemain, le curé de Sainte-Anne inscrit à nouveau dans son registre « père absent ».  Tout porte à croire que Michel passe beaucoup de temps à Mistouk pour y préparer la venue de sa famille.  Il sera encore absent en juillet lors du baptême de sa première fille (Marie) trois ans plus tard.  Ce dernier baptême aura pourtant lieu deux jours après la naissance[54].  Comme souvent en juillet, il devait être monté à Mistouk sur ses terres.

À l’automne 1884, alors que les travaux dans les champs sont terminés, le beau-frère Joseph Fleury commence la construction projetée d’un moulin à scie sur une petite chute de la rivière Mistouk, un peu plus bas que la chute des Dionne, sur le lot 19-C du Rang 3 dans le canton De l’Isle.  Tout le clan Fleury, auquel Michel Harvay appartient, y participe.  Michel écoulera dorénavant le bois que lui et ses fils bûchent sur ses terres de Mistouk au moulin du beau-frère.  Peu de temps par la suite, c’est un moulin à farine qui est construit au même endroit en utilisant la même écluse et les installations déjà aménagées.  On y ajoutera bientôt un moulin à cardes[55]

Après de multiples demandes des colons, le gouvernement accorde un budget pour l’aménagement de routes plus convenables du côté nord du Saguenay dont une entre Sainte-Anne et Mistouk.  En 1888, la direction des travaux pour la portion entre le canton Tremblay et Simard est confiée au mari de la petite-cousine, Nazaire Boucher alors que ceux du Chemin Archambault sont donnés au beau-frère Joseph Wilbrod Fleury[56]Michel y a-t-il travaillé? On ne le sait pas, mais il passe de plus en plus de temps dans le secteur.  Ces travaux prendront un certain temps à se réaliser.  Pour le transport de lourds effets, on continuera encore quelques années à utiliser le chemin Dorval, la plus courte voie de la mission de Saint-Cœur de Marie pour se rendre à Chicoutimi en passant par Alma; cette voie faisait la moitié des quinze lieues qu’il fallait pour atteindre Sainte-Anne de Chicoutimi[57].    

Depuis plusieurs années, à chacun de ses voyages à Mistouk, Michel reluque d’autres lots près des siens qu’il pourrait un jour acheter et ainsi pouvoir établir ses enfants à proximité.  En avril 1889, l’occasion se présente quand il achète de Joseph Tremblay dit Cornette deux nouveaux lots.  Ainsi les lots 21 et 22 dans le rang trois passent entre ses mains[58].  Ce sont maintenant trois cents acres de terre qu’il possède ainsi dans le canton De l’Isle.  De quoi établir tous ses enfants.  Mais où vivaient donc Michel et sa famille? Dans le canton Simard sur l’une de ses deux terres ou au canton Delisle à Mistouk? Bien malin celui qui pourrait le dire, car Michel ne semblait jamais être sur ses terres du canton Simard bien que les documents notariés de l’époque en faisaient un cultivateur de la paroisse Sainte-Anne qui comprend la partie du canton Simard où il possède des terres.  De plus, tous les baptêmes de ses enfants en faisaient un paroissien de Sainte-Anne de Chicoutimi, ce qui tendrait à démontrer qu’il y habitait toujours au début de 1889[59].  Plus pour longtemps par contre, car cette même journée du 19 avril, il vend son lot de terre de cinquante acres du troisième rang du canton Simard qu’il avait acquis dix-neuf ans plus tôt ainsi que la maison où la famille habitait.  De fait, c’est un échange que font Michel et Cornette[60]

C’est donc onze ans après avoir été parmi le groupe des premiers exploraeurs du lieu que Michel Harvay, Élise Fleury enceinte, leurs cinq fils et leur unique fille s’établissent à demeure à Mistouk auprès des quarante-trois autres familles qui y sont déjà.  Élise ne prendra cependant pas de risque; le moment venu, elle partira accoucher chez sa sœur à Sainte-Anne où sa deuxième fille, la petite Élise, naît en août 1889[61].  Elle rejoindra Michel et les enfants une fois rétablis.

La terre où la famille est établie à Mistouk comporte une chute importante qui prendra bien plus tard le nom de Chute des Dionne.  On ne sait pas si Michel utilisa cette chute à des fins hydrauliques.  Par contre, il semble que Joseph Gagné dit Papian en tirera profit après l’avoir acheté de Michel pour la somme importante de cinq mille dollars[62].

Ce ne sera qu’en 1890 que la dernière portion du chemin des colons de Mistouk sera réalisée.  « La mission Sacré-Cœur de Marie se trouvera donc reliée à Ste-Anne avant les neiges »[63] un peu tard pour Michel qui a su s'en passer pendant toutes ces années.

Vers la fin de la décennie, en 1887, un cousin germain de Michel s’était amené à Mistouk.  Marc dit Mars Harvey (1851-1923), fils de son oncle Chrysostome Hervé (1803-1886) de La Malbaie était venu s’y établir avec sa famille.  Michel n’a probablement ni connu son oncle et encore moins son cousin né dans la période où il avait quitté Les Éboulements pour le Saguenay.  Chez Michel, on ne devait pas parler souvent de sa parenté.  Il était parti de son village à sa naissance et avait quitté Charlevoix alors qu’il n’avait pas encore l’âge de raison.  Il ne devait pas en connaître long sur sa famille, lui qui avait été donné à Philibert et sa femme par des parents surchargés d’enfants.  Sa situation n’était pourtant pas si rare dans les grandes familles avec peu de moyens.  La chose avait beau être commune, être l’élu du départ devait avoir laissé une cicatrice qu’il ne voulait sans doute pas étaler aux yeux des siens.  Ses enfants devaient avoir appris à éviter le sujet qu’ils devinaient difficile pour leur père.  De toute façon, pour les enfants de Michel, ces parents résidaient à l’autre bout du monde à la Baie des Ha! Ha! pour certains et dans la région de Charlevoix pour la plupart; ils ne les verraient sans doute jamais. 

Bien que Mistouk fût desservi par voie de mission depuis 1885, il semblerait qu’Élise n’y passa pas de longs moments, restant derrière dans leur maison du canton Simard.  Les enfants de Michel et Élise avaient tous été baptisés à Sainte-Anne de Chicoutimi, leur paroisse d’appartenance.  Il faut dire que Louise Fleury (1845-1927), sœur aînée d’Élise, y habitait avec sa famille. 

On peut présumer qu’avec Michel qui au début du mariage montait dans les chantiers tous les hivers et sept ans plus tard, lorsque la décision fut prise de s’établir à Mistouk, profitait de toutes les occasions pour se rendre défricher ses terres, Élise devait sans doute se réfugier chez sa sœur pour ses accouchements.  De plus, compte tenu des conditions d’habitation dans les campes du tout début de Mistouk, Michel devait la sentir plus en sécurité auprès de cette sœur. 

À partir de septembre 1889, avec l’arrivée de Marcellin Hudon, le premier curé et l’ouverture des registres de la paroisse Saint-Cœur de Marie, Michel, qui avait été absent de cinq des sept baptêmes de ses enfants, n’en manquera plus un.  La nouvelle paroisse comprend tout le canton De l’ile et les îles adjacentes.

Élise était-elle heureuse d’avoir retrouvé les membres de sa famille maintenant à peu près tous établis à Saint-Cœur de Marie? De fait, les voisins de Michel sont des « Fleury » de la famille d’Élise.  Outre son père, cinq de ses frères y sont établis.  Par contre, en quittant Sainte-Anne, elle s’éloignait de ses deux sœurs, dont l’une était l’aînée. 

D’ailleurs, lors de l’élection du premier conseil municipal à l’été 1890, Joseph Wilbrod, le frère d’Élise est élu maire.  Son autre frère Damasse (1853-1925) est élu conseiller de même que Mars Harvey, que Michel ne connaissait peut-être pas comme un cousin.

C’est à l’été 1891 que Joseph Fleury, patriarche du clan Fleury, s’éteint dans sa nouvelle paroisse de Saint-Cœur de Marie.  Le père d’Élise n’avait que soixante-neuf ans[64].

Trois mois plus tard, le 1er novembre 1891, Élise met au monde son premier enfant né à Saint-Cœur de Marie; un sixième fils (Adélard)[65].  Elle et Michel ont maintenant huit enfants.

Le bac

Michel ne manque pas d’aide sur ses immenses terres avec trois garçons de treize à dix-neuf ans, ce qui lui permettait d’envisager d’autres activités[66]

Le réseau routier au Saguenay et sur le pourtour du lac Saint-Jean progressait lentement dans les années 1880. Bien qu’une structure en acier avait été construite en 1892 sur la Petite Décharge entre Saint-Joseph-d’Alma et l’île d’Alma et qu’un chemin traversait l’Isle-Maligne pour aboutir à la Grande Décharge, c’est un bac à rames et une barge qui servaient de traverse vis-à-vis Mistouk (Saint-Cœur-de-Marie) depuis 1883.  Le contrat de l’opération du bac était accordé par soumission publique à compter de 1890. 

En 1894, Michel Harvay tente sa chance et obtient le contrat de la traverse entre l’Île d’Alma et Mistouk jusqu’aux premiers chemins d’hiver.  Pour se faire, il opérera la « Providence », ce gros bac formé de deux chaloupes de trente et un pieds, reliées entre elles par des madriers de douze pieds.  La « Providence » est entourée d’une garde munie de quatre rames d’une dizaine de pieds et peux transporter deux voitures attelées avec leurs chevaux et leurs charges.  Il n’utilisera la barge que lorsqu’il n’y aura pas de voitures à traverser.

Michel fait ainsi un seul voyage par jour avec départ à sept heures du matin de la route d’en haut du canton et retour sur Mistouk à seize heures.  Le contrat prévoit qu’il devra faire « des extras » selon les besoins, même la nuit.  Comme depuis toujours, le postillon a priorité et voyage gratuitement.  À l’époque, le gros bac de Michel est fort prisé, car on vient tout juste d’ouvrir le chemin de fer qui relie Hébertville à Chicoutimi et au reste de la province.  Alors que naguère il fallait franchir près de soixante kilomètres par de mauvais chemins pour se rendre à Sainte-Anne de Chicoutimi, il n’en faut plus qu’une vingtaine pour se rendre au train en utilisant la « Providence » de Michel

Pour Michel qui s’accompagnait généralement de l’un de ses fils, car le bac requérait en temps normal deux rameurs, l’opération de la traverse n’est pas toujours facile.  De Saint-Cœur de Marie, le courant de la Grande Décharge poussait le bac vers le large pour remonter ensuite en eau calme le long de la rive du côté de l’île d’Alma.  Il lui faut environ de trente à quarante-cinq minutes pour cette première traversée sans trop d’efforts.  Le retour est beaucoup plus hasardeux en raison des nombreuses petites îles de la Grande Décharge.  Il faut d’abord longer la côte en remontant le courant léger à cet endroit et contourner les petites îles.  Puis Michel et son second s’élancent dans le grand courant et doivent en ramer un coup pour atteindre Mistouk.  La durée de cette traversée, selon les vents, peut prendre d’une heure à une heure et demie.    

Cette même année 1894 qui s’était annoncée heureuse avec la naissance d’un septième fils (Joseph) à la mi-mars[67] et l’obtention de l’important contrat de la traverse n’allait pas se terminer aussi bien.  Le 28 novembre, Michel et Élise perdent un premier enfant, Marie, qui avait huit ans[68].  Moins de deux mois plus tard, la maladie rodait toujours à la maison et le couple perd un deuxième enfant, Adélard; celui-là n’avait que trois ans[69]Michel et Élise furent sans doute profondément attristés de ces deux deuils coup sur coup.  Les enfants allaient garder le souvenir de leur père fabricant de petits cercueils de bois en ce long hiver 1894-95; il garderait surtout en mémoire l’image de leur père sortant à deux reprises de la maison avec un cercueil dans ses bras pour le porter au cimetière.

L’année suivante, il continue d’exploiter ce service avec un autre résident du lieu, Joseph Fortin.  Lors de cette deuxième année du contrat, le conseil municipal révise les conditions d’utilisations de la traverse de Michel.  Ainsi,

«Pour abonnement, deux piastres et dix centins par famille.  Le même taux que par les années passées (Il s’établissait à cent piastres pour la saison en 1891.  On peut présumer que Michel et Joseph en reçurent autant.)  ainsi que les extras; le fromage passe gratis (Mistouk compte déjà quelques fromageries à l’époque).  Chargement du gros “bac”, deux voitures chargées ou trois non-chargées.  Aussi, ceux qui n’étaient pas abonnés passeront par le pont et reviendront par la traverse chargés, payeront en sus de leur voiture, trois centins par cent livres pour leurs effets; que les traversiers (Michel et Joseph Fortin) radoubront les voitures de la traverse à leurs frais et dépens et devront les tenir en bon ordre toute la saison, que l’engagement date d’aujourd’hui jusqu’au 1er novembre prochain.  Que les traversiers de ligne soient au même nombre que par les années précédentes, sauf que celles d’en bas ne se feront que losqu’il y aura un signal (pavillon), quand même l’heure serait dépassée de 5 à 10 minutes.  Que les extras se feront en bas».   

La construction u pont de Taché à l’Isle-Maligne reliant Alma et Saint-Nazaire en 1894 est venue assombrir les affaires du traversier de Michel.  En 1896, alors qu’il a toujours le contrat, le bac n’est pratiquement plus utilisé, sauf pour le transport de charges lourdes.  Il abandonne donc définitivement ce gagne-pain à la fin de l’année de navigation et le conseil municipal décide de mettre fin au service de traversier.  Michel se porte acquéreur du gros bac qu’il utilisait pour la traverse le 1er novembre de cette année-là pour la somme de « six piastres ».  Il continuera de l’utiliser pour le transport de bois et de marchandises dans les années à venir.

En 1893, avant que Michel ne se voit octroyer le contrat de la traverse, son second fils, David (1873-1919) et son neveu François Fleury (1869-1952) assuraient ce service.  Les deux cousins avaient l’obligation de coucher au camp au bord de la Décharge tous les samedis soirs pour assurer la traverse aux fidèles voulant se rendent aux offices du dimanche.  À l’automne, suite à une plainte de deux citoyens, le Conseil municipal condamna les deux responsables de la traverse à une amende de deux dollars.  Si le conseil, formé entre autres du maire Joseph Wilbrod Fleury (1849-1922) et du conseiller Damasse Fleury (1853-1925), n’avait rien trouvé d’anormal d’accorder un contrat à leur frère et à leur neveu, ils n’étaient assurément pas gênés pour les sanctionner.  Autre temps, autres mœurs.  Michel Harvay en se voyant accorder le contrat de la traverse en 1894 avait ainsi assuré la relève de son fils[70].

Le canton Taché

À cinquante-quatre ans, Michel Harvay n’a pas fini d’accroître le nombre de ses propriétés. Le 28 septembre 1900, son fils aîné lui cède une terre de grande importance.  Non seulement cette terre est-elle traversée par la rivière Gervais, mais plus important encore, dans quelques années une portion de cette terre sera rachetée par le diocèse pour la construction d’une église.  Le canton Taché sera desservi par les curés de Saint-Cœur de Marie jusqu’en 1908, année où on procédera à la construction de l’église de Saint-Nazaire et à l’ouverture des registres de cette nouvelle paroisse.  L’aîné Onézime (1872-1960) avait obtenu cette terre du « département des terres de la couronne » dix ans auparavant[71].  En plus d’abattre une bonne partie de la forêt, Onésime y avait également construit une grange.  Après son mariage en 1896, il s’était plutôt établi sur le lot vingt-deux du troisième rang que possédait son père à Saint-Coeur de Marie.  D’ailleurs, Michel profite du passage du notaire pour donner à son fils aîné cette terre sur laquelle il vit maintenant depuis 1896, soit cinquante acres, la moitié ouest du lot[72].

La retraite

Décidément, le 28 septembre 1900 allait être jour de grand ménage pour le couple Michel et Élise.  Ils profitent du passage du notaire pour rédiger leur testament respectif où chacun cède à l’autre la totalité de leur bien [73].

En ce début de siècle, à l’exception d’Onésime qui a son propre toit depuis 1896, Michel et Élise logent toujours leurs cinq enfants non mariés et également son fils David et sa femme qu’il a épousée en 1896[74].

Au début de 1902, une épidémie de variole sévit dans la paroisse, heureusement, des sept enfants vivants et six petits-enfants de Michel et Élise, aucun ne sera atteint par le mal.

Michel continue de cultiver sa terre avec l’aide de ses enfants un certain temps, mais il cède progressivement la place à son fils Ernest qui comme cultivateur sur les lots 17a et 17 b du deuxième rang de Saint-Coeur de Marie assumera la relève de la ferme paternelle.  En 1911, c’est indéniablement ce dernier qui est maintenant chef de famille et qui, à l’image de son père, cumule le travail d’agriculteur en été et celui de bûcheron en hiver.  Outre Michel soixante-quatre ans et Élise soixante, seule leur fille Élise dite Élisa vingt et un ans et leur fils Joseph dix-sept ans sont toujours avec eux.  William, David et Louis qui ont maintenant pris épouses ont quittés la maison.  Comme pour la plupart des Harvey du Saguenay et du lac Saint-Jean à l’époque, les connaissances de Michel relatives à ses origines sont déficientes.  Ainsi, lui et tous ses enfants sont déclarés d’origines écossaises, un mythe qui sévira encore longtemps[75].

Elise Fleury s’éteint dans sa maison à l’âge de soixante-neuf ans le 10 avril 1921.  Elle est portée en terre trois jours plus tard dans le cimetière de sa nouvelle paroisse d’adoption[76]Michel n’aura pas très loin à marcher pour rendre visite à Élise puisque l’église et le cimetière sont situés sur le lot vingt-six alors qu’il habite le vingt-deux[77]

En juin, lors du passage de l’énumérateur, Michel vit toujours chez son fils Ernest qui est maintenant marié et a un enfant.  Tous les enfants de Michel ont maintenant quitté la maison et volent de leurs propres ailes[78].

Maintenant veuf et âgé de près de soixante-quinze ans, Michel, le corps courbé par les années de dur labeur, met de l’ordre dans ses affaires et assure sa succession sur ses terres.  Onésime avait reçu le lot vingt-deux du troisième rang en 1900.  David de son côté obtient le lot vingt et un[79].  Bien que je n’aie pas trouvé de traces des mesures de successions que Michel a prises à l’égard de ses autres fils, il ne faut pas douter qu’il ait contribué à les établir.  Il avait passé sa vie à amasser terres et pécules pour établir les siens et sans doute leurs éviter ce que lui-même avait vécu.  On sait par exemple que son fils William s’établira comme cultivateur à Shipshaw; était-ce sur la terre de cent acres que Michel avait toujours gardées dans le canton Simard? Qu’est-il arrivé de cette autre terre qu’il possédait sans doute toujours dans le canton Taché ou la moitié de terre qu’il n’avait pas vendu dans le canton Tremblay? Qu’a-t-il fait du cinq mille dollars (équivalent à soixante-dix mille aujourd’hui) obtenu lorsqu’il a vendu la chute des Dionne.  Autant de questions pour lesquels on n’a pas encore de réponses, mais qui nous assure que Michel avait amplement les moyens d’établir ses enfants.

Après avoir partagé son domaine de Mistouk entre trois de ces fils, il part vivre chez sa fille Élise à Saint-Nazaire[80]Ernest, qui a hérité de la ferme familiale et des lots 17a et 17 b du deuxième rang paie à sa sœur Élisa trois cents dollars par année pour les soins donnés à leur père Michel[81].

Michel Harvay s’éteint chez sa fille le 10 mars 1938 à l’âge de quatre-vingt-onze ans.  Il sera inhumé quatre jours plus tard en présence de ses fils Onésime, William né Guillaume, Louis, Ernest, Joseph et bien entendu de sa fille Élise qui prenait soin de son père depuis plus de quinze ans[82].

Donné en bas-âge à un couple qui rêvait d’une progéniture, puis avant l’âge de raison passé d’enfant désiré à domestique, Michel Harvay, enfant de la 6e génération de Harvey, avait gardé avec Philibert Tremblay, son maître et modèle, une relation d’amitié.  À force de travail, il aura réussi à établir ses sept enfants ayant survécu à leur enfance.  On ne sait pas si Michel avait gardé contact avec son père.  Rien ne l’indique.  On sait qu’il n’a pas assisté à son inhumation à Saint-Alexis de la Grande Baie en février 1900[83].  Ironie du sort, le vieux avait dû finir sa vie chez sa fille Arthémise (1837-1913), l’autre enfant donné.  Près des enfants de la famille de Philibert Tremblay toute sa vie, rien n’indique également que Michel ait revu les sept frères et sœurs nés avant lui et encore moins les quatre nés après lui.

Si Michel est considéré aujourd’hui comme l’un des bâtisseurs de Mistouk par une présence presque ininterrompue depuis que lui et une poignée d’homme étaient allés découvrir l’endroit en 1878, il faut noter que pendant ce temps c’est Élise qui avait gardé l’habitation principale avec les plus jeunes au canton Simard.  Pendant que lui et les plus vieux bûchaient leurs terres de Mistouk, elle assumait le fonctionnement de la ferme du canton Simard, le train nécessaire pour six vaches, l’entretien de la maison et surtout, le soin des enfants[84].  Dans le contexte de généalogies patrilinéaires, on oublie trop souvent le rôle joué par nos mères.

Les descendants de Michel Harvay sont encore aujourd’hui nombreux dans le secteur du canton De l’ile, à Saint-Cœur de Marie et à Alma.  Parmi sa descendance figure certains Harvey connus dont Léopold Harvey (1924-1996), nommé en 1995 au Temple de la renommée de l’agriculture du Québec.

Michel Harvay, ses enfants, données généalogiques — 7e génération

D’autres Harvey sont venus s’établir à Mistouk avant le XXe siècle


Outre Michel Harvay, d’autres porteurs du patronyme, tous descendants de Pierre Hervé (1733-1799), viendront s’établir à Saint-Cœur-de-Marie avant 1900.  Ce sera le cas d’un de ses cousins, de trois petits-cousins et d’un parent plus lointain :

Chronologie du village concernant les Harvey du canton De l’Isle


Plusieurs Harvey de l’endroit et d’ailleurs joueront un rôle dans le développement de Mistouk :




o   Le 4 novembre 1923, Onésime Harvey (1872-1960), l’aîné chez Michel Harvay, offre à la Fabrique une partie du chemin de croix pour l’église.

o   Le 2 octobre 1941, Jeanne d’Arc Harvey (1922-2013) devient sœur Saint-Joachim des Sœurs Notre-Dame-du-Bon-Conseil.  Elle était la fille du cadet Joseph Harvey (1894-1978) marié à Rose Anna Lessard.

o   Toujours au service de l’église au lac Saint-Jean en 2021, l’abbé Clément Harvey fut vicaire de la paroisse entre juin 1971 et octobre 1975.

Ernest Harvey (1883-1971) cinquième fils de Michel Harvay (1846-1938), président de la Corporation municipale du village de Saint-Coeur-de-Marie de 1932 à 1934.

Les fils du précédent, les frères Raymond (1928-2018) et Rosaire Harvey (1930 —) se succéderont dans les années 1950 comme surintendant de l’aqueduc.

Ludger Hervey (1901-2001) à Ernest (1870-1905) à Fortunat Harvay (1840-1924) à Barthelemi Hervey (1807-1902) à Pierre Hervé (1759-1857) chez Pierre Hervé (1733-1799), propriétaire de l’Hôtel Central dès 1946 où se situera plus tard, la première centrale téléphonique du village. 

o   Jean Baptiste Harvey (1937 — ), le neveu du précédent, fils de Philippe (1897-1954), membre du conseil municipal de Saint-Coeur de Marie au moment de la fusion avec la municipalité du canton de Delisle en 1979 qui deviendra le directeur-gérant de l’Association coopérative agricole en 1982.

Bien d’autres Harvey ont contribué au développement de Mistouk.  Ils étaient tout aussi valeureux mais  l’histoire n’a pas retenu leurs noms puisqu’ils étaient pour la plupart agriculteurs ou journaliers.

Alexis le Trotteur et une Harvey de Mistouk

Alexis Lapointe, dit Alexis le Trotteur est un athlète québécois amateur du début du XXe siècle ayant fait l’objet de deux livres.  Il est devenu un personnage du folklore québécois.

En 1921, Alexis Lapointe (1860-1924) fit une visite au village et logea chez Armand Larouche, cordonnier à Saint-Coeur de Marie et ami du Trotteur.  Dans le but d’accueillir adéquatement son ami renommé partout en province, Armand organise une veillée.  Alexis qui était connu comme un grand fêtard, danse et joue de la musique à bouche toute la soirée malgré son âge avancé.  Alexis Lapointe aimait les belles jeunes filles.  Avant son départ le matin, Armand l’informe qu’il y avait une très belle fille, qui lui ferait une bonne femme, chez Charles Harvey (1866-1927), le deuxième voisin dont il a été question plus haut.  Alexis, soixante ans, part donc enthousiaste pour rendre visite à la perle du village.  Une fois sur les lieux il découvre la jeune Antoinette (1905-1935), seize ans, se lavant les pieds au chaud soleil.  La jeune fille fait face à un Alexis, âgé et pas très beau, un manteau d’hiver noué sur le dos en plein été, la langue pendante sur les bords des lèvres comme à son l’habitude.  Antoinette prend ses jambes à son coup, sort par la porte arrière et se rend chez Armand Larouche.  Elle ne souriait pas du tour qu’elle venait de se faire jouer[87].

Son prétendant d’un jour, Alexis le Trotteur, décédera frappé par un train alors qu’il travaillait sur le chantier de construction du barrage de l’Isle-Maligne en 1924 [88]Antoinette Harvey quant à elle trouvera l’amour avec un Harvey de l’autre branche de la famille.  Elle épousera l’année suivante Alfred Harvey (1902-1991) à Alfred Hervé (1865-1923) à Guillaume Harvai (1835-1913) à Denis Hervé (1803-1887) à David Hervé (1764-1837) chez Dominique Hervé (1736-1812)[89].  Elle et son conjoint quitteront Mistouk pour s’établir dans la paroisse Sainte-Jeanne d’Arc de Montréal[90].

Le lac des Harvey au canton De l’Isle

Un petit lac se situant à l’ouest du village de Saint-Cœur de Marie près du pont de la Rivière-aux-Chicots dans le canton De l’Isle se nomme le «lac des Harvey»

Le 5 décembre 1968, lors de la désignation officielle de ce lac par la Commission de toponymie du Québec, l’origine de ce nom et sa signification n’avait pu être déterminée par la commission bien qu’elle fut connue depuis longtemps[91]

En 2003, le nom du lac, existant déjà ailleurs au Québec, fut changé pour celui de « Petit lac des Harvey ».  La Commission de toponymie du Québec, manquant de précision, avança alors qu’il est ainsi appelé parce ce qu’il se réfère au nom de la famille du propriétaire des lots adjacents[92].  Si des lots adjacents appartiennent aujourd’hui à des membres de la famille Harvey descendants d’un des premiers arrivants, c’est bel et bien à celui-ci, Marc dit Mars Harvey (1851-1923), que l’on doit ce toponyme.

Le nom de « Lac des Harvey » apparaissait déjà sur une carte du département des terres et forêts du Québec en 1926 (voir la carte plus haut dans le texte).  Ce lac est situé sur la terre qu’avait occupé Marc dit Mars Harvey avant son décès trois ans plus tôt.  En 1926, elle était aux mains de ses héritiers.  Ce nom était déjà en usage dans les débuts de la Mission de Saint-Cœur de Marie, trente ans plus tôt.  D’ailleurs, l’abbé Henri Cimon, curé de Saint-Joseph d’Alma ayant desservi la mission de Mistouk de 1885 à 1889 nous le confirmes dans une note manuscrite de 1889 dans laquelle il utilise l’expression « lac Hervey »[93].

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[1] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Agnès, 28 octobre 1846.

[2] On ne trouve pas de lien de parenté rapproché entre les familles de Philibert Tremblay et de Roger Hervey.  S’il un lien existe, il est fort tenu.  Le père de Philibert avait été marié à Anastasie Savard (1771-1803), petite-cousine de Roger Harvey native de l’Isle-aux-Coudres.

[3] BAnQ., Registre de la paroisse L’Assomption-de-la-Sainte-Vierge des Éboulements, 12 janvier 1841.

[4] Ibid., 27 février 1838.

[5] Ibid., 26 août 1849.

[6] Ibid., 5 août 1850.

[7] B.A.C., G., Recensement de 1852, Sainte-Agnès, microfilm e002314949 et recensement de 1852, Les Éboulements, microfilm e002314862.  Le recensement de 1851 au Canada-Est ne commença que le 12 janvier 1852.

[8] A.N.Q., GN. Minutier Léon-Charles Clément, no 874, 26 février 1853.

[9] Signe du temps et l’hégémonie de l’anglais dans l’administration, les documents d’époque consultés utilisent en grande majorité le terme township plutôt que canton.

[10] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-François-Xavier de Chicoutimi, 5 août 1855.

[11] A.N.Q., GN. Minutier Ovide Bossé, no 469, 20 mars 1856.

[12] Archives de la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi, rapport du curé Jean Baptiste Gagnon, 28 octobre 1858.

[13] B.A.C., G., Recensement de 1861, canton Simard (erreur, depuis 1855, canton Tremblay), microfilm 4108689_00460.

[14] BOUCHARD, Russel Aurore. Histoire de Chicoutimi-Nord, Volume 1er Le canton Tremblay et le village de Saint-Anne, 1848-1954.  À compte d’auteur, Chicoutimi, 1985, page 24.

[15] Ibid., page 36.

[16] A.N.Q., GN. Minutier Ovide Bossé, no 575, 2 février 1875.

[17] BAnQ., Fonds Mgr Victor Tremblay, Mémoire no 231.

[18] BAnQ., COLLECTIF. «Terrible conflagration au Saguenay», Journal Le Canadien. Québec, volume XXXX, N0. 24 (27 mai 1870), page 2.

[19] BAnQ., Fonds Mgr Victor Tremblay, Mémoire no 142.

[20] BAnQ., ST-AUBIN, Pierre. «Le Grand Feu», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, volume XXXXII, N0. 50 (17 octobre 1928), pages 18-19.

[21] BLANCHET, Patrick. «1870, le grand feu du Lac-Saint-Jean», Cap-aux-Diamants. No 82 (2005), pages 26-30.

[22] Comme Michel a atteint sa majorité que le 27 octobre 1867, cette acquisition n’a pu survenir qu’après cette date. 

[23] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 873, 27 septembre 1870.

[24] Ibid.

[25] Approximativement 4,8 kilomètres.

[26] BOUCHARD, Russel Aurore, op.cit., page 91.

[27] Au recensement de 1871, les cantons Harvey, Tremblay et Simard, de même que le village de Sainte-Anne seront tous englobés sous la dénomination du canton Tremblay.

[28] A.N.Q., GN. Minutier Ovide Bossé, no 3437, 26 octobre 1870.

[29] Ce ne sera qu’en 1893 que le village de Sainte-Anne de Chicoutimi sera officiellement constitué et détaché du canton Tremblay.

[30] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-François-Xavier de Chicoutimi, 6 mai 1851.  Elle est prénommée Marie Eliza au baptême.

[31] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi, 9 janvier 1871.

[32] B.A.C., G., Recensement de 1871, canton Tremblay, microfilm 4395491_00641 et 4395491_00642.  L’énumérateur note qu’il est passé le 15 avril.

[33] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi, 13 février 1872 et 27 novembre 1873.

[34] BOUCHARD, Russel Aurore, op. cit., page 36.

[35] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi, 15 février 1878.

[36] Soixante-dix kilomètres.  Au Québec, la lieue, unité de mesure héritée du régime français, était toujours utilisée au XIXe siècle, bien après la création du Canada britannique.

[37] Ériger en 1868, le canton De l’Isle, a été nommé ainsi en raison de l’Île d’Alma qui y est enclavée.  C’est en 1890 que le canton est érigé en municipalité dont le beau-frère Joseph W Fleury fut le premier maire.

[38] BAnQ., Rapport de l’arpenteur Edmond Duberger au sujet du canton De l’Isle, 29 avril 1861.

[39] L’attribution du nom de ce lac (aujourd’hui Petit-lac des Harvey) est postérieure au voyage de Michel Harvay dans ce secteur.  Il semble avoir été utilisé une première fois vers 1889.

[40] Le trait-carré ou trécarré est la ligne d’arpentage sur laquelle les lignes latérales des lots aboutissent perpendiculairement.  En 1861, Edmond Duberger avait arpenté l’entièreté du canton De l’Isle.  

[41] MARTEL, Gaston. «Chronique historique, la fondation de Saint-Coeur-de-Marie», la Société d’histoire du Lac-Saint-Jean.  L’auteur tire son information de notes manuscrites rédigées par l’abbé Henri Cimon, desservant de la mission Saint-Cœur de Marie de 1883 à 1889.

[42] Dans Les arrivants à Mistouk — 1882, l’auteur Paul Tremblay avance que le nom d’un certain Fleury se retrouve dans les livres de compte de la compagnie Price en 1856.

[43] Le voyage dura trois jours et eu lieu quelque part au début de l’année 1878, on n’en connaît pas les dates exactes.  L’absence de Michel au baptême pourrait-être aussi dû au fait qu’il était parti travailler dans les chantiers pour l’hiver. 

[44] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 2315, 20 mai 1878.

[45] BEAULIEU, Carl. Les Harvey, entrepreneurs polyvalents et citoyens engagés. Chicoutimi, Éditions du patrimoine, 2002, pages 331-333.

[46] DUBERGER, Edmond., op.cit.

[47] Mistouk est l’ancien nom de Saint-Coeur-de-Marie.  En 1979, le village de Saint-Coeur-de-Marie et la municipalité de la paroisse du canton Delisle se fusionnaient pour devenir la municipalité de Delisle qui fut plus tard englobé par l’agglomération d’Alma.

[48] BAnQ., COLLECTIF. «Saint-Cœur-de-Marie», Le Progrès Dimanche. Québec, volume 83, No. 26 (25 juillet 1871), pages 53-75.

[49] BAnQ., Fonds Henri-Hubert-Marie Cimon, enseignant et curé de la paroisse de Saint-Joseph d’Alma, de 1882 à 1892. Il desservira Mistouk de 1882 jusqu’en septembre 1889.

[50] B.A.C., G., Recensement de 1881, Sainte-Anne, microfilm e008153229.  Le district de Sainte-Anne englobe le canton Simard.

[51] BAnQ., Registres des paroisses Saint-François-Xavier de Chicoutimi, Sainte-Anne-de-Chicoutimi et Saint-Joseph d’Alma pour les années 1872 à 1882.  Illustration tirée du site de Marie-Michèle Lapointe sur Geneanet.

[52] BAnQ., COLLECTIF. «Le chemin de colonisation Archambault», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, volume I, N0. 11 (27 octobre 1887), page 2.

[53] TREMBLAY, Paul. Les arrivants à Mistouk 1882.  Delisle, Édition du centenaire, 1982, page 559.

[54] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi, 23 juillet 1883 et 14 juillet 1886.

[55] TREMBLAY, Paul., op.cit., pages 53 et 551.

[56] BAnQ., COLLECTIF. «Le chemin Dorval», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, volume II, N0. 18 (3 janvier 1889), page 2.  L’article ne mentionne pas s’il s’agit de Joseph Fleury père ou fils.  Considérant l’âge du premier, j’ai présumé qu’il s’agissait du fils.

[57] BAnQ., COLLECTIF. «Le chemin de colonisation Archambault», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, volume I, N0. 11 (27 octobre 1887), page 2.

[58] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 5287, 19 avril 1889.

[59] Certaines sources place la famille à Mistouk en 1878.  Il s’agit d’une erreur puisque le premier colon de Mistouk, le beau-frère Joseph Wilbrod Fleury ne s’est établit en permanence à cet endroit qu’en 1882.  De plus tous les actes notariés concernant Michel Harvay et tous les registres religieux en font un cultivateur de Sainte-Anne jusqu’en 1889.

[60] A.N.Q., GN. Minutier Thomas Zozyme Cloutier, no 5288, 19 avril 1889.

[61] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Anne de Chicoutimi, 10 août 1889.

[62] COMMISSION DE TOPONYMIE DU CANADA. Base de données toponymiques du Canada [En ligne]. http://www4.rncan.gc.ca/recherche-de-noms-de-lieux/unique/EKXAX [page consultée le 10/7/2021].

[63] BAnQ., COLLECTIF. «Travaux de colonisation», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, volume IV, N0. 5 (18 septembre 1890), page 3. 

[64] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Cœur de Marie, 24 juillet 1891.

[65] Ibid., 1 novembre 1891.

[66] B.A.C., G., Recensement de 1891, Canton Delisle, microfilm 30953_148193-00425 et 30953_148193-00426.

[67] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Cœur de Marie, 15 mars 1894.

[68] Ibid., 30 novembre 1894.

[69] Ibid., 16 janvier 1895.

[70] TREMBLAY, Paul., op., cit., pages 253-257 et 638-639.

[71] A.N.Q., GN. Minutier Henri François Achillas Mercier, no 9938, 28 septembre 1900.

[72] A.N.Q., GN. Minutier Henri François Achillas Mercier, no 9937, 28 septembre 1900.

[73] A.N.Q., GN. Minutier Henri François Achillas Mercier, no 9939 et 9940, 28 septembre 1900.

[74] B.A.C., G., Recensement de 1901, Canton Delisle, Saint-Cœur de Marie, microfilm z000133023.

[75] B.A.C., G., Recensement de 1911, Saint-Cœur de Marie, microfilm e002049773.

[76] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Cœur de Marie, 13 avril 1921.

[77] MAGNAN, Hormisdas. Dictionnaire historique et géographique des paroisses, missions et municipalités de la Province de Québec. Arthabaska, Imprimerie d’’Arthabaska inc., 1925, page 298.

[78] B.A.C., G., Recensement de 1921, Saint-Cœur de Marie, microfilm e003066602.

[79] BEAULIEU, Carl., op.cit., page 333.  Beaulieu intervertit les deux lots dans son ouvrage.  Le minutier du notaire Henri François Achillas Mercier au no 9937 en date du 28 septembre 1900 est pourtant clair.

[80] BEAULIEU, Carl., op.cit., page 333.

[81] FLEURY, Clémence. Site de Généalogique T’es de St-cœur de Marie si..... [En ligne]. https://www.facebook.com/groups/625739554177468/permalink/3820724568012268l [page consultée le 10/7/2021].

[82] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Nazaire, 14 mars 1938.

[83] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Alexis de la Grande-Baie, 5 février 1900.

[84] Déclaration de Raymond Harvey (1928-2018) chez Ernest (1883-1971), petit-fils de Michel Harvay.

[85] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Cœur de Marie, 13 avril 1921.

[86] TREMBLAY, Paul, op.cit., page 59.

[87] Récit inspiré et corrigé à partir des mémoires d’une ancienne partiellement publié dans Les arrivants à Mistouk 1882, de l’auteur Paul Tremblay.

[88] LAROUCHE, Jean-Claude. Alexis le Trotteur. Montréal, Éditions du Jour, 1971, 297 pages.

[89] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Cœur de Marie, 12 août 1925.

[90] BAnQ., Registre du cimetière de l’Est de Montréal, 15 juin 1935.

[91] COMMISSION DE TOPONYMIE DU QUÉBEC.  Lac des Harvey. [En ligne]. https://toponymie.gouv.qc.ca/ct/ToposWeb/Fiche.aspx?no_seq=28057 [page consultée le 14/8/2021].

[92] COMMISSION DE TOPONYMIE DU QUÉBEC.  Petit lac des Harvey. [En ligne]. https://toponymie.gouv.qc.ca/ct/ToposWeb/Fiche.aspx?no_seq=378696 [page consultée le 14/8/2021].

[93] TREMBLAY, Paul, op.cit., page 23.