Guy Bourdin (1928-1991) photographe français, né Guy Louis Banarès à Paris. Il est abandonné par sa mère un an après sa naissance et adopté par Maurice Désiré Bourdin, qui s'occupe de son éducation.

    • De 1948 à 1949, lors de son service militaire, il suit une formation de photographe dans l'armée de l'air au Sénégal, à Dakar.

    • De 1950 à 1953, de retour à la vie civile, travaille comme vendeur, reprophotographe, et coursier pour l’ambassade des États Unis à Paris. Parallèlement il intensifie son travail sur le dessin et la peinture. Il les expose pour la première fois dans une galerie parisienne. Il fait la connaissance du couturier Jacques Fath et de la peintre Leonor Fini.

    • En 1951, il rencontre le peintre et photographe Man Ray pour lequel il travaille en tant qu’assistant. Sous l’influence d’Edward Weston, il réalise ses premières photographies personnelles.

    • En 1952, à la galerie 29, rue de Seine à Paris, Guy Bourdin réalise sa première exposition photographique, avec son catalogue préfacé par son ami Man Ray. En 1953 et 1954, il expose de nouveau ses photographies ainsi que ses dessins sous le pseudonyme d'Edwin Hallan.

    • Au début de sa carrière, il est très vite encouragé par Michel de Brunhoff, rédacteur en chef de « Vogue France ». Ses premières photos sont publiées dans le numéro de février 1955 de la revue, sous la direction d’Edmonde Charles-Roux, frappée de suite par les images qu’il lui présente.

    • « Il avait l'air d'un écolier, et ses clichés d’hommes et des femmes nus, montrant seulement leur dos ou leur postérieur à l’appareil. Le sujet choisi était loin de ce qui aurait pu intéresser Vogue, mais la qualité du travail était exceptionnelle. » Edmonde Charles-Roux

    • Touchée par le talent du jeune homme, il est embauché et devient rapidement photographe attitré de « Vogue », avec lequel il collabore pendant 30 ans, jusqu'en 1987.

    • Il effectue sa première série de photographies pour les chapeaux Balenciaga, dont l’une d’elles présente un chapeau de la marque avec un petit voile, sur le visage du modèle une mouche morte apparaissant bien vivante. Il réalise d'autres images prises dans une boucherie, son modèle au chapeau posant devant des têtes de veaux avec leur langue pendante.

    • En 1961, il épouse Solange Gèze et ont un fils, Samuel né en 1967. En 1967, il débute sa première campagne publicitaire pour le chausseur Charles Jourdan, qui le fait connaître du grand public, une collaboration avec la marque qui dure presque 15 ans, jusqu’en 1981. Il devient l’un des photographes les plus reconnus dans le milieu de la mode et de la publicité. En parallèle, il collabore au sein du magazine « Harper's Bazaar » et ses photos sont publiées dans le tout jeune magazine « Photo ». En dehors du milieu de la mode et de la publicité, il réalise aussi des paysages en noir et blanc dans les années 1950 ainsi que des paysages urbains en couleurs dans les années 1970.

    • En 1972 il travaille pour la version du « Vogue Italia » et en 1974 de celui du « Vogue Anglais ». Il signe également des publications régulières pour « Marie-Claire, ou encore « Biba », continue sa collaboration avec le chasseur Chrales Jourdan, réalise de nombreuses campagnes publicitaires pour Gianfranco Ferré, Claude Montanta et Chanel.

    • En 1985, il refuse le grand prix national de la Photographie qui lui est attribué par le ministre de la culture, prix qu’il trouve totalement inutile. En revanche en 1988, il accepte avec le parrainage de la photographe Annie Leibovitz, l’ « Infinity Award » décerné par l' « International Center of Photography » de New-York, pour sa campagne publicitaire de 1987 pour la marque Chanel.

    • En 2003, le « Victoria & Albert Museum » de Londres lui consacre une grande exposition rétrospective. La même année, la chanteuse Madonna, grande admiratrice du photographe reprend plusieurs de ses photographies pour son clip « Hollywood ».


Élevé à la fin des 40’s par ses grands-parents, propriétaire de la « Brasserie Bourdin », le jeune photographe voit passer des clientes et des plats dans une sorte d’opéra-bouffe qu’il croque sur des nappes en papier. Très tôt, il se réfugie de l’autre côté du miroir sans tain dans les pas ensorceleurs d’Alice au pays des merveilles. Et très rapidement ce grand voyeur et fétichiste de génie va jusqu’à frotter la viande sur les cuisses ou dans la bouche d’un mannequin. Il profite du magazine Vogue pour faire une sorte de thérapie personnelle, de révéler toutes ses obsessions qu’il peut rendre possibles par son métier.

« La beauté attire les mouches comme une charogne. » Guy Bourdin

Au début des années 50, il effectue des photographies pour Vogue, plaçant les top-modèles, au milieu de têtes de veau, d’un plat de choucroute ou encore de cornets de glaces. Il passe des heures sur le détail d’une image et ne souhaite pas que ses photos soient conservées dans une simple boîte à chaussures.

Guy Bourdin ne se souci guère de son aura, encore moins de son héritage et vit dans l’anonymat le plus complet. Il est considéré avec Helmut Newton, un rénovateur de la publicité de mode, et avec un travail qui colle au mouvement surréaliste. Digne héritier de Man Ray, dont il est l’assistant et ami au début des années 50, il adore la perfection, sa vision est de mêler rêve et réalité. L’extrême sensualité de ses images mêlée aux mises en scène surréalistes révolutionne le domaine de la photographie de mode, dans les années 60-70.

Le surréalisme depuis le début de sa carrière est son mot d’ordre, il partage une certaine ironie et un sens du paradoxe, de l’absurde, ses modèles sont des objets pop, réduits en morceaux par une fantaisie aiguë, ainsi qu’une prédilection pour les détails dans un ensemble parfaitement orchestré, il adopte le goût d’une sensualité entre glamour et érotisme.

Il est au coté d’Helmut Newton, un véritable dictateur artistique, la femme est puissante, elle marche vers l’appareil, en fixant l’objectif comme pour le défier du regard, elle sourit peu, mais le fait de façon sardonique, ses modèles sont jeunes et espiègles comme des poupées mécaniques prenant toutes les positions imposées par le photographe, avec des maquillages omniprésent et des rouge à lèvres frappant, qui leur donne une apparence de jouets parfaitement peints qu'il transforme en pastiche de la mode.

« Je m'efforce de laisser cette chose imperceptible qu'est l'objectif agir indépendamment lorsqu'il se retrouve face à son sujet. » Guy Bourdin

Son talent, est de réussir à allier dans une image la beauté, d'un accessoire d'une paire de chaussure ou encore un vêtement. Les robes, les chaussures, il les utilise comme des pièces à conviction dans un fait divers, fétichisées, ses photographies s'interposent, tenues par le mannequin, par des déplacements et décalages, scènes en miroir créent des espaces qui s'intercalent pour donner des images complexes, qui séparent le désir et l’objet désiré, le corps marchandise, le produit à vendre sont mis à distance.

Ses campagnes publicitaires pour le chausseur Charles Jourdan comptent parmi ses plus célèbres images, les produits de la marque y sont peu apparents, comme si il les rajoute après coup, une chaussure devient un élément insignifiant dans une mise en scène théâtrale, très élaborée.

Provocatrices, sensuelles ou fuyantes, les femmes de Bourdin sont plongées dans un univers proche du surréalisme, du bizarre, d’une beauté cru, avec une esthétique ultra pointue, elles vivent et transpirent par l’image. Il veut affirmer au travers de ses clichés que l’image est plus forte que le motif, il se forge une morale visuelle qui lui permet de faire sauter les verrous de la frivolité, du glamour, de la décoration. Il lui reste alors à faire marcher son usine à idées, il devient l’auteur de mises en scènes hautement sophistiquées, suggérant un récit d’une complexité rare, Guy Bourdin ne prend pas des photos, il réalise des images, des tableaux.

« Une photographie vole votre âme. » Guy Bourdin

Ses images sont celles d’un artiste visionnaire, elles trahissent deux obsessions évidentes, le sexe et la violence, il sait avant tout le monde qu’ils vont devenir les facteurs les plus importants de notre société. Son travail traite de la vie, mais ce qui l’intéresse le plus, ce qu’il veut décrire, c’est la vie.

Son œuvre se caractérise par des images troublantes, souvent provocatrices et mystérieuses, qui instaurent un changement radical dans la manière d'aborder les campagnes publicitaires dans le domaine de la mode. Personne avant lui, n’a jamais réussi à allier la beauté d’un vêtement et d’une paire de chaussure.

Sa conception démontre que ce n’est pas le produit désigné qui attire le consommateur mais l'imagerie qui le porte, réalisé par une mise en scène d’un récit sensuel favorisant les fantasmes, par une illustration de rêves inaccessibles. Ses photographies sont très léchées, éclairées crûment et les couleurs extrêmement fortes, à la limite du fluo.

Les modèles posent dans des positions provocantes et souvent inconfortables, dans des décors claustrophobiques. Son goût du cadrage, sa saturation des couleurs, et son rouge omniprésent ainsi que l’utilisation de ses mannequins renvoient au septième art, un mystère non loin des films de David Lynch, esthétiquement proches de la perfection, jamais limpides sur le fond.

La narration de Bourdin se réduit aux termes les plus simples et pourtant il nous raconte une histoire dans ses photographies. Il nous projette dans des scènes de crime, sans aucune preuve ni indice, en créant une atmosphère à la fois inquiétante et fascinante. La tension permanente et la perfection formelle sont sa signature qui n’offre jamais de solution à ses énigmes si ce n’est la beauté et l’esthétisme.

Il pousse le spectateur à se poser des questions, certaines de ses photographies sont construites comme des clichés de scènes de crime, telles que celles immortalisées par le photographe américain Arthur Weegee, suivant les policiers new-yorkais sur les accidents et les crimes, c’est ce qu’il adapte dans son travail, sauf que ses victimes sont toujours des femmes.

Il est le seul photographe a développer une œuvre d’un cohérence millimétrée tout en s’évertuant à la rendre insaisissable, éphémère, jamais visible dans son ensemble, comme s’il voulait qu’elle s’autodétruise après sa mort.

« Je ne prends pas des photographies, je réalise des images. » Guy Bourdin

Site Officiel : Guy Bourdin

Chaussures Roger Vivier, Vogue France, 1966

Charles Jourdan, 1968

Charles Jourdan, Printemps 1968

Vogue France, 1969

En collaboration avec la romancière Françoise Sagan et le photographe, créateur de parfum et maquilleur Serge Lutens, Guy Bourdin est au commande de cette prise de vue, une image que les trois ont élaboré ensemble, deux femmes dans un lit au petit déjeuner, méconnaissables, sous une carapace pailletée, scintillante et brillante

Serge Lutens, ami de Guy Bourdin, dès 1962, muni de ses tirages, est engagé par le Vogue français, pour créer coiffures, maquillages et bijoux, il travaille durant cette période avec les photographes Richard Avedon et Irving Penn, et entame une fructueuse collaboration avec les magazines de mode les plus influents de l’époque.

Charles Jourdan, 1970

Lipstick Dior, Vogue France, 1972

Lingerie les Nuits d’Élodie, Vogue-France, 1976

Vogue Hommes, 1977

20 ans Magazine, 1977

Accessoires Dior, Vogue France, 1978

Charles Jourdan, Printemps 1978

Maillots Danskin, Vogue France, 1979

Bijoux Chaumet, Vogue France, 1979

Charles Jourdan, campagne publicitaire, 1979

Le corps d’une femme disparait à demi dans un mur jaune et rouge, parfaitement lisse. On ne voit plus que ses jambes, longues et sveltes, portant des chaussures noires à talons aiguilles. Dans cette photographie, l’imaginaire de Guy Bourdin trouve bien des associations entre surréalisme et films noirs. Avec le surréalisme, il partage une certaine ironie et un sens du paradoxe, de l’absurde, ainsi qu’une prédilection pour les détails dans un ensemble parfaitement orchestré. Des films noirs, il adopte le goût pour le suspense, mêlé à une sensualité entre glamour et érotisme.

Calendrier Pentax, 1980

Calendrier Pentax, 1980

Vogue France, Paris, 1982

Vogue, 1983

Roland Pierre, 1984

Créations, Chloé, Alimea, Stara Réty, Vogue France, 1984