Louis Stettner (1922-2016) photographe américain, né à Brooklyn, New York, de parents d’origine ukrainienne, il grandit avec ses trois frères dans la quartier de Flatbush. Il débute la photographie en 1936, après voir reçu en cadeau un Box Brownie. Les samedis il parfait sa connaissance de la photographie par des visites régulières au « Metropolitan Museum of Art », c’est ainsi, qu’il découvre les œuvres d’Alfred Stieglitz, de Clarence White et de Paul Strand. Il acquiert ensuite une imposante chambre photographique en bois.

    • En 1938, il écrit à Stieglitz, afin de lui montrer ses premiers clichés, encouragé par le photographe, Stettner persévère. De 1938 à 1940 il étudie à la « Abraham Lincoln High School» de New York.

    • Ayant appris la technique photographique en autodidacte, il décide de s’inscrire au cours de la « Photo League », Il passe huit semaines, et côtoie des photographes amateurs et professionnels. Le photographe Sid Grossman, lui enseigne l’intérêt de prendre comme sujet les gens ordinaires.

    • Au début de la Seconde Guerre mondiale, il s’engage dans l’armée en demandant une formation de photographe de guerre. De 1940 à 1941, il est envoyé à l’« Université de Princeton » dans le New Jersey, pour y suivre une formation d’ingénieur, Durant neuf mois. De 1942 à 1945, affecté dans le Signal Corps, Stettner couvre et photographie les combats en Nouvelle-Guinée, aux Philippines et au Japon

    • En 1945 de retour à New York, il devient membre et enseigne à la « Photo League » grâce à son ami Sid Grossman, un des fondateurs de la Ligue. Il fait la connaissance des photographes Lewis Hine et Arthur Weegee.

    • En 1946 il réalise à New York , sa première série de clichés, intitulée « Subway ». avec la volonté de se pencher sur les états d'âme de ses contemporains, en captant les moments de rêverie ou d'attente.

    • En 1947 il se rend à Paris, sous le charme de la capitale Stettner décide d’y rester, il rencontre Brassaï. La même année, il est missionné par la photo League pour organiser la première exposition dédié aux photographes français d' après guerre intitulée « La Photographie française », avec Brassaï, Edouard Boubat, Willy Ronis, Izis, Daniel Masclet, et Robert Doisneau. Il voyage en Italie.

    • De 1947 à 1949 il suit des études à IDHEC, l'« Institut des Hautes Études Cinématographiques » de Paris et obtient en poche son diplôme. Stettner parcoure l’Espagne, se rend en Normandie. Il rend régulièrement visite à Brassaï dans son appartement boulevard Saint-Jaques, qui pour le photographe reste son maître absolu.

    • En 1949 il réalise sa toute première exposition aux « Salon des Indépendants » à la Bibliothèque Nationale de Paris. Il s’installe en photographe indépendant et collabore avec de nombreuses revues, le Time, Fortune, Du, entre autres.

    • En 1950, à 28 ans, il se voit décerner le prix des jeunes photographes par le magazine « Life ». En 1951 il fréquente à Paris le photographe Paul Strand avec lequel il devient ami.

    • En 1952 il retourne à New York, à partir de 1958, il se consacre à l’enseignement de la photographie, et signe une série sur le thème de la Pennsylvania Station, gare New New-yorkaise qui sera détruite en 1963.

    • De 1969 à 1973 il est professeur et enseigne à New York au « Brooklyn College », au « Queens College » et à la « Cooper Union ».

    • De 1971 à 1979 il rédige « Speaking Out », plus tard intitulé « A View Humaniste », une chronique mensuelle de la photographie pour la revue Camera 35.

    • En 1972, il cesse son activité professionnelle et commerciale. De 1973 à 1979 il est professeur d'art à « CW Post Center », à la Long Island University. Le travail documentaire social de Jacob Riis et de Lewis Hine l’inspire à produire une série sur les travailleurs, en 1974 il réalise des images dans des usines d’ameublement, sur des sites de fabrication automobile, ainsi que sur des chantiers de construction, afin de rendre compte du travail des humains.

    • En 1975 il reçoit le Premier Prix du Concours mondial de Pravda.

    • De 1977 à 1989 Stettner continue de photographier aux États-Unis et en Europe. Et effectue des séries de natures mortes, de nus et de paysages.

    • En 1990, il s’installe avec sa famille à Saint-Ouen, à la périphérie de Paris. En 1991 il réalise une série photographique à partir d’éléments, comme d’anciennes gravures ou photo anciennes, « Souvenirs des marchés aux puces » est une recherche où Stettner mêle la photographie à la peinture. En 1993, il se tourne vers la peinture ainsi que la sculpture et débute des toiles sur grands formats, sans toutefois délaisser totalement la photographie.

    • En 1999, il est décoré « Chevalier des Arts et des Lettres ». La même année il publie son ouvrage « Wisdom Cries out in the Streets » aux éditions Flammarion.

L’œuvre de Louis Stettner est marquée par une ambivalence géographique entre New York et Paris. Il oscille de la même manière entre la Street Photography à l’américaine et la photographie humaniste à la française. Son travail dévoile un Paris poétique des années d’après-guerre et un New York en mouvement des années 1950 à 1970, mais toujours avec un fil conducteur commun, une qualité atmosphérique des ambiances urbaines. Son regard, empreint d'un profond humanisme, a toujours révélé un grand sens de la composition et des jeux de lumière.

Comme le disait Brassaï, Louis Stettner est indéniablement « un photographe citadin ».

Pour Louis Stettner, la photographie est comme un fruit, il faut lui laisser le temps de mûrir, libre à elle de flirter avec l'écume d'une époque et de se nier, ou à l'inverse d'explorer le futur pour être un jour en position de raconter l'essentiel.

Il trouve dans le tissu urbain une inspiration à la fois graphique et humaine. New York et Paris sont les deux pôles de son œuvre et chacune de ces villes semble correspondre à un aspect de sa personnalité artistique.

« New York incite l’esprit à s’élever à travers l’adversité. Paris y parvient à travers l’amour » Louis Stettner

Son travail a une qualité naturaliste non forcée, il cherche à capturer chaque jour la vie ordinaire de ses sujets. Avec une sensibilité ,il documente au sens le plus profond la vie, mais aussi la culture et l' architecture des deux villes.

Il fait preuve d'engagement, d'un intérêt marqué pour les minorités, les plus humbles, les laissés pour compte. Avec les travailleurs de la série « Workers » en 1973, les femmes de la série « Women » en 1975 et les déshérités de la série « Bowery » en 1986 sont des éléments particulièrement présents dans son œuvre.

Pendant prés de 60 ans il accumule des milliers de clichés constituant deux archives bien distinctes, que peu de photographes ont su réaliser, des archives étendue de deux villes, comprenant des images historiques de monuments, de la vie quotidienne et de ses citoyens.

Tout au long de sa longue carrière, il utilise différents types d’appareils photographiques, de divers formats, une grosse chambre en bois de 20 X 25, puis un Rolleiflex, et ensuite un Leica. Il travaille aussi bien en noir et blanc qu’en couleur, mais uniquement en argentique en refusant le numérique.

Son œuvre prolifique fait l'objet de publications dans de nombreuses célèbres revues américaines, le Life, le Time et françaises, Paris- Match, Réalités.

« On est dans un monde de consommation. On ne sait pas qui fait quoi. qui a confectionné la chaussure que j'achète, qui a construit ma voiture, la photographie, en revanche, on sait qui l'a faite. J'aime cet échange » Louis Stettner

Avenue de Châtillon, Paris, 1947