Après l’armistice de 1918, un comité de 10 personnes, présidé par M. Canville, maire, lance une souscription pour l’érection d’un monument aux morts. Ce sera un monument très simple, avec une colonne coiffée d’une croix, ce qui est rare car le monument ne devait pas comporter de signes religieux. Celui-ci est inauguré le 2 mai 1920, comme le relate cet article du journal de Rouen daté du 7 mai 1920 : “Une imposante manifestation s'est déroulée dimanche dernier, jour de l'inauguration du monument aux soldats de la commune, morts pour la patrie. Après réception de démobilisés à la mairie, ceux-ci se sont rendus en cortège au service funèbre célébré dans l'église de Grugny par le desservant, l'abbé Fontaine, combattant blessé de la grande guerre.
A 3 h. 1/2, après les vêpres, a eu lieu la bénédiction du monument du cimetière qu'une foule nombreuse accourue des environs avait envahi. Autour de la stèle surmontée d'une colonne ornée de drapeaux tricolores s'étaient rangés les enfants de l'école.
Dans l'assistance, auprès de la municipalité, MM. G. Cavé, juge de paix, Basuyau, percepteur; G. Lesauvage, directeur de l'asile départemental; Blondel, accompagnaient M. Depinay, maire de la Houssaye-Béranger. ainsi que de nombreux maires et conseillers municipaux des communes environnantes.
Après l'exécution de l'Hymne aux Morts par les enfants de l'école, sous la direction de leur institutrice dévouée, Mlle Schutzmann, M. Canville, maire, a ouvert la série des discours en citant les noms des soldats décédés, en remerciant les souscripteurs, les donateurs et tous ceux qui avaient contribué à donner plus d'éclat à la cérémonie.
Pour terminer, le poète Ed. Spalikowski, au nom des démobilisés, en des strophes de large envergure, a salué les fils de la terre normande tombés pour sauver leur petite patrie.
Après la distribution de diplômes aux familles des disparus, un vin d'honneur servi à la mairie, offert aux démobilisés et aux enfants de l'école a clôturé cette belle journée”.
Lu à la cérémonie de la bénédiction des combattants (UNC)
Sur ce champ de douleur, de silence et de brume
Où chaque an nous venons, par pieuse coutume
De nos pas, de nos voix éveiller nos chers morts,
Nous dressons aujourd’hui pour qu’ils le voient encore
Le drapeau du pays, sous lequel ils tombèrent,
Plus éclatant, plus neuf qu’aux grands soirs de la guerre,
Mais qui garde en ses plis, l’éternel souvenir
D’un long passé d’horreur, qui ne saurait vieillir.
Levez-vous compagnons, dans vos capotes grises
Pour saluer ici, sous le fouet de la bise,
Avec nous les vivants, nos fières trois couleurs
Emaillant en bouquet, vos tombes de leurs fleurs.
Comme recouvre un nid un rameau d’aubépine
C’est bien votre pays qui sur vos fronts s’incline
En cette riche étoffe, où l’or de ce drapeau
Rappelle ce qui fut à la fois noble et beau.
C’est le bleu de la hampe, azur du ciel de France
Qui souriait très doux, aux jeux de votre enfance,
C’est le blanc virginal des coiffes des pommiers
Quand des frissons de mai tressaillent les halliers,
C’est le rouge des soirs, où le vent qui se lève
Apporte du lointain des forêts et des grèves,
Les bruits de la légende et les récits des vieux
Qui chantent près du feu les héros et les dieux.
A l’ombre de ses flancs, nous cherchons l’espérance
D’un avenir meilleur, sans pleurs et sans souffrance,
Où les efforts des bras seront ceux du travail
Où les peuples d’Europe auront même bercail.
Dites nous, morts héros, du fond de cette plaine
Qu’ils surgiront demain, ces siècles plus cléments
Où les hommes enfin, des jours exempts de haine
Verront monter l’aurore aux yeux de leurs enfants.
11 novembre 1922
Edmond Spalikowski
Sur le monument, on peut lire les noms des 13 victimes de la guerre de 1914-18 et 2 de la 2ème guerre mondiale.
Pour en savoir plus :
Grugny - Le monument aux morts- dans le fonds Patrice Bizet
Le village de Grugny autrefois - Daniel Fauvel - Véronique Lézé - Wooz édition