LE guide touristique du Médoc : Patrimoine du Médoc
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LE guide touristique du Médoc : Patrimoine du Médoc
Sauvegarde d'un texte paru dans Sud Ouest sous la plume de Cathy Lafon Publié le 24/05/2025 à 6h00.
SECRETS D’ARCHIVES - Pour le savoir, il faut remonter à l’Antiquité, sous la domination de l’Empire romain de Jules César… Le début d’une fabuleuse histoire
Documenté sous les formes de « Canali » en 1099, « La Canau » au XVIIe siècle, « Lacanau » en 1326, 1793 et 1801, le nom de Lacanau est issu du patois gascon « canau » (prononcer « canaou »). Un mot féminin qui désigne un petit canal de drainage, naturel ou artificiel facilitant l’écoulement des eaux dans les plaines peu pentues, comme le chenal qui reliait à l’océan cette zone de marécages situés sur le littoral atlantique, à l’abri du cordon dunaire.
Comme celle de Le Porge, sa voisine distante de 12 km, l’histoire de cette commune du Médoc bordée par un vaste étang commence vraiment à l’époque gallo-romaine. Les conquérants romains ne se sont occupés que de Burdigala. Ils ont aussi façonné la Gironde, laissant en Médoc des traces durables.
Au Ier siècle avant J.-C., Lacanau-Océan était bien loin de voir le jour et le port de Lacanau-Lac, une zone aujourd’hui composée de plusieurs hameaux (Talaris, le Moutchic, le Tedey, Longarisse, la Grande Escoure, et Carreyre), n’était qu’une modeste bourgade de huttes gauloises, situées à l’embouchure de la rivière de la Canau. Les Romains les remplaceront par de belles maisons de pierre. Un peu plus loin, à 13 km de là, ils construiront le temple qui donnera son nom à la commune située sur la « Levade », la voie romaine qui mène au bourg du Porge. Ce dernier toponyme vient du latin « Porticus de Bogio », soit la « Porte » ou le « Porche » du pays de Buch où s’était établi le peuple de Bogio à l’époque gallo-romaine.
La Canau étant un canal très profond, les bateaux de haut-bord s’aventuraient très loin dans les terres, jusqu’aux Andrauts. Au VIe siècle, le sable venu de l’océan envahit tout le littoral, dont les dunes mouvantes sont sculptées par le vent. Au fil des siècles, entre l’apport de sable et les eaux pluviales qui ne s’écoulent pas et forment des étangs, le territoire de la commune se modifiera constamment. Son bourg reculera vers l’intérieur des terres, tout comme celui du Porge.
Au Moyen-Âge, le château seigneurial construit à Talaris au XIe siècle, est déplacé et remplacé au XIIIe siècle par un autre édifice. En bois comme le précédent, mais plus solide. Comme Le Porge, Lacanau devint alors une étape des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle partant de Blaye et passant par Soulac, Sainte-Hélène-de-l’Etang et Carcans. Un troisième et dernier château construit au XVe siècle sera détruit qu’en 1806.
L’église actuelle de Lacanau-Ville, Saint-Vincent-de-Lacanau, était initialement située à 500 m à l’est de la rive actuelle du lac. La construction d’une digue ne suffisant pas à parer l’avancée des marais, elle est déplacée vers le milieu du XVIIIe siècle jusqu’à son emplacement définitif. Le Médoc ne compte plus alors qu’un seul étang longeant la côte océane, de Sainte-Hélène-de-l’Etang à Lège. À la même époque, l’historien et géographe bordelais Jacques Baurein, indique que la paroisse de Lacanau est appelée « Sanctus Vincentius de Canali ».
Au XIXe siècle, les grands travaux de boisement entrepris par Napoléon III pour fixer les dunes du littoral aquitain, joints aux travaux d’assainissements des marécages et à l’arrivée du chemin de fer, parti à la conquête de l’Atlantique, vont contribuer à l’essor rapide de Lacanau.
Entre 1854 et 1879, on creuse le canal reliant les étangs de Lacanau, du Porge et de Lège. En 1884, Pierre Ortal, propriétaire à Lacanau et chef de service aux Chemins de fer des Landes, fait connaître par écrit à la commune qui, comme toutes celles des Landes de Gascogne vit alors surtout de la culture des pins, de l’exploitation de la résine, de l’élevage ovin et de la pêche, son intention de créer une station balnéaire sur les dunes littorales de la commune. Ce sera Lacanau-Océan. Pour ce faire, il faudra prolonger la future ligne de Bordeaux-Saint-Louis, ouverte en 1885, jusqu’à Lacanau. À cette fin, Pierre Ortal et des notables argentés de la région bordelaise fondent en 1890 la Société immobilière de Lacanau et du chemin de fer de Lacanau à l’océan.
À l’aube du XXe siècle, des villas commencent à surgir des sables dunaires. Elles seront achevées pour la plupart en 1906-1907, notamment La Primavera, la villa du fondateur de la station, malheureusement détruite à la fin des années 1970. Mais d’autres ont survécu au temps, comme la villa Plaisance, aujourd’hui mairie annexe de Lacanau-Océan, et les villas Beau Site (1906), Cerbère (1907), Les Mouettes (1906), Yora (1909), Les Dunes (1913)…
La route reliant sur 13 km Lacanau-Ville à Lacanau-Océan est inaugurée en 1910. À la suite de quoi, le développement de l’automobile va contrarier l’avenir du train qui a pourtant permis la naissance de la station balnéaire. Le riche réseau de lignes de chemin de fer qui irriguent ce territoire du Médoc jusqu’au bassin d’Arcachon va, hélas, fermer à partir de 1949. À Lacanau, le train s’est arrêté en 1954 pour les voyageurs. Il roulait encore pour les marchandises (essentiellement le bois) dans les années 60, avant d’être définitivement abandonné en 1978.
On peut le regretter aujourd’hui, à l’heure de la transition écologique et alors que l’on peste quotidiennement contre les bouchons sur la rocade de Bordeaux, les embouteillages autour du bassin d’Arcachon et l’enfer pour rejoindre les plages. Mais la suppression du train n’a pas empêché Lacanau de se développer considérablement dans les années 1960-1970, dans le cadre de l’aménagement de la côte Aquitaine qui verra la bétonisation de son front de mer.
Pistes cyclables construites sur les anciennes voies ferrées, casino, campings, golf, surf… Devenue active en toutes saisons, la station balnéaire qui a célébré son centenaire en 2006 a poursuivi son essor touristique, mais pas seulement. Malgré les interventions humaines lancées dès le XIXe siècle, l’érosion côtière, phénomène ancien, se poursuit toutefois parallèlement elle aussi, à Lacanau, comme sur tout le littoral.
Durant l’hiver 2013-2014, sous le coup des tempêtes à répétition conjuguées aux grandes marées, son front de mer a essuyé un fort recul, malgré les protections anti-érosion. Depuis, d’importants travaux d’empierrement et de restructuration des accès aux plages lui ont redonné son attrait, mais pour la station balnéaire, la question de l’adaptation au recul du trait de côte n’a pas fini de se poser.
Dix ans après les tempêtes de 2014, Lacanau a commencé à « débétonniser » symboliquement une partie de son front de mer pour « laisser la place à l’érosion » et elle prévoit de supprimer ses postes de secours et ses parkings du front de mer à l’horizon 2026