La Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine

La Gaspésie

Située à l’extrême Est-du-Québec, cette région maritime est une péninsule et des îles dont l’économie reposait majoritairement sur la pêche dans les deux cas et la foresterie pour la Gaspésie.

Les Harvey descendants de Sébastien Hervet (1642-1714) n’y ont pas été nombreux.  De fait, la région comptait des Harvey d’origines britanniques bien avant que le premier des nôtres n’y mette les pieds.  La couronne britannique y avait concédé des terres aux loyalistes venus des États-Unis qui avaient trouvé refuge au nord de la frontière lors de la révolution américaine.  Même si les recensements de 1825 et 1831 n’en donnent aucun dans la péninsule gaspésienne, on sait que, au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, la famille presbytérienne de George Harvey s’est établie à New Richmond.  Une autre famille, celle d’Arthur Harvey, sera à Douglastown dès 1865.  Douglastown est l’un des premiers villages gaspésiens constitués pour accueillir les loyalistes dès 1775[1].

Michel Harvey à Saint-Pierre de Malbaie en Gaspésie

Le premier descendant du migrant français à s’établir en Gaspésie est sans doute Michel Harvey.  Il est né le 9 septembre 1847 en Chaudière-Appalaches et baptisé deux jours plus tard à l’église Notre-Dame de Bonsecours de L’Islet dans le fief et la seigneurie de Bonsecours[2]Il est le fils d’Étienne Hervé (1811-1889) et de Constance Bélanger (1815-1886).  Michel a comme généalogie patrilinéaire Sébastien Hervé (1767-1834) à Dominique Hervé (1736-1812) à Sébastien Hervé (1695-1759) chez le migrant.

En 1855, peu de temps après l’abolition du régime seigneurial au Québec, la municipalité de Notre-Dame-de-Bonsecours est constituée sur les territoires des anciennes seigneuries de L’Islet Saint-Jean et de Bonsecours, là où Michel a grandi.  Le passage de l’énumérateur en 1861 sera la dernière apparition de Michel en Chaudière-AppalachesÀ quatorze ans, il vit toujours chez ses parents avec un frère et deux sœurs, mais ce n’est plus pour très longtemps.  Son père est journalier.  Si ce que l’on a déclaré à l’énumérateur est véridique, Michel ne travaille pas et ne va pas à l’école[3].  

La famille vit difficilement.  Sa mère éprouve des problèmes mentaux de même que l’une de ses sœurs.  Lui et son frère cadet Joseph (1851-1928) auront quitté la maison avant le tournant de la décennie.  Son frère partira travailler dans une manufacture de la Nouvelle-Angleterre dès février 1868 devenant ainsi le premier Harvey à participer à l’exode des nôtres vers les États-Unis.  On peut présumer que Michel, de quatre ans plus âgé que son frère, a quitté le nid familial depuis belle lurette.

On retrouve Michel en Gaspésie à la Pointe-Saint-Pierre au début de 1871.  Il y est depuis un certain temps.  À l’époque, des Charlevoisiens et des gens de la Côte-du-Sud se dirigeaient vers le golfe du Saint-Laurent pour travailler dans les pêcheries.  Des compagnies comme la Robin et d’autres entreprises anglo-normandes embauchaient des pêcheurs et des graviers[4] pour leurs activités de pêcherie[5].  C’est une goélette qui aura conduit Michel dans ce secteur de pêche.  Lorsqu’il débarque dans cette baie du golfe, Michel sera d’abord journalier pour un certain temps pour des membres de la communauté jersiaise qui, à cette époque, domine l’industrie de la pêche dans la région.

À l’arrivée de Michel dans la baie de Malbaie, l’endroit a toujours une certaine importance dans la pêche commerciale de la région, grâce à son havre naturel et à sa grève de galets propices au séchage de la morue. La baie de Malbaie est privilégiée, car elle est particulièrement riche en petits poissons de toutes sortes dont est friande la morue. Trois rivières s’y déversent formant un barachois à la rencontre de l’eau douce et de l’eau de mer.  L’endroit se reconnaît par son banc de sable abritant le marais salé.  Plus de quatre cents hommes y prennent la mer chaque jour sur près de deux cent cinquante embarcations[6].  Les prises sont bonnes et Michel y voit un endroit où se tailler un avenir puisque l’emploi ne manquera pas. 

C’est vers la fin de la décennie 1860 que Michel courtise Marie Rail.  Le premier Rail à mettre les pieds au pays fut Julien Rehel (1715-1774).  Arrivé de France un peu avant 1743 et établi à Saint-Roch-des-Aulnaies il s’était épris d’une autochtone avec qui il avait eu un enfant.  Bien que Michel et sa famille aient également habité Saint-Roch-des-Aulnaies, Julien Rehel quittera l’endroit pour le Bas-Saint-Laurent bien avant que les Hervé ne débarquent dans ce village de Chaudière-Appalaches.   La présence de l’ancêtre Rehel à Saint-Roch n’a donc rien à voir avec la relation qu’entretiennent Michel et Marie





Michel épouse Marie Rail le 21 janvier 1871 dans la petite église du village de Saint-Pierre de Malbaie en Gaspésie.     Saint-Pierre de Malbaie est situé à vingt-cinq kilomètres derrière Percé, le chef-lieu, en allant vers Gaspé.  Il est l’un des nombreux villages de pêche de cette côte et partage la baie avec Pointe-Saint-Pierre et Grande-Grève.   À une telle distance de chez lui, son témoin est un confrère de travail alors que la sœur de la mariée agit comme telle pour Marie (1847-1877).  Les deux époux ont tous deux vingt-trois ans.  La mère de la mariée est décédée en 1857; son père se remarie peu de temps par la suite.  Le père, Pierre Rehel dit Rail (1823-1874) pêcheur du lieu, n’assiste pas à la cérémonie[7].

Vingt-neuf semaines plus tard naît le premier enfant du couple.  On pourrait penser avoir trouvé ici le motif de l’absence du père à la cérémonie.  Cela est peu probable, car Marie Rail elle-même était née six mois après le mariage de ses parents.

« Michel Harver » fils, né le 16 août, sera baptisé trois semaines plus tard.  Parrain et marraine « ... ainsi que le père n’ont pu signer » [8].  On a ici la confirmation que Michel n’a jamais fréquenté l’école.

La famille vivra du fruit de la pêche.  Le 6 novembre 1877, six ans après son premier accouchement, Marie Rail met au monde un second fils.  Elle ne se relèvera cependant pas de ce dernier accouchement.  L’enfant est baptisé le 12 novembre et portera le nom de « Pierre Harvey »Michel est absent lors de la cérémonie du baptême.  Il est vraisemblablement auprès de Marie qui agonise et succombera la même journée[9].

Déjà en 1881, Michel n’est plus au Québec.  Peut-être est-il parti rejoindre Joseph, son frère cadet, qui vit à Salem au Massachusetts avec sa nouvelle épouse et travaille comme réparateur de métiers à tisser dans une importante filature.  Il est probable qu’il est franchi la frontière bien que l’on n’en trouve aucune trace.  Sa dernière apparition dans les registres civils ou religieux du pays fut inscrite lors de l’inhumation de sa femme.   Il en est de même pour ses deux fils.  S’il les a donnés en adoption, ce n’est à aucun des parents de sa défunte femme.  

Une Hervé à Cap-Chat

À la fin de sa vie, Marie Scholastique Hervé (1799-1881) à Joseph Sébastien Hervé chez Dominique Hervé, ira vivre à Cap-Chat en Haute-Gaspésie.   Elle est l’une des tantes de Michel Harvey de Saint-Pierre de Malbaie mentionné plus haut.

C’est ainsi que s’achève la brève histoire des Harvey descendants de Sébastien Hervet en Gaspésie.  D’autres viendront, mais ce sera au vingtième siècle[10].

Les îles de la Madeleine

Aucun descendant de Sébastien Hervet n’a foulé le sol des îles pour aller y vivre.  Cependant, c’est à cet endroit que l’histoire des Hervy/Harvey a débuté après qu’ils eurent quitté les îles françaises de Saint-Pierre et Miquelon.  Voir le chapitre consacré aux :


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[1] B.A.C., G., Recensements du Canada : la Gaspésie n’a pas été recensée en 1842 et les documents du recensement de 1851 pour cette région n’ont pas survécu.

[2] BAnQ., Registre de la paroisse Notre-Dame de Bonsecours de L’Islet, 11 septembre 1847.

[3] B.A.C., G., Recensement de 1861, district du comté de L’Islet, sous-district de la paroisse de L’Islet, page 93-69.  Le recensement a débuté officiellement le 14 janvier 1861.

[4] Au Québec ce mot signifiait un homme qui retourne la morue sur la grève ou sur les vigneaux.

[5] DESJARDINS, Marc, Yves FRENETTE, Jules BÉLANGER et Bernard HÉTU, Histoire de la Gaspésie. Sainte-Foy, Les Éditions de l’IQRC, collection «Les pays du Québec», no 1, 1999, pages 167.

[6] University of Saskatchewan, Canadian Historical Geographic Information System, St. Pierre de la Malbaie – 1881.

[7] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de La Malbaie, 21 janvier 1871.

[8] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de Malbaie, Barachois, 8 septembre 1871.

[9] BAnQ., Registre de la paroisse Saint-Pierre de Malbaie, Barachois, 14 novembre 1877.

[10] Plusieurs Harvey s’établiront dans la vallée de la Matapédia et dans la région de Matane.  Ces endroits furent longtemps considérés comme partie de la Gaspésie.  Aujourd’hui, les divisions administratives du Québec les places au Bas-Saint-Laurent.  Voir cette section pour accéder aux récits des Harvey qui s’y sont établis un peu avant 1850.