Erich Hartmann (1922-1999) photographe américain, d’origine allemande, né au cœur de la Bavière, à Munich. Il est l'aîné d'une famille de trois enfants, d'une classe moyenne, il grandit à Passau, petite ville près du Danube, à la frontière autrichienne.

    • En 1930, à huit ans, il effectue ses premières photographies tout en poursuivant ses études, suite à l'arrivée, en 1933 d'Adolf Hitler au pouvoir, les conditions deviennent de plus en plus difficile.

    • En 1938, ses parents décident de fuir le régime nazi, grâce au soutien financier de sa grand-mère maternelle, la famille s'embarque pour les États-Unis. En Amérique, âgé de seize ans, il se retrouve chef de famille étant le seul à parler la langue anglaise.

    • Il travaille dans une fabrique de textile à Albany, dans l'état de New York, tout en suivant des cours du soir, et termine son cycle scolaire au Siena College de Loudonville.

    • Au lendemain du bombardement de Pearl Harbor, le 7 décembre 1941, il s'enrôle volontairement dans l'armée américaine, s'entraîne pendant un an en Virginie et dans l'Ohio, avant d’être engagé définitivement, il rejoint l'Angleterre, lors du débarquement des alliés en Normandie, est interprète aux sein des armées en Belgique et à la fin de la guerre, est interprète à la Cour de Cologne pour des procès de nazis.

    • De retour aux États-Unis, il déménage avec les siens au cœur de New York où il rencontre une jeune diplômée en littérature de l'université de Brown, Ruth Ellen Bains, qu'il épouse en 1946. Il décide de faire la photographie son métier, il débute en tant qu'assistant pour un photographe portraitiste.

    • En 1948, il s'inscrit à la « New School for Social Research » en même temps que Charles Leirens, Berenice Abbott et Alexey Brodovitch.

    • En 1950, il vole de ses propres ailes et s'installe en free-lance en tant que portraitiste, il dresse le portrait de l'architecte Walter Gropius, de l'écrivain Arthur Koestler et du chef d'orchestre Leonard Bernstein.

    • Puis rapidement, il se fait connaitre par une approche poétique dans les univers de l'architecture, de la science et de l'industrie, ses clichés sont publiés dans le magazine « Fortune », des séries comme « Shapes of Sound », « The building of Saint Lawrence Seaway », ou encore « The Deep North », qui marquent sa reconnaissance.

    • En 1952 il intègre l'agence Magnum Photos, et devient membre à part entière en 1954. Durant cette période, le couple donne naissance à deux enfants, un fils Nicholas, en 1952 et une fille Célia, en 1956.

    • Il divise son emploi du temps en deux, d'un part réalise des commandes avec les magazines, Life, Time, Newsweek, Paris Match et Die Zeit, avec lesquelles il collabore. D'autre part, il assure des photos-reportages, des catalogues et des brochures majoritairement en couleurs, pour « IBM », « Nippon Airways » , « Boeing », « RCA », « Ford Motor » et « Citroën ».

    • En 1956, il réalise sa première exposition individuelle au Museum of the City of New York, intitulée « Sunday under the Bridge », présentant une série de photographies sur le pont de Brooklyn.

    • En 1962, il publie un ouvrage et effectue une nouvelle exposition « Our Daily Bread » qui parcoure le territoire tout entier des États-Unis.

    • Il voyage en permanence, se rend à Londres, où il travaille sur l'architecture britannique pour le « Daily Telegraph », tout en collaborant pour le « Johns Hopkins magazine », le « Sunday Times », ainsi que la chaîne de télévision « ABC ».

    • De 1969 à 1973, il consacre son temps à donner des cours et assure le suivi des enseignements d'atelier de photographie à l'université de Syracuse et à l' « International Fund for Concerned Photography ».

    • En 1972, il participe avec de nombreux clichés, à la publication d'une étude publiée par l' « European Space Research Organization », intitulée « L'Espace objectif terre, étude des satellites européens, de leur technologie et de leur design ».

    • En 1985, il est élu pour une année, Président de l'agence Magnum Photos.

    • À partir des années 1990, il se consacre de plus en plus à des projets personnels à long terme, en 1994 devient collaborateur-donateur de Magnum.

    • En hiver 1993, ressentant le besoin de témoigner sur les camps, il part en compagnie de sa femme pendant plus de huit semaines, se rend en Allemagne, en Pologne et jusqu'aux confins les plus reculés de l'Europe où la Shoah c'est passée, en se fixant une règle, photographier exclusivement en noir et blanc ce qu'il découvre dans chaque lieu d'extermination et capter seulement ce qui est. Il parcoure un total de 22 camps de concentration dans une lumière grise d'hiver, photographiant avec une précision impitoyable les vestiges de cette indicible horreur.

    • « Je me sentis simplement obligé d'aller dans autant de camps qu'il était possible, de remplir ce devoir que je ne pouvais définir et de rendre cet hommage tardif, avec les moyens de mon métier. » Erich Hartmann

    • Après un travail de titan, sur les 126 rouleaux de ses pellicules, il effectue une première sélection de 300 clichés pour finir par n'en choisir que 74 pour la publication, en 1995, de son ouvrage « In The Camps », parallèlement de nombreuses expositions des soixante-quatorze photos se multiplient en Europe, de l'Italie, à l'Autriche, de l'Angleterre à Paris, ou l'Arc de Triomphe est sélectionné pour exposer ses clichés.

    • Vers la fin des années 1990, il mène en parallèle deux projets qui lui sont chers, trier parmi ses milliers de clichés pris au cours ses cinquante années de travail, afin de rassembler pour le premier, tout ce qui traite de la musique en vue d' une exposition qu'il veut intituler « Music Everywhere » et le second travail, les quelques photographies qui peuvent mieux témoigner de son existence.

    • Au début de l'année 1999, il collabore avec la galerie « Fotohof » à Salzbourg pour une exposition nommée « Where I was », qui ne voit pas le jour suite à sa disparition le 4 février, d'une crise cardiaque.


L'intérêt majeur, dans son travail comme dans sa vie, consiste à appréhender la façon dont les gens sont façonnés tant par l'environnement dont ils proviennent que par ceux qu'ils créent. Il porte son regard sur ce qui l'entoure, c'est pour lui des découvertes perpétuelles, passe des mariniers solitaires aux coffres de banques scellés comme des cages, d'un archet sur un violoncelle au silence d'une plage abandonnée, jusqu’à la sensualité d'une vague.

« J'ai gagné ma vie en tant que photo reporter et photo-journaliste. Mais en même temps que je travaillais sur des sujets relevant de l'intérêt général ou bien aussi pointus que le monde industriel et la haute technologie, la photographie était aussi, et inséparablement, le meilleur moyen que j'avais trouvé pour raconter le quotidien de la classe moyenne américaine et me raconter moi, en miroir, à travers notamment ce que le temps enseigne. Ce n'est donc pas un hasard si j'ai choisi l'autobiographie comme sujet privilégié. Je suis tenté de croire que les résultats de cette auscultation personnelle résonnent d'un écho sans limite dans toutes les vies. » Erich Hartmann

Il saisit lieux et personnes dans un temps d'arrêt, avec toujours une façon de voir au-delà. Incongruité d'une rencontre de pieds de statues et de pieds de visiteurs dans un musée parisien, étrange rassemblement de mannequins de bois, froideur apparente du monde des bureaux ou encore la fatigue d'une femme dans un métro désert.

Au début des années 1970, il développe dans son travail, les reflets, les recompositions, les échos d'images, allant jusqu’au jeu de gouttes d'encre dans l'eau, il aborde une nouvelle écriture qui est celle de la lumière laser, il veut avec ce procédé, que la lumière devienne une écriture, et qu'inversement, la photographie devienne graphie. Dans cette recherche, qu'il nomme « Écrire avec la lumière », Erich Hartmann fait figure de novateur.

« J'essayais d'entendre avec mes yeux, stimulé par ce que je voyais, j'ai photographié rapidement et impulsivement, acceptant les lieux, les objets et les paramètres comme le temps ou l'heure, comme ils venaient, au lieu de réarranger les choses, d'apporter des éclairages additionnels, ou de revenir plus tard, à un moment où je pouvais espérer que la lumière serait plus propice. » Erich Hartmann

Hartmann parvient à dégager dans ses images, une âme, une poétique parfois presque surréaliste, il le fait aussi bien dans la rue, qu' à partir de machines, de formes mathématiques abstraites qui prennent l'aspect aqueux, sur les fabriques de verre, la construction des bateaux, le quotidien d'une vie à la ferme ou les chaines de production alimentaire.

Parallèlement la musique est pour lui, un vaste terrain d'exploration et de recherches, terrain sur lequel il se lie d'amitié avec de nombreux interprètes.

« La musique m'a captivé bien avant que la photo ne le fasse, se souvient-il. Dans la maison de mes parents, il y avait peu de musique; seulement un antique gramophone sur lequel je passais et repassais sans arrêt des airs de Carmen. C'était bien avant que je sache lire ! » Erich Hartmann

« La photographie, c'est le regard d'une vie. » Erich Hartmann

Montgomery Clift, Marilyn Monroe, Clark Gable, The Misfits, 1960

Dublin, Irlande, 1964

Broadway, New York, 1971

Camp de Concentration de Majdanek, Lublin, Pologne, 1994