Aucune des données archéologiques ou historiques connues actuellement ne décrit avec précision l’aspect du château médiéval de Clères. Ce que l’on sait, c’est que dès le XIXe siècle, une charte de donation conservée aux archives départementales de la Seine-Maritime, mentionne Roger, baron de Clères en 1034. Il semble déjà être propriétaire d’un important domaine puisqu’il fait don d’une église et de terres sur le territoire de Blainville, emplacement où sera d’ailleurs construit le château dont les ruines sont encore visibles actuellement.
Sur cette charte, Roger de Clères semble affilié à Osbern de Cailly puisqu’il est surnommé fitz Osbern. On sait également que Roger était vassal des seigneurs de Tosny (Conches-en-Ouche (27)) et qu’il a dû intervenir lors d’affrontements entre les Tosny et leur voisin Onfroy de Veuille. Par vengeance, Roger tuera Robert le fils cadet d’Onfroy et frère de Roger de Beaumont (qui donnera son nom à Beaumont-le-Roger).
Le château de Clères devait alors être un château à motte comme de nombreux châteaux en Normandie à cette époque. Il s’agit d’un monticule de terre surmonté d’une tour et d’une palissade, le tout cerné de fossés. Cette motte était souvent adjacente à une cour elle-même entourée d’un système de talus et fossés.
Quelques éléments architecturaux apportent toutefois la preuve d’une reconstruction en pierres. En effet, d’après l’abbé Cochet, archéologue et préhistorien normand, les caves situées sous le château à voûte en berceau dateraient du XIIIe siècle. Une transformation de nombreux châteaux normands en pierre devient la règle à partir d’Henri 1er Beauclerc (roi d’Angleterre et duc de Normandie - 1100-1135). Le successeur de Guillaume le Conquérant cherche à jalonner son territoire de puissants châteaux pour faire front face aux Français.
La cour du château de Clères est jusqu’en 1860 entourée de fossés et de bâtiments. C’est le comte de Béarn qui, héritant du domaine, décide de restaurer l’ensemble, de démolir les bâtiments communs qui clôturent la cour vers le sud et de combler les fossés. Un travail titanesque qui donne forme au parc que l’on connaît aujourd’hui. Pour passer les fossés, trois entrées protégées existaient dont deux ponts levis dont les traces sont encore présentes dans la façade du corps de logis et de la cohue.
Ce que l’on appelle la cohue est un édifice en silex et grès de forme quadrangulaire très massif rappelant certains bâtiments médiévaux. Une étude dendrochronologique* réalisée en décembre 2020 date les bois de la charpente de l’automne-hiver 1502-1503, il s’agirait là d’une restauration de l’édifice. La « cohue » a dû remplacer la vieille fortification abandonnée peu à peu. Il est dit que l’on y rendait la justice. Les fenêtres y ont été percées à partir du 16e siècle.
* La dendrochronologie est la datation des bois en analysant les anneaux de croissance des arbres.
Les seigneurs de Clères (Hippolyte Lemarchand - 1901)