Marc Riboud (1923-2016) photographe français, né à Lyon, bien connu pour ses reportages menés en Asie. Sa rencontre avec la photographie commença par l'héritage d'un Vest Pocket Kodak qu'avait son père. En 1937, Marc Riboud, alors âgé de quatorze ans, prit ses premiers clichés à l'Exposition universelle de Paris. Jusqu'en 1951, Riboud travaille comme ingénieur dans une usine à Villeurbanne puis se lance dans la photographie en indépendant . En 1952, il monte à Paris, où il rencontre grâce aux relations de son frère Jean, Henri Cartier-Bresson et Robert Capa, les créateurs de Magnum Photos. Il entre dans la fameuse agence en 1953, sur l'invitation de Capa, puis passe deux ans à Londres. En 1953, il obtient une publication dans le magazine LIFE Magazine pour une photo « d'un peintre de la Tour Eiffel ». Sa capacité à capter les instants éphémères de la vie, grâce à des compositions puissantes, était déjà visible, et cette aptitude allait le servir dans les décennies qui suivirent.
Marc Riboud de 1955 à 1958 entamera un long voyage, parcourant le Moyen et Extrême Orient, à bord d’une Land-Rover spécialement aménagée, dont l’un des fondateurs de Magnum, George Rodger s’était servi pour un célèbre périple en Afrique. Riboud va traverser la Turquie, l'Iran, l'Afghanistan, le Pakistan, l'Inde, la Chine et le Japon. Arrivant en 1956 en Inde, il sillonnera le pays pendant près d’une année, de Calcutta à Bombay, de Delhi au Darjeeling, jusqu’au Népal. C’est de là qu’il entre en Chine communiste, où il sera l’un des rares et premiers Occidentaux à obtenir un visa. Il terminera son « Grand Tour » au Japon en 1958, alors en pleine reconstruction d’après guerre. De retour en France, Marc Riboud ramènera des milliers de photographies, traces de ces cultures ancestrales, que l’on retrouve partout, dans les monuments, les gestes, la beauté des femmes, l’hospitalité des gens.
Il devient vice-président de Magnum pour l'Europe en 1959. Il suivra les événements de la décolonisation en Algérie et en Afrique noire dans les années 1960. Entre 1968 et 1969, Riboud réalise plusieurs reportages sur le Vietnam du Nord et du Sud. Depuis les années 80, il est régulièrement retourné en Orient et en Extrême-Orient et a exposé à Paris, Londres, New York, Beijing, Hong Kong, Bilbao…
Images commandées ou photos buissonnières, depuis 50 ans Marc Riboud sillonne la planète comme un reporter, un voyageur, un promeneur qui aime prendre son temps. Il a un goût pour la surprise, une sympathie pour les êtres. Rétif à la violence, ses photos révèlent le plaisir de l’œil.
Marc Riboud est libre, parce qu'il sait se perdre sur les chemins du monde, sans jamais s'égarer dans les méandres de l'Histoire. Parce qu'il aime l'aventure, adore la fantaisie, recherche l'imprévisible, mais garde ses distances avec les événements, son libre arbitre dans les débats d'idées, une belle indépendance devant les idéologies. Cet homme d'image est un homme de culture qui, dans son sac de photographe, a toujours plusieurs livres. Il sait capter la grâce de la vie quotidienne dans des lieux lointains inondés de soleil.
Les personnages solitaires sont fréquents dans l'œuvre de M. Riboud. À Ankara, un personnage central est silhouetté sur un arrière-plan industriel tandis qu'en France, un homme se repose dans un champ. La composition verticale des photos de Riboud souligne le lieu et tout cela entoure mais n'écrase pas l'élément humain, par sa géométrique il offre une image véritablement intemporelle. D'autre part il accède par une vision émouvante à une sensibilité sophistiquée, jusque dans le détail.
Marc Riboud a photographié Angkor au cours de cinq séjours entre 1968 et 1990. Un livre, « Sérénité bouddhique », est paru en 1992. La rencontre avec ces temples enfouis sous la végétation, et avec le peuple cambodgien, a été l’un des grands chocs du photographe.
« Pour moi, la photographie n'est pas un processus intellectuel, c'est un processus visuel. L'œil est fait pour voir et non pas pour penser. Ce que je cherche est dans la vie, dans la réalité. La création pure, je n'y crois pas trop. Mon obsession: photographier le plus intensément possible la vie la plus intense. C’est une manie, un virus aussi fort pour moi que le réflexe d’indépendance.»
« Si on veut bien voir, il est inutile de se fondre dans ce que l'on regarde. Car si on devient l'autre, comment avoir la surprise de l'autre ? » Marc Riboud
« Les lieux sont comme les amis, j'ai besoin de les retrouver, de savoir s'ils ont changé, ce qu'ils deviennent. » Marc Riboud
Le peintre de la Tour Eiffel, Paris, 1953
« Cappa voulait la vendre pour Hennessy, la tour se faisait repeindre couleur Cognac, hélas j’avais photographié en noir et blanc. » Marc Riboud
Darjeeling, Inde, 1956
Bénarès, Baigneur du Gange, Inde, 1956
Marché aux chameaux, Rajasthan, Nagaur, Inde, 1956
Contremaître d'une aciérie à Anshan, Chine, 1957
Kamakura, Japon, 1958
Karuizawa, Rallye des photographes, Japon, 1958
Le Rallye des photographes, le premier dimanche de juin 1958, plus de 2000 photographes participent à un concours organisé par la marque Fuji à Karuizawa, à 150 km de Tokyo. Au japon à la fin des années 1950, Riboud se passionne pour la femme japonaise au sein de cette société en pleine occidentalisation. Il immortalise ce rallye des photographes, une réunion d’amateurs qui se retrouvent pour photographier un sujet, un modèle féminin sur un rocher, dans un Japon à l’époque en plein boom de l’industrie photographique. Le rallye des photographes est une des ses compositions les plus fortes, celle ou sous son objectif, se mêle le plus explicitement, le désir de photographier et la libido. Le contraste entre les jeunes femmes isolée et la meute des photographes, entre le caractère apprêté des modèles et le coté brutal du lieu, concourt à donner à cette scène une forte irréalité non dénudée d’une dimension inquiète.
Accra, Ghana, Afrique, 1960
It's Great to be Young, Ghana, 1960
Pékin, Chine, 1965
Washington D.C, Jan Rose Kasmir, 21 octobre 1967
Jan Rose Kasmir, une lycéenne américaine, une fleur à la main, face aux lames des fusils à baïonnettes des soldats de la garde nationale près du Pentagone, fixant un militaire dans les yeux, pendant une des marches contre la Guerre du Viêt Nam.
« Je photographie avec frénésie, la nuit tombe, j’épuise mes films, quand cette jeune fille, seule face aux baïonnettes, dessine avec une fleur le symbole de la jeunesse américaine. Cette photo est la dernière de mon film. » Marc Riboud
Une photo construite sur une opposition entre les signes situés à gauche et ceux situés à droite d’une verticale tracée au milieu de l’image. Opposition parfaite comme en témoignent, la gauche et la droite, le passé et l’avenir, les hommes et la femme, le pluriel et le singulier, le sombre et le clair, les horizontales et la verticale, le flou et le net. Au-delà, et par extrapolation, on constate qu’à l’association « homme-arme-guerre » répond « femme-fleur-paix ».
Maternité, Calcutta, Inde, 1971
Huang Shan, Chine, 1983
Angkor, Cambodge, 1990