2. Les Harvey de Mistassini

Les Harvey de Mistassini

 

L’histoire qui va suivre est celle de la vie difficile de l’un de nos ancêtres qui, comme tant d’autres, était à la recherche d’employeurs, où qu’ils soient, pouvant trouver une quelconque utilité à ses bras en échange d’une maigre pitance qui lui permettrait de faire vivre sa famille. 

Dans ce monde où la grande influence du clergé pour une grande part et de la société civile dans une moindre mesure avait fait de la culture de la terre l’ultime objectif de la vie, un sans-terre comme Louis Hervai ne pouvait que courir les chemins pour offrir ses bras en espérant pouvoir accumuler ce qu’il fallait pour s’établir un jour sur une terre de qualité qui générerait des profits.

Louis Hervai de la sixième génération est de cette famille de migrants dont le noyau à éclater.  Ses membres ont atteint en autres la région de Valleyfield, l’Ontario, l’Ouest canadien et les États-Unis.  

Louis Hervai (1828-1917) et sa quête d’un avenir meilleur pour les siens

« Louis Hervai » est né le 8 août 1828 et fut baptisé le jour même dans sa paroisse de Saint-Étienne de la Malbaie[1].  C’est le troisième curé de Saint-Étienne, Pierre Duguay (1786-1843), celui qui avait été curé à l’Isle aux Coudres de 1819 à 1822, qui procède au baptême; il inscrit à son registre le patronyme de l’enfant sous la forme Hervai comme il le fait depuis son arrivée à Murray Bay.  Les registres religieux sont à l’époque copiés et déposés comme registres civils.  Sur cette copie faite par l’abbé Pierre Villeneuve (1802-1856), de passage à La Malbaie pour remplacer le curé le temps d’une absence, le patronyme est inscrit Harvé comme l’écrit Villeneuve alors vicaire à Saint-Roch de Québec[1a].  De plus, le vicaire de Saint-Roch s’approprie le baptême en signant sous la copie de l’acte; erreur honnête puisque la prochaine inscription datée du lendemain 9 août est celle du baptême du cousin Didier Harvé (1828-1868), un baptême que l’abbé Villeneuve avait officié.  Louis Hervai est le fils de Pierre Hervez (1799-1867).  Parmi les six homonymes de la région, il est le Pierre de qui l’on dira plus tard qu’il n’était pas «commode à battre et difficile à tordre»[3].  Sa mère Marie Tremblay (1801-1891) en est déjà à son troisième enfant.

Louis aura tout le temps de connaître son grand-père, le journalier Dominique Isaïe Hervé (1775-1851).  Avec ses connaissances limitées de son passé, ce dernier lui apprendra sans doute l’histoire de «Ménic», l’arrière-grand-père et pilote du Saint-Laurent, Dominique Hervé (1736-1812), car c’est dans cette lignée des nôtres qu’on semble en avoir fait, pour un certain temps du moins, un Harvey écossais venu au pays avec les troupes de la conquête plutôt qu’un Hervé d’ascendance française qui avait combattu l’envahisseur.  Il faut dire que le grand-père de Louis avait très peu connu son père; cadet d’un premier lit, Dominique Isaïe devint orphelin de mère alors qu’il n’avait pas encore six ans.  Alors que son père était absent la plupart du temps sur le fleuve à piloter, il fut élevé par une très jeune belle-mère dont les beaux-parents avaient disparu depuis près de trente ans, donc avant sa naissance[3].  Occupée qu’elle était à élever ses dix marmots, elle n’avait sans doute pu répondre à toutes les interrogations du petit Dominique Isaïe.  Puis à son tour, ce dernier avait rapidement quitté l’île en 1797 après avoir mis une jeune fille enceinte et s’être fait tirer l’oreille avant de la marier.  Faute de mieux, il se sera forgé une image de ce père absent, une image inspirée de son époque et l’aura transmise à ses enfants.

Dominique Isaïe Hervé, le grand-père de Louis, fut cultivateur comme tous l’étaient un peu, mais il fut principalement journalier à la solde des autres.  Sans revenus suffisants pour établir tous ses enfants, il les verra partir un à un en des lieux éloignés.  De tous les descendants du migrant Sébastien Hervet (1642-1714) ce cadet d’un premier lit aura été celui qui aura le plus contribué par sa condition à voir le nombre de Harvey s’étendre partout au Québec, dans l’Ouest canadien et aux États-Unis.  Louis dont il sera question ici fut l’un d’entre eux.

Dans la région où Louis grandira, les bonnes terres sont toutes occupées depuis longtemps.  Celles que son père possédera ne seront jamais assez productives pour faire vivre la famille.  Ainsi, ce dernier sera toujours un peu plus journalier qu’agriculteur.  C’est donc ce modèle qui guidera Louis puisque la rareté des bonnes terres n’ira qu’en grandissant alors que se multiplient les concessions de territoires passablement arides.  Le garçon qui le précédait étant décédé à la naissance, Louis est l’aîné de la famille, mais il n’attendra pas l’héritage du père pour se contenter d’une terre improductive en pays de montagnes et à l’intérieur des terres où vivent quelques familles de squatters.  Il partira à son tour pour offrir ses bras aux autres dès qu’il le pourra, mais cela ne sera possible que bien plus tard.

Le canton de Settrington

Louis est âgé d’à peine dix-huit ans quand il s’éprend d’Eleonore Tremblay qui en a dix-neuf[4].  Peut-être se fréquentaient-ils depuis un certain temps puisqu’ils se connaissent depuis toujours, les deux familles habitant le même rang du canton de Settrington dans les hauteurs charlevoisiennes, dont une partie prendra le nom de Saint-Hilarion dans une quinzaine d’années.   Quoi qu’il en soit, ils s’épousent le 15 février 1847[5].  Les garçons de l’époque se mariaient à l’âge moyen de vingt-quatre ans.  Louis est donc très jeune pour un mariage.

Eléonore est la fille de Zéphirin Tremblay (1793-1859) et de Marguerite Tremblay (1803-1862), une famille de squatters établie dans le canton de Settrington à la même période que le père de Louis.

Sur une terre aussi pauvre, en compagnie d’un père au caractère bouillant et d’une jeune femme à protéger, un départ hâtif eut été assez compréhensible, mais il n’en fut rien.

Louis et Eléonore ne partent pas.  Probablement à cause du droit d’aînesse, le couple demeure sous le toit familial du père de Louis, dans le canton de Settrington sur cette terre squattée sans permission depuis plusieurs années.  Le canton était en grande partie occupé de cette manière, depuis un peu plus de quinze ans, par des individus «pauvres qui avaient été forcés d’abandonner les anciennes paroisses».  Les gens y vivaient principalement de la forêt et n’osaient s’investir dans la culture d’une terre qu’ils occupaient, mais qui n’était pas à eux.

C’est en mai 1851, que Maxime Hervai (1830-1906), le frère de Louis, se marie.  Il se construit sur un lopin voisin de la terre familiale.  En septembre de la même année, l’aînée Joséphine Harvé (1824-1912) se marie également.  Tout comme Louis, elle continuera d’habiter la maison familiale avec son mari, du moins pour un certain temps.  Ils sont donc douze dans cette maison construite de pierres comme la plupart dans ce rang de montagne où l’on écoule ce matériau qui handicape les champs plutôt que le bois que l’on peut revendre.

Les premières années de Louis et Eléonore sont difficiles.  Ce canton situé à l’intérieur des terres, en pays de montagnes, ne s’est ouvert à l’agriculture qu’aux environs de l’année du mariage de Louis et Eléonore.  Tout comme les premiers colons du canton, Louis a dû faire preuve de grandes persévérances pour nourrir sa famille sur ces sommets austères de plus cinq cents mètres d’altitude.  Avant cela, on ne faisait qu’y abattre la forêt pour alimenter les quelques scieries du coin.  L’année 1851 avait été désastreuse en raison d’un gel tardif coutumier pour l’endroit, mais peu connu de ces bûcherons qui peu à peu empoignaient également la charrue.  Bien que seulement une vingtaine de kilomètres sépare la Malbaie des hauteurs du canton de Settrington, il y tombe deux fois plus de neige[6].  Comble de malchance cette année-là, les semences qui n’avaient pas gelé à la fin du printemps et qui avaient fini par pousser avaient brûlé en août en raison de feux de broussailles[7].  Ce n’était pas de nature à convertir Louis à l’agriculteur, lui qui avait vu son père travailler en forêt toute sa vie.

C’est dans ce pays d’hivers hâtifs et rigoureux que le couple engendrera tous ses enfants, treize au total, dont au moins dix survivront à l’enfance[8] : Louis Harvey (1847), Augustin Harvey (1849), Napoléon Harvey (1851), Denis Harvez (1852), Elie Arvey (1854), Marie Harvey (1856), Marie Célina dite Julie Harvey (1858), Onesime Harvey (1859), Philomène Harvez (1861), Pierre Harvey (1864), François Harvey (1866), Pierre Harvey (1868) et Demerise Harvey (1874).

Louis et sa famille s’établissent sur une nouvelle terre du canton dans les années 1850.  La nouvelle maison, de bois celle-là, sera plus facile à chauffer durant ces hivers qui arrivent tôt dans les hauteurs et n’en finissent plus de durer.  Son père prendra un chemin différent en 1859, il se fera sacristain et laissera sa maison pour aller vivre chez Philomène Harvey (1837-post.1899), la sœur de Louis[9]

Comme son père l’avait fait avant lui, Louis travaillera les hivers dans les chantiers et le plus clair des étés pour autrui.  Il réussira peut-être à vendre un peu de bois de sa terre. 

Eléonore perd son père en 1859 et sa mère peu de temps par la suite.  Ces deux décès entraîneront le départ de tous ses frères et de toutes ses sœurs pour la Baie-des-Mille-Vaches, au-delà de Tadoussac sur la Côte-Nord avant la fin de la décennie.

La population de Saint-Hilarion de Settrington a pratiquement doublé depuis neuf ans; de deux cent quarante-quatre qu’elle était en 1852, ils sont maintenant cinq cent trente-neuf à côtoyer Louis[10].  Au printemps 1861, Louis Hervey et Eléonore vivent avec leurs huit premiers enfants.  Eléonore est enceinte de plusieurs mois déjà.  Leur enfant prénommée Marie Célina au baptême en 1858, porte maintenant celui de Julie, prénom qu’elle gardera toute sa vie[11].

La décennie qui s’entame en sera une de tristesse pour la famille.  Eléonore enfantera quatre fois et trois de ces enfants n’atteindront pas l’âge de dix ans.  Conséquemment, ils sont maintenant neuf enfants sous le toit familial au tournant de l’année 1870.  Plus de vingt et un ans séparent l’aîné Louis fils (1847-1934) du cadet Pierre (1868-1935).  Louis qui a quarante-trois ans est sur le point de voir changer sa situation.  Son fils aîné, Louis, est journalier comme son père.  Ses autres fils Augustin et Napoléon ne travaillent pas sur la terre, ils sont serviteurs.  Seuls les plus jeunes ont fréquenté l’écoleet seront les lecteurs et les plumes de leurs parents illettrés[12].  Dans le cas d’Augustin et de Napoléon, s’ils étaient bien présents et serviteurs à Saint-Hilarion en avril 1871, lors du passage de l’énumérateur au recensement, ils n’y seront guère longtemps[13].  Avant la fin de l’été, Augustin sera marié à une fille de Saint-Jérôme au lac Saint-Jean, une fille qu’il a rencontrée alors,qu’il travaillait comme journalier dans la paroisse voisine de Notre-Dame d’Hébertville[14].  De son côté, Napoléon s’unira ce même été à la fille d’une petite-cousine de Louis établie à Roberval[15].

En mai 1871, Louis était parti pour le lac Saint-Jean aider ses fils Augustin et Napoléon à s’établir.  Il y avait passé l’été avant d’assister aux mariages de ses fils[16]

Trois ans plus tard, c’est au tour de l’aîné de se marier.  Louis fils épouse une fille de Baie-Saint-Paul le 10 février 1874.  Arthémise Lamarre (1855-1905), native de Charlesbourg, est la « fille mineure de François Lamarre et Marie Boutet », une famille nouvellement arrivée dans cette paroisse.  Le père est de fait François Moore dit Lamarre, descendant d’un pilote anglais arrivé au pays bien avant la conquête.  L’union ne durera pas.  Bien que toujours marié, Louis fils aura quitté la région moins de deux ans après le mariage.  On le retrouve à Sainte-Anne de Chicoutimi en 1878 où sa maîtresse, Sophie Tremblay, accouche d’un enfant le 14 décembre.  Lors du baptême de « Joseph Israël » le lendemain, Louis fils et Sophie, peu connus dans la paroisse, se gardent bien de mentionner au célébrant qu’ils ne sont pas mariés.  Ce n’est qu’un peu plus tard que le curé de la paroisse ajoutera en marge du registre « J’ai appris depuis que cet enfant était illégitime »[17].  Union illégitime ou pas, le couple aura un autre enfant qui sera prénommé Louis.  Louis fils et Sophie vivront en relation libre jusqu’au décès de cette dernière[18]

Saint-Fidèle de Mount Murray

C’est après la naissance du plus célèbre fils de Saint-Hilarion, Olivar Asselin en novembre 1874, celui qui fondera le journal Le Devoir en 1910 que Louis et sa famille entamèrent leurs pérégrinations.  Comme Eléonore, alors âgé de quarante-sept ans, avait accouché de Demerise, sa dernière fille et treizième enfant en août[19], il est probable que le départ n’eut lieu qu’au printemps 1875.   À l’époque, Louis avait déjà quarante-six ans, son père était décédé depuis huit ans et ses frères avaient quitté le canton tout comme ses trois plus vieux, Louis, Augustin et Napoléon, lesquels se sont mariés et sont partis.  Plus rien ne le retient dans les hauteurs du canton de Settrington qui était devenu Saint-Hilarion de Settrington en 1864.  Pour tout avoir, la famille ne traîne que très peu avec elle. Outre quelques hardes et des outils chèrement acquis, Louis apporte « un poêle français, le tuyau en arrière avec lequel il a élevé une famille »[20].

Louis, Eléonore et sept des leurs (Denis, Elie, Marie, Julie, Onesime, Pierre et Demerise) se dirigent donc vers Saint-Fidèle de Mount Murray pour s’établir sur un lopin de terre guère plus productif que le premier.  De toute façon, Louis semble avoir renoncé au rêve agricole depuis longtemps.  À Saint-Fidèle, il sera emplacitaire essentiellement et journalier.  Il y demeurera six ou sept ans travaillant probablement dans les bois et dans un moulin à scie.  Son fils Augustin est journalier lui aussi; depuis son retour du lac Saint-Jean après son mariage en 1871, il a roulé sa bosse dans tous les villages de la région.  Vers la fin de la décennie, il viendra habiter chez Louis avec sa femme et leurs trois enfants.  Il y a six de leurs enfants qui vivent encore avec Louis et Eléonore; seul Denis s’est marié[21] depuis leur arrivée à Saint-Fidèle et a quitté le nid familial.  Ils seront donc treize sous le même toit en 1881[22].  Ce ne sera pas pour longtemps cependant puisqu’Augustin sera parti pour La Malbaie avant la fin de l’année[23].

C’est maintenant au tour d’Onésime de quitter le nid familial en 1881.  Journalier de profession comme son père, il part offrir son labeur à l’un des moulins de Saint-Siméon. 

Louis et Eléonore voient également leur fille Marie (1856-1899) partir travailler à la Baie-des-Mille-Vaches en 1881, peut-être chez sa grande tante Catherine Hervey (1814-1886) établit là depuis les années 1840, mais plus probablement chez l’un des membres de la famille de sa mère Eléonore qui y sont à peu près tous établis depuis un certain temps.  C’est d’ailleurs là que Marie épousera son cousin germain Onésime Bouchard (1855-post.1917) le 18 juin 1883 dans la chapelle Saint-Paul de l’endroit.  Onésime est le fils de sa tante Marie Obéline Tremblay (1831-post.1908).  Son oncle Ephrem Tremblay (1833-c.1900) lui sert d’ailleurs de père lors de la cérémonie[24].

La Malbaie

Le temps faisant son œuvre, Louis, qui est au milieu de la cinquantaine, trouve sans doute plus difficile de fournir les efforts nécessaires au travail des chantiers.  Il quitte alors Saint-Fidèle en 1882 pour venir demeurer et travailler à la ferme de Saint-Étienne de la Malbaie pour une dizaine d’années.

Depuis son départ pour Saint-Siméon, Onésime (1859-1942) a fait la rencontre de Louise Duchesne (1860-1944).  À la fin novembre 1882, le mariage est célébré.  Aucun membre de la famille de Louis n’assiste à la cérémonie.  On peut supposer que les vents du fleuve devaient avoir poussé une sérieuse tempête pour que la famille ne puisse franchir la quarantaine de kilomètres qui séparent les deux endroits, les empêchant ainsi de participer à la fête[25]Onésime ne repartira plus de sa fenêtre sur le fleuve à Saint-Siméon et sera donc absent des futures pérégrinations de son père.  Il y travaillera comme journalier toute sa vie.  Lui et Louise y auront quinze enfants.

De son côté, Marie, de nouveau enceinte et qui venait de vivre une autre grossesse difficile, viens recherchez les bons soins de ses parents à l’été 1887 avec son seul marmot toujours vivant.  Pendant ce temps, son mari Zozyme Bouchard est resté travailler à Baie-des-Mille-Vaches.  En juillet, au cours de son séjour chez ses parents, elle perdra cette enfant qu’elle avait difficilement mise au monde[26].  Rien ne la retenant plus à La Malbaie, elle retourne à Baie-des-Mille-Vaches où elle donnera naissance, en janvier 1888, à un autre enfant qui ne survivra pas[27].

En 1891, Louis et Eléonore n’ont maintenant plus que trois enfants non mariés sous leur toit (Julie, Pierre et Demerise).  Pierre travaille d’ailleurs comme garçon de ferme avec son père. 

Curieusement, Denis, toujours marié, habite également chez ses parents, mais sans sa femme.  Peut-être vivait-elle toujours dans leur maison de Saint-Fidèle pendant que Denis travaillait à Saint-Étienne de la Malbaie sur la même ferme que son père même si le recensement de cette année-là ne lui attribue aucun emploi?

Lorsque Louis migre à la recherche d’emplois, c’est souvent une grande partie du clan familial qui le suit.  À La Malbaie, les fils Augustin et Elie, toujours journaliers, habitent deux maisons voisines avec leur famille respective.

Louis héberge maintenant sa mère vieillissante qui s’éteindra avant la fin de l’année[28]Louis et ses fils Pierre, Augustin et Elie conduiront Marie Tremblay (1801-1891) en terre le 13 octobre 1891 au cimetière Saint-Étienne de la Malbaie[29].

La Baie-des-Mille-Vaches

Outre par sa fille Marie, Louis devait avoir entendu parler de ce coin de pays auparavant puisque quatre de ses tantes Madeleine Hervé (1797-1875), Geneviève Hervé (1800-1867), Suzanne Hervey (1808-1858) et Catherine Hervey (1814-1886) furent attirées dans la seigneurie de Mille-Vaches un peu avant le milieu du siècle alors qu’un chantier important s’était ouvert sur la rivière Portneuf aux limites de la seigneurie de Mille-Vaches.  L’entrepreneur James Gibb de Québec y faisait alors construire, avec la permission de la Compagnie de la Baie d’Hudson, une très grande scierie entourée d’une douzaine de bâtiments.  Près de cent cinquante personnes y vivaient alors dont quelques soixante à soixante-dix travailleurs[30].  À l’époque, les tantes de Louis et leurs époux avaient été parmi les premiers colons de la seigneurie de Mille-Vaches.  De plus, sa sœur Marie-Louise (1844-post.1901) était partie y vivre dès son mariage en 1873 avec le veuf Abel Girard (1832-post.1901) établi à cet endroit avec sa dizaine d’enfants.  Elle et sa famille y demeureront encore quelques années malgré la fermeture des moulins de la Portneuf Mills en 1889 desquels la famille avait d’abord tiré ses revenus d’hiver. 

Lorsque qu’à l’automne 1891, Louis et Eléonore partent à la Baie-des-Mille-Vaches avec leurs enfants Julie, Pierre et Demerise, c’est pour, en autres, y rejoindre leur fille Marie qui vit à cet endroit depuis plus d’une dizaine d’années maintenant et qui a vécu plusieurs grossesses difficiles.  On se rappellera que c’est à cet endroit que Marie avait convolé en 1883.  De plus, Eléonore rejoint également la plupart des membres de sa famille puisqu’au moins deux de ses frères, dont l’aîné et trois de ses sœurs y tiennent feu et lieu depuis plus d’une vingtaine d’années. 

Louis est en mode découverte.  Bien que les terres soient minuscules, la baie des Mille-Vaches le séduit peut-être par la fertilité de ses sols et l’abondance du foin salé, mais comme il ne possède aucune bête à cornes, c’est plutôt le domaine forestier qui l’intéresse probablement.  Les gens de l’endroit pratiquent une agriculture bien marginale et œuvrent surtout pour le moulin à scie qui est en activité au pied de la chute de Sault-au-MoutonLa population de l’ouest du village de Baie-des-Mille-Vaches où sa famille est établie vit essentiellement de l’exploitation du bois, la rivière servant à la drave.  Avec son passé de journalier forestier, le travail de journalier de ferme à La Malbaie ne devait pas lui avoir plu.  Ses enfants semblent vouloir tenter leur chance dans ce nouveau coin de pays.  La famille demeurera à cet endroit quelques années hébergée d’abord par Marie. 

Ce besoin de bouger, d’aller voir ailleurs si la vie pourrait être meilleure n’est pas propre à Louis dans la famille.  Oncles et tantes ont fini leurs vies aux quatre coins de la province et au Maine.  Maxime (1830-1906), son frère puîné, après avoir vécu un certain temps à Montréal et dans ses environs, a quitté le pays pour de bon et est établi à Lowell au Massachusetts depuis 1880.  Au tournant du siècle, sa sœur cadette, Marie Louise (1841-1921), partira de la baie de Mille-Vaches pour finir sa vie à Brosseau en Alberta.  Comme peu d’entre eux savent lire et écrire, il est probable que ce soient Julie ou Demerise qui entretiennent au nom du père une correspondance occasionnelle avec les autres membres de la fratrie de Louis pour connaître ce qu’il advient d’eux.  On en aura la preuve dans quelques années.  Ainsi allait donc la vie dans ce pays passablement illettré où la malle n’était qu’hebdomadaire en été[31].

Dans le hameau de Mille-Vaches sur la Haute-Côte-Nord, il n’y a encore aucune route digne de ce nom en 1891.  Depuis 1882, une route s’arrête dans le canton voisin d’Iberville (futur Sault-au-Mouton); il s’agit du «ch’min maritime», une «trail» chaotique, impraticable en hiver, vaseuse en automne et au printemps.  Le seul lien de communication réel demeure donc le fleuve, sept mois par année pour ceux qui veulent se rendre à Tadoussac et douze mois par année pour ceux qui veulent aller plus loin[32].  C’est donc sur une goélette à partir de Saint-Étienne de Murray Bay que la famille embarque son maigre butin pour repartir un peu à zéro tout en laissant derrière eux une petite maison vide. 

L’hiver 1891-1892 sera rempli de promesses pour les enfants.  Marie est à nouveau enceinte, Pierre fait la rencontre d’Alpheda Harvay alors que Demerise est courtisée par Pierre Duchêne

Louis et Eléonore assisteront donc au mariage de leur cadet tôt au printemps 1892.  C’est dans la petite chapelle Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches (Saint-Paul-de-Mille-Vaches à compter de 1898) que Pierre épouse Alpheda Harvay (1870-1950), fille de Fortunat Harvay (1840-1936) et Clémentine Ratté, une famille de journalier également, établie dans la baie des Mille-Vaches depuis une dizaine d’années[33].  Les arrière-grands-pères de Pierre et Alphéda étaient cousins; le premier est de la lignée de Sébastien Dominique Hervé (1736-1812) alors que le second est de la lignée de son frère Pierre Hervé (1733-1799)[34].

Après le mariage de son fils, Louis repart vers Saint-Étienne de la Malbaie pour y prendre le reste de ses effets laissés sans doute chez son fils Augustin.  Probablement hébergé à la ferme où il travaillait à la Malbaie, Louis n’est pas homme à traîner dans les études de notaires.  Il n’en a ni les moyens ni le besoin; ne possédant à peu près rien ses transactions se feront toujours sur la foi de la parole[35].

De retour à la baie des Mille-Vaches, c’est au cours de cet été 1892 que Louis apprend sans doute le départ de son fils Napoléon et de sa famille pour la Nouvelle-Angleterre l’automne précédent.  Peut-être, le second à choisir l’exil puisqu’on soupçonne Louis l’aîné, le P’tit Louis de probablement être déjà aux États-Unis.  Napoléon vivait à Saint-Louis de Métabetchouan (Chambord) depuis son mariage en 1871.  Comme des milliers d’autres Canadiens français, Napoléon a été attiré aux États-Unis, plus précisément à Manchester, la plus grande ville du New Hampshire, pour y travailler dans les usines de textile.  Louis a beau avoir été journalier toute sa vie et n’avoir pu établir ses fils comme encore plusieurs savent le faire, voir l’un de ses enfants quitter le pays est sans doute un traumatisme que plusieurs pères sans-le-sou de cette génération auront à subir[36].

En octobre, c’est au tour de Demerise d’épouser son prétendant.  La cérémonie a lieu le 4 octobre 1892 dans la chapelle de son village comme le veut la tradition, celle de Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, puisque Louis et Eléonore sont maintenant officiellement «aussi de cette mission».  Pierre Duchêne (1875-post.1940) le nouvel époux est un natif de l’endroit, mais une dispense de quatrième degré de consanguinité fut nécessaire.  Bien malin celui qui pourra établir un quelconque lien de parenté en deçà du sixième niveau? Le grand-père de Pierre Duchêne a effectivement été marié à Marie Modeste Hervé (1788-1820), mais cette dernière est la petite-fille de Pierre Hervé (1733-1799) et non de son frère Sébastien Dominique (1736-1812), la lignée de Demerise.  Cela n’empêchera pas le couple de fonder une famille de huit marmots[37].

Louis et Eléonore n’ont donc plus qu’un enfant à marier, la vieille fille Julie, trente-quatre ans. 

Les enfants de Louis compensent chacun à leur façon la mauvaise nouvelle du départ de leur frère pour les States. Par exemple, Marie accouche finalement d’une fille à la fin du même mois.  Sa sœur Julie est choisie comme marraine[38]

À une époque où la plupart des gens sont majoritairement illettrés, les membres du clergé à travers leurs prêches dominicales demeurent la principale source d’information afin d’orienter le surplus de paroissiens vers de nouveaux territoires.  Quelques mois plus tard, encouragé par l’évêché de Chicoutimi et par une lettre pastorale de Mgr Michel-Thomas Labrecque lui-même, l’abbé Joseph O. Perron (1864-1960), nouvellement nommé curé de Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches devait, comme dans toutes les paroisses du diocèse, avoir mentionné à ses paroissiens le vaste programme de recrutement de colons pour peupler le nord du lac Saint-Jean.  La fondation d’un monastère trappiste à Mistassini est vouée elle aussi à l’établissement de colons[39].  Le message devait avoir été entendu par Louis et ses enfants, car en plus de colons on cherche des journaliers pour bâtir chapelle, bâtiments de ferme et moulins.

Le 12 mars 1893, l’épouse de Pierre donne naissance à leur premier enfant.  Tradition oblige, Louis, grand-père de l’enfant, est choisi comme parrain[40].  

Denis, sans enfants et dont l’épouse vit toujours dans leur maison de Saint-Fidèle passe l’hiver 1893-94 à Baie-des-Mille-Vaches en travaillant dans les chantiers.  Encore une fois à cet endroit, c’est presque toute la tribu de Louis qui se trouve réunie.  Au mois de février 1894, Denis est parrain du deuxième enfant de son frère Pierre.[41] 

En 1894, Louis vit toujours dans la seigneurie de Mille-Vaches, l’une des quatre dernières seigneuries existantes d’ailleurs.  Il n’en finit plus d’être parrain de ses premiers petits-enfants comme en mai 1894, il est parrain de son petit-fils Louis Duchêne, premier enfant de sa cadette Demerise[42].

Quand Marie accouche de nouveau à l’été 1894, c’est son frère Elie et son épouse qui agissent comme parrain et marraine de l’enfant.  Lui et sa famille sont maintenant installés dans la baie[43].   Il avait sans doute accompagné la tribu de Louis dans sa migration vers la baie de Mille-Vaches.  Ce dernier baptême confirme donc la présence de tout le clan de Louis à la baie des Mille-Vaches.  Seul, Louis l’aîné, le P’tit Louis probablement aux États-Unis[44], Augustin à la Malbaie et Napoléon dit Corneille en Nouvelle-Angleterre ne sont pas avec lui et Eléonore.

Pendant que les enfants continuent de procréer, Louis Hervai est toujours à la Baie-des-Mille-Vaches avec ses enfants journaliers en juin 1895 lors du baptême du troisième enfant de son fils Pierre[45].  Maintenant âgé de soixante-six ans, il voit naître de plus en plus de rejetons chez sa progéniture et réfléchit assurément à leur assurer un avenir ailleurs puisque le lopin de terre qu’ils possèdent ne sera bientôt plus assez grand pour tous les soutenir.  Alors que Louis pensait améliorer leurs quotidiens à la baie, les chantiers sont de moins en moins réguliers.  Les gens qui dépendent de la terre et de la nature pour survivre ont à tout le moins un lopin décent, ce qui n’est pas le cas de Louis.

On peut imaginer la vieille fille Julie faisant la lecture à ses parents des journaux de l’époque qui parviennent hebdomadairement à Baie-des-Mille-Vaches.  Depuis un certain temps déjà, les gros titres parlent du mal du pays, l’exode de ses enfants vers la Nouvelle-Angleterre, un sujet délicat pour ses parents.  Le gouvernement annonçait un vaste programme visant à contrer cet exode des Canadiens français vers la Nouvelle-Angleterre, le Michigan et l’Ouest canadien.  Le programme qui vise non seulement à contrer l’exode des Canadiens français, mais aussi à ramener ceux qui sont déjà partis, entraîne un certain déplacement des populations.  On parle activement d’établir des colons au nord du lac Saint-Jean avec l’aide de moines[46]

La famille qui trônait dans les registres de la chapelle Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches depuis quelques années sera totalement absente de ces mêmes registres après le début de juin 1895.  On peut donc croire que la migration vers la dernière quête de Louis, la mission Saint-Michel de Mistassini, ait eu lieu au cours de cet été 1895[47].

Mistassini

François Gaudreault (1844-1921), fils de Bénoni Gaudreault et d’Angèle Desgagné, est originaire de Saint-Étienne de la Malbaie.  En mai 1869, avec sa femme Marie Louise Boily (1847-1882), il part s’établir avec ses enfants à Hébertville.  Le colon perd sa compagne en 1882, laissant quatre enfants orphelins de mère, Aimé, Théodule, François et Eugène.  Deux d’entre eux épouseront d’ailleurs des Harvey à la mission de Mistassini dans la prochaine décennie.

En 1883, François, maître de chantier sur la rivière Péribonka découvrit grâce à un autochtone la chute de la rivière Mistassini libérée de ses glaces.  Il trouva l’endroit idéal pour construire un moulin à scie qui profiterait de la puissance de la chute pour fonctionner.  Il prendra un an avec l’un de ses fils pour y ériger son moulin et un campement rudimentaire[48].  À l’âge de quarante ans, en 1884 avec sa famille, il s’établit donc seul au confluent des rivières aux Foins (aujourd’hui Mistassibi) et Mistassini.

En 1890, le gérant de la colonisation pour les districts du Saguenay et du Lac-Saint-Jean, Mgr Calixte Marquis propose à Gaudreault de lui racheter ses biens pour le compte d’une communauté de trappistes qu’il tente d’attirer dans la région.  Le squatter François Gaudreault se dit disposé à déménager sur la rive gauche de la Mistassibi et il le fait en échange de cinq cents dollars.


Ce sont donc les lots un, deux et trois, du rang Mistassibi dans le canton Pelletier, avec toutes les bâtisses, maison, moulin, grange qu’acquière le responsable de la colonisation.  Quelques années plus tard, en 1892, trois premiers Pères trappistes de l’ordre des Cisterciens d’Oka arrivent dans la région afin de déposer les bases de cette nouvelle communauté avec pour mission d’organiser le territoire et le rendre attrayant pour des colons éventuels.  Ils s’installent dans la grange de Gaudreault qui leur servira de toit pour un an, le temps de se construire un monastère.  Ils commencent à cultiver les terres le long des rivières Mistassini et Mistassibi.  

L’arrivée des pères trappistes n’est pas un hasard.  Le Québec vit alors un grave problème d’exode et c’est dans le cadre du programme de recrutement de colons mis en branle par le gouvernement que les Pères trappistes d’Oka sont mis à contribution, dont la mission de l’ordre est la mise en valeur des terres[49].

Déjà en février 1893, au moins cent cinquante demandes d’octrois de terre dans le voisinage du nouvel établissement des Trappistes avaient déjà été reçues par le gouvernement[50].

En mars 1893, les moines avec l’aide de colons avaient bâti une grange et disaient déjà la messe dominicale pour les ces derniers.  Un mois plus tard, le 1er avril, les Trappistes ouvraient un bureau de poste.  Au début de l’été, ils mirent en branle l’érection d’un moulin à scie pour faciliter les constructions du monastère, de la chapelle et des autres bâtiments de l’établissement de la Trappe de Notre-Dame de Mistassini[51]

Le vendredi 7 juillet 1893, après s’être embarqué à bord de goélettes de Saint-Étienne de Murray Bay vers Québec, le Grand Vicaire Leclerc, curé de La Malbaie, y prend le train du lac Saint-Jean avec un certain nombre de colons de Charlevoix pour s’établir sur les rives de la rivière Mistassini là où sont situées les terres accordées aux pères trappistes par le gouvernement[52].  Bien que le secteur ne soit guère propice à l’agriculture, des dizaines de familles s’agglutinent maintenant autour du monastère. 

Il y a tout lieu de croire qu’Augustin, le fils de Louis, était du voyage avec sa famille.  On se souviendra que ce dernier n’avait pas accompagné son père dans son aventure à la baie des Mille-Vaches deux ans plus tôt et était plutôt resté derrière à La Malbaie. 

Sa fille Rosaline, dite Obéline Harvey (1873-1954)[53], épousera d’ailleurs un des fils du premier colon de Mistassini le 11 mai 1896.  L’époux, Eugène Gaudreault, est le troisième fils de François et de sa première épouse Marie Louise Boily.  Eugène avait été parrain du premier enfant baptisé dans la chapelle du monastère provisoire de Notre-Dame de la Trappe de Mistassini en 1893[54].  Cette cérémonie bénie par le frère trappiste François d’Assise Quézel est la première manifestation de la présence d’un membre du clan de Louis à Mistassini[55].  Comme le mariage a lieu tôt au printemps, il ne fait aucun doute qu’Augustin et sa famille s’y trouvaient depuis un certain temps.  Journalier un jour, journalier toujours!

Il est intéressant de noter que bien que l’on soit en pays de colonisation où l’on tente d’implanter des familles d’agriculteurs, le «religieux trappiste» dans son registre prend soin de noter qu’Augustin est     «journalier»; il devait sans doute travailler aux nombreuses constructions entreprises par les pères, puisque rien d’autre n’existe à des kilomètres à la ronde et que les trappistes emploient la main-d’œuvre parmi les colons pour les défrichements et les constructions de la Trappe Notre-Dame de Mistassini [56].


La construction des moulins à scie et à bardeaux entamés au début de l’été est terminée à l’automne.  Le 3 novembre, ils commencent à fonctionner et vingt-trois jours plus tard les moines prennent possession de leur monastère provisoire, surmonté d’un clocheton[57].

Si la population n’est pas encore nombreuse autour du nouvel établissement des moines, dès l’ouverture des registres de la Mission par les Pères trappistes en 1893, les Harvey de passage occupent la plupart des pages et cela pour les deux premières années.

La mission des pères étant justement de favoriser l’arrivée de ces familles, les Pères trappistes avaient pris les devants en offrant aux colons divers services, comme la chapelle, le bureau de poste, un magasin général, de même que les moulins à scie et à farine.

Les premiers colons sont tous pauvres, sans autres ressources que leurs bras avec l’espérance d’être aidés et secourus par la communauté naissante.  Les Trappistes, par la construction de maisons à même cette main d’œuvre bon marché, fournissent aux colons le gîte moyennant un léger loyer.  Les colons regroupés autour de la Trappe obtiennent un travail rémunérateur dans l’une ou l’autre des multiples entreprises des moines.  On verra poindre avant le tournant du siècle un ensemble de bâtiments, église, presbytère, école et village, tous construits sur le domaine des Trappistes par des journaliers comme ceux du clan de Louis, lequel s’y pointera bientôt.  Par contre, les colons ne savent pas encore que les pères considèrent toutes ces constructions comme temporaires et qu’ils demanderont un jour de les déplacer.  Les Harvey des prochaines décennies vivront ce drame humain[58].

Mistassini, la fin de la quête de Louis

Cette envie de mouvements, cette quête d’un avenir meilleur pour les siens mènera Louis dans un ultime voyage, le dernier cette fois-ci.

À l’époque, le trajet de la baie des Mille-Vaches à Mistassini demande quelques jours même si un train circulait dans la région depuis peu.  Il est probable que Louis et Eléonore ainsi que leurs enfants et leurs familles respectives aient quitté la baie à bord d’une goélette en partance pour Chicoutimi.  De là, après une nuit de repos, ils purent prendre le train et débarquer à Roberval.  Ce seul segment par train du voyage aura coûté trente-deux dollars à cette grande famille sans trop de moyens[59].  

Pour les soixante-cinq kilomètres restants, ils durent s’assurer d’un cocher pour les mener en charrette avec leurs bagages jusqu’à Saint-Méthode à l’ouest de la rivière Mistassini.  En empruntant le nouveau pont construit en pleine forêt en 1893[60], ils purent enfin atteindre la mission de Mistassini. 

S’ils n’étaient qu’une poignée en 1893, l’arrivée des colons venus de partout en 1894 aura gonflé la population de la mission de Mistassini, car en 1895, quatre cents personnes y demeurent déjà à l’arrivée présumée du clan de Louis.  L’ensemble des bâtiments déjà construits sont situés sur la rive nord de la rivière Mistassini à quelque quarante-cinq kilomètres de Saint-Félicien.  Comme aux temps médiévaux, les colons qui avaient suivi la trace des moines s’étaient regroupés autour du monastère.  D’ailleurs, dans quelques années, on en viendra même à oublier que les maisons du village avaient été construites à proximité du monastère de Notre-Dame de Mistassini sur les terres des Pères.

Louis et sa famille s’établissent dans le canton de Pelletier, plus précisément dans le rang de Mistassini qui n’a pas encore pris ce nom.  Bien que les registres soient ouverts depuis 1893, le lieu n’est toujours qu’une mission desservie par les Pères trappistes[61]

Si Louis est parmi les premiers descendants européens et les premiers Harvey à s’établir le long de la rivière, d’autres avant lui y étaient passés.  Les Innus du lac vénéraient depuis toujours une pierre énorme qui se trouve encore aujourd’hui dans la rivière Mistassini.  Rappelons-nous que c’est un autochtone qui fit découvrir le lieu au premier colon, François Gaudreault.

Louis en quittant la Baie-des-Mille-Vaches ne partait pas seul.  Bien sûr il y avait ses enfants et leur famille : Elie et Georgina Savard et leurs trois enfants, Marie et Onésime Bouchard avec leurs deux enfants vivants, Pierre et Alphéda Harvey et leurs trois enfants, Demerise et Pierre Duchêne et leurs deux enfants puis enfin la vieille fille Julie.  Au total, ils sont vingt à l’accompagner.  Ce jour-là, d’autres familles de Baie-des-Mille-Vaches étaient également à bord de la goélette en direction des nouvelles terres de Mistassini.  C’était le cas, en autres, d’une partie de celle des beaux-parents de Pierre, Fortunat Harvay (1840-1936) et Clémentine Ratté et de leur fils Joseph Harvey (1870-1941) et Elise Tremblay, le beau-frère de Pierre et sa famille de trois enfants; celle aussi de la nombreuse famille d’Abel Duchêne dit Lapierre et d’Angélique Martel, les beaux-parents de Demerise et futurs beaux-parents de la vieille fille Julie.

La première année, la famille s’attellera au défrichement de ces six mille acres de terres nouvellement reçus du gouvernement dans le cadre de son programme de colonisation[56].  À cette époque Mistassini n’est que forêt le long des cours d’eau.  Il y a beaucoup d’arbres à abattre afin de transformer la forêt en une terre nourricière pour un clan si nombreux que celui de Louis.  Heureusement, pour cette famille de journaliers bûcherons, bien que la tâche soit énorme sans la contribution apparente d’animaux de traits, ils ont tous l’expérience voulue. Au début, la famille comme la plupart habite au village des Pères dans une maison appartenant à ces derniers qui ne souhaitaient pas qu’un trop grand nombre de familles s’établissent dans leur village, outre celles de leur main-d’œuvre.  Ils vendront dès qu’ils en auront l’occasion, les maisons dont ils étaient généralement les propriétaires avec obligation pour les acheteurs de les éloigner du village[57].  Si ce fut le cas de la famille, on peut penser que ce fut bien plus tard, car la plupart de ses membres seront pour des années à la solde des Pères.  Comme on le verra, Louis ne connaîtra pas ce drame, mais ce pourrait être le cas pour ses fils, Napoléon et Pierre

On peut penser que le clan de Louis assiste à la messe de minuit dans la première église construite au cours de l’automne 1895 et bénite tout juste à temps pour la période des Avents le 8 décembre 1895.  Les trappistes qui avaient desservi la population depuis le tout début avaient passé la main en août au premier curé, l’abbé Auguste-Louis-Adrien Delay.

Au cours de l’hiver 1895-1896, le fils Denis a rejoint le clan de Louis et travaille comme journalier à la Mission de Saint-Michel de Mistassini tout comme le reste du clan d’ailleurs.  Félicité Boily (1839-1896) son épouse, encore seule à Saint-Fidèle de Mount Murray, décède le 18 janvier 1896.  Denis ne l’apprendra que plus tard[64].  Il ne repartira probablement pas de Mistassini puisque lorsqu’il convolera en secondes noces en juin 1897, il demeure toujours à «Notre-Dame de Mistassini»[65].

Louis, ses fils et beau-fils sont avant tout journaliers comme on a pu le voir.  Lors de leur arrivée à l’établissement de la Trappe de Notre-Dame de Mistassini, seul son fils Pierre se convertira un peu à l’agriculture en s’établissant sur une terre des pères Trappistes, du moins pour un certain temps[66].  Pour les autres, ils travailleront pour le compte des Trappistes pendant un certain nombre d’années en échange de           «timbres» convertissables au magasin de trappistes[67].  En cela les pères n’étaient guère différents de Price quarante ans plus tôt.  Les nombreux travaux de construction de la Trappe, dont les moulins, leur pouvoir d’eau, et le défrichement de l’immense terre, avanceront rondement et la famille y contribuera[68].

Julie, la plume de la famille ne devait cesser d’écrire.  Le père devait insister pour qu’elle communique à son fils ou ses fils perdus aux États afin de lui faire valoir son nouveau pays de Mistassini.  Louis devait avoir appris qu’après quelques années à Manchester au New Hampshire, Napoléon dit Corneille avait dû aller tenter sa chance ailleurs et qu’il était maintenant à Fall River au Massachusetts aux frontières du Rhode Island.  Avant qu’il ne s’enfonce davantage dans son rêve américain, Louis voulait lui faire savoir que d’autres revenaient au pays grâce au programme de subvention de terre du gouvernement.  Les efforts de Louis à travers les missives de Julie durent porter fruit, car à l’automne 1896, Napoléon débarque avec sa femme et ses deux filles célibataires d’un train de la Quebec and Lake St-John Railway qui relie la ville de Québec à Roberval et vient s’établir à Mistassini.  Son fils Joseph (1876-1949) ne les accompagne pas; l’opérateur de moulin dans une usine de textile de Manchester qui s’est trouvé une épouse aux États, une Canadienne française elle aussi expatriée,[69] est resté derrière, il ne reviendra qu’en 1898[70].  Quelques mois plus tard en janvier 1897, Pierre choisira d’ailleurs son frère Napoléon comme parrain de son premier fils qui naîtra à Mistassini.  Sa nièce Rosaline à Augustin, dite ici Ovéline agit comme marraine[71].

Louis et sa famille sont toujours résidents dans une maisonnette appartenant aux Trappistes dans le village des Pères, lorsqu’à la fin de 1896 la municipalité de Saint-Michel de Mistassini est officiellement fondée, cela ne change pas grand-chose dans leur vie[72].

Au début de l’été suivant, la Mission est déjà entourée de quatre-vingt-cinq familles.  Les journaliers des moines profiteront des beaux jours de l’été 1897 pour construire quatre nouvelles maisons de colons, un hôtel et un magasin qui sera tenu par un commis, de manière à supprimer celui du monastère.  La construction du moulin à farine et d’une beurrerie, de même que le creusage de l’aqueduc commence ce même été.  Dès le début de l’automne, c’est un presbytère qu’ils érigent pour le nouveau curé.  Décidément, les journaliers du clan de Louis ne manquent pas de travail.



Si Mistassini n’est pas l’Eldorado rêvé par Louis, il n’en demeure pas moins que les siens y ont à tout le moins du travail régulier ce qui n’était plus le cas à Baie-des-Mille-Vaches.  Le travail ne fait pas défaut au cours de l’hiver 1897-1898.  Les moines proposent de construire le pont projeté par le ministre de la colonisation sur la Mistassibi, un affluent de la rivière Mistassini.  Situés à trois arpents en amont de la communauté, les travaux débutent à la fin novembre et sont terminés quatre mois plus tard, fin mars 1898[73].

C’est à cette époque qu’une autre famille de Harvey vient s’établir à Saint-Michel de Mistassini.  Ce sera le dernier arrivage de porteurs du patronyme avant le tournant du siècle.  Le charretier Hector Harvey (1865-1954) à Ferdinand Harvey (1837-1908) à Louis Hervé (1802-1866) à Louis Hervé (1762-1842) chez Pierre Hervé (1733-1799) et son épouse Marie Perpétue Boutet s’amène donc avec leurs quatre enfants.  Hector, originaire de Roberval, après avoir réalisé le peu d’intérêt que les Trappistes pouvaient avoir pour sa charrette, repartira vivre à Roberval avant 1911.  Il s’établira voisin du couvent des Ursulines.  Sœur Malvina Gagné, dite sœur Saint-Raphaël (1837-1920), qui avait fondé le couvent et ouvert l’école ménagère lui assurera son gagne-pain[74].

Cela faisait plus de trente ans que Louis et Eléonore n’avaient pas perdu un enfant quand «Marie Harvé épouse de Zozime Bouchard» décède le 21 août 1899[75].  Celle qui avait des grossesses difficiles et sans doute de fausses couches avait perdu cinq de ses sept premiers enfants, dont six à Baie-des-Mille-Vaches[76]; en 1898, elle venait d’en perdre deux autres guères plus en santé à Mistassini en un mois alors que la maladie s’était immiscée dans la maison[77].  Elle laisse donc Zozime avec deux orphelins.  Compte tenu de la régularité de ses accouchements, il est bien possible que son décès soit dû à une autre tentative d’enfanter; les registres de l’église étant bien muets sur les causes de décès, surtout celles des femmes, nous ne le saurons jamais. 



Chaque année, au cours des hivers, Louis, ses enfants journaliers-bûcherons et les autres colons à la solde des Trappistes défrichaient les terres de ces derniers.  Ce sont trente mille billots qu’ils purent en extraire au cours de l’hiver 1900-1901.  Une fois halé au moulin du monastère, le bois scié fut transporté par bateau à Roberval au printemps[78].  Ainsi allaient les hivers de Louis et de son clan!

En 1901, Louis a soixante-douze ans.  Il est absent lors du passage de l’énumérateur du gouvernement en juin.  Lui et sa femme Eléonore demeurent chez leur fils Pierre, cultivateur à Saint-Michel de Mistassini; du moins, c’est ce que tente de nous faire croire le recenseur en nommant son fils chef de famille[79], une situation qu’aura tôt fait de corriger Louis dix ans plus tard lorsqu’il attendra le prochain représentant de ce gouvernement assis dans sa chaise berçante; à quatre-vingt-deux ans, il reprendra ses droits chèrement acquis de patriarche et de chef de famille[80].  Ils sont onze sous le même toit en 1901.  Outre Pierre et sa famille, le veuf Zozime Bouchard et ses deux enfants demeurent avec eux depuis le décès de Marie.  Déjà en 1901, cent neuf maisons constituent le village des Pères trappistes constitués de cent vingt-neuf chefs de famille.  Parmi eux, quarante-quatre individus portent le patronyme Harvey à Mistassini en 1901 dont Louis, et vingt-cinq de ses descendants[81].

Demerise, la fille de Louis, et Obéline Harvey mariée à Eugène Gaudreault, la fille de son fils Augustin, sont voisines.  Depuis peu, ils ont un nouveau voisin à quelques maisons de chez elles, Jean Philippe et sa famille.  Ils sont parents, petits-cousin de fait, mais le savent-ils? Il faut en douter, car bien des événements les séparent.  Jean est le fils d’Adéline Harvai (1830-1895), cousine de Louis puisqu’elle est fille de son oncle Dominique Hervé (1806-1890).  Adéline qui avait épousé un autochtone en 1847 à l’Anse à l’Eau, avait toujours vécu en nomade avec le clan de son mari avant de se sédentariser au début des années 1880 et de finir ses jours à la mission Saint-Charles-Borromée de Pointe-Bleue.  Louis, tout aussi nomade, n’avait peut-être pas connu cette cousine dont la famille vivait déjà à la Mission Sainte-Marguerite au moment du mariage de Louis.  Son chemin n’avait pas permis de les recroiser depuis, mais... son fils Napoléon dit Corneille était, avec le métis Louis Cleary (1842-1925) de Chambord, parmi les deux plus réputés violoneux du canton.  Ils assuraient la musique de toutes les noces et animaient les veillées non seulement à Chambord, mais aussi ailleurs sur les rives du lac Saint-Jean, des années 1870 aux années 1890[82]Or l’un des fils de Cleary avait épousé Philomène Philippe[83], petite-fille d’Adéline Harvai, nièce du nouveau voisin métis et petit cousin de Demerise.  Après tout, peut-être que malgré l’éloignement de chacun, le fin conteur, Napoléon dit Corneille avait peut-être dénoué les nœuds des liens remontant à sa petite cousine.

Deux ans plus tard, en 1903, après quarante-cinq ans d’attente, Louis et Eléonore voient la vieille fille Julie épouser Pitre Bouchard, veuf depuis peu.  La première épouse de ce dernier était la belle-sœur de Demerise mariée à Pierre Duchêne[84]Julie épaulait d’ailleurs sa sœur Demerise depuis quelques années et vivait chez cette dernière[85]

Le ciel de l’année 1905 allait être grisonnant sur Mistassini et au sein du clan de Louis.  L’année débute par une épidémie de varicelle qui sévit cette année-là au village des Pères.  En mai, Louis et Eléonore perdent leur fils Denis.  Il n’avait que cinquante-deux ans[86].  Le 3 septembre, Antoine Harvey marié à Marie Otis, beau-frère de Pierre et frère d’Alphéda, perdent leur fille Denise[87]

Plus triste encore, Louis perd sa partenaire de vie le 19 octobre 1905.  Après avoir suivi son mari dans toutes ses aventures, Eléonore s’éteint à l’âge de soixante-dix-sept ans[88].

L’année suivante ne commença guère mieux quant au printemps la crue des eaux de la rivière inonda l’ensemble des bâtiments des Pères longeant la rivière, dévastant leurs aménagements.  Comme à quelque chose malheur est bon, les Pères décidèrent de déménager leurs installations, un peu plus haut dans les terres et les journaliers à leur solde comme ceux du clan de Louis n’eurent que plus de travail.

Les beaux-parents de Pierre ne pouvaient s’habituer de l’absence des vents du large.  Ayant vécu à la baie de Mille-Vaches une bonne partie de leur vie, ils font le chemin inverse vers 1907 comme quelques autres qui étaient venus fonder Mistassini.  Fortunat Harvay et Clémentine Ratté, les parents d’Alphéda retournent à l’air du fleuve à Saint-Paul de Mille-Vaches après une dizaine d’années à défricher Mistassini.  Ils y sont avec certitude dès 1908.  Antoine, le frère d’Alphéda et sa famille les accompagnent[89].

Bien que la plupart y ont résidé plusieurs années, les enfants de Louis ne demeureront pas tous à Saint-Michel de Mistassini.  Denis (1852-1905) par exemple, après son mariage en 1897 était parti vivre à Roberval[90]Augustin (1849-1920) de son côté, après avoir besogné comme journalier pour les moines pendant huit ans, partira en 1902 offrir ses bras à Chicoutimi.  Il sera de retour à Mistassini à compter de 1909 alors que chez les trappistes il y eut à nouveau de l’emploi pour le journalier.  Après quelques années à besogner pour les trappistes, il ira finir sa vie de journalier à Sainte-Anne de Chicoutimi laissant à Mistassini plusieurs de ses enfants dont au moins deux résideront à Saint-Michel de Mistassini jusqu’à leur décès : Arméline (1887-1918) et Joseph (1890-1950).

Le bonheur de Julie, finalement mariée en 1903, aura été de courte durée.  En 1911 elle a déjà perdu son veuf et se retrouve seule à nouveau.  Elle finira sa vie chez la benjamine Demerise[91].

Les dernières années de Louis sont difficiles : après lui avoir rongé les lèvres, un chancre de pipe s’attaqua ensuite à son visage[92].

En 1916, Elie se perd dans le bois entre Mistassini et Normandin.  On ne le retrouvera qu’après trois semaines. 

Louis voit s’éteindre cet autre enfant de sa progéniture un an après être disparu en forêt, en août 1916.  Elie (1854-1916) décède à l’âge de soixante et un ans.  Le journalier aura survécu sept ans à son épouse décédée en 1909[93].  Les deux enfants qui lui restaient partiront s’établir dans le Témiscamingue ontarien[94].


Tout comme Georges Harvey (1884-1958), mon grand-père, Louis le patriarche, s’éteint à son tour en 1917 des suites d’un cancer de la bouche[95]Louis aura mené la majorité de son clan dans des terres où le travail de journalier était régulier.  Sa quête achevée, il décède le 1er mars 1917[96].  Son fils Napoléon même s’il avait beaucoup voyagé, n’avait pas appris à compter.  En 1935, il affirmera que «Louis son père était décédé à l’âge de cent deux ans et sa mère à l’âge de quatre-vingt-quatre ans»[97]Louis à son décès n’avait que quatre-vingt-huit ans et Eléonore en avait soixante-dix-sept.

Seul Napoléon (1851-1937), Pierre (1868-1935) et la cadette Demerise (1874-1940) finiront leur vie dans les environs de Mistassini. 

On se rappellera que les curés de la paroisse et nombre de colons s’étaient longtemps opposés au      «vilain procédé» qu’employait les Trappistes de vendre dès qu’ils le pouvaient, les maisons dont ils étaient généralement les propriétaires en obligeant les acheteurs à les éloignées du village.  En 1928, la situation s’était tellement détériorée que l’évêque de Chicoutimi décida de fermer les édifices de la Fabrique et de former trois paroisses nouvelles : la première, qui conserva le nom de Saint-Michel de Mistassini, eut son église et son presbytère dans le village de Bellevue, situé sur la rive gauche de la Mistassibi, non loin du confluent des rivières Mistassini-Mistassibi; l’église du village des Pères connut sa dernière célébration le 11 novembre; la seconde paroisse eut comme titulaire Saint-Eugène et la troisième porta le nom de Saint-Stanislas; la paroisse de Sainte-Thérèse d’Avila de Dolbeau avait été formée l’année précédente.  L’église et les maisons qui formaient le village des Pères furent démolies[98].  Pendant la trentaine d’années que vécut le clan de Louis au village des Trappistes, ses membres eurent probablement peu connaissance de la guerre ouverte que se livrait l’évêché de Chicoutimi et la maison mère des Trappistes à Oka.  Ils furent par contre parmi les victimes innocentes de ce conflit, car eux aussi durent se reloger après avoir quitté le village des Trappistes[99]

En 1928, trois des quatre enfants restants du clan de Louis avaient pris des chemins différents quoique peu éloignés l’un de l’autre.  C’est ainsi que Pierre et sa famille s’étaient retrouvés au village de Saint-Eugène où il décède le 31 janvier 1935[100]Napoléon quant à lui s’était établi au village de Saint-Michel de Mistassini.  À quelques semaines de sa fin, «Napoléon… de Mistassini» se réfugiera chez sa fille Eléonore (1878-1945) à Jonquière comme le faisaient les vieux de l’époque[101].  Pour sa part, Demerise, son époux Pierre Duchêne et leurs enfants avaient alors pris le chemin du village de Saint-Stanislas où la mort emportera Demerise le 24 janvier 1940[102].  Dans le cas de Louis fils, il finira sa vie « le long de la mer dans Charlevoix le 9 octobre 1934 »[103].

Il ne reste aujourd’hui aucun vestige des maisons où ont habité les membres du clan de Louis.  Les terrains sur lesquels s’établirent les moines et nos premiers colons Harvey de Mistassini servent depuis lors de pâturage aux animaux du monastère.

Comme on l’a vu, Louis et ses fils, de même que ses gendres ont été avant tout journaliers toute leur vie, et cela, même si les membres de la famille s’étaient vu attribuer des terres par le gouvernement à leur arrivée à Mistassini.  Si son fils Pierre avait été déclaré cultivateur à l’occasion, c’est comme journalier qu’il sera reconnu à Saint-Michel de Mistassini.  Évidemment, Louis n’avait su transmettre à sa progéniture l’amour de la terre faute de talent ou d’intérêt peut-être.

Les Harvey étaient parmi les premières familles venues bâtir Mistassini.  Aujourd’hui, des descendants de Louis demeurent toujours dans ce coin de pays de Dolbeau-Mistassini.

Louis Harvé, ses enfants, données généalogiques — 7e génération 


D’autres Harvey on mit les pieds à Mistassini avant le clan de Louis

Deux Harvey se sont établis à Mistassini avant Louis.  Ils n’ont fait que passer quelques années et l’histoire du village et les monographies s’y rapportant n’ont pas retenu leurs noms.  Ils n’ont pas moins contribué à la fondation de Saint Michel de Mistassini.  Ce sont :

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Ceci termine la section des Harvey colonisateurs au lac Saint-Jean pour l'instant.

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[1] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 8 août 1828.

[1a] ALLAIRE Jean-Baptiste-Arthur. Dictionnaire biographique du clergé canadien-français; Les anciens. Montréal, Imprimerie de l’école catholique des Sourds-Muets, 1910, page 538.

[2] TREMBLAY, Victor Mgr. «Mémoires d’un ancien - Monsieur Napoléon Harvey», Saguenayensia, volume 15, numéro 2 (mars-avril 1973), page 56.  Et : BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 130.

[3] Marie Magdeleine Dufour, la seconde épouse de Sébastien Dominique Hervé, qui fit son entrée dans la vie de Dominique Isaïe en 1881, est née en 1757.  Sa belle-mère, Rosalie Tremblay était décédée depuis 1740 alors que son beau-père Sébastien Hervé avait quitté l’île aux Coudres depuis 1750 et était décédé en 1759.  Si les aînés sont porteurs de mémoire, ils n’auront pu contribuer ici aux connaissances généalogiques de Dominique Isaïe.

[4] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 14 décembre 1827.  Elle fut baptisée sous le prénom d’Eleonore.  Le célébrant, lors du mariage, se sentit obligé d’ajouter Marie devant le prénom, une pratique que certains membres du clergé tentaient alors d’imposer, mais qui était nouvelle dans les mœurs du milieu.

[5] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Irénée, 15 février 1847. 

[6] PERRON, Normand et Serge GAUTHIER.  Histoire de Charlevoix.  Québec, les Presses de l’Université Laval, 2000, page 27.

[7] B.A.C., G., Recensement de 1851, canton de Settrington, microfilm e002314922y.  Note du recenseur Napoléon Huot. L’énumération connue sous le nom du Recensement de 1851 a débuté officiellement le 12 janvier 1852 pour le Canada-Est.

[8] BAnQ., Registre des paroisses : Saint-Irénée pour quatre enfants, l’Assomption de la Sainte Vierge des Éboulements pour trois enfants, Saint-Pierre et Saint-Paul de Baie-Saint-Paul pour deux et Saint-Hilarion de Settrington pour les quatre autres.

[9] B.A.C., G., Recensement de 1861, comté de Charlevoix, Saint-Hilarion, page 202.

[10] B.A.C., G., Ministère de l’Agriculture/Bureau fédéral de la statistique/Statistique Canada, Recensements du Canada, 1861 à 2016.

[11] B.A.C., G., Recensement de 1861, comté de Charlevoix, Saint-Hilarion, page 201.

[12] B.A.C., G., Recensement de 1871, district de Charlevoix, canton de Settrington, microfilm 4395454_00105.

[13] BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 130.  Napoléon déclarera en 1935 avoir quitté Saint-Hilarion pour le lac Saint-Jean le 12 mars 1871.  Il est pourtant inscrit au recensement de Saint-Hilarion qui a débuté le 2 avril 1871.  

[14] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Jérôme du lac Saint-Jean, 28 août 1871.

[15] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame-Immaculée de Roberval, 28 août 1871. Mariage de Napoléon et d’Aurélie Bouchard.  Aurélie est la fille de Modeste Hervey (1820-1911) à Pierre Hervé (1796-1858) chez David Hervé (1764-1837).

[16] BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 130, op.cit.

[17] BAnQ., Registre de la paroisse Sainte-Anne-de-Chicoutimi, 15 décembre 1878.

[18] BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 130, op.cit.  Napoléon dans ses mémoires confirme que Sophie Tremblay fut la deuxième femme de Louis fils ce qui permet de conclure que Louis et Sophie sont bien les parents de l’enfant baptisé en 1878. 

[19] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Hilarion de Settrington, 20 août 1874.

[20] BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 130, op.cit.

[21] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Fidèle de Mount Murray, 23 octobre 1875.

[22] B.A.C., G., Recensement de 1881, district de Charlevoix, Saint-Fidèle, microfilm e008153304.

[23] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 30 novembre 1881.

[24] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, 18 juin 1883.

[25] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Siméon, 21 novembre 1882.

[26] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 4 juillet 1887.

[27] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, 17 janvier 1888.

[28] B.A.C., G., Recensement de 1891, district de Charlevoix, Malbaie, microfilms 30953_148192-00424 1891 et 30953_148192-00425.

[29] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Étienne de la Malbaie, 13 octobre 1891.

[30] FRENETTE, Pierre. «Pionniers et squaters de la Haute-Côte-Nord : les explorations de Duberger», Histoire Québec, volume 15, numéro 1, page 32.  

[31] BAnQ., Quebec Business Directory, 1892, page 32.

[32] BAnQ., BRISSON, Nataly. «Le boucher de Mille-Vaches», Journal Haute-Côte-Nord. Forestville, volume 23, N0. 42 (17 octobre 2018), page 16.

[33] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, 3 mai 1892.

[34] Alphéda Harvey (1870-1950) à Fortunat Harvay (1840-1934) à Roger Hervey (1809-1900) à Pierre Hervé (1759-1857) chez Pierre Hervé (1733-1799).

[35] Contrairement à l’ensemble des ancêtres rencontrés à ce jour, je n’ai pu retrouver aucun document juridique au nom de Louis du début de son mariage à son décès dans l’ensemble des greffes habituelles accessibles à BAnQ.

[36] Archives de la Société historique du Saguenay, section «Mémoires d’un ancien», Napoléon Harvey, 13 juillet 1935.  Registre de mariage de la ville de Manchester (NH), 12 mai 1895.  Mariage de Joseph Harvey, fils de Napoléon et de Joséphine Desgagnés dite Gagnon.  Date de départ estimée selon les déclarations de Napoléon et le recensement de 1891.  Compte tenu du retour de la famille au lac Saint-Jean en 1896, le départ pourrait avoir eu lieu au printemps 1892 puisque selon Napoléon il serait demeuré à Manchester trois ans et à Fall River un an et demi. 

[37] Ibid., 4 octobre 1892.

[38] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, 29 octobre 1892.

[39] Archives du diocèse de Chicoutimi, lettre pastorale de Michel-Thomas Labrecque, 21 novembre 1892.

[40] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, 13 mars 1893.

[41] Ibid., 7 février 1894.

[42] Ibid., 14 mai 1894.

[43] Ibid., 19 août 1894.

[44] On ne trouve plus trace au Québec de Louis fils après la naissance de son premier fils en 1878.  Il ne semble pas avoir été recensé en 1881 ni après.  Le registre de sa sépulture reste introuvable.  Peut-être avait-il pris le chemin des États-Unis.  Bien que nous ayons aujourd’hui accès à de nombreux documents relatifs aux Canadiens français ayant migré vers la Nouvelle-Angleterre et ailleurs aux États-Unis dans la dernière moitié du XIXe siècle, bon nombre d’entre eux sont passés sous le radar, ils ont simplement disparu des archives canadiennes.  Louis fils est probablement l’un de ceux-là.

[45] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, 10 juin 1895.

[46] BAnQ., COLLECTIF. Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, volumes IV à VIII.  À compter de 1890, et cela sans interruption jusqu’en 1895, les journaux et spécifiquement celui accessible à Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, Le Progrès du Saguenay, publient régulièrement des mises à jour relatives à la colonisation du nord-ouest du lac Saint-Jean et principalement de Mistassini.

[47] Dans un article publié dans la revue «La Souvenance» en 2017, l’auteur avance que l’aînée Marie était arrivée à Mistassini en 1895, un an avant son père Louis en 1896.  Bien que je n’aie pu trouver aucun document ou registre soutenant cette affirmation, l’absence des membres du clan de Louis Hervai des registres de Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches à compter de juin 1895, tend à supporter une migration de la famille entière au cours de l’été ou au début de l’automne 1895.  Quoique de peu d’importance pour notre histoire, l’auteur, Clément Tremblay, puisse avoir eu accès à de l’information familiale, mais comme il ne fournit aucune source en appui de ses affirmations, j’ai choisi de croire à une migration en 1895.  Ce même article mentionne également que Louis arrivait de la Malbaie, ce que nous savons erroné aujourd’hui.

[48] SOCIÉTÉ D’HISTOIRE ET GÉNÉALOGIE MARIA CHAPDELAINE. Le pionnier derrière l’avenue Gaudreault. [En ligne].   http://histoiregenealogie.ca/le-pionnier-derriere-lavenue-gaudreault/ [page consultée le 20/09/2021].

[49] CÔTÉ, André. L’ordre de Citeaux et son établissement dans la province de Québec, depuis la révolution française jusqu’à 1935. Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1971, pages 102-103.

[50] Pineault, Jacques. «Mistassini… au commencement : de Oka à Mistassini : les fils de Cîteaux du Québec», Histoire Québec, volume 1, numéro 2, (décembre 1995), pages 24-27.

[51] CÔTÉ, André, op.cit., page 113.

[52] BAnQ., COLLECTIF. «Colons pour le lac St-Jean», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, volume VI, N0. 47 (13 juillet 1893), page 3.

[53] Prénommée Rosaline à la naissance, Marie à son mariage (1896), Obéline au décès de son fils Ludger (1901), Ovéline au décès de son mari en 1937 et Mausélina à son décès en 1954.

[54] BAnQ., Registre de Notre-Dame de la Trappe de Mistassini, 21 mars 1893.

[55] BAnQ., Registre de la mission Saint-Michel de Mistassini, 11 mai 1896. Seuls les deux témoins des mariés sont mentionnés au registre soient Théodule Gaudreault, frère aîné du marié et Augustin, père de Rosaline dite Marie.  Deux autres personnes présentes pour le marié ont signé, Anne Harvay, fille d’Augustin Harvai (1833-1896) à Pierre Hervé (1806-1859) à Jean Hervé (1775-1813) chez Pierre Hervé (1733-1799) et épouse de Théodule Gaudreault ainsi qu’Alfred Bouchard marié à Marie Fédeline Harvey, la sœur de Marie Anne.   Bien qu’il soit probable que le clan de Louis soit arrivé à Mistassini à l’été 1895, comme les membres de la famille d’Augustin sont illettrés on ne peut donc affirmer avec certitude leur présence à Mistassini en mai 1896.    

[56] BAnQ., COLLECTIF. «À propos des Trappistes», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, (19 octobre 1893), page 3.

[57] CÔTÉ, André, op.cit., page 115.

[58] Ibid., page 162.

[59] BAnQ., COLLECTIF. «Excursion à Roberval», Journal Le Progrès du Saguenay. Chicoutimi, (27 juillet 1893), page 2.

[60] BAnQ., COLLECTIF. «Visite officielle au lac Saint-Jean», Journal Le Courrier du Canada. Québec, (5 septembre 1893), page 2.

[61] MAGNAN, Hormisdas. Dictionnaire historique et géographique des paroisses, missions et municipalités de la Province de Québec. Arthabaska, Imprimerie d’’Arthabaska inc., 1925, page 585.

[62] Les terres octroyées dans le canton Pelletier formaient soixante lots pour un total de six mille acres répartis comme suit : rang Mistassibi, n° A, 4 à 24, partie sud-ouest du n° 25; rang II, parties nord-est des n° 49 à 57; rang III, n° 49 à 55; rang IV, n° 49 à 53; rang V, n° 42 à 50; rang VI, n° 43 à 49.  Les Trappistes rachèteront des colons ou recevront de certains colons certaines terres : n° 43 à 48, rang IV, canton Pelletier, en novembre 1896; partie nord-est du n° 25, rang Mistassibi, en mai 1899; n° 5, 6, 12,15 et 16, rang X, canton Dolbeau, en 1900 et 1901; n° 46, 48 et 58, rang I, canton Pelletier; n° 46, 48 et 58vrang II; 48, rang III; 36, 37, 41 et 42, rang IV, du même canton, de 1902 à 1904.  Le nombre total de lots s’élevait donc à quatre-vingt-cinq; trente-neuf d’entre eux seront vendus par la suite aux colons et aux compagnies, et les quarante-six autres, d’une superficie de quatre mille six cent cinquante-quatre acres, resteront aux mains des Pères.

[63] CÔTÉ, André. «Le monastère de Mistassini : sa suppression ou sa formation en prieuré, 1900-1903», Sessions d’étude — Société canadienne d’histoire de l’Église catholique. Volume 40 (1973), pages 92-111.  Les Trappistes pousseront ainsi les villageois hors village jusqu’en 1924.

[64] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Fidèle, 20 janvier 1896.

[65] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame de Roberval, 28 juin 1897.

[66] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Chicoutimi Saguenay, Saint-Michel de Mistassini, microfilm, z000133664.  Et : BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 358, Joseph Harvey, 12 août 1944.

[67] CÔTÉ, André. L’ordre de Citeaux et son établissement dans la province de Québec, depuis la Révolution française jusqu’à 1935, op.cit., page 121.  Établit le 8 janvier 1893 le magasin général du monastère pour le service des colons d’une importance incontestable sera la source de mille difficultés et de frictions avec les colons.

[68] Archives de la Société historique du Saguenay, section «Mémoires d’un ancien», Napoléon Harvey, 13 juillet 1935.  Dans sa déclaration, Napoléon avance avoir travaillé à la construction du moulin.  Il devait y avoir fait des travaux additionnels, car le moulin était déjà construit à son arrivée en 1896. 

[69] Registre des mariages de Manchester au New Hampshire, 12 mai 1895. 

[70] Manchester, New Hampshire, City Directory, 1898.

[71] BAnQ., Registre de la mission Saint-Michel de Mistassini, 17 janvier 1897.

[72] MAGNAN, Hormisdas. Dictionnaire historique et géographique des paroisses, missions et municipalités de la Province de Québec. Arthabaska, Imprimerie d’’Arthabaska inc., 1925, page 585.  L’érection en municipalité a été décrétée le 26 décembre 1896; la municipalité était formée des rangs XIII, XIV, XV, XVI et XVII, canton Parent, de même que des cantons Pelletier, Dolbeau et Racine.

[73] CÔTÉ, André. L’ordre de Citeaux et son établissement dans la province de Québec, depuis la Révolution française jusqu’à 1935, op.cit., page 121-124. 

[74] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Chicoutimi Saguenay, Saint-Michel de Mistassini, microfilm, z000133658 et recensement de 1911, district de Chicoutimi Saguenay, la ville de Roberval, village de Roberval, microfilms, e002049957 et e002049958.

[75] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Michel de Mistassini, 24 août 1899.

[76] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul de Baie-des-Mille-Vaches, 1883, 1884, 1886, 1887, 1889, 1890, 1892 et 1894.

[77] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Michel de Mistassini, 1er février et 3 mars 1898.

[78] CÔTÉ, André, op.cit., page 104.

[79] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Chicoutimi Saguenay, Saint-Michel de Mistassini, microfilm, z000133664.

[80] B.A.C., G., Recensement de 1911, district de Chicoutimi Saguenay, Saint-Michel de Mistassini, microfilm, e002049714.

[81] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Chicoutimi Saguenay, Saint-Michel de Mistassini, microfilms, z000133658 à z000133678.

[82] ALEMANN, Ser Alexander.  Les 16 familles souches répertoriées et documentées de la Communauté Métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan Dans Familles souches métisses. Saguenay, éditions ville Saguenay, 2005, page 589.

[83] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Charles-Borromée de Pointe-Bleue, 15 avril 1901. Mariage de Philomène Philippe et Thomas Cleary.

[84] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Michel de Mistassini, 8 septembre 1903.

[85] B.A.C., G., Recensement de 1901, district de Chicoutimi Saguenay, Saint-Michel de Mistassini, microfilm, z000133667.

[86] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame de Roberval, 16 mai 1905.

[87] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Michel de Mistassini, 5 septembre 1905.

[88] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Michel de Mistassini, 21 octobre 1905.

[89] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Paul-du-Nord, 7 juin 1908.

[90] B.A.C., G., Recensement de 1901, district du lac Saint-Jean, village de Roberval, microfilm, z000133281.

[91] B.A.C., G., Recensement de 1911, district de Chicoutimi Saguenay, village de Saint-Michel de Mistassini, microfilm, e002049714 et recensement de 1921, district de Chicoutimi Saguenay, Saint-Michel de Mistassini, microfilm, e003067329.

[92] TREMBLAY, Clément. «La famille Harvey», La Souvenance. Volume 30, numéro 3 (hiver 2017), page 11. 

[93] BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 130. Et : BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Michel de Mistassini, 17 août 1916.

[94] BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 358, op.cit.

[95] TREMBLAY, Clément, op.cit. 

[96] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Michel de Mistassini, 3 mars 1917.

[97] Archives de la Société historique du Saguenay, section «Mémoires d’un ancien», Napoléon Harvey, 13 juillet 1935.  Dans un article publié dans la revue «» en 2017, l’auteur avance que l’aînée Marie était arrivée à Mistassini en 1895

[98] CÔTÉ, André, op.cit., page 92.

[99] On ne connaît pas l’année exacte où les enfants de Louis furent obligés de transporter leur maison à l’extérieur du village, mais en 1921, ils y étaient toujours.

[100] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Eugène, 2 février 1935.

[101] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Dominique de Jonquière, 19 janvier 1937.

[102] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Stanislas, 27 janvier 1940.

[103] BAnQC., Mémoires d’Anciens, No 130, op.cit.

[104] BAnQ., Registre de la mission Saint-Michel de Mistassini, 31 juillet 1893.

[105] BAnQ., Registre de la mission Saint-Michel de Mistassini, 13 août 1896.

[106] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Michel de Mistassini, 7 novembre 1918.  Le registre de 1918 comporte vingt-six décès contre quatorze en 1917, dix-neuf en 1919 et seize en 1920.  Il n’y a pas de preuve formelle du décès de Frédeline dû à la grippe espagnole.  Néanmoins, son nom apparaît au registre parmi une suite ininterrompue de dix-sept décès entre le sept octobre et le 7 novembre 1918.

[107] B.A.C., G., Recensement de 1921, district de Chicoutimi Saguenay, Sainte-Jeanne d’Arc, microfilm, e003066692.

[108] BAnQ., Registre de la mission Saint-Michel de Mistassini, 7 octobre 1896.