Le parc

Projet d'aménagement du parc tenant compte du futur percement des chemins départementaux vers Montville et Pavilly

Projet de E. Brusigny, paysagiste

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Le parc de 13 hectares qui entoure le château de Clères est imaginé par Edouard Busigny à la demande d’Hector de Béarn dans les années 1860. Autrefois les abords de la bâtisse ne sont que bois et prés destinés à l’exploitation agricole.  De Béarn choisit de les transformer en un lieu d’agrément dédié à la promenade dans le style des parcs à l’anglaise. On aime à penser qu’il le fait pour sa jeune épouse Marguerite de Choiseul-Praslin, de vingt ans sa cadette. 

Pour ce faire, il faut arracher, niveler, creuser et planter. La tâche est confiée à Busigny, un jardinier qui opère souvent avec Henri Parent, l’architecte chargé de la restauration du domaine. Le dessin du parc s’inspire des grands parcs à l’anglaise à l’instar de Stourhead en Angleterre ou du Désert de Retz à Chambourcy. On y retrouve des petites fabriques comme ce petit reposoir en brique surplombé par un hêtre près de la route de Sierville, ou les quelques pierres abandonnées près de La Clérette pour laisser imaginer au promeneur qu’il découvre une ruine antique.

Le lac est creusé à cette époque. Il est légèrement agrandi par la suite. Certains arbres plantés alors sont encore visibles aujourd’hui, comme le séquoia géant à l’entrée du parc, ou le thuya marcotté surplombant le lac et classé « arbre remarquable ». La route de Montville, qui passait autrefois quasiment au pied du château, est repoussée à sa situation actuelle pour donner de l’espace devant l’édifice. La Clérette est détournée pour alimenter le lac. 

Le plan du parc existant aujourd’hui n’a que très peu changé. Quelques modifications, qui sont toutefois majeures,  ont été apportées lors de l’achat par Jean Delacour en 1919. Le naturaliste acquiert le domaine avec pour objectif la création d’un parc où les animaux vivraient en liberté. Aussi fait-il appel à Henry Avray Tipping, architecte paysagiste anglais de la mouvance Arts and Crafts. Ce courant artistique international a connu son essor entre 1880 et 1920 en réaction à l'appauvrissement des arts décoratifs de l’époque en occident, et aux conditions de productions avec l'accélération de l’industrialisation. Le style Arts and Crafts valorise le travail artisanal traditionnel, tout en utilisant des décorations inspirées des styles médiévaux, romantiques ou folkloriques. Dans les jardins, cela se traduit par un travail autour des allées, du choix du dallage, de l’installation de sculptures, de topiaires, de haies, de murs, de bassins ou de marches. 

A Clères, Tipping va créer une terrasse au pied du château avec des plates-bandes de vivaces (mixed borders) un calepinage de dalles de ciment  des haies d’ifs, des topiaires (à l’époque des oiseaux) et un mur de séparation. Il ajoute un bassin octogonal situé au milieu d’une vaste pelouse. Sur les murs du château, il fait grimper des plantes (chèvrefeuille, actinidia, kiwi, glycine) qui donnent à l’édifice cette impression de jaillir de la verdure. 

Le travail de plantation de haies permet de cacher des clôtures pour éviter le passage de certains animaux. La partie « grand parc » permet alors d’accueillir antilopes, bernaches, wallabies et flamants roses en toute sécurité. Tipping va également travailler sur la végétalisation des volières et la création de petits jardins pour les animaux. 

Jean Delacour, voyageur infatigable, va sans cesse tenter d’acclimater, outre les animaux,  de nombreuses espèces végétales dans le parc. L’exemple le plus réussi est le gunnera. Cette rhubarbe du Brésil est plantée par Jean Delacour après son voyage en Amérique du Sud dans les années 1920. Elle s’acclimate très vite au climat normand (en la protégeant des froidures de l’hiver). Il en offrira un pied à la princesse Sturdza pour son jardin de Vasterival. Les témoignages de personnes ayant travaillé avec Delacour évoquent les nombreux végétaux reçus en cadeau par le naturaliste, et qu’il faut alors planter dans le parc. Parfois cela fonctionne… et parfois non. 

Pendant la seconde guerre mondiale, le parc est touché par quelques bombes mais il n’est pas dévasté. Contrairement aux animaux qui ont tous disparu. La réouverture a lieu en 1947. 

Le parc est un site classé depuis 1987 pour son caractère paysagé et pittoresque. L’objectif est donc d’en conserver son aspect et sa valeur patrimoniale. En 2020, des études sont menées afin de définir le projet de replantation et faciliter l’accessibilité du site.