Minor White (1908–1976) photographe américain, né à Minneapolis, d’un père comptable et d’une mère couturière. Dès l’âge de dix ans, il s’intéresse à l’art photographique. Il suit ses études secondaires dans sa ville natale jusqu’en 1927, puis entre à l’université de Minnesota où il étudie la botanique ainsi que la littérature anglaise. Il est fasciné par l’œuvre graphique et poétique de William Blake, artiste mystique, tenaillé par l’enfer et le mal.

    • En 1934 il obtient son diplôme de botanique et part à Portland. Il est alors imprégné des sagesses orientales, des lectures mystiques, de la volonté de fusion spirituelle avec la nature, le bouddhisme zen et les écrits mystiques chrétiens.

    • En 1938, juste avant la Seconde Guerre mondiale, il commence la pratique de la photographie et entreprend son cheminement spirituel au travers de l’objectif de ses appareils.

    • En 1941 il participe à l’exposition « Image de la liberté » au Museum of Modern Art de New York.

    • En 1942 il réalise sa première grande exposition au Musée d’ Art de Portland.

    • De 1942 à 1945, il sert dans l’armée de terre, la « US Army Intelligence Corps » et participe à la bataille des Philippines.

    • En 1943, il se convertit au catholicisme.

    • En 1945, il s’installe à New-York et étudie l’histoire de l’art et l’esthétique à l’université de Columbia pendant un an. Il rencontre et travaille avec Edward Weston ainsi qu’Alfred Stieglitz et collabore très souvent avec son ami Ansel Adams dont l’esthétique est proche de la sienne.

    • En 1946 il devient l’assistant d’Ansel Adams et le rejoint à San Francisco en Californie, à l’école des Beaux-Arts, il y reste jusqu’en 1953.

    • En 1948, il réalise a première grande exposition personnelle au musée d’art de San Francisco, dans laquelle il met en œuvre ses principes photographiques.

    • En 1952, il cofonde le magazine Aperture, aux cotés d’Ansel Adams et Dorothea Lange, une référence pour le monde de la photo. Parallèlement, il travaille comme commissaire d'exposition à la « George Eastman House ».

    • De 1953 à 1964 il exerce au Rochester Institute de Technology et de 1965 jusqu'à sa mort en 1976 au Massachusetts Institute of Technologie (MIT), organisant durant cette période de nombreux séminaires photo.

    • Son œuvre connait en France la consécration lors d’une exposition organisée par Jean Dieuzaide en 1976, au Château d’eau à Toulouse.


Professeur passionné, éditeur avisé, et photographe des instants et de la fausse immobilité du monde, il semble restituer une sagesse philosophique immémoriale envers la nature et les humains. Sa haute stature, son magnétisme imposant, son enseignement imbibé de pensée zen, fait de lui une sorte de légende. Toutes ses expositions, il les accompagne de poèmes pour en prolonger le sens.

« En devenant photographe j’ai seulement changé de médium. Le cœur fondamental et essentiel des vers ou de la photographie est la poésie. » Minor White

Homosexuel, il est toute sa vie tourmenté par ce penchant à l'époque inacceptable socialement, auteur d’études du corps masculin sensuelles et érotiques qu’il a du mal à exposer. Certaines de ses photographies d'hommes nus sont considérées comme des chefs d'œuvres du genre, jamais publiées de sont vivant, elles le sont en 1989.

Influencé par Ansel Adams et sa théorie du « Zone system », voulant une vision aiguë des choses et non pas un flou savant et désordonné, il est marqué par l’abstraction lyrique, ses images, c’est ce qui se trouve derrière la réalité qu’il privilégie, elles deviennent des symboles, des métaphores d’un monde plus profond, une porte étroite vers un univers caché de sensations, se trouvant derrière l’objet ou l’être photographié.

« Je photographie les choses non comme elles sont, mais tel que je suis. » Minor White

Il est une âme sensible, passée au révélateur des émotions, sachant transmettre les infinies vibrations, l’aura entre silence et rosée des êtres ainsi que des choses. Sensible aux frémissements du vent, aux vastes paysages, aux peaux des jeunes hommes nus qui le font également frissonner, il sait restituer la beauté sacrée de ces petits bouts d’éternité. Il jette un pont d’empathie, de lien métaphysique entre le photographe et son modèle. Cette nouvelle approche change la nature de la photographie dans les années d’après guerre, et son influence est majeure et indélébile.

Il sait errer dans les paysages ou les êtres sans but déterminé, sans rien attendre qu’une sorte de grâce face à un arbre, une ombre, un être vivant. Attendre, attendre, qu’une sorte d’union se réalise, même si la photographie n’est pas prise, seul compte pour lui, cet instant de plongée dans l’esprit des choses.

Chaque seconde de déclenchement photographique doit pour Minor, contenir en elle toute une vie, « Œil, réflexion, esprit » est son credo, il se veut devenir son propre appareil pour laisser l’objet photographié générer sa propre image. Tout son parcours artistique témoigne de son attirance pour l’instantanéité et le caractère éphémère de l’image. Un rayon de lumière sur le sable humide, les ombres créées par le flottement d’un voilage, des cristaux de glace sur une fenêtre en hiver, c'est la capture de tels instants qui constitue le meilleur de ses œuvres. Il adopte une méthodologie transculturelle, destinée à stimuler la connaissance de l’observateur.

« J’ai juste besoin d’un peu de technique pour savoir utiliser mon appareil sans être maladroit quand je suis transfiguré par la lumière. Mon acte de photographier est au service d’une force extérieure, aussi quand je photographie, un pouvoir extérieur ou intérieur, me laisse son empreinte digitale. » Minor White

Il est le photographe de la fusion dans un infini respect du sujet qui se trouve de l’autre côté de l’objectif, aucune séparation n’existe entre son modèle et lui, pour parvenir à donner une vision parfaite de l’image.

« Quand vous vous approchez de quelque chose pour le photographier, soyez d’abord profondément calme avec vous-même, jusqu’à ce que l’objet affirme votre propre présence. Alors restez là jusqu’à ce que vous ayez réussi à capturer sa présence. » Minor White

Jamais il ne retouche ses photographies ni au développement ni au tirage. Il ne retouche pas plus sa vie, elle aussi « straight », directe et pure.

« Votre essence propre, en vous depuis la naissance, est votre qualité intérieure. Cela est ce que vous savez de vous-même. » Minor White

Muni de ce viatique il veut photographier son essence, et au travers d’elle l’essence des choses, de la nature, des hommes. L’éphémère de la lumière, le mouvement furtif des ombres ou des vagues, le gel précaire sur les objets, tout cela participe pour lui à un vaste ordre éternel du monde. Cette captation de l’aura, de la présence invisible au-delà du réel des choses, rejoint l’art du peintre Paul Klee qui voulait rendre visible l’invisible.

« L’appareil photographique est avant tout un révélateur de soi, et ensuite un outil de développement personnel. » Minor White

Tom Murphy, San Francisco, 1948

Two barns and shadow, 1955

Grand Teton, Wyoming 1959