Stuart Franklin (1956) photographe britannique, né à Londres. De 1976 à 1979, il étudie la photographie et le cinéma au College of Art and Design dans la comté du West Surrey, au sud de Londres. Puis il obtient un doctorat en géographie à l'université d'Oxford.

 

Il a pour politique de réintroduire la dimension matérielle dans ses images, au lieu de s'en tenir aux apparences, au début des années 1980, il s’intéresse aux effets de la crise économique sur la société britannique, ensuite poursuivant dans la même veine, il effectue des reportages sur le conflit en Honduras et celui d'Afghanistan, avant d’assister en direct, à Pékin en 1989, à l'intervention des chars sur la place Tian'anmen. Dans les années 1990, il se rend principalement en Amérique du Sud et en Amérique centrale, puis dans les années 2000, il se met à parcourir le Mali et le Moyen-Orient.

Tout au long de son travail, une constante s'impose, celle de la rigueur d'une qualité formelle, en s’efforçant de tendre à une belle photographie, non pas par simple amour de l'image mais pour aussi dire quelque chose du monde, pour une juste raison, dévoiler à quoi ressemble la civilisation. Il présente des situations ordinaires qui atteignent l'extraordinaire, grâce à sa rapidité et à son talent, maitrisant la technique, sachant exactement ou se placer et à quel moment il doit appuyer sur le bouton.

Il explore de nombreux domaines, du photojournalisme au paysage, travaillant avec différents formats, du 35 mm à la chambre 4 x 5, avec une prédilection pour un appareil se situant approximativement au milieu, le Rolleiflex, équipé d'un objectif Planar 75 mm : 3,5.


« J’adore photographier, c’est aussi simple que ça. » Stuart Franklin

Émeutes, Belfast, Irlande du Nord, 1985

Place Tienanmen, Pékin, Chine, 1989

En 1989, Stuart Franklin est envoyé par l'agence Magnum Photos à Pékin pour couvrir la révolte, avec d'autres photojournalistes, il loge dans un hôtel donnant sur la place. Le 5 juin, il sort sur son balcon et voit les chars entrer sur Chang An Avenue, les étudiants se mettent en files pour leur faire front, l'armée tire. Un homme seul tente de bloquer une colonne de chars, la simplicité du geste de cet anonyme qui affronte seul la violence du pouvoir, deux sacs en plastique à la main devient ce jour là, un symbole d'espoir pour l'humanité.

« J'ai vu cet étudiant sortir de la foule et se mettre face à un char d’assaut, le blindé s’arrête, le jeune homme grimpe sur le char et parle avec son conducteur. » Stuart Franklin

En captant cette scène, son image vaut plus plus que mille articles, sa valeur d’icône n'a besoin d'aucun commentaire, son cliché est publié dans les journaux du monde entier, il remporte le « World Press Photo », en 1998, le magazine Time, considère « l'inconnu rebelle » comme l'une des personnes ayant le plus influencé le 20eme siècle et en 2003, sa photo apparaît dans le Life magazine parmi les cents photos qui ont changé le monde.

Mexico City, 1996

Pour cadrer la faillite urbaine, il choisit la perspective aérienne, un très long atterrissage vers un imaginaire et lointain point de convergence de rues. Il fait jour, il y a du soleil, la lumière frappe brutalement chaque coin de mur, chaque détail de l'architecture, une superficie irrégulière, entre la peau vieillissante et un panneau de circuit électrique rouillé. Stuart ne s'enferme pas, ni se perd dans ce dédale de variations minuscules, il laisse une ouverture dans son image, une bande de terre brûlée, de désert aux marges de sa photographie, un labyrinthe dans lequel on ne peut s'échapper, on s'y perd et rien d'autre.

Torso N°11, 2010