la forêt de pins en Aquitaine


 Un peu d’histoire :

 le pin, apparu naturellement voilà 9000 ans est actuellement cultivé comme de la vigne, du blé ou du maïs. Que deviendrait ce massif sans les sylviculteurs ?

En 1840, Théophile Gautier parlait d’un « Sahara français, poudré de sable ».

 En 1879, Jules Vernes y voyait encore un désert, « une succession de vastes plaines, les unes absolument nues, les autres tapissées de bruyères et d’ajoncs ».

 La forêt de pins est bien de création récente. Respectons la. Protégeons-la.

Le Pin des Landes

On ne voit en passant par les Landes désertes, 

Vrai Sahara français, poudré de sable blanc, 

Surgir de l’herbe sèche et des flaques d’eaux vertes 

D’autre arbre que le pin avec sa plaie au flanc ; 

Car, pour lui dérober ses larmes de résine, 

L’homme, avare bourreau de la création, 

Qui ne vit qu’aux dépens de ceux qu’il assassine, 

Dans son tronc douloureux ouvre un large sillon ! 

Sans regretter son sang qui coule goutte à goutte, 

Le pin verse son baume et sa sève qui bout 

Et se tient toujours droit sur le bord de la route, 

Comme un soldat blessé qui veut mourir debout. 

Le poète est ainsi dans les Landes du monde ; 

Lorsqu’il est sans blessure, il garde son trésor . 

Il fait qu’il ait au cœur une entaille profonde 

Pour épancher ses vers, divines larmes d’or ! 

Théophile Gautier (1840) 


Le pin maritime c’est toute une histoire

On connaît mieux, aujourd’hui, l’histoire mouvementée de la mise en valeur de cette contrée inhospitalière, terreur des pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle. Les brillants ingénieurs qu’étaient Brémontier (pour la dune) et Chambrelent (pour la lande) surent devenir les catalyseurs d’une œuvre colossale. En l’espace d’un siècle, elle fit passer la surface de la forêt landaise de 100 000 à près de 900 000 hectares.

Chambrelent ne parvint à convaincre son administration du bien-fondé de sa théorie (l’assainissement avant le boisement) qu’en l’expérimentant sur une propriété acquise sur ses deniers à Pierroton (Gironde). L’effet démonstratif fut décisif puisque le 19 juin 1857, l’état promulgua la fameuse loi sur l’assainissement et le boisement des landes communales. Et la tendance au reboisement gagna les propriétaires landais, qui s’adaptaient au déclin avéré de l’activité pastorale.

La revalorisation brutale des cours de la gemme, au moment de la guerre de Sécession, explique en partie que la forêt landaise se soit constituée pour produire d’abord de la résine. En 1926, le conservateur des Eaux et Forêts, Buffault, écrit : « le Sud-Ouest produit à lui seul la moitié de la production de la France en bois résineux. La production annuelle de la gemme est de 120 millions de litres, plus de la moitié de cette production est exportée. »

La crise de 1929, puis la guerre, ont entraîné une certaine désaffection pour la forêt, et surtout un exode rural. De 1930 à 1949, année terrible, le feu dévora près de 400 000 hectares, dont 131 000 en 1949. On a peine à imaginer l’ampleur de la catastrophe, mais là encore, les Landais réagissent et s’adaptent. Ils mettent au point un système de défense contre l’incendie (DFCI), impliquant fortement les sylviculteurs dans la prévention. La lande est quadrillée de milliers de kilomètres de fossés, pistes et pare-feu. Dès lors, le reboisement s’intensifie, et en 1960, le massif est reconstitué avec près d’un million d’hectares […]

Didier Ters ( Sud-Ouest 31/03/1994)

 

les coupes

 

A quoi servent les coupes ? Françoise Decaix, ingénieur à l'ONF apporte des réponses : la croissance des arbres en hauteur est forte dans le jeune âge, puis se stabilise. En revanche, la croissance en diamètre se poursuit tout au long de la vie de l'arbre, elle est très liée à la densité des tiges. Plus les arbres sont serrés, plus la croissance en diamètre sera difficile et lente. S'il y a trop de tiges, les plus vigoureuses étouffent les autres, qui finissent par mourir. Les arbres, lorsqu'ils deviennent vieux ne font plus de fleurs, et donc, plus de graines. Oui, les arbres fleurissent : ce sont les chatons par exemple ou les "bougies" et les cônes du pin maritime. Les arbres arrivés en fin de vie dépérissent puis meurent."

 

Une gestion " démographique ". Deux objectifs essentiels conduisent à établir des plans de coupe. Il y a d'abord l'éclaircissage, qui permet de maîtriser la densité, afin que ceux qui restent disposent de davantage d'espace pour poursuivre leur croissance. Ainsi pour le pin maritime on fait le plus souvent quatre éclaircies espacées de cinq à dix ans. L'autre préoccupation est l'anticipation de la régénération de la forêt. Pour cela, on ne laisse qu'un certain nombre d'arbres espacés au moins de 10 mètres, afin que les branches et les feuilles bénéficient d'un ensoleillement maximum favorisant ainsi le fleurissement et la production de graines. Lesquelles tombent au sol, et, si tout va bien, donnent naissance à des semis ou petits arbres. Ces derniers ont eux aussi besoin de lumière, il faut alors enlever les vieux arbres parents. Cette régénération est dite naturelle. Parfois pour améliorer l'espèce ou substituer des essences, on procède à une coupe rase, c'est-à-dire que l'on enlève tous les vieux arbres d'un coup. Ensuite, on introduit artificiellement soit des graines, soit des plans. Selon Françoise Decaix " une forêt peut vivre sans coupe, mais les trouées s'établissent alors spontanément au gré des coups de vent, des incendies ou des mortalités dues à des insectes ou des champignons, la lumière entraînent des peuplements sauvages, et ces zones sont souvent difficilement pénétrables ".

 

Pierre Vallade (Sud-Ouest 2 août 2005) extraits

  

La fixation des dunes (Brémontier)

L’ingénieur des Ponts et Chaussées Brémontier met au point, à partir de 1788, le projet de fixation des dunes envisagé dès le Moyen Age.

Il construit d’abord une digue destinée à arrêter le cheminement des sables au point de départ.

A environ 70 m de la ligne atteinte par les plus hautes mers, il dispose une palissade de madriers contre laquelle le sable s’accumule. Relevant les madriers à mesure que le sable monte, il crée une dune littorale de 10 à 12 m de haut, formant barrière. Le sable de la surface est fixé par les semis de gourbet, dont l’épais lacis de racines s’étend rapidement.

Brémontier s’attaque ensuite au problème de la fixation des dunes intérieures. Des graines de pin maritime, mélangées à des graines d’ajonc et de genêt sont semées sous une couverture de fagots de branchages qui maintiennent provisoirement les sables. Au bout de 4 ans, le genêt atteint près de 2 m de hauteur. Le pin, d’une croissance plus lente, grandit ainsi protégé et distance bientôt les autres plantes qui, en pourrissant, apportent des éléments organiques fertilisants ;

En 1867, le travail est pratiquement terminé : 3 000 ha de dunes littorales sont couverts de gourbet, 80 000 ha de dunes intérieures sont plantés de pins.

source : Michelin

  

L’assainissement de l’intérieur (Chambrelent)

Au début du XIXème siècle, la plaine intérieure reste mal drainée, et rebelle à toute tentative de colonisation agricole. Les autorités étudient tous les palliatifs imaginables. C’est finalement sous le Second Empire que l’ingénieur Chambrelent met au point la solution décisive.

Après avoir eu l’idée de défoncer la couche d’alios, il établit un plan de drainage, de défrichement et d’ensemencement forestier. Les résultats obtenus justifient la plantation en grand de pins maritimes, de chênes-lièges et chênes verts.

source : Michelin